23/12/2023
Arno Schmidt, Scènes de la vie d'un faune
Je ris tout seul, un instant, m’imaginant que je suis un mort célèbre et que Berta, ma veuve, guide les visiteurs dans les salles du « Musée Düring » de Fallingshotel. On y voit dans les vitrines mes manuscrits (pa exemple, l’avertissement à Fintels, le sommant pour la dernière fois de venir apposer ses empreintes digitales sur sa carte d’identité — « Sa dernière lettre, oui » — à côté de la grande biographie inédite de Fouqué). Au mur, mon portrait par Oskar Kokoschka, avec une seule oreille et un teint d’un incarnat fort peu catholique.
Arno Schmidt, Scènes de la vie d’un faune, traduction Jean-Claude Hémery, Christian Bourgois, 1981, p. 151.
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06/04/2022
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Quelque intégrité que nous ayons, on peut toujours nous classer dans une catégorie de voleurs.
Hier soir , dîner des Symbolistes. (...) Tous ces gens-là disent : « Je suis un révolté, moi », avec un petit air de vieillard qui vient de faire pipi sans trop souffrir.
Je ne lis rien, de peur de trouver des choses bien.
Chez Rodin, il m’a semblé que mes yeux tout d’un coup éclataient. Jusqu’ici la sculpture l’avait intéressé comme un travail dans du navet.
Écrire à la manière dont Rodin sculpte.
Un homme écrit une lettre d’amour à une femme qui ne lui répond pas.
Il cherche les raisons de ce silence.
Il finit par trouver ceci :
— J’aurais dû mettre un timbre dans la lettre.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 76, 77, 83, 85, 91.
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25/03/2022
Kafka, À Milena
Prague, 15 juillet 1920
(...) Tu remarques peut-être que cela fait plusieurs nuits que je ne dors pas. C’est tout simplement « la peur ». C’est vraiment quelque chose qui m’enlève toute volonté, qui me jette de ci de là selon son bon vouloir, je ne reconnais plus ni haut ni bas, ni droite ni gauche. (...) De plus dans tes dernières lettres se glissent deux ou trois remarques qui m’ont rendu heureux, mais désespérément heureux car ce que tu dis à ce propos est vraiment convaincant pour la raison, le cœur et le corps, mais il y a encore une conviction plus profonde dont je ne connais pas le lieu et qui ne se laisse visiblement convaincre par rien. Et pour finir, ce qui a beaucoup contribué à m’affaiblir, la disparition au fil des jours du merveilleux effet apaisant-excitant de ta présence corporelle. Si seulement tu étais déjà là ! Donc je n’ai personne d’autre ici que la peur, nous roulons étroitement enlacés l’un à l’autre à travers les nuits. Cette peur recèle quelque chose de très sérieux, en un certain sens elle rend compréhensible le fait qu’elle m’annonce continuellement la nécessité du grand aveu : Milena n’est elle aussi qu’un être humain.
Kafka, À Milena, traduction Robert Kahn, NOUS, 2021, p. 121.
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07/06/2021
Esther Tellermann, Un versant l'autre
(...)
Jadis très loin
furent
des voilures
des myrtilles
et le câprier
même crête du monde
qu’un été brûle
même ambre
qui vous enferme
Poème creusait
chaque interstice
où vinrent
la lettre
et la blessure
(...)
Esrher Tellermann, Un versant
l’autre, Flammarion, 2019, p. 62.
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07/02/2021
Catherine Pozzi, Paul Valéry, La flamme et la cendre, Correspondance
À Catherine Pozzi
Paris, vendredi 25 février 1921
(...) Tu comprends, mon petit nigaud, que je t’aime comme sœur et comme femme et comme Psyché et comme Éros, comme infiniment intime, et je ne puis rien ôter de ton adorable collier. Je ne peux pas briser le fil qui retient les perles. La rareté incomparable du joyau vient de cette réunion. Une perle considérée me jette à l’autre, et d’orients en orients je te parcours indéfiniment. C’est t’aimer chérie trop complète trop nécessaire trop fermée autour de L.
Donnez-moi mon souci quotidien. N’est-ce pas mon petit et de quoi voulez-vous que je vive ? Je ne pense pas que tu comprennes ce besoin impossible qui tout à coup après une nuit et un demi-jour de peine tendre et sombre, se soulève et me brise contre moi-même car c’est moi aussi qui suis obstacle à moi vers toi, puisque si j’étais autre, peut-être il n’y aurait pas d’obstacle.
Catherine Pozzi, Paul Valéry, La flamme et la cendre, Correspondance, édition Lawrence Joseph, Gallimard, 2006, p. 133.
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13/10/2020
Henri Michaux, Donc c'est non
Paris, le 14 février 1977
Monsieur Roger Borderie
Les Pilles
26110 Nyons
Cher Monsieur,
Vos retards à entreprendre le N° H.M. vous font mal, dites-vous. À moi ils font du bien. Ils m’ont permis de revoir tranquillement les publications « OBLIQUES » et de réfléchir.
Au vu de ces N° d’ailleurs remarquables, ma décision est prise. Pas de N° Michaux. Je vous prie de renoncer à votre projet.
Il est clair que même atténuée votre formule va à l’encontre de mes désirs. Je répugne — en ce qui me concerne — à l’étalage.
Si après tant de dizaines d’années j’ai pu rester plus ou moins caché c’est grâce à ma vigilance et au nombre de refus que vous n’imaginez pas, à toutes sortes de propositions.
Réfléchissez vous-même. Comme je ne veux pas de photos, pas de documents personnels, pas d’autographe, pas de tripotage dans ma vie, etc., votre formule ne s’applique pas.
Réduit ainsi, un N° OBLIQUES ne serait plus ce qu’on en attend, n’aurait pas d’intérêt et ressemblerait à ces volumes ou à ces catalogues faits à l’occasion de rétrospectives ou à d’autres volumes avec reproductions de peintures et de dessins... lesquels ne manquent pas.
Vous qui ne suivez que vos idées, comprenez celui qui vous dit : je n’ai pas envie. J’ai envie qu’on [n’en] parle plus, sauf vous pour me donner votre accord là-dessus.
D’avance je vous remercie. Vôtre
Henri Michaux
Henri Michaux, Donc c’est non, Lettres réunies, présentées et annotées par Jean-Luc Outers, Gallimard, 2016, p. 126-127.
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05/01/2019
Bernard Noël, La Chute des temps
Portrait
où est la lettre ?
cette question vient d’un mourant
puis il se tait
tant qu’un homme vit
il n’a pas besoin de compter sa langue
quand un homme meurt
il doit rendre son alphabet
de chaque mort
nous attendons le secret de la vie
le dernier souffle emporte
la lettre manquante
elle s’envole derrière le visage
elle se cache au milieu du nom
Bernard Noël, La chute des temps,
Poésie / Gallimard,1993, p. 219.
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15/10/2018
Étienne Faure, Tête en bas
Soirée autour de Tête en bas d’Étienne Faure,
avec un hommage à Julien Bosc, éditeur et poète,
le jeudi 18 octobre, à partir de 19 h,
librairie Liralire, 116, rue Saint-Maur, 75011, Paris.
Parfois s’excusant, les livres
— d’avoir vécu, d’être jaunes —
chutent, obscurs,
soudain remarqués sur la planche
par leur absence — on les ramasse,
en relit quelques lignes, extraits de vie,
fulgurances, les adopte un temps
puis leur sens retombe, les mains les rangent
au plus haut, côté ciel, en réchappent
un dactyle, une fleur inhalée de longue date,
foin du monde où s’arrêta la lecture d’avant,
et des lettres d’amour recluses
autrefois parcourues en hâte, emmêlées avec
les mots du livre qui les protègent, les enveloppent,
les mots protégeant les mots jusqu’à la prochaine
lecture quand d’autres mots s’acclimatent
au noir des signes, qu’on y voie.
chutes
Étienne Faure, Tête en bas, Gallimard, 2018, p. 81.
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25/04/2017
Étienne Faure, Poèmes d'appartement
De ses nuits à deux corps dans un lit il garde
le réflexe de dormir sur le bord, non pas au centre,
en souvenir de l’autre qui pourrait resurgir,
se lover contre lui, demander asile
un soir de neige à pas feutré traverser la chambre
où le rêve et sa ligne de flottaison persistent
au plus rêche de l’entrée en matière — y a quelqu’un ?
Revient l’épais silence, voix tranchante il répète.
Y a personne.
Comme aux frontières de l’Europe hier
— quelque chose, rien, tout à déclarer —
il écrit, se relève la nuit pour écrire
ce qui pourrait devenir une lettre
sur du papier, juste avant la
Dématérialisation des amours
Et des déclarations qui vont avec
(âmes et hameaux où vivaient les amants qui traversent
à découvert la nuit).
à deux corps
Étienne Faure, Poèmes d’appartement, dans
Rehauts, n° 39, mars 2017, p. 48.
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23/10/2016
Giorgio Manganelli, Amour
Si tu m’aimes — et j’ignore si l’amour est permis à qui rêve — , tu m’aimes comme on peut aimer après bien des amours, au point que les mystères, les inexactitudes, les noms échangés, malicieuse persistance, rendent vague, inepte et hagarde toute tentative de ta part d’envoyer des messages, quel qu’en soit le destinataire naturel, ou laborieusement dénaturé, accessible aux seuls entretiens allégoriques ; tu pourrais avoir recours à des catalogues d’exploits, à des proverbes, à des indices flous mais non dépourvus de loyauté ; proposer des symptômes, des signes d’une maladie dotée de sens, un syndrome élaboré, un callot de rêves pénibles et hirsutes. Je pourrais accepter, me diras-tu, vieil homme, un billet vierge, et ne rien écrire dessus ; mais cette virginité ne sera-t-elle pas déjà une allusion au silence, à d’intolérables vacarmes, une proclamation d’identité, ou l’impossibilité de mesurer la distance et de sonder simultanément le désespoir, la dispersion, l’imminence, les allusions au néant ; ne sera-t-elle pas le plus muet murmure, ce qui reviendrait à dire : « Bien que je sois là, nous n’avons rien à nous dire » ; et même : « Toi et moi, nous nous ignorons depuis toujours. »
Giorgio Manganelli, Amour, traduction Jean-Baptiste Para, Denoël, 1981, p. 22-23.
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30/01/2016
Jean de Sponde (1557-1595), Les Amours
Mon Dieu, que je voudrois que ma main fut oisive,
Que ma bouche et mes yeux reprissent leur devoir !
Escrire est peu : c’est plus de parler et de voir,
De ces deux œuvres l’une est morte et l’autre vive.
Quelque beau trait d’amour que notre main escrive,
Ce sont tesmoins muets qui n’on pas le pouvoir
Ni le semblable poix, que l’œil pourroit avoir
Et de nos vives voix la vertu plus naïve.
Mais quoy ? n’estoyent encor ces foibles estançons
Et ces fruits mi-rongez dont nous le nourrissons
L’Amour mourroit de faim et cherroit en ruine :
Escrivons, attendant de plus fermes plaisirs,
Et si le temps domine encor sur nos desirs,
Faisons que sur le temps la constance domine.
Jean de Sponde, Les Amours, dans Œuvres littéraires, édition
Alan Boase, Droz, 1978, p. 54.
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23/01/2015
Franz Kafka, À Milena
Prague, 8 juillet 1920, jeudi
Jeudi matin
Ta lettre enfin. Tout de suite quelques mots seulement, en hâte, sur l'essentiel, même si la hâte y mêle peut-être des inexactitudes que je regretterai plus tard : je ne connais pas d'autre cas semblable à celui de notre relation à tous les trois [1], et donc on ne doit pas le troubler avec des expériences tirées d'autres cas (cadavres — souffrance à trois, à deux — disparaître de telle ou telle manière). Je ne suis pas son ami, je n'ai trahi aucun ami, mais je ne suis pas non plus pour lui une simple connaissance, je lui suis en fait très lié, peut-être suis-je sur certains plans plus qu'un ami. Quant à toi tu ne l'as pas non plus trahi, car tu l'aimes, quoique tu en dises et quand nous nous unissons (merci, vous les épaules !) c'est à un autre niveau, hors de son domaine. Le résultat de tout cela est que cette situation n'est pas seulement notre situation à garder secrète, pas seulement souffrance, peur, douleur souci — ta lettre m'a effrayé en me tirant d'un calme relatif, calme qui provenait encore de notre rencontre et qui maintenant file peut-être à nouveau vers les tourbillons de Merano, quoi qu'il en soit, il y a de puissants obstacles au retour des conditions de Merano — mais c'est une situation ouverte à trois, claire dans son ouverture, même si tu devrais encore la taire un moment. Je suis très opposé à une réflexion sur les possibilités éventuelles — j'y suis opposé, parce que je t'ai, si j'étais seul, rien ne pourrait m'empêcher d'y réfléchir — dès le présent on s'érige soi-même en arène du futur, alors comment le sol dévasté pourrait-il porter la maison du futur ?
Je ne sais plus rien d'autre maintenant, je suis au bureau depuis trois jours et n'ai pas encore écrit une ligne, peut-être cela va-t-il marcher maintenant. D'ailleurs Max m'a rendu visite pendant que j'écrivais cette lettre, son silence va de soi, pour tous à part ma soeur mes parents la jeune fille et lui je suis passé par Linz.
F.
Franz Kafka, À Milena, traduit de l'allemand par Robert Kahn, éditions NOUS, 2015, p. 101-102.
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17/11/2014
Raymond Queneau, Texticules, dans Contes et propos
Dans la lettre
L'abri, c'est magistral à l'intérieur d'un a, par exemple, d'un o, d'un i — intérieur mince, bien sûr, que celui de l'i, mais combien certain, tiède même, gemütlich. Avec ça bien sûr, on ne va pas loin sur le chemin de la renommée. Bien plutôt, on va lentement. Oh, combien d'écrivains et combien d'écrivaines
qui sont partis joyeux pour des courses lointaines
à l'intérieur d'un i se sont ensevelis.
Si l'on est désinvolte on peut choisir autre chose : l'aleph, l'oméga, le sampi.
Ah petit troupeau, petit troupeau, que tu nous fais souffrir.
Paralogies
Que s'apprête un peu, loin de, le ce qu'il faut dire alors les échos qu'aux cocoricos d'une longue carte infuse mais dérisoire les limites répondent, répondent. C'est minuit. Certains écrivent, certains rêvent. L'encre coule entre les doigts de la lune en ses carrosses d'algèbres. À côté de, presque, environ, l'étage est annoncé par le carillon flagrant d'une thune. Il est toujours midi. L'heure n'a pas changé depuis le silurien. À peine a-t-elle changé. À peine : juste de quoi ne plus devenir troglodyte.
Le papier blanc laissé sur la table bat des ailes et prend son vol adéquat, idoine, certain.
Raymond Queneau, Texticules, dans Contes et propos, Gallimard, 1981, p. 209-210 et 214.
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30/12/2013
Patrick Beurard-Valdoye, La fugue inachevée
Pour "commémorer" la boucherie de 14-18...
Menoncourt samedi 1er août 1814 — Marcel à ses parents (Morvillars (Terr. de Belfort)
C'est avec une grande peine que je vous écris peut-être ces derniers mots nous sommes en troisième ligne en cantonnement d'alerte à Menoncourt nous sommes partis le vendredi 31 juillet à 8 heures du soir en tenue de guerre pour Menoncourt à 5 kilomètres de la frontière nous avons avec nous 120 cartouches ici le pays est tout sens dessus dessous nous avons fauché blé pommes de terre etc. pour faire des tranchées pour nous retrancher ici les femmes pleurent car elles ont reçu l'ordre de quitter le village j'espère qu'Albert et Amédée sont partis aussi pour faire leur devoir aujourd'hui samedi nous avons entendu l'ordre de mobilisation générale peut-être demain nous partirons au feu un aéroplane est venu ce soir atterrir à Menoncourt faire une reconnaissance je ne pensais guerre que dimanche la situation en viendrait à ce point-ci je termine ma lettre en vous embrassant bien tous
votre fils qui fera son devoir Marcel
Menoncourt lundi 3 août 1814 - Marcel à ses parents
Je crois que nous sommes encore à Menoncourt pour deux jours nous pousserons peut-être plus avant c'est un pays à peu près ruiné les vergers arbres fruitiers sont en grande partie coupés ainsi que les blés pommes de terre etc. nous avons fait des fosses pour nous abriter pour tirer nous coupons aussi les lisières de bois dans le pays on ne peut plus rien trouver aucune boisson tout a été nettoyé en deux jours Je voudrais bien que vous me disiez si Albert et Amédée sont partis et où ils sont dans le village on a tambouriné hier que tout homme valide de 16 à 60 ans devait se rendre à Belfort pour faire des travaux de défense dites-moi si le Papa est parti ainsi que nos chevaux [...]
Un commandant du 35' s'est suicidé il s'était trop rapproché de la frontière avec son bataillon le Général lui a ordonné de reculer il a refusé et s'est suicidé.
Bonjour à tous.
Patrick Beurard-Valdoye, La fugue inachevée, éditions Al Dante/Niok, éditions Léo Scheer, 2004, p. 176 et 179.
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13/07/2013
Luc Bénazet et Benoït Casas, Envoi
Luc Bénazet
11 décembre
[préparatifs]
Poésie &
Poésie & Histoire
revues, Italie
traductions...
Poésie & duo :
je prépare liste et noms
discours-montage
livres-outils
piles des titres
dispositif serré
en vue de
littéral oral
et d'accélération prochaine.
Benoît Casas
19/12/10
calendrier. Considérant sa propre vie, avancer ou reculer
avançant. Sans reculer
au point de mire des regards — à l'arête du nez —, la lumière
[grandit ou bien décline
sans arrêt
Luc Bénazet et Benoït Casas, Envoi, Héros-Limite, 2012, p. 44-45.
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