27/12/2021
Esther Tellermann, Sous votre nom
Peut-être j’avais
voulu défaire
les écueils dans la
syllabe
voir où tu
dors
Si étions le même
arceau
même mèche
de l’incendie `
à l’un l’autre
l’épuisement de la
lumière ?
Voulus que corps
ait hâte.
Esther Tellermann, Sous votre nom,
Poésie/Flammarion, 2015, p. 163.
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26/12/2021
Esther Tellermann, Carnets à bruire
Quelle première
fois
chaque fois
reprise
irise la ligne
où se reflète
l’incendie ?
Je voulais
resserrer
la déchirure
rouges rouges
seraient les aubes
et les lampes
vous adossé
aux écarts
de la lumière.
Esther Tellermaznn, Carnets à bruire,
La Lettre volée, 2014, p. 67.
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13/03/2021
Philippe Jaccottet, Le dernier livre de Madrigaux
Là-bas, les tentes bleues des montagnes semblent vides.
Qu’ourdissez-vous de sombre sur vos fils,
oiseaux nerveux, mes familières hirondelles ?
Qu’allez-vous, à vous toutes, m’enlever ?
Si ce n’était que la lumière de l’été,
j’attendrais bien ici votre retour.
Si ce n’était que ma vie, emportez-la.
Mais la lumière de ma vie, oiseaux cruels,
laissez-la-moi pour éclairer novembre.
Philippe Jaccottet, Le dernier livre de Madrigaux,
Gallimard, 2021, p. 38.
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03/10/2020
Jacques Roubaud, C
1994
Il n’y a pas de ciel
pas d’yeux
pas de voix
rien qu’une lampe
une lampe dont la lumière
s’écoule
et ne reviendra pas
même si elle semble
posée
en permanence
sur la photographie au mur
sur les livres
en l’absence de ciel
d’yeux
et de voix
Jacques Roubaud, C, NOUS,
2015, p. 308.
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29/09/2020
Philippe Jaccottet, Airs
Monde
Poids des pierres, des pensées.
Songes et montagnes
n’ont pas même balance
Nous habitons encore un autre monde
Peut-être l’intervalle
Fleurs couleur bleue
bouches endormies
sommeil des profondeurs
Vous pervenches en foule
parlant d’absence au passant
Sérénité
L’ombre qui est dans la lumière
pareille à une fumée bleue
Philippe Jaccottet, Airs, dans Œuvres,
Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard,
2014, p. 438.
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22/09/2020
Jacques Réda, La course
Gitans à Montreuil
Dans les vergers à l’abandon qui dominent Montreuil,
Les filles des Gitans fument près des roulottes.
Sous des cordes à linge où sèchent leurs culottes,
Elles rodent avec la grâce du chevreuil.
On n'ose jeter en passant qu’un rapide coup d’œil :
Des vieilles à l’affût suspendent leurs parlottes
(Les hommes sont allés vendre des camelotes
Dans le grand déballage, en bas). Pourquoi ce deuil
Au fond de la lumière alors qu’elle irradie,
Et dans l’air vif ce goût fade de maladie ?
Les filles des Gitans ont beau se déhancher,
L’espace fourbu gît sous ses propres décombres :
Cabanes à lapins, potagers à concombres
Sous la fumée inerte et sans feu d’un pêcher
Rose.
Jacques Réda, La course, Gallimard, 1999, p. 46.
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04/09/2020
Johannes Bobrowski, Ceci vit encore
Et voici que
Et voici que
nous avons les deux mains pleines de lumière —
les strophes de la nuit, les eaux
agitées heurtent de nouveau
la rive, le sentiment âpre, sans regard,
des bêtes dans les roseaux
après l’étreinte — puis
nous voilà debout contre la pente
dehors, contre le ciel
blanc, qui vient
par-dessus la montagne,
froid, cascade-splendeur,
et demeure figé, glace
qui descendait des étoiles.
Sur ta tempe
je veux vivre cette petite
saison, oublieux, sans bruit
laisser errer
mon sang à travers ton cœur.
Johannes Bobrowski, Ce qui vit encore,
traduction de l’allemand Ralph Dutli et
Antoine Jaccottet, L’Alphée, 1987, p. 73.
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14/12/2019
Yves Bonnefoy, Ce qui fut sans lumière
La neige
Elle est venue de plus loin que les routes,
Elle a touchz le pré, l’ocre des fleurs,
De notre main qui était en fumée,
Elle a vaincu le temps apr le silence.
Davantage de lumière ce soir
À cause de la neige.
On dirait que des feuilles brûlent, devant la porte,
Et il y a de l’eau dans le bois qu’on rentre.
Yves Bonnefoy, Ce qui fut sans lumière, Poésie/Gallimard,
2007, p. 67.
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26/08/2019
Cédric Demangeot, Pour personne
Pourquoi certains poètes sombrent dans le noir. Sinon parce qu’ils sont seuls. Seuls, j’entends non pas comme en leur romantique adolescence mais plus simplement, plus crûment aussi, qu’ils sont seuls à voir trembler la lumière qu’il leur est possible et donné de voir. Seuls dans l’exercice de voir la vie se vivre en eux. Et cette indéfectible solitude, forte d’un pouvoir absorbant au sens mathématique et total, fait s’abattre leur état naturel de grâce en son néant conjoint— néant d’autant plus béant que le mouvement de joie a pu, un instant, tenter de s’appuyer sur lui.
Attention quand je parle de lumière. Pas d’illumination, pas d’intervention divine, pas de coup monté. C’est seulement dans le regard que nous posons sur le monde qu’est la lumière. Ce n’est peut-être pas de là qu’elle procède physiquement, mais c’est bien là qu’elle tremble ou non. Sur ce fil de feu, de poussière. Et sa vivacité dépend de moi.
Cédric Demangeot, Pour personne, L’Atelier contemporain, 2019, p. 51.
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23/04/2019
Roger Munier, Le moins du monde
Faire un texte
que la lecture efface
à mesure
La lumière a peut-être désir du jour,
comme la nuit de l’ombre,
le silence du silence…
Est-ce le vide
entre les choses
qui fait qu’elles sont choses,
ou les choses
en étant choses
qui font le vide ?
Maisons à l’aube,
aux volets clos.
Témoins aveugles.
Roger Munier, Le moins du monde,
Gallimard, 1982, p. 15, 16, 17, 19.
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04/04/2019
Arp, L'Ange et la Rose
Comme l’étoile se réjouit
de l’ange d’argent.
L’ange est-il une rose d’argent ?
La rose est-elle une étoile ?
L’étoile est-elle un rêve ?
Le rêve rêve-t-il
de l’ange ou de la rose ?
Comme l’étoile se réjouit
de l’argent du rêve.
La rose d’argent est-elle un ange ?
Comme la rose se réjouit
de la lumière de l’ange.
Les roses d’argent entourent-elles les anges d’argent ?
Comme les étoiles sont parfumées.
Comme la rose se réjouit
du rêve de l’étoile.
Est-ce un rêve ?
Est-ce une lumière ?
Est-ce un ange ?
Arp, L’Ange et la Rose, traduction Maxime Alexandre,
Robert Morel, 1965, p. 18-19.
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24/12/2018
James Sacré, La poésie, comment dire ?
Faire briller la nuit de la langue, est-ce que voilà pas l’essentielle affaire de l’écriture ? Grande quincaillerie qui remue les casseroles de l’académisme ou maladroit boitement dans les mots, peu importe. L’amour qu’on peut manifester pour la langue il faut bien que ça soit par des façons particulières de l’entendre et de l’écrire, avec ou contre les règles (ces anciennes manières plus ou moins réduites au silence des bibliothèques et des discours professoraux). Tous les canons d’amour se défont, au moment de l’amour, en des gestes vaguement ridicules, ou dangereusement splendides, dans l’extase ou le rien. Et bien sûr aucune « bonne manière » d’aimer la langue. Des poètes se perdent dans le noir insignifiant de son silence avec leurs poèmes alambiqués qu’eux seuls voyaient briller dans le temps. D’autres manières d’écrire sont soudain des soleils que tout le monde acclame. Beau soleil, parfois, qui peut n’être que la fusante roue de lumière d’un feu d’artifice. Un soleil pour savoir que nous passons, un peu plus lentement, vers l’énormité sans forme de la nuit.
Des manières d’amour en somme forcément désespérées. Aucune belle région de la langue où nous serions assurés de construire pour l’éternité. Les cathédrales de langage de Chateaubriand s’usent à l’ironie de l’auteur, à celle du temps ; mais elles dressent encore dans notre avenir les manières et les rythmes inquiets de leurs phrases.
James Sacré, Des manières de poète, dans La poésie, comment dire ?, André Dimanche éditeur, 1993, p. 81-82.
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24/10/2018
Pascal Quignard, Les Larmes
(…) Les hommes ôtent leurs différentes peaux le soir.
Puis ils approchent leur corps de la surface lisse de leur miroir. Ils s élavant le visage.
Ils nettoient leurs crocs avec de petits bouts de bois. Ils essuient une à une leurs griffes. Ils frottent la paume de leurs mains en sorte d’écarter la crasse qui y a imprimée le jour. Ils éteignent la lumière.
Nus — phosphorescents encore de la lumière qu’ils viennent d’anéantir — ils avancent dans le couloir puis pénètrent dans le noir de leur chambre.
Ils ouvrent leurs draps et s’y glissent.
Ils sont si pâles.
Ils sont comme des grenouilles sur les ries des rivières qui se détachent sur la mousse vête en écarquillant leurs grands yeux exorbités et étranges. Notre pauvre premier monde de têtards est une eau qui est sombre. Avant de naître et de découvrir le soleil nous avons connu un séjour à peu près complètement obscur où nous vivions sans jamais respirer ainsi que le font les carpes et les crabes les poulpes ou les anguilles.
Pascal Quignard, Les Larmes, Folio / Gallimard, 2018, p. 189-190.
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20/10/2018
Cécile A. Holdban, Toucher terre
Autour d’elle
Des images se retournent dans l’ombre
Si simple la nuit assise au fond du corps
d’être pur langage, vérité d’une origine
inscrite.
Sortilège du son
on achève l’orage dans le creux d’une oreille
des chevaux mortellement blessés se brisent
entraînent dans les tranchées l’infini galop des mots
la lumière creuse plus profond dans ce rêve
en perles sur la peau d’une rosée nocturne
le temps chaviré du poème parmi
les interstices de la foudre.
Mais balbutiant il faudra tout reprendre
de la gorge au souffle, resserrer le jour et sa robe trop courte
comme un vêtement d’amour
sur les restes en pièces de la nuit.
Quelque chose tombait dans le silence. Un son de mon corps. Mon dernier mot fut je mais je parlais de l’aube lumineuse.(Alejandra Pizarnik)
Cécile A. Holdban, Toucher terre, Arfuyen, 2018, p. 44.
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09/03/2018
Christophe Manon, Au nord du futur
Nous n’étions rien qui
pourrait dire le sol fumant les neiges écarlates l’air
ocreux ni tout à fait serein l’odeur
noire des rêves éparpillés doucement nos mains
doucement frôlaient les hémisphères et aucun temps aucun
nom volontaires aux silences si étroits comme si
les murs les muscles les
syllabes comme si nous avions soudain choisi
quel froid circule dans les vertèbres quelle
lumière soudain branlante où nous marchions plus vieux et pourtant et de vies
si nombreuses éphémères et pourtant pourtant si bien dressés les uns
contre les autres reste
que nous prenions nos rires pour de l’acide de minces filets
d’orgueil à nos squelettes
pendus.
Christophe Manon, Au nord du futur, NOUS, 2016, p. 11.
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