04/09/2022
Samuel Beckett, Peste soit de l'horoscope
On rentre, Olga
J pourrait être convié à représenter le jade de l’esspoir ou de l’exil, savez-vous
Ainsi que Jésus et les Jésuites, engins de terrassement dans l’île hémorroïdaire,
Modo et forma pucelle sodomisée qui de dépit se marre à en mourir.
E pour l’érythrite de l’amour et du silence et du délicieux style nou-ou-veau,
Sinuosités et volutes d’amour et de science sous le regard du soleil et l’œil de la mouette rieuse,
Juvante Jeovah et un Jaïn ou deux et une pointe de yiddophile amical,
O pour l’opale de la foi et du clin d’œil rusé, adieu adieu adieu,
Ys, l’hier englouti sera demain, décrypte-moi ça mon guérillero gaélique,
Che sarà sarà che fu, c’est là plus qu’’Homère peut en débiter,
Exempli gratia : ecce lui-même en personne, et l’agneau dithyrambique e.o.o.e
Home Olga 1932
Samuel Beckett, Peste soit de l’horoscope, traduction Édith Fournier, éditions de Minuit, 2012, p. 26.
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24/07/2021
Samuel Beckett, mirlitonnades
ce qu’ont les yeux
mal vu de bien
les doigts laissé
de bien filer
serre-les bien
les doigts les yeux
le bien revient
en mieux
*
ce qu’a de pis
le cœur connu
la tête pu
de pis se dire
fais-les ressusciter
le pis revient
en pire
Samuel Beckett, (Poèmes suivi de)
mirlitonnades, traduction Édith Fournier,
éditions de Minuit, 1978, p. 39.
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23/07/2021
Samuel Beckett, Bande et sarabande
Madame bboggs avait un amant dans la Délégation à l’urbanisme, au point que de, du reste, certaines dames malveillantes de sa connaissance ne perdaient pas une occasion de souligner la disparité frappante tant en ce qui concerne le physique que le caractère entre monsieur bboggs et Thelma : lui si sanguin, si blond et trapu à tous points de vue, attributs qui, remarquez bien, pouvaient non moins servir adéquatement de prédicat à sa fille Una ; une petite créature si frêle et noiraude. Anomalie des plus étranges, pour dire le moins, et qu’aucun ami de la famille ne pouvait vraisemblablement ignorer.
Le coucou présomptif, s’il n’était pas précisément l’un de ces petits bureaucrates sémillants dont on jurerait qu’ils sont venus au monde vêtus par Austin Reed,(1) présentait cependant quelques-unes des particularités spécifiques les mieux connues : le menton à fossette, les yeux de toutou si attirants, bruns et brillants, la surface sans ride d’un vaste front pâle dont la superficie était au moins le double de celle du bas du visage.
Samuel Beckett, Bande et sarabande, traduction Édith Fournier, éditions de Minuit, 1994 (More Pricks than Kicks, 1934), p. 186-187.
1. Chaîne britannique de vêtements.
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22/07/2021
Samuel Beckett, L'innommable
(...) ce sont les derniers mots, les vrais derniers, ou ce sont les murmures, ça va être les murmures, je connais ça, même pas, on parle de murmures, de cris lointains, tant qu’on peut parler, on en parle avant, on en parle après, ce sont des mensonges, ce sera le silence, mais qui ne dure pas, où l’on écoute, où l’on attend, qu’il se rompe, que la voix le rompe, c’est peut-être le seul, je ne sais pas, il ne vaut rien, c’est tout ce que je sais, ce n’est pas moi, c’est tout ce que je sais, ce n’est pas le :mien, c’est le seul que j’aie eu, ce n’est pas vrai, j’ai dû avoir l’autre, celui qui dure, mais il n’a pas duré, je ne comprends pas, c’est-à-dire que si, il dure toujours, j’y suis toujours je m’y suis laissé, je m’y attends, non, on n’y attend pas, on n’y écoute pas, je ne sais pas, c’est un rêve (...)
Samuel Beckett, L’innommable, éditions de Minuit, 1953, p. 260-261.
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21/07/2021
Samuel Beckett, Comment c'est
(...)
échantillons ce qui vient remémoré imaginé comment savoir la vie là-haut la vie ici Dieu aux cieux oui ou non s’il m’aimait un peu si Pim m’aimait un peu oui ou non si moi je l’aimais dans le noir la boue quand même un peu d’affection trouver quelqu’un que quelqu’un vous trouve enfin vivre ensemble collés ensemble s’aimer un peu aimer un peu sans être aimé être aimé un peu sans pouvoir aimer répondre à ça laisser vague dans l’ombre
fin de la deuxième partie la première est finie plus que la troisième et dernière c’était de bons moments il y aura de bons moments de moins bons il faut s’y attendre mais d’abord un petit tour le dernier nouvelle position et effet sur l’âme
Samuel Beckett, Comment c’est, éditions de Minuit, 1961, p. 91-92.
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20/07/2021
Samuel Beckett, Les Os d’Écho
Dortmunder
À l’heure magique, au crépuscule mauve d’Homère,
passée la flèche rouge du sanctuaire,
moi nul, elle carène royale,
allons en hâte vers la lanterne violette, vers la musique Qin de la maquerelle.
Dans la loge illuminée, elle se tient devant moi
incitant les éclats de la tige de jade ;
le signaculum de la pureté, balafré, alors apaisé,
les yeux, les yeux noirs jusqu’à ce que l’est plagal
vienne conclure la longue phrase de la nuit.
Alors : lovée tel un rouleau manuscrit refermé,
et la gloire de sa dissolution épandue
en moi, Habbacuc, dépositaire de tous les pécheurs.
Schopenhauer est mort, la maquerelle
range son luth.
Samuel Beckett, Les Os d’Écho, traduction Édith Fournier,
éditions de Minuit, 2002, p. 23.
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19/07/2021
Samuel Beckett, mirlitonnades
samedi répit
plus rire
depuis minuit
jusqu’à minuit
pas pleurer
*
chaque jour envie
d’être un jour en vie
non certes sans regret
un jour d’être né
*
rien nul
n’aura été
pour rien
tant été
rien
nul
Samuel Beckett, (Poèmes suivi de)
mirlitonnades, éditions de Minuit
1978, p.37, 37, 38.
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18/07/2021
Samuel Beckett, mirlitonnades
en face
le pire jusqu’à ce
qu’il fasse rire
*
rentrer
à la nuit
au logis
allumer
éteindre voir
la nuit voir
collé à la vitre
le visage
*
somme toute
tout compte fait
un quart de milliasse
de quarts d’heure
sans compter
les temps morts
*
fin fond du néant
au bout de quelle guette
l’œil crut entrevoir
remuer faiblement
la tête le calma disant
ce ne fut que dans ta tête
Samuel Beckett, (Poèmes suivi de)
mirlitonnades, éditions de Minuit,
1978, p. 33-34.
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06/03/2021
Samuel Beckett, Les Os d'Écho et autres précipités
Dortmunder
À l’heure magique, au crépuscule mauve d’Homère
passée la flèche rouge du sanctuaire,
moi n ul, elle carène royale,
alors en hâte vers la lanterne violette, vers la menue musique Qin de la maquerelle.
Dans la loge illuminée, elle se tient devant moi
incitant les éclats de la tige de jade ;
le signaculum de la pureté, balafré, alors apaisé,
les yeux, les yeux noirs jusqu’à ce que l’est plagal
vienne conclure la longue phrase de la nuit.
Alors : levé tel un rouleau manuscrit refermé,
et la gloire de sa dissolution épandue
et moi, Habbacuc, dépositaire de tous les pécheurs.
Schopenhauer est mort, la maquerelle
range son luth.
Samuel Beckett, Les Os d’Écho et autres précipités, traduction Édith Fournier, éditions de Minuit, 2002, p. 25.
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05/03/2021
Samuel Beckett, Nouvelles et textes pour rien
Ai-je tout essayé, bien fouiné partout, doucement, en écoutant avec patience, sans faire de bruit ? Je parle sérieusement, comme souvent, j’aimerais savoir si j’ai tout fait, avant de me porter manquant, et d’abandonner. Partout, je veux dire aux endroits où j’avais des chances d’être, où je me tenais autrefois, en attendant l’heure de me glisser dehors, endroits éprouvés, voilà tout ce que je voulais dire, en disant partout. Autrefois, je veux dire alors que je bougeais encore, que je me sentais qui bougeais, avec peine, à peine, mais dans l’ensemble changeant incontestablement de place, les arbres le disaient, le sable, l’air des sommets, les pavés de la ville.
Samuel Beckett, Nouvelles et textes pour rien, éditions de Minuit, 1958, p. 175.
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04/03/2021
Samuel Beckett, Comment c'est
ici donc enfin deuxième partie où j’ai encore à dire comment c’était comme je l’entends en moi qui fut dehors quaqua de toutes parts des bribes comment c’était avec Pim un temps énorme tout bas dans la boue à la boue quand ça cesse de haleter comment c’était ma vie on parle de ma vie dans le noir la boue avec Pim deuxième partie plus que la troisième et dernière c’est là où j’ai ma vie où je l’ai eue où je l’aurai des temps énormes troisième partie et dernière dans le noir la boue tout bas des bribes
Samuel Beckett, Comment c’est, éditions de Minuit, 1961, p. 63.
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03/03/2021
Samuel Beckett, L'innommable
[...] À moi maintenant de faire le mort, à moi qu’ils n’ont pas su faire naître, et ma carapace de monstre autour de moi pourrira. Mais c’est entièrement une question de voix, toute autre métaphore est impropre. Ils m’ont gonflé de leurs voix, comme un ballon, j’ai beau me vider, c’est encore eux que j’entends. Qui, ils ? et pourquoi plus rien, depuis quelque temps ? Se peut-il qu’ils m’aient abandonné en disant, C’est entendu, il n’y a rien à en tirer, n’insistons pas, il n’est pas dangereux. Ah mais un petit filet de voix d’homme forcé, pour murmurer ce que leur humanité suffoque, aux oubliettes, garrotté, au secret, au supplice, un petit halètement de condamné à vivre, pour balbutier ce que c’est que d’avoir à célébrer la relégation.
Samuel Beckett, L’innommable, éditions de Minuit, 1953, p. 77-78.
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02/03/2021
Samuel Beckett, Malone meurt
Cette fois je sais où je vais. Ce n’est plus la nuit de jadis, de naguère. C’est un jeu maintenant, je sais jouer. Je n’ai pas su jouer jusqu’à présent. J’en avais envie, mais je savais que c’était impossible. Je m’y suis quand même appliqué, souvent. J’allumais partout, je regardais bien autour de moi, je me mettais à jouer avec ce que je voyais. Les gens et les choses ne demandent qu’à jouer, certains animaux aussi. Ça commençait bien, ils venaient tous à moi, contents qu’on veuille jouer avec eux. Si je disais, Maintenant j’ai besoin d’un bossu, il en arrivait un aussitôt, fier de la belle bosse qui allait faire son numéro. Il ne lui venait pas à l’idée que je pourrais lui demander de se déshabiller. Mais je ne tardais pas à me retrouver seul, sans lumière. C’est pourquoi j’ai renoncé à vouloir jouer et fait pour toujours miens l’informe et l’inarticulé.
Samuel Beckett, Malone meurt, éditions de Minuit, 1951, p. 9-10.
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25/05/2020
Samuel Beckett, Peste soit de l'horoscope
là-bas
là-bas
surprenant
pour un être
si petit
jolis narcisses
armée de mars
alors en marche
puis là
puis là
puis de là
narcisses
encore
mars alors
en marche encore
surprenant
encore
pour un être
si petit
Samuel Beckett, Peste soit de l’horoscope,
traduction Édith Fournier,
éditions de Minuit, 2012, p. 37.
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19/01/2020
Samuel Beckett, Les Os d’Écho,
Alba
avant le point du jour tu seras présente
et Dante et le Logos et toutes les strates et tous les mystères
et la lune masquée d’infamie
occultés par la blanche muraille de musique
que suscitera ta présence avant le point du jour
sourd frisson suave de la soie
s’inclinant sue le ferme avec noir de la table d’harmonie
pluie sur les bambous fleur de fumée allée de saules
toi qui ne seras pas plus généreuse
même si par compassion tu t’inclines
pour contresigner de tes doigts la poussière
toi dont la beauté ne sera qu’un drap devant moi
affirmation de son propre principe abolissant la tempête des fantasmes
en sorte qu’il n’y a nul soleil et nul dévoilement
et nulle présence
moi seul et puis ce linceul
et mort éperdument
Samuel Beckett, Les Os d’Écho, traduction Édith Fournier, Les éditions de Minuit, 2002, p. 24.
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