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20/05/2016

Henri David Thoreau, Walden ou La vie dans les bois

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                                  Pendaison de crémaillère

 

   En octobre je m’en allais grappiller aux marais de la rivière, et m’en revenais avec des récoltes plus précieuses en beauté et parfum qu’en nourriture. Là aussi j’admirai, si je ne les cueillis pas, les canneberges, ces petits gemmes de cire, pendants d’oreille de l’herbe des marais, sorte de perles rouges, que d’un vilain râteau le fermier arrache, laissant le marais lisse en un grincement de dents, les mesurant sans plus au boisseau, au dollar, vendant ainsi la dépouille des prés à Boston ou à New York ; destinées à la confiture, à satisfaire là-bas les goûts des amants de la Nature. Ainsi les bouchers rôtissent les langues de bison à même l’herbe des prairies, insoucieux de la plante déchirée et pantelante. Le fruit brillant de l’épine-vinette était pareillement de la nourriture pour mes yeux seuls ; mais j’amassai une petite provision de pommes sauvages pour en faire des pommes cuites, celles qu’avaient dédaignées le propriétaire et les touristes. Lorsque les châtaignes furent mûres, j’en mis de côté un demi-boisseau pour l’hiver. C’était fort amusant, en cette saison, de courir les bois de châtaigniers alors sans limites […] un sac sur l’épaule, et dans la main un bâton pour ouvrir les bogues, car je n’attendais pas toujours la gelée, parmi le bruissement des feuilles, les reproches à haute voix des écureuils rouges et des geais.

[…]

Henri David Thoreau, Walden ou La vie dans les bois, traduction L .Fabulet, Gallimard, 1967 [1922], p. 237.

 

19/05/2016

Virginia Woolf, Journal d'un écrivain

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Lundi 13 septembre 1925, peut-être

 

   C’est une honte. Il est dix heures du matin, et j’écris ceci au lit, dans la petite chambre qui donne sur le jardin. Le soleil est déjà haut. Les feuilles de la vigne sont d’un vert transparent, et celles du pommier si luisantes que, tandis que je prenais mon petit déjeuner, j’inventais une petite histoire sur un homme qui écrivit un poème, les comparant je crois à des diamants, et les toiles d’araignées (qui apparaissent et disparaissent de façon si surprenante) à ceci ou cela. Ce qui m’amena à penser à Marvell et à ce qu’il écrit sur la vie à la campagne, et de là à Herrick et à cette idée que leur œuvre dépendait pour une grande part, et par réaction, des plaisirs de la ville. Mais j’ai oublié les faits. J’écris cela, d’une part pour mettre à l’épreuve le pauvre paquet de nerfs noués sur ma nuque (tiendront-ils ? céderont-ils, comme ils l’ont fait si souvent, car je suis toujours amphibie, moitié couchée moitié levée ?) d’autre part pour apaiser ma démangeaison d’écrire. C’est à la fois un grand soulagement et une malédiction.

 

Virginia Woolf, Journal d’un écrivain I, traduction Germaine Beaumont, Éditions du Rocher, 1977

18/05/2016

Hervé Guibert, Mes parents

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   Je rentre plus tôt du lycée, un professeur est absent. Ma mère est toujours à la maison pour être là quand nous rentrons. Je frappe comme d’habitude des coups contre la porte et l’on ne me répond pas ; je ne m’inquiète pas longtemps, mon souci se transforme vite en malaise, en incompréhensible suspicion. On a reconnu mes coups et leur succède maintenant non l’ouverture de la porte mais le bruit confus d’un trouble, d’un déménagement qui s’astreint à ne pas le faire paraître. C’est long : il faut remettre en place des meubles ou je ne sais quoi. Je ne sais quoi : je ne sais comment interpréter ces murmures mais je sens immédiatement qu’il va me falloir les interpréter, et que cette interprétation m’amènera à une découverte capitale. Par un échange de voix ma mère me fait attendre un peu plus. Le chien-de-garde est mis ; on ne le met que la nuit, contre les voleurs. Son bruit de chaine inaccoutumé à une telle heure aggrave, me semble-t-il, la situation. Ma mère m’ouvre : mon père est là, planté bêtement dans le salon qui est aussi leur chambre, et que je dois traverser pour atteindre la mienne. Sans défaillir et sans parler, pour aller déposer mon cartable, je traverse effectivement cette chambre ; je remarque que le dessus de lit rose orangé, d’un lignage que je peux suivre du doigt lorsqu’il m’arrive de m’asseoir dessus, n’est pas défait ; mais un regard affolé de ma mère désignant quelque chose à mon père, avant même que j’aie pu le remarquer, et le lui faisant empoigner et dissimuler dans un coffret de la vitrine me dit que je devrai bientôt aller m’enquérir de la réalité de cet objet.

[…]

 

Hervé Guibert, Mes parents, Gallimard, 1986, p. 67-68.

17/05/2016

Ludovic Degroote, Pensée des morts

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Photo Michel Durigneux

 

notes, fragments, poèmes, bouts de tout, mais en serrant les dents comme un crâne, bien serrer les dents pour lâcher le moins, le moins le mieux, on a beau penser à sa santé, trop de forme vous tue

 

sales petits morts qui ont laissé des mots partout.

 

comment tirer une forme non tronquée d’un tel état de décomposition, d’où que forme libre si forme libre possible en cas de non tronqueriez ou non décomposition de soi-même

 

ils en sont venus aux vers

 

Ludovic Degroote, Pensée des morts, Tarabuste, 2002, p. 45.

16/05/2016

Jaromír Typlt, Fragment B 101

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Fragment B 101

 

Deux bulles d’air comme enseigne

Gribouillées à la craie

Sur le crépi tout près de l’entrée :

Ici vit le délire.

 

Souriant il viendra vers moi le jour même où prendra sa folie.

Après quelques pas le sourire s’en ira,

de ma vie je n’ai vu personne aussi vite s’assombrir,

s’effondrer de sa face, s’oublier,

et figer son regard en lâchant tout à vau-l’eau

et des yeux d’effroi ébahis observer

combien ça augmente

augmente sans retenue.

Avant qu’une voix ne le brouille

en appelant son nom . Depuis la mort de sa mère

Franrisck vit seul dans la maison.

 

Par un couloir il me conduira

opinant à tout ce que je dis,

son pantalon trop lâche lui glissera des hanches

jusqu’en bas, vers l’aine toute noire

que d’un regard légèrement interdit

je devinerai

avant qu’il remonte sa culotte.

              

Plus tard je comprendrai où j’ai mis les pieds.

Chez lui tout est ordinaire, conduite et réponses.

Sauf le reste sans doute :

d’avoir pénétré dans sa maison sens dessus-dessous, sortons des affaires, taillons,

avant de nous asseoir devant un café

et de rigoler de nos blagues. Il fera semblant de tout approuver,

très volontiers,

trop,

mais avec un agacement perçant çà et là.

[…]

 

Jaromir Typlt, Fragments B 101, traduit du tchèque par Denis

Molcanov, dans NUNC, n° 38, février 2016, p. 113.

15/05/2016

Marina Tsvétaïéva, Tentative de jalousie

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Poème pour Ossip Mandelstam

 

Tu rejettes la tête en arrière —

Et puis que tu es fier et hâbleur.

Quel joyeux compagnon jusqu’à moi

A conduit ce mois de février !

 

Cliquetant de pièces de monnaie

Et lentement soulevant la poussière,

Comme des étrangers triomphants

Nous allons par la ville natale.

 

De qui sont les mains délicates

Qui ont, beauté, touché tes cils,

Quand, comment, par qui et combien

Tes lèvres ont-elles été baisées —

 

Je m’en moque. Mon esprit avide

A surmonté ce rêve-ci.

Et toi c’est le garçon divin,

Petit de dix ans, que j’estime.

 

Nous resterons au bord du fleuve,

Où trempent les perles des réverbères,

Je te mènerai jusqu’à la place —

Témoin des tsars adolescents.

 

Siffle ton mal de jeune garçon,

Serre ton cœur au creux de ta main.

— Toi, flegmatique et frénétique,

Toi, mon émancipé, — pardon !

 

                                       18 février 1916

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de

Tentative de jalousie, traductions de Pierre Léon

et Ève Malleret, Poésie / Gallimard, 1999, 97-98.

 

Le sixième numéro de la revue annuelle Place de la Sorbonne, animée par Laurent Fourcaut, sera présenté à la Maison de la Poésie de Paris le 17 mai, à 19h30.

Outre un entretien avec l’éditeur Antoine Jaccottet, le sommaire offre des inédits en langue française, de poètes confirmés (William Cliff, Pierre Dhainaut, Jacques Demarcq, etc.) ou non (Ariel Spiegler, Christine Guinard, Minh-Triet Pham, etc.), et des traductions de poètes d’Argentine, de l’Équateur, de Slovénie, d’Allemagne, d’Autriche. D’autres rubriques — poème commenté, prose accompagnant un tableau, des lectures, etc.) — complètent ce très riche numéro.

 

 

13/05/2016

Ghérasim Luca, La Paupière philosophale

Pour saluer la publication aux éditions Corti de La Paupière philosophale et la sortie du dernier numéro de la revue Europe, coordonné par Serge Martin et consacré à Ghérasim Luca :

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Bien au-delà du peu

   la peau et l’épée

         lapent

       l’eau ailée

     du petit pire

 

Toupie d’une peur idéale

     épi à pas de pou

         appât

   ou pâle pet de pétale

 

            *

 

La vie dupe la fille du vite

 

         Tapis doux

         où les fées filent

             les feux muets

       d’un rien de doute

 

         L’effet est fête

            faute hâte

         écho et cause

 

Ghérasim Luca, La Paupière philosophale,

Corti, 2016, p. 9, 10.

 

 

11/05/2016

Georges Perros, Papiers collés, III

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   Ces artistes qui se refusent à connaître l’œuvre de leurs contemporains par craintes d’être influencés, c’est un peu comme si un homme ne voulait voir aucune femme par crainte de tromper la sienne.

    La réponse n’est pas hors du texte ou dans le texte. Elle est le texte.

   Écrire, pouvoir écrire, c’est, d’une certaine manière, se venger. Remettre l’éternité en marche. Ou tenter d’éliminer le futur.

   Le drame : on se fait des idées. La poésie, c’est le contraire. Poésie de nulle part de n’importe où de partout.

 

Georges Perros, Papiers collés, III, Gallimard, ‘’L’Imaginaire’’, 1994, p. 90, 95, 104, 108.

10/05/2016

Georges Perros, Poèmes bleus

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Je te propose ce fugitif compagnonnage

Entre le chien et le loup

De l’aboiement crépusculaire

Je te demande de m’aider

À extraire de nos solitudes jumelles

Un peu de cette magie

Grâce à laquelle se renouvelle le bail

Se rafraîchissent nos tristes idées

Qui sont comme pierres dans un désert sans oasis

Stupidement debout contre le mur du néant

Comme lorsqu’on attend quelqu’un

Qui ne viendra pas

Qui ne viendra plus

Le rendez-vous n’aura pas lieu

Les pierres de Carnac sont comme ces idées

Muettes comme l’éternité

Justes bonnes à attirer ceux qui veulent savoir tout

Par le biais de qui ne sait rien

Ô l’Histoire belle paresse,

Mais vivre en est une autre, histoire,

Rempli d’épines, le chemin,

Et n’ignore-t-on pas encore

L’étrange énigme d’ici-bas ?

 

Georges Perros, Poèmes bleus, Gallimard,

‘’Le Chemin’’, 1962, p. 53-54.

09/05/2016

Georges Perros, Papiers collés

 

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  Vivre sans arrêt avec une personne, du matin au soir, au bout de huit jours on la déteste. Mais vivre avec soi-même ! Alors on part en voyage, on dédaigne de prendre une valise qui nous rappellerait… Et on arrive dans une chambre d’hôtel où la première chose entrevue est un miroir. (Inutile de le casser.)

 

   J’aime quand j’ai bu un peu. J’épouse la terre plus aisément. Je tourne un peu. Je suis à jeun quant à elle. Cet état de demi-ébriété me ravit. Comme un coma de juste mesure. Celui-là même que j’ai vainement cherché avec les êtres, que je n’espère plus trouver qu’avec moi-même, un jour de musique privilégiée, musique d’accompagnement qui m’adoptera pour thème.

 

Georges Perros, Papier collés, Gallimard, 1960, p. 37, 57.

08/05/2016

Tristan Corbière, La Cigale et le Poète, dans Les Amours jaunes

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Corbière par Félix Valloton

 

     À Marcelle

 

La Cigale et le Poète

 

Le poète ayant chanté,

       Déchanté,

Vit sa Muse, presque bue,

Rouler en bas de sa nue

De carton, sur des lambeaux

De papiers et d’oripeaux.

Il alla coller sa mine

Aux carreaux de sa voisine,

Pour lui peindre ses regrets

D’avoir fait — Oh ! pas exprès —

Son honteux monstre de livre !...

— « Mais vous étiez donc bien ivre ?

— Ivre de vous !...Est-ce mal ?

— Écrivain public banal !

Qui pouvait si bien le dire…

Et, si bien ne pas l’écrire !

— J’y pensais, en revenant…

On n’est pas parfait, Marcelle…

— Oh ! c’est tout comme, dit-elle,

Si vous chantiez maintenant ! »

 

Tristan Corbière, Les Amours jaunes,

dans Charles Cros, T. C., Œuvres complètes,

Pléiade / Gallimard, 1970, p. 853.

        

07/05/2016

Guillaume Apollinaire, Le Guetteur mélancolique

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La nudité des fleurs c’est leur couleur charnelle

Qui palpite et s’émeut comme un sexe femelle

Et les fleurs sans parfum sont vêtues par pudeur

Elles prévoient qu’on veut violer leur odeur

 

La nudité du ciel est voilée par des ailes

D’oiseaux planant d’attente émue d’amour et d’heur

La nudité des lacs frissonne aux demoiselles

Baisant d’élytres bleus leur écumeuse ardeur

 

La nudité des mers je l’attife de voiles

Qu’elles déchireront en gestes de rafale

Pour dévoiler au stupre aimé d’elles leurs corps

 

Au stupre des noyés raidis d’amour encore

Pour violer la mer vierge douce et surprise

De la rumeur des flots et des lèvres éprises

 

Guillaume Apollinaire, Le Guetteur mélancolique, dans

Œuvres poétiques, édition M. Adéma et M. Décaudin,

Pléiade / Gallimard, 1965, p. 574.

06/05/2016

Giorgio Caproni, Le Mur de la terre

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            Il battait

                      (Hommage à Dino Campana)

Il battait le nom (il le battait

Précisément, comme

On bat de la monnaie) et la frappe

(mais celle-ci battait

obstinément), le sens

(la valeur) dans le vent

(dans le souffle de pandémonium

sur Oregina) heurté

se perdait dans la mer

d’aluminium — avec la morte

fumée de la cheminée

de la citerne, dont l’éclair

ferme qui, ferme, secouait

la tôle — que, encore,

lui, battait

obstinément (et battait) (comme

on bat une médaille) dans le nom

vide qui se perdait

au vent que, Lui, battait.

 

Giorgio Caproni, Le Mur de la terre,

traduction Philippe Di Meo , Atelier

La Feugraie, 2002, p. 49.

05/05/2016

Paul Valéry, Littérature

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                                     Littérature

 

   Si l’on se représentait toutes les recherches que suppose la création ou l’adoption d’une forme, on ne l’opposerait jamais bêtement au fond.

 

   Quand l’ouvrage a paru, son interprétation par l’auteur n’a pas plus de valeur que toute autre par qui que ce soit.

 

   Ce qui plaît beaucoup a les caractères statistiques. Des qualités moyennes.

 

   Dire qu’on a inventé la « nature » et même « la vie » ! On les a inventées plusieurs fois et de plusieurs façons…

   Tout revient comme les jupes et les chapeaux.

 

   Le nouveau n’a d’attraits irrésistibles que pour les esprits qui demandent au simple changement leur excitation maxima.

 

Paul Valéry, Œuvres, II, édition établie par Jean Hytier, Pléiade / Gallimard, 1960, p. 554, 557, 559, 560, 561.

04/05/2016

William Blake, Chanson de folie

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           Chanson de folie

 

Les vents sauvages pleurent,

   La nuit est glacée ;

Viens ici, Sommeil,

   Et dévoile mes chagrins.

Mais voici le point du jour

   Dans les hauteurs de l’Orient

Et les oiseaux frémissants de l’aube

S’envolent loin de la terre.

 

Voyez, jusqu’au zénith

   De la voûte céleste,

Chargés de douleur

   Mes accents sont portés ;

Ils frappent l’oreille de la nuit,

   Et font couler les larmes du jour ;

Ils font rugir les vents en folie

Et se jouent avec la tempête.

 

Comme un démon dans la nue

   Hurlant de douleur

Suivant la nuit je me hâte

   Et avec la nuit je m’en irai

Me détournant de l’Orient

   D’où nous est venue consolation,

Car la lumière frappe mon âme

D’un indicible mal.

 

William Blake, Esquisses poétiques, dans

Poèmes, traduction L. M. Cazamian,

Aubier-Flammarion, 1968, p. 99.