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12/03/2020

Durs Grünbein, Presque un chant

  Les journaux

 

J’ai mangé des cendres au petit déjeuner, cette poussière

Noire qui tombe des journaux, des colonnes dont l’encre est encore fraîche,

Où un putsch ne fait pas de taches et où le typhon reste immobile, noir sur blanc,

Et j’avais l’impression qu’elles se pourléchaient les babines, les Parques       bavardes,

 

Quand, à la page Sports, commença la guerre sur laquelle se fondent les cours de la Bourse.

  J’ai mangé des cendres au petit déjeuner. Mon régime quotidien.

Et de Clio, comme toujours, pas un mot... Soudain, en les repliant,

Le bruissement des pages passa sur ma peau comme un frisson.

 

Durs Grünbein, Presque un chant, traduction Jean-Yves Masson et Fedora Wesseler, 2019, p. 78.

L'Atelier contemporain :

 « L’Atelier contemporain » s’attache depuis son premier livre – paru à l’automne 2013 – à publier des livres d’art et de littérature, des ouvrages qui associent artistes et écrivains. Des pratiques et des voix dans ce qu’elles ont de plus radical. L’ambition est d’explorer, et de perpétuer en quelque sorte, la voie ouverte par Albert Skira, découvrir les « sentiers de la création » au travers de six collections réunies au sein de la Maison : essais sur l’art, écrits d’artistes, entretiens & correspondances, monographies, « Beautés » et littérature. Il s’agit d’interroger le contemporain et donner à voir, à lire, ce qui est en jeu dans l’espace de création qu’est l’atelier. Penser la phrase de Francis Ponge : « Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Que faisons-nous ? Que se passe-t-il en somme dans l’atelier contemporain ? »
 
Structure associative sans ressources autres que la passion et quelques ambitions intellectuelles, les difficultés économiques sont évidement au rendez-vous : ouvrages forcément onéreux à réaliser (reproductions, traductions, impression de qualité) — et notre société qui concède aux ouvrages de l’esprit une place de plus en plus maigre…

À côté du travail de fond des libraires tout au long de l’année, sans lesquels une maison comme L’Atelier contemporain ne pourrait tout simplement pas vivre, nous proposons donc une formule d’abonnement afin de nous permettre de répondre en partie à nos besoins en trésorerie, équilibrer nos budgets.

Merci à vous de manifester votre soutien et votre intérêt pour notre projet éditorial, de contribuer à la pérennité et au développement de « L’Atelier contemporain » !
 
Nous vous proposons de choisir 6 ouvrages, parmi ceux à paraître et/ou ceux déjà parus.
Ces livres vous seront expédiés en un envoi unique.
Si vous êtes parisien ou si vous venez aux salons auxquels nous participons (Marché de la poésie, en juin, place Saint-Sulpice ; Festival de l’Histoire de l’art de Fontainebleau, en juin ; salon L’Autre livre, en novembre, Espace des Blancs-Manteaux), nous vous les remettrons en main propre.
 
Deux possibilités de réglement :
— en 10 mensualités de 10 € en vous inscrivant ici (paiement par CB) : https://www.helloasso.com/associations/l-atelier-contempo... ;
— si vous désirez payer par chèque(s) (à envoyer à notre adresse) : 4 mensualités de 25 € ou 2 mensualités de 50 € (ou le règlement complet, en une fois, de 100 €).
 
Avec tous mes remerciements pour votre attention,
 
François-Marie Deyrolle
 
L’ATELIER CONTEMPORAIN
4, boulevard de Nancy / F-67000 Strasbourg

 

06/12/2019

Durs Grünbein, Presque un chant

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                 Mantegna, peut-être

 

Un jour, dans le demi-sommeil... entre recevoir et donner,

J’ai vu mes mains, leur peau rouge, jaunâtre,

Comme celles d’un autre, d’un cadavre à la morgue.

Au repas, elles tenaient couteau et fourchette, ces outils

De cannibale qui faisaient oublier la chasse

Et le vacarme de l’égorgement.

                                               Vide comme l’assiette,

Une paume était devant moi, relief charnu

Du dernier singe à qui tout était devenu accessible

Dans un monde de primates. Mantegna, peut-être,

Aurait pu les peindre dans toute leur cruauté, sans les enjoliver,

Ces callosités crasseuses.

                                         Qu’était l’avenir

Résultant des lignes de la main, bonheur ou malheur,

Comparé à la terreur des pores par lesquels perlait la sueur

Comme la légende de la compréhension silencieuse sur un front.

 

Durs Grünbein, Presque un chant, traduction de l’allemand Jean-Yves

Massson et Fedora Wesseler, Gallimard, 2019, p. 90.