28/01/2016
David Bosc, Mourir et puis sauter sur son cheval
Je suis une jonchée de feuilles, qui dévale, tourbillonne, s’élève, retombe, s’arrête, s’élance à nouveau, se divise, se mêle à d’autres tas de feuilles, plus jeunes ou plus anciens, accueille un papier gras, une page de journal, un morceau de ficelle, se laisse acculer dans une impasse, rebrousse chemin, explose en gerbe folle sur une bouche d’aération, paie son écot à l’eau de la rigole, espère et trouve les jambes nues d’un enfant, n’est aucune des feuilles pas plus qu’elle n’est le vent, elle est la danse, elle est dansée. Fugace impression de me disperser enfin, mais le corps résiste, le pavé, le mur, et même l’air et l’eau m’opposent leur matérialité, leur permanence obtuse.
David Bosc, Mourir et puis sauter sur son cheval, Verdier, 2016, p. 47.© Photo Frédéric Bosc.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : david bosc, mourir et puis sauter sur son cheval, feuille, mouvement | Facebook |
27/01/2016
Raymond Queneau, Fendre les flots
Bois flottés
Pour, auprès des eaux
stagnantes mais un peu soulevées
tendues par les marées,
ne pas briser les
branches au-dessus des canaux
assimilés il faut découvrir
lucidement quelque gravure
xylographie éventuelle
ordonner les traits du hasard
dominer les coupures
abraser après l’érosion
chercher enfin la forme éprouvée
objet abandonné à lui-même
statuette sans autre raison d’être que d’être
Raymond Queneau, Fendre les flots,
Gallimard, 1969, p. 54.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Queneau Raymond | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : raymond queneau, fendre les flots, bois flottés, forme | Facebook |
26/01/2016
Raymond Queneau, Battre la campagne
L’instruction laïque et obligatoire
Le semeur qui semait se trouve pris d’angoisse
car le soleil se tient bien haut sur l’horizon
de longues heures à sillonner les sillons
avant que cette étoile à l’ouest ne disparaisse
Le semeur qui semait se trouve pris d’angoisse
ll s’arrête et se dit à quoi bon à quoi bon
j’aurais bien mieux fait de me casser le citron
pourquoi donc fallut-il que point ne m’instruisisse
Le semeur qui se meurt se trouve pris d’angoisse
il n’a plus de temps pour avoir de l’instruction
et savoir s’il eut raison de dire à quoi bon
Le semeur qui se meurt redevient philosophe
il reprend son chemin à travers les sillons
en distribuant son grain pour une autre moisson
Raymond Queneau, Battre la campagne, Gallimard,
1968, p. 173.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Queneau Raymond | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : raymond queneau, battre la campagne, l'instruction laïque et obligatoire | Facebook |
25/01/2016
Raymond Queneau, Courir les rues
Changement de régime
Entre haricots verts et pomm’frites
ah qu’il hésite ah qu’il hésite
il préfèrerait du boudin
non ! non ! gronde son médecin
les restaurateurs attristés
par les soucis d’obésité
regrettent les gouttes anciennes
les gouttes du temps de Carême
ou du grand roi Louis le Quatorzième
ou celles des films de Charles Chaplin
tarte à la crème tarte à la crème
Kléber Colombes guide Michelin
dans les romans naturalistes
on voyait des messieurs très tristes
se ravager leur estomac
en consommant chaque jour les plats
d’un bouillon éclairé au gaz
les moralistes actuels
ne veulent pas avoir pitié
de ceux qui s’obstinent à manger
Raymond Queneau, Courir les rues,
Gallimard, 1967, p. 77.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Queneau Raymond | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : raymond queneau, courir les rues, changement de régime, obésité | Facebook |
24/01/2016
Fernando Pessoa, Pour un ''Cancioneiro"
On dit que je feins ou mens
Tout ce que j’écris. Mais non,
Moi, simplement, je sens tout
Avec l’imagination.
Je ne me sers pas du cœur.
Tout ce que je rêve ou éprouve,
Ce qui me manque ou m’accomplit,
est comme une terrasse
Sur autre chose encore.
C’est cette chose qui est belle.
C’est pourquoi j’écris au milieu
De ce qui n’est pas à côté,
Délivré de tous mes émois,
Sérieux de tout ce qui n’est pas.
Sentir ? C’est au lecteur de sentir !
Fernando Pessoa, Pour un ‘’Cancioneiro’’,
traduction Patrick Quillier, dans Œuvres
poétiques, Pléiade / Gallimard, 2001, p. 176.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fernando pessoa, pour un cancioneiro, écrire, imagination, rêve, sensation | Facebook |
21/01/2016
Michel Leiris, À cor et à cri
Que le discours même le plus sensé soit incapable d’imposer silence aux méchants dont les agissements ensanglantent notre planète et, même à froid, vont à l’encontre de la justice la plus élémentaire, cela ne dévalorise-t-il pas toute forme de parole et n’incite-t-il pas tout simplement à se taire, sans que — ressort autre que l’idée trop utopique de moraliser, prêcher ou chapitrer — la réflexion sur ce qu’on peut attendre encore de la parole devienne prétexte à un autre discours. Me borner, donc, aux demandes et réponses qu’exige la vie telle qu’elle est et me garder d’ajouter à ce strict nécessaire sans relief ni visage d’élégants exercices de funambule... Mais dans quel vide intolérable m’abîmerais-je, antennes coupées, si je tenais ma langue à ce point ? Littérairement me taire : je pourrais dire aussi bien « me terrer » voire « m’enterrer ».
Michel Leiris, À cor et à cri, Gallimard, 1988, p. 95.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Leiris Michel | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michel leiris, à cor et à cri, discours, méchant, argument, silence | Facebook |
20/01/2016
Germain Nouveau, Valentines
Amour
Je ne crains pas les coups du sort,
Je ne crains rien, ni les supplices,
Ni la dent du serpent qui mord,
Ni le poison dans les calices,
Ni les voleurs qui fuient le jour,
Ni les sbires ni leurs complices,
Si je suis avec mon Amour.
Je me ris du bras le plus fort,
Je me moque bien des malices,
De la haine en fleur qui se tord,
Plus caressante que les lices ;
Je pourrais faire mes délices
De la guerre au bruit du tambour,
De l’épée aux froids artifices,
Si je suis avec mon Amour.
Haine qui guette et chat qui dort
N’ont point pour moi de maléfices ;
Je regarde en face la mort,
Les malheurs, les maux, les sévices ;
Je braverais, étant sans vices,
Les rois, au milieu de leur cour,
Les chefs, au front de leurs milices,
Si je suis avec mon Amour.
Envoi
Blanche amie aux noirs cheveux lisses,
Nul dieu n’est assez puissant pour
Me dire : « Il faut que tu pâlisses »,
Si je suis avec mon Amour.
Germain Nouveau, Valentines, dans Lautréamont,
Germain Nouveau, Œuvres complètes, Pléiade /
Gallimard, 1970, p. 665.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : germain nouveau, valentines, amour, ballade, crainte | Facebook |
19/01/2016
Jules Supervielle, La Fable du monde
L’enfant et la rivière
De sa rive l’enfance
Nous regarde couler :
« Quelle est cette rivière
Où mes pieds sont mouillés ;
Ces barques agrandies,
Ces reflets dévoilés,
Cette confusion
Où je me reconnais,
Quelle est cette façon
D’être et d’avoir été ?
Et moi qui ne peux pas répondre
Je me fais songe pour passer aux pieds d’une ombre.
Jules Supervielle, La Fable du monde, dans
Œuvres poétiques complètes, Pléiade / Gallimard,
1996, p. 389-390.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jules supervielle, la fable du monde, l'enfant et la rivière, confusion, réponse | Facebook |
17/01/2016
Gaspara Stampa (1523-1554), Poèmes
Pleurez, dames, et toi amour, pleurez ensemble,
car il ne pleure pas celui qui tellement
me blessa, que bientôt mon âme va quitter
ce corps supplicié !
Et si jamais cœur noble et sensible exauça
les ultimes soupirs d’une voix qui s’éteint,
lors, par vos soins, ma sépulture portera
la cause de mes peines.
« Un grand amour trop mal aimé fut le malheur
de ma vie, et j’en suis morte. Ici repose
l’amoureuse la plus fidèle du monde.
Tes prières, passant, pour qu’elle dorme en paix,
victime qui t’enseigne à ne point t’attacher
à cœur cruel toujours insaisissable. »
Piangete, donne, e con voi pianga, Amore,
poi che non piange lui, che m’ha ferita
si, che l’alma farà tosto partita
da questo corpo tormentato fuore.
E, s emai da pictoso e gentil core
l’estrema voce altrui fu essaudita,
dapoi ch’io sarò lorta e sepelita,
scrivete la cagion del mio dolore :
« Per amar molto ed esser poco amata
visse e morì infelice, ed or qui giace
la più fidel amante che sia stata.
Pregale, viator, riposo e pace,
od impara da lei, si mal trattata,
a non seguir un cor ceudo e fugace. »
Gaspara Stampa, Poèmes, traduction Paul Bachmann,
Poésie / Gallimard, 1991, p. 105 et 104.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gaspara stampa, poèmes, amour déçu, peine, amoureuse, inconstance | Facebook |
Raymond Roussel, L'Âme de Victor Hugo
L’Âme de Victor Hugo
Une nuit je rêvai que je voyais Victor Hugo écrivant à sa table de travail, et voici ce que je lus en me penchant par-dessus son épaule :
Mon âme
I
Mon âme est une étrange usine
Où se battent le feu, les eaux...
Dieu sait la fantastique cuisine
Que font ces immenses fourneaux.
C’est une gigantesque mine
Où sonnent des coups de marteaux ;
Au centre un brasier l'illumine
Avec des bords monumentaux ;
Un peuple d’ouvriers grimace
Pour sortir de ce gouffre en feu
Les rimes jaillissant en masse
Des profondeurs de son milieu ;
Avec les reflets sur leur face
Du foyer jaune, rouge et bleu,
Ils saisissent à la surface
Les vers déjà formés un peu ;
Péniblement chacun soulève
Le sien, avec sa pince en fer,
Et, sur le bord du puits, l’achève
En tapant dans un bruit d’enfer.
Quelquefois une flamme brève
Plus ardente, comme un éclair,
Va tellement haut qu’elle crève
La voûte sombre, tout en l’air.
[...]
Raymond Roussel, Nouvelles Impressions
d’Afrique, suivies de L’Âme de Victor Hugo,
Alphonse Lemerre, 1932, p. 241-243.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, MARGINALIA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : raymond roussel, l'âme de victor hugo, usine, métaphore, poésie, octosyllabe, quatrain | Facebook |
15/01/2016
Samuel Beckett, Les années Godot, Lettres II, 1941-1956
Lettre à Georges Duthuit, 11/08/ 1948
L’erreur, la faiblesse tout au moins, c’est peut-être de vouloir savoir de quoi l’on parle. À définir la littérature, à sa satisfaction, même brève, où est le gain, même bref ? De l’armure tout ça, pour un combat exécrable. Je crois savoir ce que vous ressentez, acculé à des jugements, même suggérés, seulement, chaque mois, enfin régulièrement, arrachés de plus en plus difficilement à des critères haïs. C’est impossible. Il faut crier, murmurer, exulter, intensément, en attendant de trouver le langage calme sans doute du non sans plus, ou avec si peu en plus. Il faut, non, il n’y a que ça apparemment, pour certains d’entre nous, que ce petit bruit de hallali insensé, et puis peut-être le débarras d’au moins une bonne partie de ce que nous avons cru avoir de meilleur, ou de plus réel, au prix de quels efforts, et peut-être l’immense simplicité d’une partie au moins du peu redouté que nous sommes et avons.
Samuel Beckett, Les années Godot, Lettres II, 1941-1956, Gallimard, 2015, p. 186.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Beckett Samuel | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : samuel beckett, les années godot, lettres, georges duthuit, littérature, définir, langage, simplicité, suggestion | Facebook |
14/01/2016
Jean-Paul de Dadelsen (1913-1957), Gœthe en Alsace
Je vous aime ...
Je vous aime. C’est une phrase que l’on entend parfois. Au cinéma par exemple.
Mais qu’est-ce que ça veut dire ?
Je dois avouer ne pas être bien certain de ce qu’elle signifie, cette petite phrase de trois mots dont chaque mot me paraît, à la réflexion, assez obscur : le mot « aime », le mot « vous » et même le mot « je ».
Un jeune homme nommé John rencontre une jeune européenne nommée Éva. C’est le printemps et quelque part dans l’Atlantique les millions de harengs serrés en bancs commencent à pondre leurs milliards d’œufs. Éva, depuis qu’elle a découvert le parfum Mistigris, le soutien-gorge Luxur et le dentifrice Magnétic, Éva, comme disent les pages de publicité, Éva a une personnalité folle. C’est-à-dire qu’elle est assez gentille. Ils vont se marier ; le journal local dira que c’était le coup de foudre (love at first sight), ils se sont aimés depuis le premier regard, sans préciser si la foudre est tombée sur la lingerie publicitaire d’Éva ou sur la voiture grand sport de Johnnie.
Peut-être, si les gens étaient véridiques et savaient de quoi ils parlent, pourrait-on entendre — peut-être au début de quelque civilisation encore à venir entendra –t-on en pareille circonstance des conversations sensiblement différentes, ar exemple :
— Je vous aime
— Pardon ?
— Je vous aime
- Excusez-moi ; je ne sais si je vous comprends bien. Exactement, de quoi s’agit-il ? En effet la question se pose. Que vous veut, chère Mademoiselle, ce jeune homme de bonne famille ? « Je vous aime » peut signifier, non seulement « la situation de votre papa me plaît », ou bien « profitons des allocations familiales », mais encore, par exemple : « J’aime votre beauté, elle est flatteuse pour moi-même », ou « elle est un peu sotte, donc, elle m’admirera », ou peut-être « voilà une femme plus forte que moi » ou encore « j’en ai assez de manger au restaurant ».
Jean-Paul de Dadelsen, Gœthe en Alsace, Le temps qu’il fait, 1987, p. 77-78.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-paul de dadelsen, gœthe en alsace, je vous aime, coup de foudre, illusion, ambiguïté | Facebook |
13/01/2016
Philippe Beck, Dans de la nature
61.
À Anne Morin
Que peut bien le :
« Qui suis-je pour demander
du paradis ici ? »
dans de la nature ?
La question a voyagé
et a de la sève isolée.
Question usée est un tesson
dans de l’usure.
Si elle est plaine criante
enrouée,
alors « Qui suis-je pour... ? »
est l’énergie satirique
qui aère les morceaux de bravoure,
les « Par ici ! » archaïques
dont je canalise les rivières
en pleine cité. Comme celui
qui empoignait grammaticalement
un frêle et gracile pipeau
et marchait sur du pétrole enterré.
« Qui suis-je pour... ? »
est roucoulement de tourterelle,
bête interdite et chantant ardemment.
Les tourterelles font et refont des Oh !
« Oh ! » est l’étiquette sur la Dame qui chante.
Philippe Beck, Dans de la nature, Flammarion,
2003, p. 73.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Beck Philippe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 61. À anne morin que peut bien le : « qui suis-je pour demander, alors « qui suis-je pour... ? » est l’énergie satirique qui aère, les « par ici ! » archaïques dont je canalise les rivières en pl, bête interdite et chantant ardemment. les tourterelles font et r, dans de la nature, qui-jequestion, chant | Facebook |
12/01/2016
Apollinaire, Funérailles
Funérailles
Plantez un romarin
Et dansez sur la tombe
Car la morte est bien morte
C’est tard et la nuit tombe
Dors bien dors bien
C’est tard et la nuit tombe
Dansons dansons en rond
La morte a clos ses yeux
Que les dévots prient Dieu
Dors bien dors bien
Que les dévots prient Dieu
Cherchons des prie-dieu
La mort a fait sa ronde
Pour nous plus tard demain
Dors bien dors bien
Pour nous plus tard demain
Plantons un romarin
Et dansons sur la tombe
La mort n’en dira rien
Dors bien dors bien
La mort n’en dira rien
Priez les dévots mornes
Nous dansons sur les tombes
La mort n’en saura rien
Dors bien dors bien
Guillaume Apollinaire, Pèmes divers, dans
Œuvres poétiques, Pléiade / Gallimard,
1965, p. 575.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Apollinaire Guillaume | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guillaume apollinaire, funérailles, danse, mort, prière, romarin | Facebook |
11/01/2016
Danielle Collobert (1940-1978), Survie
balancé au chaos sans armure
survivra ou non résistance aux coups la durée longue de
[vie
je parti l’exploration du gouffre
tâtonnant contre jour
déjà menottes aux mains les stigmates aux poignets
aux pieds les fers les chaînes
la distance d’un pas l’unité de mesure
je raclant mon sol avec ça
traîne le bruit dans l’espace
en premier sur la bande son du prométhée
le vautour dans la gorge
à coups au sang rabattu sans fin vers le silence
au milieu du front le plat désert futur
derrière caché peut-être le corps à s’agglomérer
Danielle Collobert, Survie, Orange Export Ltd, 1978,
repris dans Change, n° 38, octobre 1979, repris dans
Œuvres, I, P.O.L, 2004.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : danielle collobert, survie, chaos, prométhée corps | Facebook |