03/09/2024
Jacques Roubaud, La forme d’une ville change plus vite, hélas, que le cœur des humains
L’automne rue du printemps
Les feuillages du boulevard Pereire (sud)
Roussissent
Déjà
Ça choque
On devrait barrer d’u grand rideau
De toile le bout de cette rue
Résolument terne, et ne le tirer
Que le jour du printemps.
Jacques Roubaud, La forme d’une ville change plus vite,
hélas, que le cœur des humains, Poésie/Gallimard, 1999, p. 66.
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26/06/2024
Marianna Kiyanovska, Partager la lumière
C’est la faute à la guerre dit la petite fille la faute à la guerre
si le printemps tarde tellement à venir
déjà les cigognes se sont envolées, les cerisiers ont fleuri
c’est la faute à la guerre dit la petite fille
voici deux jours que mon Ouman est dans le brouillard
j’ai si mal à ma ville à mon Ouman si mal
que la douleur suspend son vol comme le halo d’une étoile ou d’une fleur
et alors on la voit dit la petite fille
je marche et je vois dit-elle
c’est la faute à la guerre dit la petite fille et le vent fait voler les cendres de la vie des gens
ici le vent emporte les cendres de la vie des gens partout
au lieu des fleurs ailleurs
à présent les gens là-haut et les cerisiers là-haut
se sont envolés ont fleuri
la petite file dit qu’il n’y a presque plus de temps c’est la faute à la guerre
dans le brouillard la guerre va plus vite que le temps plus vite que deux jours
et c’est bizarre que le printemps tarde tellement à venir
Marianna Kiyanovska, Partager la lumière, traduction de l’ukrainien Iryna Dmytrychyn, dans La Revue de belles-lettres, 2024-I, p. 121.
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26/07/2019
Bashô seigneur ermite
Elles mourront bientôt
et pourtant n’en montrent rien —
Chant des cigales
Obscurité de la nuit —
Un pluvier pleure
son nid perdu
Jour après jour
les orges rougissent —
Chant d’alouettes
Souffle le vent d’automne —
Mais les bogues des châtaignes
encore vertes
Invisible printemps _
Des fleurs de pruniers dessinées
au revers du miroir
Bashô, seigneur ermite, édition bilingue
par Makoto Kemmoku et Dominique Chapot,
La table ronde, 2012, p. 255, 272, 276, 285, 293.
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18/04/2019
Dylan Thomas, Ici dans ce printemps
Ici dans ce printemps
Ici dans ce printemps, des étoiles flottent dans le vide.
Ici dans cet hiver ornemental
S’abattent les froids nus.
Cet été porte en terre un oiseau de printemps.
Les symboles sont choisis depuis la ronde lente
Des années autour des quatre saisons,
Enseignent en automne les feux des trois saisons
Et les chants des quatre oiseaux.
Je saurai l’été grâce aux arbres, les vers
Ne révèlent jamais que les tempêtes de l’hiver
Ou les funérailles du soleil.
J’apprendrai le printemps par le chant du coucou,
Et la limace m’enseignera la destruction.
Un ver sait l’été bien mieux que l’horloge,
La limace est un vivant calendrier des jours.
Que me révèlera-t-elle si un insecte sans fin
Dit que le monde tire à sa fin ?
Dylan Thomas, Poèmes, traduction Patrick Reumaux,
dans Œuvres, I, Seuil, 1970, p. 389.
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08/02/2019
Georges Perros Poèmes bleus
Ce n’est pas cela que j’attends
De la vie à l’odeur forte
Couleur de lilas veuve morte
Tu m’indiffères printemps.
L’algue marine et les vents
Qui viennent frapper à ma porte
L’amour que le diable l’emporte
Me sont plus émoustillants
Homme qu’un désastre habite
Mes vœux de nulle saison
Ne se soucient. Ma prison
Ce corps qu’un feu noir excite
Rien n’en peut changer le sort
Sinon toi, mort de ma mort.
Georges Perros, Poèmes bleus,
Gallimard, 1962, p. 43.
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11/09/2018
Li Po, Libation solitaire au clair de lune
Libation solitaire au clair de lune
Parmi les fleurs un pot de vin ;
Je bois tout seul sans un ami.
Levant ma coupe, je convie le clair de lune ;
Voici mon ombre devant moi : nous sommes trois.
La lune, hélas ! ne sait pas boire :
Et l’ombre en vain me suit.
Compagnes d’une instant, ô vous, la lune et l’ombre !
Par de joyeux ébats, faisons fête au printemps !
Quand je chante, la lune indolente musarde ;
Quand je danse, mon ombre égarée se déforme.
Tant que nous veillerons, ensemble égayons-nous ;
Et, l’ivresse venue, que chacun s’en retourne,
Que dure à jamais notre liaison sans âme :
Retrouvons-nous sur la lointaine Voie Lactée !
Li Po, dans Anthologie de la poésie chinoise classique, sous la
direction de Paul Demiéville, Poésie / Gallimard, 1997, p. 212.
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08/05/2018
Isabelle Lévesque, Pierre Dhainaut, La grande année
Au milieu des prairies, chaque année,
nous guettons le jour où fleurira le cerisier,
nous ne doutons jamais de la surprise,
de la fête augurale : il nous enseigne
à maintenir, l’année entière, le regard
qui ne flétrit pas l’arbre fidèle.
Pierre Dhainaut, dans Isabelle Lévesque et
D., La grande année, L’herbe qui tremble,
2018, p. 26.
Ici, Aux Andelys
L’ombre d’un cercle dépossédé
glisse dans la nuit.
Si léger.
Ascension cavalière. Blanc comme songe,
la falaise a terrassé les monstres,
il reste un peu de givre sur nos lèvres.
Les marguerites capturent la lumière.
Nous savons deuxqui résonne et tombe.
À midi tout recommence.
Isabelle Lévesque, dans voir supra, p. 89.
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26/04/2018
Charles Olson, dans Jacques Roubaud, Traduire, journal
Le printemps
Le cornouiller
éclaire le jour
La lune d’avril
fait la nuit flocons
Les oiseaux soudain
sont multitude
Les fleurs ravinées
par les abeilles, les fleurs à fruit
jetées au sol, le vent
la pluie bousculant tout. Bruit —
sur la nuit même le tambour
de l’engoulevent, nous sommes aussi
occupés, nous labourons, nous bougeons,
jaillissons, aimons Le secret
qui s’était perdu ne se cache
plus, ne se révèle, dévoile
des signes. Nous nous précipitons
pour tout saisir Le corps
fouette l’âme. En grand désir
exige l’élixir
au grondement du printemps,
transmutations. L’envie
se perd qui se traîne. Le défaut du corps et de l’âme
— qui ne sont un —
le coq matinal résonne
et la séparation : nous te saluons
saison de nul gâchis
Charles Olson, dans Jacques Roubaud,
Traduire, journal , NOUS, 2018, p. 86.
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28/03/2018
Des merles dans le jardin
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20/01/2018
Haïku, anthologie du poème court japonais
Pas de pont —
le jour se couche
dans les eaux du printemps
Yosa Buson
Au printemps qui s’en va
les oiseaux crient —
les yeux des poissons en larmes
Matsuo Bashô
Jour de brume —
les nymphes du ciel
auraient-elles du vague ) l’âme ?
Kobayashi Issa
À la surface de l’eau
des sillons de soie —
pluie de printemps
Ryôkan
Dans les jeunes herbes
le saule
oublie ses racines
Yosa Buson
Haïku, anthologie du poème court japonais,
traduction Corinne Atlan et Zéno Bianu,
Poésie / Gallimard, 2002, p. 29, 32, 34, 36, 53.
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09/01/2018
Emily Dickinson, Ses oiseaux perdus (dernières années, 1882)1886)
Tout à fait vide, tout à fait calme,
La Grive boucle son Nid et exerce ses Ailes —
Elle ne connaît pas la Route
Mais avance Machine toute
Vers des rumeurs de printemps —
Elle ne demande pas de Midi —
Elle ne demande pas de Merci —
Sans miettes et sans force, avec une seule requête —
Ses Oiseaux perdus —
Quite empty, quite at rest,
The Robin locks her Nest, and tries her Wings —
She doesnot know her Route
But puts her Craft about
For rumored springa —
She does not ask for Moon —
Se does not ask for Boon —
Crumbless and homeless, of but one request —
The Birds xhe lost —
Emily Dickinson, Ses oiseaux perdus, traduction François
Heusbourg, éditions Unes, 2017, p. 59 et 58.
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08/12/2017
Umberto Saba, Trente poèmes
Printemps
Printemps que je n’aime pas, je veux
rapporter que tournant au coin
d’une rue, le présage de ta venue me blessait
comme un coup de couteau. L’ombre mince encore
des rameaux, sur la terre encore
nue, me trouble aujourd’hui comme si je pouvais,
comme si je devais renaître. La tombe elle-même
semble mal sûre à ton retour, antique
printemps, qui, plus que nulle autre saison,
cruellement, ressuscites et tues.
Umberto Saba, Trente poèmes, traduction Georges Mounin,
L’Apprentypographe, 1986, p. 17.
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10/09/2017
Buson, Le parfum de la lune
les journées lentes
s'accumulent
si loin autrefois
le poirier en fleurs
sous la lune
une femme lit une lettre
je marche, je marche
songeant à des choses et à d'autres
le printemps s'en va
au bord du chemin
des jacinthes d'eau arrachées fleurissent
la pluie du soir
la nuit, des voix d'hommes
irriguant les champs
la lune d'été
la nuit voilée
les grenouilles brouillent
l'eau et le ciel
Buson (1716-1783), Le parfum de la lune,
traduction Cheng Wing fun et Hervé
Collet, Moundarren, 1992, p. 55, 59,
68, 80, 90, 93.
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21/03/2017
Bashô Seigneur ermite
Froide, la couverture ouatée
où vous vous glissez —
Nuit de solitude
Dans le vent qui souffle
les poissons sautent —
Ablutions rituelles
Curiosité —
un papillon posé
sur une herbe sans parfum
Le soleil splendide
entre chien et loup —
Soir de printemps
Puces, poux
et un cheval qui pisse
à mon chevet !
Bashô Seigneur ermite, édition bilingue
par Makoto Kemmoku et Dominique Chipot,
La Table ronde, 2012, p. 193, 194, 197, 203, 214.
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05/01/2017
Marcel Bénabou, Un poème à votre façon
Un poème à votre façon
Tout est rêve et la vie et l’amour et la mort
On entre en souriant dans le berceau de l’ombre
Quel cadavre la nuit ne reprend son essor
Pour retrouver l’enfant survivant aux décombres
Je débarque parfois dans ma ville déserte
Le feu du ciel alors s’est éteint brusquement
Encore enveloppé des ruses du printemps
Au-dessus de la craie qui poudre les fleurs vertes
Les rues muettes me regardent sans me voir
La vie s’est réfugiée au profond des miroirs.
Marcel Bénabou, dans La Bibliothèque Oulipienne,
Slatkine, 1981, p. 55.
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