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22/03/2018

Colette, Lettres à sa fille, 1916-1953

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1944 [Janvier ?], Lundi soir

 

C’est beaucoup de temps sans lettre de toi, chérie. Ce bout de papier n’est que pour te rassurer, te dire que nous allons bien, que nous mangeons assez mal, que je te blâme pourtant de m’avoir fait apporter des choses si précieuses. Un soir un peu maigre, nous avons tordu le cou à une boîte qui contenait un merveilleux morceau de cochon, et nous l’avons mangé chaud avec des pommes de terre. Un mets des dieux, chérie ! Mais pas de gaspillage ! Je cache les autres. Car la vie et la ville sont idiotes. Plus d’eau chaude électrique. Une heure de gaz. Défense de. Interdiction de. Le métro se résorbe mais les barrages prolifèrent. Pas de lumière de 7 h 30 matin à 8 h 30 du soir, etc., etc. Et par là-dessus un froid ! Tourbillons glacés de poussière, vent du nord-est.

 

Colette, Lettres à sa fille, 1916-1953, édition Anne de Jouvenel, Gallimard, 2003, p. 448.

21/03/2018

H(ilda) D(oolittle), Le jardin près de la mer

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         Nuit

 

La nuit a séparé

l’un de l’autre

et recroquevillé les pétales

sur le dos de la tige

et dessous en rangs crépus :

 

dessous, sans défaillir,

dessous, jusqu’à ce que les peaux se fendent,

et sur le dos de la tige, jusqu’à ce que chaque feuille

s’en détache à force de pencher ;

 

dessous, avec sévérité,

dessous, jusqu’à ce que les feuilles

soient recourbées,

jusqu’à ce qu’elles tombent sur le sol,

courbées jusqu’à ce qu’elles soient brisées.

 

Ô nuit,

tu prends les pétales

des roses dans ta main,

mais tu laisses le cœur nu

de la rose

périr sur la branche.

 

H(ilda) D(oolittle), Le jardin près de la mer, traduction

Auxeméry, Orphée/La Différence, 1992, p. 99.

 

20/03/2018

Eugène Savitzkaya, Portrait de famille

 

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   Une guêpe rend visite à mère couchée dans sa chambre. La guêpe est véritablement dorée et striée de suie. Son abdomen n’est séparé du thorax que par un filament mince comme un cheveu et qui semble très près de se rompre. La guêpe dit à ma mère : » Je connais cette chambre, j’y suis déjà venue à trois reprises et j’ai bu dans ton verre de sirop de cassis une bonne quantité de sucre, les parois de cette chambre sont beaucoup trop rapprochées et la vitre, froide et dure comme le haut ciel. » La guêpe dit encore : «  Je suis une femme que tu as rencontrée dans le train qui te conduisait à travers l’Allemagne, c’est moi qui, t’ayant mise en confiance — toi bouleversée et triste — t’ai volé l’enveloppe contenant toutes tes photographes, mon cœur et mes nerfs sont dans mon thorax, et mon abdomen contient le reste, et cette division nette me rend invincible. »

 

Eugène Savitzkaya, Portrait de famille, Bruxelles, Tropismes, 1992, p. 7-8.

 

19/03/2018

Sylvie Durbec, (bien difficile de) Transformer la jalousie en ballon rond

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Bien difficile

 

s’asseoir café des Miroirs

en face de Dino Campana

en espérant que n’entre pas

celle que je n’attends pas

grise mais les yeux ouverts

là où je suis assise

Caffè degli Specchi

à me demander quoi voir

ce soir

à part elle à part moi

dans le noir

bien difficile

et ensuite y aller d’un bon pas

en revenir en repartir

avec un ballon

sous le bras

 

c’est une maison

qui commence

son histoire

ici

 

Sylvie Durbec, (bien difficile de) transformer

la jalousie en ballon rond, Le phare du cousseix,

2018, p. 5.

 

nouvelle publication des éditions

        le phare du cousseix

                                Sylvie Durbec, (bien difficile de) transformer  la jalousie en ballon rond, café, dino campana, reprise

Vous pouvez découvrir & commander ce recueil sur le site des éditions
                               www.lephareducousseix.com
 

 

 

18/03/2018

Cole Swensen, Si riche heure

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Mars 1432

 

Gela si cruellement et les eaux gagnèrent

la Place Maubert puis la Place de Grève     défirent    

                   la moitié du Marché au Pain. Nous fûmes stupéfaits.

Nous connaissions la suite.

et c’était des mains vides

                        Question : là : un mal est fait     et vengé

           plus loin                  

de la Place Saint-Antoine à la Porte Saint-Martin

                                                                         de Noël à Pâques

                                             où rien

de vert ne vint sur les marchés

 

soixante centimètres de glace sur une rivière grosse

 

d’une crue après gel et encore crue les rois parlent entre eux de paix

 

Cole Swensen, Si riche heure, Corti, 2007, p. 45.

 

 

16/03/2018

Reinhard Priessnitz, 44 poèmes

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premier jet d’un projet

 

glisser perturbé dans la chaleur

patiner confus vers l’équarri

flotter affolé vers l’agenouillé

 

le bourdon harcèle l’après-fête

amortir l’achevé contaminé

refouler des douleurs incongrues

 

gicler tremblant sur le rivé

parsemer terrifié le pompé

débouler étonne l’ déjà donné

 

fendre bluffé sur l’ancré

dériver pâle dans l’immergé

asperger frissonnant le méconnu

 

Reinhard Priessnitz, 44 poèmes, traduction

Alain Jadot, préface Christian Prigent,

NOUS, 2015, p. 135.

15/03/2018

Francis Ponge, L'Atelier contemporain

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Braque

 

[…] Lorsqu’on entre dans l’atelier de Braque, c’est vraiment, qu’on m’en croie, comme chez un de ces mécaniciens de village, auxquels bien des automobilistes ont eu à faire, qui s’en sont généralement bien trouvés.

   Plusieurs voitures déjà sont au fond, immobiles pour l’instant encore. L’homme va posément de l’une à l’autre, selon l’urgence et le bon emploi de son temps.

   Il ne s’agit, bien évidemment, ni de virtuosité, ni de délectation. Il ne s’agit que de les remettre en route, avec les moyens du bord, souvent réduits.

   C’est alors qu’un esprit inventif se montre, inventif mais rien moins que maniaque et sans nulle inclination au système. Jamais il ne s’agit que de cas d’espèce. Et tout, bien sûr, commence à chaque fois par une émotion. Mais aussitôt… « J’aime, dit Braque dès 1917, la règle qui corrige l’émotion. »

 

Francis Ponge, L’Atelier contemporain, dans Œuvres complètes, II, Pléiade / Gallimard, 2002, p. 587.

14/03/2018

Ceija Sojka, Nous vivons cachés, Récits d'une Romni à travers le siècle

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[Les camps]

 

J’en rêve tout le temps. Des barbelés, des gémissements, des cris des gens. Des cauchemars. […] Parfois, quand j’ouvre les yeux le matin, mon Dieu, j’ai encore l’odeur des crémations dans le nez. Oui, les rêves, ils viennent tout seuls, sans rien faire, et on ne peut pas les balayer comme ça : j’ai juste rêvé. Je l'ai vraiment vécu, moi, et avec une peur bleue, chaque jour. Chaque jour là-dedans, c’était comme un an, chaque heure durait une éternité. Souvent on se demandait : où sont les gens tout autour ? Est-ce que l’Autriche, elle n’existe plus ? il n’y a plus que nous, et tout le reste, ça n’existe plus ?

Et aussi après 1945, c’était très dur. On a échappé et maintenant tu arrives dans la ville, avec des gens qui ne savent rien de tout ça. Cette personne ne sait même pas ce que je ressens, ce que j’ai enduré, où j’étais. C’est pas facile. Mais il faut quand même se mettre debout, sinon tu dépéris, il faut quand même vivre. Donc il faut faire face à la vérité. Ça a eu lieu. Dieu soit loué, tu as encore tes pieds, tes mains, tu sais penser. Et — on travaille, on vit, on fait ce qu’on a à faire chaque jour ; Auschwitz ou Ravensbrück ou Bergen-Belsen, c’est toujours là.

 

Ceija Stojka, Nous vivons cachés, Récits d’une Romni à travers le siècle, isabelle sauvage, 2018, p. 181.

13/03/2018

Joseph Joubert, Carnets, I

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On aime qu’une fois, disent les chansons : c’est-à-dire qu’il n’y a qu’un seul âge qui soit véritablement propre à l’amour.

 

Entendez-vous ceux qui se taisent ?

 

Par le souvenir, on remonte le temps, par l’oubli on en suit le cours.

 

Nous sommes, dans le monde, ce que sont les mots dans un livre. Chaque génération en est comme une ligne, une phrase.

 

C’est ici le désert. Dans ce silence, tout me parle : et dans votre bruit tout se tait.

 

Joseph Joubert, Carnets, I, Gallimard, 1994, p. 110, 130, 135, 139, 155.

 

 

                           Le retour

 

Joseph Joubert, Carnets, I, aimer, souvenir, oubli, mot, désert

12/03/2018

Jean Daive, 1, 2, de la série non aperçue

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Mort jusqu’au cri poussé

dans la matière

si je regarde

parmi les meubles

du jugement

la tombe externe.

 

Jean Daive, 1, 2, de la série non

aperçue, textes/Flammarion,

1976, p. 63.

11/03/2018

Rose Ausländer, Pays maternel

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Seule

 

Je vis solitaire

Avec le chant

 

Mes questions

Demeurent toutes inachevées

 

Le cel répond

Non

Oui

 

Je ne sais

Où la fin commence

Et le début s’achève

 

Rose Ausländer, Pays maternel, traduction

Edmond Verroul, Héeos-Limite, 2015, p. 18.

10/03/2018

Marina Tsevetaeva, La diable et autres récits

 

                                  marina tsvétaeva,le diable et autres récits,musicienne,ondine,larme

                                      Ma mère et la musique

 

     Lorsqu'au lieu d'Alexandre, le fils désiré, réclamé, presque commandé au destin, vint au monde une fille, moi, rien que moi, ma mère avala un soupir avec dignité et dit : « Du moins, elle sera musicienne ». Et lorsque le premier mot manifestement absurde mais tout à fait distinct que je prononçais avant d'avoir un an fut "gamme", ma mère se contenta de réaffirmer : « je le savais bien » et entreprit aussitôt de m'apprendre la musique, me clamant sans cesse cette gamme : « Do, Moussia, et ça c'est ré, do-ré... ». Ce do-ré se transforma bientôt pour moi en un livre énorme, la moitié de ma propre taille, un "rivre" comme je disais alors, son "rivre" à elle, avec un couvercle sous le mauve duquel l'or perçait avec une force si effroyable, que jusqu'à présent j'en ressens en un coin secret, le coin d'ondine de mon cœur, la chaleur et l'effroi, comme si, ayant fondu, cet or sombre se fut déposé tout au fond de mon cœur et que de là, il s'élevât au moindre contact pour m'inonder tout entière jusqu'au bord des paupières et m'arracher des larmes brûlantes.

 

Marina Tsvétaeva, Le diable et autres récits, traduction et postface de Véronique Lossky, L'âge d'homme, 1979, p. 65.

09/03/2018

Christophe Manon, Au nord du futur

 

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Nous n’étions rien qui

pourrait dire le sol fumant les neiges écarlates l’air

ocreux ni tout à fait serein l’odeur

noire des rêves éparpillés doucement nos mains

doucement frôlaient les hémisphères et aucun temps aucun

nom volontaires aux silences si étroits comme si

les murs les muscles les

syllabes comme si nous avions soudain choisi

quel froid circule dans les vertèbres quelle

lumière soudain branlante où nous marchions plus vieux et pourtant et de vies

si nombreuses éphémères et pourtant pourtant si bien dressés les uns

contre les autres reste

que nous prenions nos rires pour de l’acide de minces filets

d’orgueil à nos squelettes

pendus.

 

Christophe Manon, Au nord du futur, NOUS, 2016, p. 11.

08/03/2018

Paul de Roux, Les intermittences du jour, Carnets 1984-1985

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   Hier, dimanche, la foule tout au long des rivages, se pressant sur les plages. Je ne saisis pas du tout pourquoi elle me blesse à ce point, la nature de la blessure. Je ressens l’ébranlement (je le ressens encore ce matin). Je me suis demandé si à toutes les raisons qui viennent à l’esprit ne s’ajoute pas une explication d’ordre simplement biologique. Dans la nature, la foule est un monstre, un non-sens. Elle n’est pas viable. (Ou alors c’est la nature telle quelle qui n’est plus viable : il y a incompatibilité entre les deux économies. À dire vrai, il n’y a pas d’économie possible de la foule dans la nature — d’où ce malaise « biologique ». La foule ne peut être qu’urbaine.)

 

Paul de Roux, L’es intermittences du jour, Carnets 1984-1985, Le temps qu’il fait, 1989, p. 53.

07/03/2018

Valérie Rouzeau, Quand je me deux

                                      Rouzeau.jpg        

                         Carotte

 

C’est toto biographique l’âne dans essentiellement

Ça dit je parce que c’est ainsi quand tu parles

Que longtemps tut ‘es couché de bonne heure longtemps

Tu es le ténébreux le veuf l’inconsolé

Tu inventas la couleur des voyelles l’i rouge

Et tu penses donc tu es et puis voici ton cœur

 

Plein de larmes il ne faut pas secouer

Tu accuses dans l(Aurore tu as fait un grand rêve

Très haut amour s’il se peut que tu meures

Toi délaissé comme le vent te révèle

Tu devras t’expliquer avec les étoiles oui

Tes oreilles elles sont bien à toi

 

Puis tes chiffres ne sont pas faux

Tu écrivais dans un grenier où la neige…

Demain dès l’aube demain tu partiras

Tu te souviens

Tu entendis sonner les trompettes d’artillerie

Tu commences ton très triste dit

 

Pour avancer sans potager je me tire

La carotte ce sont les vers du nez

C’est toto biographique l’âne dans l’enraciné

Pissent mes feuilles ne pas trop faner

 

Valérie Rouzeau, Quand je me deux, Le temps qu’il fait, 2009, p. 92-93.

 

 

Annonce d'une revue amie

            

                                                      La Revue Nu(e)


 

Fondée par Béatrice Bonhomme et Hervé Bosio en 1994, la revue NU(e) a publié 66 numéros sur la poésie contemporaine. Chaque numéro, véritable dossier de recherche consacré à un poète particulier, comprend un entretien, des textes de création inédits, des articles critiques, des interventions plastiques et une bibliographie exhaustive. La couverture de la revue a été dessinée par la plasticienne Sonia Guerin.

 
La revue NU(e) frappe d’abord par ses couleurs (le bleu de la méditerranée qui s’est ensuite décliné dans les couleurs de l’arc-en-ciel) et par son titre qui marque une volonté d'aller vers la nudité, le dénuement, le dépouillement. Le (e) permet aussi de souligner la présence trop souvent négligée de la femme dans la poésie contemporaine. NU(e) est également l'anagramme de une, à la fois singularité et convergence. C’est ainsi que NU(e) défend une parole de liberté contre toute caste, cénacle, chapelle, obédience, mot d'ordre. Elle refuse de limiter la poésie à des débats dépassés. NU(e) veut lutter contre le sectarisme pour accueillir la différence, les diversités. Elle voudrait faire entendre une polyphonie plutôt qu'une polyphobie, des résultats d'écriture plutôt que des diktats théoriques, des chocs de styles plutôt qu'un ton unanime. NU(e) est parole laissée aux « mineurs » et minoritaires de la poésie, mais inversement occasion, pour les « grands auteurs », de s’exprimer en confiance. La revue a ainsi créé un style qui permet, d’un numéro à l’autre, au fur et à mesure, de faire apparaître un véritable panorama de la poésie contemporaine, et cela sans exclusion, dans un souci de partage. Elle recueille ainsi des approches différentes qu’elle fait se croiser, se rencontrer, se mêler, se tutoyer, passant d’une voix à l’autre, dans une volonté de décloisonnement. Son rôle d’ouverture permet qu’elle soit présente dans une relation à d’autres cultures et à d’autres langues. Elle est donc un lieu de fertilité, un lieu d’expérimentation, un lieu de découverte, et participe à la lisibilité d’auteurs connus ou non.

Accordant également une place importante aux arts plastiques et travaillant en collaboration avec des peintres, des graveurs ou des photographes, NU(e) possède une vocation de découverte et joue le rôle d’un laboratoire. Elle constitue un lieu d’artisanat et d’amitié, au sens où l’entend Blanchot, c’est-à-dire « rapport sans dépendance » où entre « toute la simplicité de la vie ». Cette amitié passe par la « reconnaissance de l’étrangeté commune », selon « le mouvement de l’entente ». S’en remettant à Kenneth White : « Éduquez-vous en nudité. Orphée était nu sur une pierre », NU(e) souhaite marquer sa volonté d’aller vers la nudité, vers l’essentiel, tout en privilégiant une sobriété exigeante.

 

Après 24 ans de publication papier, la revue souhaite passer au numérique pour être encore plus accessible en proposant gratuitement les nouveaux numéros qui paraîtront désormais en ligne. Florence Trocmé, ayant accepté de l’accueillir  sur son site, NU(e) continuera, sous cette nouvelle forme à paraître 3 fois par an.

La liste des anciens numéros, ainsi que tous les sommaires et quelques extraits, resteront accessibles sur le site de la revue NU(e) : revue-nue.org. Les numéros papier toujours disponibles  pourront être commandés sur paypal ou par courrier à l’adresse de la Revue, 29 avenue Primerose, Nice 06000.