19/05/2020
Antoine Emaz, Personne
Passants
loin sur le sable au matin
des passants qui semblaient
ressembler
passants
rien d’autre
mais assez pour lever zn tête
après leur passage
d’autres passés
que l’on poursuit de l’œil dedans
alors que l’espace est devant
vide
à nouveau
on ne sait comment faire
pour bloque rles deux yeux
dedans dehors
malgré tout l’effort
ça passe
trop poreux
revenir seulement aux vagues
leur calme lancinant fatigué
à marée base
leur énergie qui se replie
tirer dedans comme un drap
lourd d’écume et de sel
du ciel un peu aussi
et dans les plis
les êtres
passés
pas plus
des ombres
des bouts
[...]
Antoine Emaz, Personne, éditions
Unes, 2020, p. 21-23.
© Photo Tristan Hordé, 2012
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25/11/2019
Sabine Huynh, Parler peau
Dehors l’horizon les grues rongent les corps vulnérables exposés derrière les vitres de tours éphémères dedans l’amour que nous faisons serine l’impossible qu’il prenne son temps nous oublie nous laisse nous parler ce langage d’amants tout en mosaïque d’égarements
Sabine Huynh, Parler peau, Æncrages & Co, novembre 2019, np
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06/02/2018
Victor Hugo, Choses vues
16 février 1859
Que de choses j’ai encore à faire ! Dépêchons-nous ! Je ne serai jamais prêt. Il faut que je meure cependant.
22 septembre 1862
Parler, écrire, imprimer, publier : cercles concentriques de l’intelligence. Ondes sonores de la pensée.
25 décembre 1862
C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches.
C’est au-dedans de soi qu’il faut regarder le dehors.
Victor Hugo, Choses vues, Quarto/Gallimard, 2002, p. 891, 923, 939, 943.
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06/08/2015
André du Bouchet, Je suis sur les traces d'un autre
[...]
où le pas est encore plus rare qu’ici, on aura ramassé dans le désert un biface déposé là, où il sera tombé, depuis quelques milliers d’années : la face tournée au dehors, polie, lustrée par le vent. l’autre, au sol, qu’elle n’a pas quitté, mat et sans lustre. puis, venue jusqu’à la table du paléontologue qui alors en aura parlé.
rien alors, dans ces carnets, qui n’ai été noté dehors, alors que du dehors très peu en soit rendu compte. mais dehors, comme sortir de soi d’abord sans projet — dehors sans projet, comme retour au silence antérieur lorsque j’avance, qui sera porteur de la parole inattendue qui sera, par éclats, trouvée sans être attendue. je porte jusqu’au dehors la pensée qui sans le dehors ne serait pas apparue — de moi comme en provenance de ce dehors — éclats de voix, éclats de vent — par instants, et avec l’instant qui ne se soutient pas je ne suis pas le seul à ne pas la soutenir, et je la retrouve, elle l’insoutenable, à travers l’épaisseur silencieuse ou bruyante de tout ce qui lui est réfractaire, et qui engourdit jusqu’à l’absence.
André du Bouchet, "Je suis sur les traces d’un autre", dans Europe, "André du Bouchet", n°986-987, juin-juillet 2011, p. 73.
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20/05/2013
Jean-Louis Giovannoni, L'invention de l'espace
L'invention de l'espace
I
Tout est un intérieur
et reste à jamais
cet intérieur.
Car rien ne doit sortir
de sa forme.
Rien ne doit se tenir
en dehors.
Rien ne doit se franchir
prendre corps
dans le corps des autres.
Aucun corps
n'a droit au corps
de ce qu'il n'est pas.
Toute chose
doit se tenir en elle-même.
Toute chose
doit se contenir
ne prendre que sa forme
n'occuper que sa place
n'être pas plus qu'elle ne doit.
Surtout
ne pas se détacher
du lieu
imparti à son corps.
Tout doit rester
ce qu'il est
et ne rien ajouter.
En ce monde
tout est déjà trop prononcé.
Tout est bien trop présent
trop au bord
toujours trop poussé
par l'envie de sortir
de prendre la place d'un autre
de gagner en volume
en surface
en espace
en oxygène.
Tout est un intérieur
et doit le rester.
Imaginez
l'espace
avec des choses
ne tenant pas leur intérieur.
Des choses
ne sachant plus
où se tient leur seuil
le côté à ne pas franchir.
Des choses toujours trop pleines
ne pouvant se soustraire.
Des choses
qui menacent de fracturer
de contaminer
l'espace.
Des choses
qui soumettraient
qui réduiraient les autres
par excès de corps
de présence.
Imaginez
tout ce monde
enfermé dans son corps
rêvant de proliférer
d'envahir
de pousser ailleurs
de se multiplier
dans le corps des autres
d'être au présent
de toute chose.
Tout ce monde
impatient
qui n'en peut plus
de se contenir
d'avoir son dedans
dans le dedans de l'espace
sans jamais pouvoir se dégager
sans jamais trouver la faille
le moindre passage
pour s'écouler ailleurs
s'infiltrer dans l'autre
et le faire sien.
[...]
Jean-Louis Giovannoni, Ce lieu que les pierres regardent, suivi de Variations, Pas japonais, L'invention de l'espace, préface de Gisèle Berkman, Lettres vives, 2009, p. 147-154.
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