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21/12/2023

Ludwig Wittgenstein, Tractacus-logico-philosophicus

 

6.4311. La mort n’est pas un événement de la vie. La mort ne peut être vécue.

 

Si l’on entend pas éternité, non pas une durée temporelle infinie, mais l’intemporalité, alors celui)là  vit éternellement qui est dans le présent.

 

Notre vie est tout autant sans fin que notre champ de vision est sans limite.

 

Ludwig Wittgenstein, Tractacus-logico-philosophicus, traduction Pierre Klossowski, préface Bertrand Russel, Gallimard, 1961, p. 104.

26/11/2023

Luis Cernuda, La Réalité et le Désir

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Avec toi

 

Mon pays ?

Mon pays c’est toi.

 

Mon peuple ?

Mon peuple c’est toi

 

L’exil et la mort

pour moi sont

où tu n’es pas.

 

Et ma vie ?

Dis-moi, ma vie, qu’est-elle, sinon toi ?

 

Luis Cernuda, La Réalité et le Désir, traduction

Robert Marrast et Aline Schulman,

Gallimard, 1965, p. 145.

20/11/2023

Emily Dickinson, Du côté des mortels

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Marcher pour toujours à Ses côtés —

La plus petite des deux !

Cerveau de Son Cerveau —

Sang de Son Sang —

Deux vies — Un Être — Désormais —

 

Partager Son Sort pour toujours —

En cas de chagrin — abandonner ma part

À ce Cœur bien-aimé —

 

La vie entière — pour connaître l’autre

Que nous ne pouvons jamais apprendre —

Et petit à petit — un Changement —

Appelé Paradis —

Voisinage d’humains en extase —

Découvrant alors — ce qui nous troublait —

Sans le lexique !

 

Emily Dickinson, Du côté des mortels, poèmes

1860-1861, traduction François Heusbourg,

Editions Unes, 2023, p. 133.

22/07/2023

Gerard Manlay Hopkins, Sonnets terribles

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Pire, non : rien. Degré de l’au-delà des peines,

Maux neufs nourris aux maux anciens, serrent plus forts,

Grande consolatrice, où est ton réconfort ?

Mère nôtre, ô Marie, ton soulagement vienne !

Mes cris jappent, en harde, accolés à leur chef,

Mal cosmique — à l’enclume archaïque il bruit, gri-

Mace — se calme, arrête. La furie glapit :

« Vite ! Et que je sois cruelle ! Le fort fait bref. »

Ô l’esprit ! il a ses montagnes ; ses écorces

D’à-pics inouïs, inhumains. Ni ne peut tel abîme

Contenir notre esprit limité. Là ! pécore,

Rampe, sous l’aise agit l’ouragan : toute vie

Mort achève et tout jour meurt de sommeil aussi.

 

Gerard Manley Hopkins, « Terribkes sonnets », 1885-1886¡, dans Le Chaos dans 14 vers, anthologie bilingue du sonnet anglais, traduction Pierre Vinclair, éditions Lurlure, 2023, p. 265.

25/12/2022

Volker Braun, Poèmes choisis

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Le petit déjeuner

 

Aimée, qui si facilement à moi s’est donnée

Comme si toute ma vie n’était que ce challenge

Car hésiter n’eût fait que retarder l’échange :

Ce que je possède, je l’ai vraiment liquidé.

 

Quand vint le matin nous barbouillâmes nos lèvres

De miel et de lait au restaurant si correct

Dans le couloir les serveurs étaient en alerte

C ‘était cette substance désirée avec fièvre.

 

Nous nous étions cherchés et trouvés. Et dès lors

Je n’avais donc plus qu’à l’absorber pour guérir

Prise régulière : elle me sauverait sans coup férir

Mais le fier navire a soudain viré de bord.

 

La substance de la vie, à la saveur de l’amour

Et de sel et de mort, je l’ai léchée un jour.

 

Volker Braun, Poèmes choisis, traduction J.-P. Barbe

et A. Lance, Gallimard, 2018, p. 66.

 

04/11/2022

Cioran, Syllogismes de l'amertume

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Nos tristesses prolongent le mystère qu’ébauche le sourire des momies.

 

Quelqu’un emploie-t-il à tout propos le mot vie ? — sachez que c’est un malade.

 

Tôt ou tard chaque désir doit rencontrer sa lassitude, sa vérité...

 

Entre l’Ennui et l’Extase se déroule toute notre expérience du temps.

 

Cioran, Syllogismes de l’amertume, dans Œuvres, Pléiade/Gallimard, 2011, p. 194, 195, 196, 199.

22/02/2022

Joseph Joubert, Carnets, II

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Ils se tiennent aux portes et ne voient que les barreaux.

 

La grande affaire de l’homme c’est la vie, et la grande affaire de la vie c’est la mort.

 

La vie entière est employée à s »’occuper des autres ; nous en passons une moitié à les aimer, l’autre moitié à en médire.

 

Qui est-ce qui pense pour le seul plaisir de penser ? qui est-ce qui examine pour le seul plaisir de savoir ?

 

Tous ceux enfin pour qui le style n’est pas un jeu, mais un travail.

 

 

Joseph Joubert, Carnets, II, Gallimard, 1994, p. 95, 100, 100, 117, 118.

07/02/2022

Charles Pennequin, Dehors Jésus

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Petit Jésus est nostalgique des premiers instants qu’il vit mais qu’il ne connaît pas. Il st nostalgique de la vie qui pousse sans s’arrêter. La vie pousse devant lui et autour de lui, partout la vie elle pousse et elle ne s’arrête jamais et pourtant il lui semble qu’elle n’est que mort. La vie elle ne s’arrête jamais pour échapper à la mort, mais en réalité c’est parce qu’elle continue qu’elle est dans la mort, c’est ce que petit Jésus pense, car petit Jésus pense que la vie c’est la nostalgie, c’est-à-dire le moment où tout s’arrête. La vie, c’est le moment où l’on voudrait tout noter de la vie et qu’on ne peut pas, on ne peut pas noter la vie qu’on vit pense alors petit Jésus, et petit Jésus voudrait accrocher la vie pour pouvoir tout goûter des moments qu’il est en train de vivre, ce qu’il vit file à toute allure, elle file de partout tout autour du petit Jésus la vie.

 

Charles Pennequin, Dehors Jésus, P. O. L, 2022, p. 113-114.

28/02/2020

Béatrice Bonhomme, Les boxeurs de l'absurde

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                   Chef-d’œuvre

 

Il dit tu as accompli un chef-d’œuvre de nos vies

Un trésor où passe le vent

Et où rien n’est à personne

Il est fait de bric et de broc

D’instants de vie et de sourires

D’instants de larmes

Et de souffrance

Il est fait de tout et de rien

Il est construit de non-sens

Et donne un sens à ma vie

 

Il dit plus tard j’élèverai un château de cartes

Une architecture improbable

De terre et de limon

De branches et d’échappées

De nuit et de terre

Il sera comme un puzzle abandonné

Un sable qui n’a pas d’empreintes

Un paréo prêté au vent

Une figure sans dessin

Le temps baroque d’un passage.

 

Béatrice Bonhomme, Les boxeurs de l’absurde,

L’étoile des limites, 2019, p. 117.

17/02/2020

Michel Leiris, À cor et à cri

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Où que je sois

quoi que je fasse

je passe toute ma vie

à regarder couler ma vie 

 

note unique qui ne suffit pas

à créer une mélodie

 

Michel Leiris, À cor et à cri,

Gallimard,1988, p. 111.

24/11/2019

Ludovic Degroote, Si décousu

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                               Dans la vie

 

il n’y a aucune désolation qui ne tienne quelque chose de vous debout

 

car ce qui reste est la matière durable de ce que nous avons été

 

et quand bien même cela tournerait vert-de-gris

 

sous quoi le vert-de-gris

 

nous, semblables et indistincts

 

et constamment issus de tout ce qui ne nous détruit pas encore

 

prenons les allures fantômes que laissent

 

nos pieds embourbés

 

dans la vie

 

Ludovic Degroote, Si décousu, éditions Unes, 2019, p. 74-75.

04/11/2019

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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Les nuits sans celui qu’on aime

Avec celui qu’on n’aime pas , et les grandes étoiles

Au-dessus de la tête en feu et les mains

Qui se tendent vers Celui —

Qui n’est pas — qui ne sera jamais,

Qui ne peut être — et celui qui le doit...

Et l’enfant qui pleure le héros

Et le héros qui pleure l’enfant,

Et les grandes montagnes de pierre

Sur la poitrine de celui qui doit — en bas.

 

Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,

Je connais ce mystère sourd-muet

Que dans la langue menteuse et noire

Des humains — on appelle la vie.

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, traduction

Pierre Léon et Ève Malleret, Poésie/Gallimard,

1999, p. 79.

02/11/2019

Juan Gelman, Vers le sud, précédé de Notes

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Note XIX

 

homme / la vie est une chose

misérable / immortelle / ouvreuse

de blessures et douleurs / mais homme véritable /

regarde-la défaire

les tourments comme un bœuf humain

qui labourerait de l’autre côté de l’ombre /

ou qui te m’aimerait la transparence

pour souffrir pareillement

 

                                                  à jorge cedron

 

Juan Gelman, Vers le sud, précédé de Notes, traduction

de l’espagnol (Argentine) Jacques Ancet, Poésie /

Gallimard, 2014, p. 57.

08/02/2019

Georges Perros Poèmes bleus

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Ce n’est pas cela que j’attends

De la vie à l’odeur forte

Couleur de lilas veuve morte

Tu m’indiffères printemps.

 

L’algue marine et les vents

Qui viennent frapper à ma porte

L’amour que le diable l’emporte

Me sont plus émoustillants

 

Homme qu’un désastre habite

Mes vœux de nulle saison

Ne se soucient. Ma prison

 

Ce corps qu’un feu noir excite

Rien n’en peut changer le sort

Sinon toi, mort de ma mort.

 

Georges Perros, Poèmes bleus,

Gallimard, 1962, p. 43.

25/11/2018

Jules Supervielle, Le Forçat innocent

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                        Le miroir

 

Qu’on lui donne un miroir au milieu du chemin,

Elle y verra la vie échapper à ses mains,

Une étoile briller comme un cœur inégal

Qui tantôt va trop vite et tantôt bat si mal.

 

Quand ils approcheront, ses oiseaux favoris,

Elle regardera mais sans avoir compris,

Voudra, prise de peur, voir sa propre figure,

Le miroir se taira, d’un silence qui dure.

 

Jules Supervielle, Le Forçat innocent, dans Œuvres complètes,

édition Michel Collot, Pléiade / Gallimard, 1996, p. 280.