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30/07/2024

Pierre Reverdy, Autres écrits sur l'art et la poésie

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Réponse à l’enquête « Pourquoi écrivez-vous ? »

 

Vous m’écrivez pour me demander

J’écris pour vous répondre

On écrit aussi pour faire parler de soi, en s’occupant bien plus de faire écrire sur ses œuvres que de savoir si elles sont dignes qu’on en parle ; mais ceci est une tendance ! Pour le moment je ne lis que les affiches électorales. Eh bien, on écrit aussi pour que les autres en prennent de la graine !!! Vous comprenez ce qu’il y a !

                                            Littératuren°10, décembre 1919.

 

Pierre Reverdy, Autres écrits sur l'art et la poésie, dans Œuvres complètes, I, Flammarion, 2010, p. 562.

29/07/2024

Pierre Reverdy, Self defence

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On a combattu et injurié tous les grands artistes, d’où les petits qu’on maltraite concluent qu’ils sont grands.

 

Beaucoup de camaraderies artistiques ne sont que des contrats de publicité.

 

La vulgarisation d’une œuvre n’est que la conséquence et le développement du germe vulgaire qu’elle portait à son début.

 

Il y a à chaque époque quelques créateurs originaux, le reste c’est le remplissage et ce remplissage la part entière — pour un moment.

 

Si un auteur ne veut qu’étaler ses dons, il est libre, les tempéraments doués fourmillent. Mais l’art veut une discipline. Il n’y a pas d’art sans discipline, il n’y a pas d’art personnel sans discipline personnelle.

 

Pierre Reverdy, Self defence, dans Œuvres complètes, I, Flammarion, 2020, p. 528, 528, 529, 530, 530.

28/07/2024

Pierre Reverdy, Cravates de chanvre

 

                       pierre reverdy, cravates de chanvre, lumière

                        Adieu

 

         La lueur plus loin que la tête

                                            Le saut du cœur

Sur la pente où l’air roule sa voix

les rayons de la roue

le soleil dans l’ornière

 

Au carrefour

près du talus

               une prière

Quelques mots que l’on n’entend pas

              Plus près du ciel

      Et sur ses pas

                           le dernier carré de lumière

 

Pierre Reverdy, Cravates de chanvre, dans Œuvres complètes, I,

Flammarion, 2010, p. 342.

27/07/2024

Pierre Reverdy, La guitare endormie

 

pierre reverdy, la guitare endormie, ombre

L’amour dans la boutique

 

Tout ce qui se passe glisse dans la pénombre

    C’est ce carré au sol qui marque la limite et le nombre

C’est un peu de soleil

                           Chaud derrière la tête

          La poussière ou les bulles de l’air montent sur la cloison

Sortent sur le palier

L’amour se vend dans la boutique

Mais cette forme d’ombre ou blanche ou encore qui ne    bouge pas sur la tenture

 

                                            À l’angle plus étroit

                                                 Qui est-ce

 

Pierre Reverdy, La guitare endormie, dans Œuvres  complètes, I,

Flammarion, 2010, p. 270.

26/07/2024

Pierre Reverdy, Les Ardoises du toit

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                  Soleil

 

Quelqu’un vient de partir

Dans la chambre

                  Il reste un soupir

La vie déserte

 

    La rue

             Et la fenêtre ouverte

Un rayon de soleil

Sur la pelouse verte

 

Pierre Reverdy, Les Ardoises du toit,

dans Œuvres complètes tome I,

Flammarion, 2010, p. 193.

22/07/2024

Pierre Reverdy, Self defence

 

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Ceux qui dans l’at ne voient qu’une imitation tiennent pour facile toute œuvre faite.

 

Qu’est-ce qu’une œuvre dont on peut détacher l’idée ou l’anecdote qui, isolées, ne sont rien, et dont après cette extraction il ne reste rien ?

 

La seule idée intéressante en art est celle, tout esthétique, qui soutient l’ensemble de l’œuvre.

 

Des résultats nouveaux en art frappent plus et sont plus féconds que des sentiments ou des idées pour si forts qu’ils soient.

 

La réalité ne motive pas l’œuvre d’art. On part de la vie pour atteindre ne autre réalité.

 

Pierre Reverdy, Self defence, dans Œuvres complètes, I, Flammarion, 2020, p. 521, 522, 524, 526, 527.

15/09/2022

Pierre Reverdy, Cravates de chanvre

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                  Adieu

 

    La lueur plus loin que la tête

                               Le saut du cœur

 

Sur la pente où l’air roule sa voix

                  les rayons de la roue

                  le soleil dans l’ornière

 

                  Au carrefour

près du talus

                 une prière

Quelques mots que l’on n’entend pas

                  Plus près du ciel

     Et sur ses pas

        le dernier carré de lumière

 

Pierre Reverdy, Cravates de chanvre, dans Œuvres

complètes, I, Flammarion, 2010, p. 342.

23/06/2022

Pierre Reverdy, Le Livre de mon bord

                           pierre reverdy, le livre de lmon bord, plume, désespoir, masque,

La plume — peut-être le meilleur instrument de maquillage que l’homme ait réussi à fabriquer.

 

Il y a un degré de tension dans le désespoir au-delà duquel on se sent libéré de tous les soucis qui nous ont conduit au désespoir — mais c’est un déclic qu’on ne peut pas soi-même provoquer. Nous ne connaissons pas les limites de notre résistance qui n’est jamais constante.

 

Le plus solide et le plus durable trait d’union entre les êtres, c’est la barrière.

 

Ils portent presque tous un masque, c’est vrai — mais ce qu’il y a de plus terrible, c’est que derrière ce masque, il n’y a rien.

 

Pierre Reverdy, Le Livre de mon bord, dans Œuvres complètes, 2, Flammarion, 2010, p. 660, 661, 665, 666.

22/06/2022

Pierre Reverdy, Flaques de verre

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Remords

 

   Je vois le petit apprenti sur l’appareil des rigoles isolées. Je tends la main aux flaques d’eau sous l’éternelle glace perpendiculaire, trouble et où s’évaporent le col, la fissure du treillage chevelu.

   Parure de sel, figure de rayons, passage secret des moules de ma main sur les fleurs décapitées, à peine filtrées au réveil, des neiges perdues dans les cimetières, dans les saisons nues, dans le corps ruisselant des larmes du crime muselé. La valse amère.

 

Pierre Reverdy, Flaques de verre, dsans Œuvres complètes, 2, Flammarion, 2010, p. 497.

21/06/2022

Pierre Reverdy, Bois vert

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Cran d’arrêt

 

Je n’espère rien du néant

Je ne garde rien de la fête

et je n’oublie pas le présent

Auquel il me faut tenir tête

 

Décroche la lumière à fond

Sur cette poitrine rebelle

Plus dure que la pierre où s’épanche son sang

 

Je ne mens que d’un œil

Une trappe qui s’ouvre

Sur tous les espoirs interdits

Un recul plus farouche devant l’autre qui s’ouvre

Une gorge plus sourde

Au coude de la nuit

Et puis le temps et puis la lampe

Un pas qui compte sans retour

Dans la rue plus de vie plus d’aile

Sur la route plus d’avenir

De mon cœur jusqu’au fond du monde l’étouffante

   épaisseur d’un mur.

 

Pierre Reverdy, Bois vert, dans Œuvres complètes, 2,

Flammarion, 2010, p. 445.

20/06/2022

Pierre Reverdy, Pierres blanches

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Mais rien

 

Un même pan ferme le coin

Où l’ai libre s’étend

Autour la corde glisse

Et l’eau monte

La pluie descend

Un homme tombe de fatigue

C’est le même qui tend la main

On saute le mur du jardin

Le ciel est plus bas

Le jour baisse

La route court

Et le vent cesse

On pourrait croire qu’il est arrivé quelque chose

Mais rien

 

Pierre Reverdy, Pierres blanches, dans

Œuvres complètes, 2, Flammarion, 2010, p. 255.

15/07/2021

Pierre Reverdy, En vrac

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Bien connaître le passé pour pouvoir feindre de prévoir l’avenir, les meilleurs politiques n’ont jamais réussi un tour plus habile que celui-là.

 

On s’use à vivre et sans pouvoir comprendre quoi que ce soit à ce que peut signifier la vie. On en use autant qu’elle nous use et c’est tout.

 

Il ne faut pas écrire pour son temps mais dans son temps. Et celui qui ne se mêle que de son temps meurt plus vite que son temps. C’est qu’il n’écrit au fond que pour lui-même — un peu trop peu.

 

Vivre et vieillir pour qui et quoi que ce soit, êtres et choses, sont synonymes. Mais on ne se rend bien compte de cette évidence que lorsque le phénomène vieillir a déjà très nettement pris le pas sur celui qu’on appelle vivre.

 

Pierre Reverdy, En vrac, dans Œuvres complètes, Flammarion, 2010, p. 856, 858, 851, 863.

14/07/2021

Pierre Reverdy, En vrac

 

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N’ayant besoin de rien, comme il serait facile de n’avoir besoin de personne.

 

Le véritable opium du peuple, c’est le spectacle, sous toutes ses formes, qui l’a toujours été. Et il y a un très important côté de spectacle dans les manifestations politiques, aussi bien que dans celles des religions.

 

Ne rien préférer, aimer et haïr alternativement tout avec la même intensité, il n’est peut-être pas de meilleure ou de pire condition de malheur.

 

La place des vieux, la place des jeunes, on se la dispute avec tant d’âpreté et, depuis que le monde est monde, tout cela tient finalement dans quelques cimetières qui sont, après tout, assez petits.

 

Pierre Reverdy, En vrac, dans Œuvres complètes, Flammarion, 2010, p. 834, 835, 846, 848.

15/03/2021

Pierre Reverdy, Le gant de crin

Pierre Reverdy, Le gant de crin, vanité, gloire, misère

Un artiste qui espère la gloire posthume est comme un homme qui dirait : « Quand je n’y serai plus, je ferai ceci, je ferai cela. »

 

La misère est une espèce de reflet sinistre de l’enfer. Mais la pauvreté nous accable du poids de l’esclavage.

 

Il est aussi ridicule de prendre, quand on est vieux, des airs de jeune que, quand on est jeune, des airs de vieux.

 

Quand on voit quels sont les hommes qui comptent, on a tout de suite envie de ne jamais compter. Mais quand on voit aussi ceux qui ne comptent pas et qui se croient dignes de compter...

 

Pierre Reverdy, Le gant de crin, Plon, 1927, p. 74, 76, 85, 88.

05/01/2021

Pierre Reverdy, Sable mouvant

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                                   Clair mystère 

Par-dessus le portique où s’enroule la treille et ou chante l’oiseau — À la fenêtre où se dressent une tête et un buste immobile. Derrière le mur qui penche et l’air qui s’éblouit, un œil à demi clos qui attend le signal.

Pierre Reverdy, Sable mouvant, Poésie / Gallimard, 2003, p. 62.