15/11/2022
Jacques Roubaud, Quelque chose noir
Le sens du passé
Le sens du passé naît
d’objets-déjà
Dans tous les moments évidents
je t’ai cherchée
Aussi dans de ténus
interrègnes
Cherchée qui ?
où
es-tu ?
qui ?
qui, n’a plus de nom
ni quoi (sans nom, dans nulle langue)
Je reviendrais de quelques pas en arrière, je serais
dans un espace
différent, en un sens précaire.
Comme si le son traversant l’eau
tombait d’une quarte.
Jacques Roubaud, Quelque chose noir, Gallimard, 1986, p. 30.
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24/02/2022
Cédric Demangeot, Obstaculaire
Mes yeux
pensent à côté de moi.
Ma poitrine
s’enfonce
sans fin
dans le vide
qu’en s’enfonçant elle creuse
au fond de mon effondrement.
Mes épaules
me cherchent.
Ma bouche
m’insulte et me tait.
Cédric Demangeot, Obstaculaire, L’Atelier contemporain, 2022, p. 30.
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23/01/2022
Pascal Quignard, Sordidissimes
Chapitre XXXIV
Lieu perdu. Objet perdu. Océan perdu. Cité perdue. Errant sans retour.
Comme Dante allait de petites cours en petites cours.
Navire sans voiles, sans but, sans astres sous les nuages,
avançant à l’aveugle dans la nuit de sa langue.
Homme qui même dans la nuit de sa langue ne s’avançant que dans le souvenir d’une nuit qui précède la nuit.
Car ils se souviennent d’une nuit d’avant la nuit, tous les hommes, poissons perdus, eau perdue, chaleur perdue, pénombre perdue.
Au gouvernail non pas un ni deux ni trois
rois
un amas de pilotes morts
les uns sur les autres, le ventre nu.
Car ils ont tous le ventre nu pour qu’ils se succèdent ceux qui se suivent dans le temps.
Pascal Quignard, Sordidissimes, Golio/Gallimard, 2007, p. 121.
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20/10/2020
Lois Wolfson, Le Schizo et les Langues
La mère du schizophrène fréquemment oubliait où elle avait temporairement placé quelque chose. Alors, elle cherchait partout dans l’appartement pour le retrouver, courant de chambre en chambre, regardant au-dessous de ceci et au-dessus de cela, même examinant l’intérieur des placards, aussi déplaçant tous les oreillers du divan tout en fouillant ce meuble, jetant des coups d’œil sur les tables, sur les lits, sur le réservoir de la chaise percée, naturellement fouillant ses poches et ceci plus d’une fois. Toutefois, elle semblait quelque heureuse d’avoir une excuse de moins ou plus déranger les autres avec son affaire, soit son mari, soit son fils, soit tous les deux.
« Où sont mes lunettes ? » hurlerait-elle soudain, par exemple. « Je les avais il y a seulement deux minutes ! Les as-tu vues, mes lunettes ? J’ai déjà le vertige à force de les chercher ... »
Louis Wolfson, Le Schizo et les Langues, préface de Gilles Deleuze, Gallimard, 1970, p. 64.
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31/05/2020
Étienne Faure, Légèrement frôlée
Où est l’exil,
en sueur, en train jadis accompli
si les avions, presque
à la vitesse du mensonge nous déposent
en des lieux prémédités de loin,
transmis par la parole, des papiers
traduits ou rédigés dans la langue des mères,
où est l’exil, un écart temporel
réduit à rien — espace crânien
où l’on revient sur ses pas pour retrouver
l’idée perdue en route —
histoire de seconde main aujourd’hui effacée
devant l’entrée des morts sur le seuil,
par politesse ultime de la mémoire
ici trahie, en creux, quand l’avion atterrit
qui ne comblera donc rien, jamais
l’amplitude de la perte.
il revient les mains vides
Étienne Faure, Légèrement frôlée, Champ Vallon,
2007, p. 90.
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10/02/2020
Pascal Quignard, Mourir de penser
Écrire est cet étrange processus par lequel la masse continue de la langue, une fois rompue dans le silence, s’oriente sous forme de petits signes non liés et dont la provenance se découvre extraordinairement contingente au cours de l’histoire qui précède la naissance. Cet alphabet est déjà une ruine. Par cette mutation chaque « sens » se décontextualise. Tout signal devenant signe perd son injonction tout en perdant le son dans le silence. Tout signe se décompose alors et devient littera morte, non coercitive, interprétable, transférable, transférentielle, transportable, ludique.
Pascal Quignard, Mourir de penser, Folio/Gallimard, 2015, p. 218.
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31/01/2020
Anna Ayanoglou, Le fil des traversées
Le règne des confins
Des frontières appuyées, de la dichotomie
qui chez moi façonnait l’espace
plus rien
Sitôt passé le centre
la chaussée jusqu’au pied des maisons
Même le ciment, le verre
quand ils surgissent
portent le sceau de la verdure
Parfois, une rue se tarit —
dans la tourbière, les herbes folles
j’ai continué
sans que rien ne se perde
Anna Ayanoglou, Le fil des traversées,
Gallimard, 208, p. 51.
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30/04/2018
Déborah Heissler, Sorrowful Songs
Rien que le ciel ouvert
Nuit
L’horizon comme un cheminement sans fin. Se perdre, ne pas insister. Bouches dans le silence. Trêve. Voir. Sentir. Jouir.
Tu le sais que quelque chose peut se passer. Que tu sens. Cri. Gorge. Nuit comme lignes qui se fondent.
Fruit brûlé
Tu — qui bat entre deux rythmes, juste amnésie à la langue de nos désirs. Corps inclinés, paupières closes.
Spasme lumineux du bleu sur la page contre le soleil avant le jour. Creusement. Torsion de la voix et tournant ainsi étreinte ; dans le milieu du monde, rien que le ciel ouvert.
Lignes
Et qui manquent aux lèvres, traits de neige tenant la terre contre les vents. Impasse du seul geste de tes mains sur mes mains, habiles, ferventes.
Je t’ai rêvée bouche et nuque, pointes sèches des hanches déroulant la ligne d’horizon.
Esquisse.
[…]
Déborah Heissler, Sorrowful Songs, Æncrages & Co, 2015, np.
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09/01/2018
Emily Dickinson, Ses oiseaux perdus (dernières années, 1882)1886)
Tout à fait vide, tout à fait calme,
La Grive boucle son Nid et exerce ses Ailes —
Elle ne connaît pas la Route
Mais avance Machine toute
Vers des rumeurs de printemps —
Elle ne demande pas de Midi —
Elle ne demande pas de Merci —
Sans miettes et sans force, avec une seule requête —
Ses Oiseaux perdus —
Quite empty, quite at rest,
The Robin locks her Nest, and tries her Wings —
She doesnot know her Route
But puts her Craft about
For rumored springa —
She does not ask for Moon —
Se does not ask for Boon —
Crumbless and homeless, of but one request —
The Birds xhe lost —
Emily Dickinson, Ses oiseaux perdus, traduction François
Heusbourg, éditions Unes, 2017, p. 59 et 58.
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16/02/2017
Pauline Klein, Les Souhaits ridicules
Il y a fort longtemps, dans une contrée retirée de Bretagne, je tombais secrètement amoureuse d’un jeune garçon rencontré en été. Il s’appelait Frédéric Bresson. Un après-midi, je l’avais suivi dans sa chambre. Il avait ouvert un coffre à jouets, et m’avait tendu une boussole. C’était une petite boîte ronde, légère et métallique, au fond de laquelle était dessiné un chat gris et noir. On raconte que le soir même, j’étais allée au lit avec l’objet, regardant les aiguilles osciller, et que je m’étais endormie en la serrant dans ma main. On raconte que j’avais passé la fin des vacances avec elle, la déposant à côté du lavabo quand je brossais mes dents, à droite de mon assiette lors des repas en famille, sous ma serviette de plage et sous mon oreiller.
Le jour de notre départ, Frédéric se tenait devant la porte de la maison. Je ne sais pas s’il se souvenait m’avoir offert cette boussole. Elle était là, au fond de ma poche. Nous nous sommes dit au revoir devant nos parents et je me suis installée à l’arrière de la voiture, à côté de mon petit frère. J’ai collé ma joue contre la vitre et j’ai écouté la musique de mon père. J’ai sorti la boussole de ma poche, je l’ai regardée encore, encore.
On raconte que, quelques kilomètres plus loin, mes parents, mon frère et moi nous sommes arrêtés sur le bord de l’autoroute pour déjeuner. J’ai posé la boussole devant moi sur la table. Puis nous sommes retournés à la voiture et repartis. Au bout de quelques minutes, j’ai ouvert mes mains, vides, j’ai fouillé dans mes poches, vides. J’avais oublié la boussole dans la station-service, et il n’était plus question de faire demi-tour.
Pauline Klein, Les Souhaits ridicules, Allia, 2917, p. 9-10.
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02/12/2016
Ilse Aichinger, Josefstadt
Josefstadt
École de l’après-midi, asile des aveugles, une pièce de monnaie perdue sur la place silencieuse. Je suis invitée ici : aujourd’hui à quatre heures. Il suffisait que j’arrive un peu en retard, il n’y aurait plus rien ici qu’au loin les murs des hôpitaux, des prisons, des corbeaux dans le ciel gris.
Où seraient alors les clôtures plus basses, la fumée plus clémente, et moi-même, où serais-je ? Celui qui a ramassé la pièce de monnaie nous a-t-il recueillie avec ?
Ilse Aichinger, Courts-circuits, traduction Marion Graf, dans la revue de belles-lettres, 2014, 1, p. 114.
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01/05/2016
Jean Genet, Ce qui reste d'un Rembrandt déchiré...
Ce qui est resté d’un Rembrandt…
Comme une odeur d’étable : quand, des personnages, je ne vois que le buste (Hendrijke à Berlin) ou seulement la tête, je ne peux m’empêcher de les imaginer debout sur du fumier. Les poitrines respirent. Les mains sont chaudes. Osseuses, noueuses, mais chaude. La table du Syndic des Drapiers est posée sur de la paille, les cinq hommes sentent le purin et la bouse. Sous les jupes d’Hendrijke, sous les manteaux bordés de fourrure, sous les lévites, sous l’extravagante robe du peintre les corps remplissent bien leurs fonctions : ils digèrent, ils sont chauds, ils sont lourds, ils sentent, ils chient. — Aussi délicat et grave que soit son regard, la Fiancée juive a un cul. Ça se sent. Elle peut d’un moment à l’autre relever ses jupes. Elle peut s’asseoir, elle a de quoi. Madame Trip aussi. Quant à Rembrandt lui-même, n’en parlons pas : dès son premier portrait sa masse charnelle ne cessera de s’accélérer d’un tableau à l’autre jusqu’au dernier, où il arrive, définitif, mais non vidé de substance. Après qu’il a perdu ce qu’il avait de plus cher — sa mère et sa femme — on dirait que ce costaud va chercher à se perdre, sans politesse envers les gens d’Amsterdam, à disparaître socialement.
Vouloir n’être rien, c’est une phrase qu’on entend souvent. Elle est chrétienne : faut-il comprendre que l’homme cherche à perdre, à laisser se dissoudre ce qui, de quelque manière, le singularise banalement, ce qui lui donne son opacité, afin, le jour de sa mort, de présenter à Dieu une pure transparence, même pas irisée ? Je ne sais pas et je m’en fous.
Jean Genet, Ce qui est resté d’un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers, et foutu aux chiottes, dans Ouvres complète, IV, Gallimard, 1968, p. 21-23.
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20/04/2016
Étienne Faure, Légèrement frôlée
La nuit quelqu’un pleure en elle
plus souvent qu’autrefois.
Sur le ponton, sa peur
— chair évidée des poissons servant d’appâts —
cent fois réveillée, c’est la noyade.
Ce chagrin d’un autre, elle le porte
ainsi qu’un deuil à très haute tension
dans la gorge, au sternum, sous les os.
Puis, le jour revenu, le sang circule,
chacun respire,
de nouveau la vie va reprendre,
on a eu peur ; pourtant
l’amour que le mort lui porte
n’a pas quitté ce corps, chair votive
où la beauté résiste à fleur de peau
— tant le mort pense à elle —
comme en janvier fleurissent
les camélias du littoral
malgré le froid, puis fanent,
offerts à la jetée.
les camélias du littoral
Étienne Faure, Légèrement frôlée, Champ Vallon,
2007, p. 60.
Étienne Faure a publié Vues prenables (2009),
Horizon du sol (2011), La vie bon train (2013),
Ciné-plage (2015).
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01/12/2015
Étienne Faure, Ciné-plage
T’as perdu ta langue
T’as perdu ta langue — effroyablement seule
et soudain exacte est la phrase
entendue quand on se sait plus — stupeur —
lire, écrire, ni rêver dans la langue
qu’on avait crue acquise de longue date,
à cet instant frappé d’hébétude
de n’avoir su garder racine en elle,
mots précaires, locutions locales
qui s’immisçaient vaguement jusqu’à l’âme,
et que noué jusqu’à la glotte par l’émotion
de la perte on revit le mutisme
de l’enfant d’alors qui savait à peine
la langue qu’on lui parlait quand l’autre,
la maternelle, était déjà en voie de partance
sans plus d’espoir de la retrouver, enfouie,
t’as perdu ta langue.
perdue
***
Entrée, sortie
Qui est là — et voilà, debout
après les trois coups pour entrer dans l’histoire
à dormir sur les planches, il déclame
face aux assis en rang sur les fauteuils
qui attendront la fin, cramoisis, pour éclater,
ou transis regardent dans leurs lorgnettes
l’avenir de loin,
entrer le vieil acteur au teint farineux,
un crâne en plastique à la main pour dire,
mis en branle par le corps, son texte
appris par cœur, lui donner le souffle
que la langue et la voix fusionnent
dans l’illusion qui se fait attendre
jusqu’à l’applaudissement, premier rappel
quand, se dit-il, revenu à pas caverneux pour saluer,
le tour est joué.
ceci est du théâtre
Étienne Faure, Ciné-plage, Champ Vallon, 2015,
- 103 et 118.
Rencontre avec Étienne Faure et lecture, le mercredi
9 décembre, à partir de 19h à la librairie "Libralire",
116, rue St-Maur, Paris, 75011.
06:27 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Faure Étienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Étienne faure, ciné-plage, langue, perte, théâtre, rôle, spectateur, acteur | Facebook |
19/09/2015
Ingeborg Bachmann, Toute personne qui tombe a des ailes
Une sorte de perte
Utilisés en commun : des saisons, des livres et une musique.
Les plats, les tasses à thé, la corbeille à pain, des draps et un lit.
Un trousseau de mots, de gestes, apportés, employés, usés.
Respecté un règlement domestique. Aussitôt dit. Aussitôt fait. Et toujours tendu la main.
De l’hiver, d’un septuor viennois et de l’été je me suis éprise.
De cartes, d’un nid de montagne, d’une plage et d’un lit.
Voué un culte aux dates, déclaré les promesses irrévocables,
porté aux nues un Quelque chose et pieusement vénéré un Rien,
(_ le journal plié, la cendre froide, un message sur un bout de papier)
intrépide en religion car ce lit était l’église.
La vue sur la mer produisait ma peinture inépuisable.
Du haut du balcon il fallait saluer les peuples, mes voisins.
Près du feu de cheminée, en sécurité, mes cheveux avaient leur couleur extrême.
Un coup de sonnette à la porte était l’alarme pour ma joie.
Ce n’est pas toi que j’ai perdu,
c’est le monde.
Ingeborg Bachmann, Toute personne qui tombe a des ailes (poèmes 1942-1967), édition, introduction et traduction François Rétif, Poésie / Gallimard, 2015, p. 437 et 439.
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