18/03/2019
Philippe Jaccottet, Tout n'est pas dit
Tout n’est pas dit
Croire que « tout a été dit » et que « l’on vient trop tard » est le fait d’un esprit sans force ou que le monde ne surprend plus assez. Peu de choses, au contraire, ont été dites comme il le fallait, car la secrète vérité du monde est fuyante et l’on peut ne jamais cesser de la poursuivre, l’approcher quelquefois, souvent de nouveau s’en éloigner. C’est pourquoi il ne peut y avoir de répit à nos questions, d’arrêt dans nos recherches, c’est pourquoi nous ne devrions jamais connaître la mort intérieure, celle qui survient quand nous croyons, à tort, avoir épuisé toute possibilité de surprise. Si nous cédons à ce désabusement, bien proche du désespoir, c’est que nous ne savons plus voir ni le monde en dehors de nous, ni celui que nous contenons, c’est que nous sommes inférieurs à notre tâche, et nous n’avons pas le droit d’en faire le reproche à la « Vie », au « Destin » ou à rien, qu’à nous seuls.
Philippe Jaccottet, Tout n’est pas dit, Le temps qu’il fait, 1994, p. 128.
Une publication en mars
LES CARNETS
D’EUCHARIS
[Édition 2019]
CLAUDE DOURGUIN
Tristan Hordé
Myrto Gondicas
Pierre Chappuis
Bernhild Boie
Jean-Baptiste Para
Claude Chambard
Éryck de Rubercy
Marco Martella
Didier Pinaud
Richard Blin
Michaël Bishop
Nathalie Riera
CLARICE LISPECTOR – OLIVIER ROLIN – EDUARDO ARROYO
[Sur les routes du monde – Vol. II]
Nicolas Boldych Michel Gerbal Catherine Zittoun André Ughetto Rita R. Florit Christophe Lamiot Enos Jean-Paul Bota Gilles Debarle Thierry Dubois Laurent Enet Benoît Sudreau Victoria Gerontasiou Yin Ling Gianni D’Elia Sarah Kirsch…
Format : 16 cm x 24 cm | 216 pages (dont un Cahier visuel de 8 pages)
| France : 26 € (frais de port compris)
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16/03/2019
James Joyce, Brouillons d'un baiser
Mamalujo
Et ils étaient là eux aussi à écouter de toutes leurs forces les solans & les sycomores et les grives et tous les oiseaux tous les quatre à écouter ils étaient les grands quatre les quatre maîtres vagues d’Erin tous à écouter quatre il y avait le vieux Matt Gregory et à côté du vieux Matt il y avait le vieux Marcus Lyons les quatre vagues et souventes fois ils avaient coutume de dire les grâces ensemble ici-même maintenant nous voilà les quatre le vieux Matt Gregory et le vieux Marcus Lyons et le vieux Luke Tarpey nous quatre et pour sûr Dieu merci il n’y a plus que nous et pour sûr maintenant tu ne t’en iras plus vieux Johnny MacDougall nous tous les quatre il n’y a plus que nous et maintenant fais passer le poisson pour l’amour du Christ amen la façon dont ils disaient les grâces avant le poisson pour auld lang syne(1)
1.Le bon vieux temps en écossais. C’est le titre d’un poème de Robert Burns et d’une chanson qu’on entonne traditionnellement à l’occasion d’un adieu.
James Joyce, Brouillons d’un baiser, Premiers pas vers Finnegans Wake, traduction Marie Darrieusecq, Gallimard, 2014, p. 103.
15/03/2019
Raymond Queneau, Courir les rues
Mon beau Paris
Maisons lépreuses
maisons cholériques
maisons empestées
bâtisses fienteuses
immeubles atteints de rougeole
de scarlatine
de vérole
pavillons chlorotiques
pavillons scrofuleux
pavillons rachitiques
hôtels particuliers
constipés
baraques
taudis
Raymond Queneau, Courir les rues, dans
Œuvres complètes, I, Pléiade/Gallimard,
1989, p. 412.
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14/03/2019
Jules Supervielle, Le Corps magique
Qui parle ?
L’univers fait un faible bruit
Est-ce bien lui à mon oreille ?
Pourquoi si faible si c’est lui
Alors qu’il n’a pas son pareil
Pour être lui, même la nuit.
Que deviendra ce faible bruit
A ses seules forces réduit
Sans une oreille qui le pense,
Sans une main qui le conduise,
Où le bruit est encore le bruit.
Où le silence à son silence
Très secrètement se fiance.
Jules Supervielle, Le Corps magique, dans
Œuvres poétiques complètes, éditions
Michel Collot, Pléiade/Gallimard, 1996, p. 601.
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13/03/2019
Jean-Paul Michel, "Défends-toi, Beauté violente"
« Ordonne ce frais désordre de choses données »
Ordonne ce frais désordre de choses données
Prends
Toute beauté donnée, toutes choses à l’excès données
Prends.
Qu’on sente dans ton pas gémir la terre tendre
Marche. Cadence. Rythme. Chasse.
Tout le parfait réel. Tout le Mal. Prends.
Plonge en lui, Nageur ô crache
Avec le sel l’exultante
Joie.
Jean-Paul Michel, « Défends-toi, Beauté violente ! »,
Poésie/Gallimard, 2919, p. 247.
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12/03/2019
Jean-Louis Giovannoni, L'air cicatrise vite
On se tient dans le visage de l’autre. En dehors, c’est le vide.
Ces visages qui affleurent à la surface et qui ne vivent qu’un instant.
Effacer est une nécessité.
Accélère, ne reste pas sur place — la meute n’est pas loin !
Toutes ces formes qui glissent en nous pour avoir un visage.
Jean-Louis Giovannoni, L’air cicatrise vite, éditions Unes, 2019, p. 11, 15, 16, 21, 26.
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11/03/2019
Henri Heine, 40 poèmes
La Lorelei
Je ne sais ce que veut dire
La tristesse que je ressens,
Une légende des anciens temps
De mon esprit ne peut sortir.
L’air est frais, l’ombre grandit
Le Rhin coule doucement,
Le sommet des monts resplendir
Au soleil couchant.
La vierge la plus belle
Là-haut s’est posée,
Sa parure d’or étincelle
Elle peigne ses cheveux dorés.
Un peigne d’or lui sert
Et pendant ce temps elle chante ;
Ô merveille de cet air,
Ô mélodie puissante !
Le batelier dans son esquif
Est ému jusqu’à la douleur,
Il ne voit plus le récif,
Il regarde vers les hauteurs.
Enfin les flots ont englouti
Le batelier et son bateau,
Et cela, par son chant si beau
C’est la Lorelei qui le fit.
Henri Heine, 40 poèmes, traduction Diane de Vogüe,
Debresse, 1956, p. 55 et 57.
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Henri Heine, 40 poèmes
La Lorelei
Je ne sais ce que veut dire
La tristesse que je ressens,
Une légende des anciens temps
De mon esprit ne peut sortir.
L’air est frais, l’ombre grandit
Le Rhin coule doucement,
Le sommet des monts resplendir
Au soleil couchant.
La vierge la plus belle
Là-haut s’est posée,
Sa parure d’or étincelle
Elle peigne ses cheveux dorés.
Un peigne d’or lui sert
Et pendant ce temps elle chante ;
Ô merveille de cet air,
Ô mélodie puissante !
Le batelier dans son esquif
Est ému jusqu’à la douleur,
Il ne voit plus le récif,
Il regarde vers les hauteurs.
Enfin les flots ont englouti
Le batelier et son bateau,
Et cela, par son chant si beau
C’est la Lorelei qui le fit.
Henri Heine, 40 poèmes, traduction Diane de Vogüe,
Debresse, 1956, p. 55 et 57.
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10/03/2019
Antoine Emaz, Cuisine
La « poésie » va prendre en charge ce que le récit classique ne peut porter, peut-être parce qu'il ne s'agit pas de fiction. Quelques chose l, comme si travailler dans le vrai interdisait le récit, parce qu'un poète n'est pas un autobiographe narcissique ou exhibitionniste et qu'il sait que la poésie est et n'est pas un confessionnal. Donc on va avec le récit, on le détourne, on le déboîte, le défait, on le déstructure, le pousse aux limites... plus rien n'est reconnaissable mais tout est dit. Ce cœur noir moteur, c'est lui qui pulse. En poésie, quand on sait lire, l'urgence est palpable, la nécessité de dire évidente. Cela peut être plus ou moins masqué par le dispositif d'écriture qui est à la fois un mode d'exposition et un mode de défense, mais c'est bien un cœur ouvert, au bout. L'enfant qui pleurede Reverdy.
En poésie, ce qui est dit est l'affleurement lisible de ce qui est tu : la vague / les profondeurs de la mer.
Dans tout ce que je note au jour le jour, cette piétaille de lignes, je ne vois pas bien en quoi je suis poète. Je note seulement ce que d'ordinaire on ne retient pas, espérant que tel ou tel détail sera révélateur, qu'il portera un peu plus que seulement lui-même.
Antoine Emaz, Cuisine, publie.net, p. 31, 35, 50.
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09/03/2019
Antoine Emaz, Sauf
L'élan, l'impact
Au commencement, une poignée de terre ou une tête, serrée, trop.
Fuir haut.
Gong bleu. N'importe où l'impact. Un long frémissement à peine, immense, léger.
Une tête contre le ciel s'étoile. Miettes.
Pluie de sable sec.
Fin, en bas. De force rassemblée, une tête à nouveau serrée, un peu.
***
Dans la peur coincé, puis comme un souffle au point où on avait peur sans mots.
Brusquement, tout le corps emporté par le souffle monte, libre, vite, heurte le ciel, trop près.
La force brise net contre : un bruit d'os. Ciel à peine étoilé.
Longtemps la poussière retombe.
En bas, on est au bout, à la fin, avec quelques mots et la peur qui revient.
***
La peur trop : l'élan vers l'air, plus haut.
Bleu massif et sans bords.
Tant que l'élan nous plaque au ciel, on tient contre, sans appui.
Au bout de la force, une retombée lente, vidé.
Les mots, la tête à la fin, une poignée de sable sec.
***
être à l'étroit
trop brusque
l'appel
gong bleu choc
la tête en miettes
en bas
on refait figure
compact
à nouveau
on se tient comme on peut
Antoine Emaz, L'élan, l'impact, dans Sauf,
Tarabuste, 2011, p. 53-54.
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08/03/2019
Antoine Emaz, Peau
Vert, I (31.09.05)
on marche dans le jardin
il y a peu à dire
seulement voir la lumière
sur la haie de fusains
un reste de pluie brille
sur les feuilles de lierre
rien ne bouge
sauf le corps tout entier
une odeur d'eau
la terre acide
les feuilles les aiguilles de pin
silence
sauf les oiseaux
marche lente
le corps se remplit du jardin
sans pensée ni mémoire
accord tacite
avec un bout de terre
rien de plus
ça ne dure pas
cette sorte de temps
on est rejoint
par l'emploi de l'heure
l'à faire
le corps se replie
simple support de tête
à nouveau les mots
l'utile
on rentre
on écrit
ce qui s'est passé
il ne s'est rien passé
Antoine Emaz, Peau, encres de Djamel Meskache,
éditions Tarabuste, 2008, p. 25-28.
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04/03/2019
Carol Snow, Artiste et modèle
Le dos de la blouse blanche
Le dos de la blouse blanche boutonnée de boutons blancs
— ou le dos de la femme
emplissant la blouse blanche —
en sorte que les boutons tiraient sur les boutonnières
et ça faisait des plis
je suis restée assise derrière ça pendant toute la lecture.
J’avais essayé de décrire comment il semblait facile
d’être dehors — feuilles et herbe
attentive à verdir en guise de compagnie : combien ma difficulté
à vivre seule était exacerbée par les objets
que j’avais choisis ou qu’on m’avait donné, par la nécessité
permanente d’avoir à les reconnaître
— ce que, à l’image de la poupée
passant tendrement toute la nuit avec moi,
je savais n’être qu’illusion.
Carol Snow, Artiste et modèle, traduction de l’anglais (États-Unis) Maïtreyi et Nicolas Pesquès, éditions Unes, 2019, p. 45.
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03/03/2019
Arno Schmidt, Scènes de la vie d'un faune
[...]Septembre 1944
Un chat s'approche, hésitant, m'adresse un regard timide, accompagné d'un petit rire gêné : je lui coup une de mes trois rondelles de saucisson que je pose sur un bout de papier gras : — — Une vieille femme, perchée sur un vélo, zigzague dangereusement au milieu des gosses qui sortent de l'école.
Un chœur d'enfants ânonnait avec conviction : « Brossons nos quenottes. Zoignons nos menottes. Avant de faire dodo. Pensons saque soir au Fuhrère. Il nous donne notre lolo. Il nous protèze comme un père ! » Je n'ai pas pu me retenir d'aller jusqu'à la haie pour regarder ces mioches de cinq ans , en barboteuses, bib and tucker, sagement assis sur leurs bancs de bois. La sœur (qui venait de leur faire répéter cette monstrueuse litanie) était en train de distribuer des bonbons vitreux ; ils les mettaient alors dans un petit pot de fer blanc et touillaient avec application, jouant à les <faire cuire> : le régime capable d'inventer des choses pareilles ?! Mais je me suis alors rappelé que la première chanson qu'on m'avait apprise à l'école maternelle était : « L'Empereur est un brave homme (sic): il habite à Berlin. » C'est sans doute ainsi qu'on enseigne partout les premiers rudiments d'<instruction civique> ! : Tous des salauds ! Oser pomper ce purin fétide dans des réceptacles innocents et sans défense ! Ou l'absurde rengaine du « Sang du Christ »! : Jusqu'à l'âge de dix-sept ou dix-huit ans, les enfants devraient grandit dans une parfaite neutralité philosophique. Après, quelques cours sérieux suffiraient ! On pourrait alors leur conter alternativement l'histoire à dormir debout de la « Sainte Trinité » et la vaste blague du « brave homme de Berlin » et, à titre de comparaison, leur enseigner la filosofie et es sciences naturelle. Alors, les obscurantistes pourraient s'inscrire au chômage !
Arno Schmidt, Scènes de la vie d'un faune, traduit de l'allemand par Jean-Claude Hémery avec la collaboration de Martine Vallette, postface de J.-C. Hémery, 1991 [1962, Julliard], Christian Bourgois, p. 157-158.
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02/03/2019
John Clare, Poèmes et proses de la folie
Solitude
Il y a dans la solitude un charme heureux
Un sentiment dont le monde ne connaît rien
Un vert délice que chérit l’esprit blessé
Une fois retranché de ce monde brutal
Dont la joie criminelle est de railler le bien
Sa verte geôle lui procure du plaisir
La renarde ne le fuit pas les oiseaux rient
Il vie en Crusoë de son champ dont les chênes
Abritent vert foncé son méridien loisir
John Clare, Poèmes et proses de la folie, traduction
Pierre Leyris, Mercure de France, 1969, p. 91.
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01/03/2019
Thomas Kling, Échange longue distance
Actéon 5
petites images trouvées en marge, les idoles piteuses
communiqués de l’Institution idyllique, images radio
d’un relief romain défoncé, description violente,
ici en terrain isolé la nature a échafaudé une œuvre
d’art, grotte en trompe-l’œil du bain de Diane, d’où
transparence jusqu’au fond, la source résonne, trame
où D., nue, surprise par A., n’hésite pas longtemps, prononce peu
de mots : quelque chose comme tabou brisé, pores, mort ignominieuse,
qui entraînent rapidement perte de parole, cellule de cerf,
sa tête s’alourdit de cornes, un écho de brames, aucun répit avec ce
projecteur de cerf qui ronronne jusqu’au bout, puis déchirements. l’antiquité
en accéléré, une scène de chasse, comme des troubles du sommeil la lumière.
Thomas Kling, Échange longue distance, traduction Aurélien Galateau, éditions Unes, 2016, np.
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