22/12/2020
Danielle Collobert, Dire II
Corps là
noué
noué aux mots
l’étranglement du souffle
perte du sol
pendu
balancement à l’intérieur des mots – trouées –
vide
approche de la folie
peur continuelle de la fuite verticale
les mots en spirale fuyante – aspirée
sans prise
sans arrêt
tremblement
un cri
peur continuelle – absence de mots – gouffre
ouvert – descente – descente
mains accrochées au visage
toucher
corps là
résistance –
entendre encore le souffle – quelquepart
à l’instant savoir – souffle là
à l’écoute du bruit
affolement
tendu pour entendre
tendu pour résister
jusqu’à la limite – l’immobilité
sursaut
cassure
encore sombrer – descendre – ou aspiré au loin
– ou fatigue – désespoir
Danielle Collobert, Dire II, dans Œuvres I, P. O. L., 2004, p. 256-257.
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28/07/2020
Laurent Albarracin, L'herbier lunatique
Retirant la pierre de l’eau
elle luit vivante et morte
On aurait donc arraché
un cœur à ses battements.
Mouille un caillou
assombris-le
et son éclat sèche aussitôt
comme un peu de brume lui venant
Souffle sur la pierre
pour attendrir
ton souffle
En soupesant une pierre
sentir la pierre faire bloc avec son poids
faire pierre avec la pierre
On ne sépare pas le chacun
du tout
Tout l’opaque de la pierre
est le durcissement d’une clarté
tout le dur de la pierre
l’éclat de sa durée
Laurent Albarracin, L’herbier lunatique
Rougerie, 2020, p. 8, 9, 10, 11.
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19/09/2019
Michel Deguy, Poèmes de la Presqu'île
Le vent
Du vent sur le village ! Stères des maisons qui branlent, et les flaques gelées des vitres craquent sous ses pas puissants. Tout est ébauche de fable, et moi de rares poèmes. Sous les yeux dessertis tourne le documentaire.
Comment être à ce nouveau monde
Arbre et tête de sang et vent et trous et vides et murmures, l’oreille bat sous le vent du sang.
Tête à tête bruissant, deux arbres hagards aux ocelles de vide, grands ossuaires aux mille orbites. Un souffle fait bruire les rets de dendrites.
Un souffle... il attise une parole.
Le vent, là-bas !
Un vent qui tente la racine, inventant à l’aveugle l’espace !
Passant le souffle érige les oreilles
Il plante au sol l’arbre de ma stupeur et va se ruer sous l’essieu de la nuit.
Michel Deguy, Poèmes de la Presqu’île, Gallimard, 1961, p. 18.
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08/06/2019
Bernard Noël, La Chute des temps
Sur un pli du temps
toujours le plus
aura manqué
la langue a touché
trop d’ombre
trop compté les lettres du nom
une fois
cent fois
mille fois
les mains
ont rebâti
la statue
des larmes
mot
tombé
d’un mot
l’être
a roussi
dans le souffle
quelle fin
la bouche
troue
un visage
l’ombre
gouverne
sous les yeux
une pierre
pousse
entre nous
(…)
Bernard Noël, dans
La Chute des temps,
Poésie/Gallimard,
1993, p. 225-226.
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26/01/2019
Bernard Vargaftig, Le monde le monde
L’horizon touche les herbes
À nouveau pas un nuage
Et tant de souffle qu’espère
L’écho dans l’emportement
Tout ressemblait à la suite
Amandiers hâte calanque
Après l’avoir oubliée
L’inclinaison et l’été
Comme étonné sous ton cri
Et pitié inavouable
Et parfum embrasé où
Aucun mot n’est épargné
L’éblouissement sans ombre
Ne se referme jamais
Bernard Vargaftig, Le monde le monde,
André Dimanche, 1994, p. 65.
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20/10/2018
Cécile A. Holdban, Toucher terre
Autour d’elle
Des images se retournent dans l’ombre
Si simple la nuit assise au fond du corps
d’être pur langage, vérité d’une origine
inscrite.
Sortilège du son
on achève l’orage dans le creux d’une oreille
des chevaux mortellement blessés se brisent
entraînent dans les tranchées l’infini galop des mots
la lumière creuse plus profond dans ce rêve
en perles sur la peau d’une rosée nocturne
le temps chaviré du poème parmi
les interstices de la foudre.
Mais balbutiant il faudra tout reprendre
de la gorge au souffle, resserrer le jour et sa robe trop courte
comme un vêtement d’amour
sur les restes en pièces de la nuit.
Quelque chose tombait dans le silence. Un son de mon corps. Mon dernier mot fut je mais je parlais de l’aube lumineuse.(Alejandra Pizarnik)
Cécile A. Holdban, Toucher terre, Arfuyen, 2018, p. 44.
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20/07/2018
Emmanuel Godo, Je n'ai jamais voyagé
Les fables de nourrice racontaient votre amour
Quand il n’existait déjà plus
Tu ne sais pas si tu peux marcher encore
Mais tu veux vivre
Les écluses de la nuit sont rouvertes
Ton ventre se soulève doucement
La tristesse est là qui bat la mesure du temps
Le cœur déraciné de son feu
Lève sa dernière lumière à la face de la mort
Tu n’es pas comme l’animal au bord de la vie
Tu es l’animal au bord de la vie
Un souffle te fait regarder de tous tes yeux
Des yeux à la surface des mots
Est-ce le même souffle qui te fera disparaître
Qui t’emportera dans la calme immobilité des choses ?
Le nombre de fois où un paysage
Sans te prévenir t’a pris par la main
Mais quel visage a ta joie ?
Emmanuel Godo, Je n’ai jamais voyagé, Gallimard,
2018, p. 70.
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06/07/2018
Raluca Maria Hanea, Retirements
Sous la pluie les hommes continuèrent à grimper,puis se figèrent.
Leurs dos de pierre ont fini d’achever la montagne.
Leur apparition restera notre plus longue étreinte.
paroi osseuse plantée devant le vide
l’obturateur en marge
extrémités prises
la pellicule s’est refermée
le souffle en couronne
sans excès d’espace
nervures cordes rentrées
les doigts rêches, le matin les yeux encore un peu salés
pour que toute la poussière leur revienne, toute la cendre
Raluca Maria Hanea, Retirements, éditions Unes, 2018, p. 63.
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07/02/2018
Leslie Harrison, Pantoum pour une marche dans les bois
PANTOUM POUR UNE MARCHE DANS LES BOIS
La rime désigne toute répétition accompagnée de différence :
auditive, grammaticale, rhétorique…
Allen Grossman
Tout rime. Prenez une forêt peuplée d’arbres –
des milliers (tous différents, et pourtant confondus
en une foule), des rochers innombrables, une multitude d’abeilles
dans le chicot d’un arbre mort. Je marche, je passe devant eux
par milliers. Toutes les différences sont confondues :
si nombreuses, si semblables. Elles riment, et pourtant
tiennent ensemble, chicot planté dans le sens, le laissant
se répéter, sans fin. Les différences, si minimes,
sont semblables. Le rythme de la marche
suit les contours de la montée, et le cœur
répète – sans fin. Timide, son petit
bégaiement se fixe sur un rythme calme. Ce motif
suit la cadence de la montée. Le cœur
s’accorde avec le souffle. Les yeux refusent toute différence,
se fixent, en rythme avec le calme bégaiement
des pierres sous le pied. Et les kilomètres défilent,
s’accordent avec le corps pour refuser toutes les distances.
Je me souviens de la foule innombrable et désordonnée
des pierres sous le pied. Et les kilomètres défilent
comme des géants – autoréférentiels, dénués de sens.
Je me souviens de la foule désordonnée des bois,
De la lourde grâce de cet autre mystérieux,
Comme de géants, autoréférentiels, tout leur sens
Caché dans la différence. Nous traversons la vie
dans la foule, innombrables, un millier d’abeilles
se cachant, cachées. Dans nos vies,
rien ne rime. Et nous confondons les arbres
entre eux, avec du bois, avec des bancs.
Leslie Harrison, “Pantoum for a Walk in the Woods”,
in Poetry, juin 2002, traduit de l’anglais (USA) par
Guillaume Condello, dans Catastrophes, n° 2, novembre 2017.
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07/09/2017
Esther Tellermann, Carnets à bruire
Ne m’effleurait
votre
incise théâtre
de pierres linges
recouvraient
les paumes
j’induisais votre
souffle
à l’intérieur
de mes sillons
je
respire
vos aurores de
papier comme si
l’ombre
prenait
feu
Esthet Tellermann, Carnets
à bruire, La lettre volée, 2014, p. 74.
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07/04/2017
David Constantine, Gare d'Oxford, 15 février 1997
Gare d’Oxford, 15 février 1997
Et puis tout s’arrêta, tout devint très calme.
Je regardais plein nord un petit nuage dans le ciel bleu
Un ciel bleu vers lequel s’éloignaient les rails.
Un bleu, si sereinement bleu, qu’il me troubla
Comme quelque chose d’inimaginable que je pouvais voir
Et pour lequel je n’avais pas de mot, je regardai le nuage
Un seul nuage blanc dans ce ciel sereinement vide
Léger comme une plume au bord des lèvres
Pour tester le souffle, ultime preuve de la vie.
David Constantine, dans Rehauts, n° 39, mars 2017, p. 9.
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09/08/2016
Fabienne Courtade, Papiers retrouvés
Papiers retrouvés
j’en mets dans les poches
dans une enveloppe
je garde les mots
recopiés
sur un carnet
des morceaux
Été 2013
*
cette année est faite d’eau
et de feu
le trottoir est rouge sang
dehors
on entend le bruit des papiers
les bouteilles roulent sous les pieds
ici
les objets
sont précipités
en continu
sur le mur
c’est un film que l’on passe
et repasse
car il manque toujours le début
*
Pendant que nous allions
d’une chambre à l’autre
une goutte de pluie au bout des doigts
c’est le même pays que nous pleurons
Il n’entend pas leur respiration
le souffle
la sueur
les « jouets d’enfant »
Racle le sol
de ses doigts
dès le début
premier jour
âcre
Fabienne Courtade, Papiers retrouvés,
le phare du cousseix, 2016, p. 4-6.
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12/05/2014
Pascal Quignard, Petits traités, I
Petits traités, volume 1 à 8
VIIIe traité, Le Livre des lumières
Au cours de la lecture, on dit qu'une voix silencieuse, parfois, se fait jour. À l'évidence, elle ne naît pas du livre. Mais le corps ne l'articule pas. Elle épouse le rythme de la syntaxe et sans qu'elle fasse sonner les mots elle mobilise pourtant la gorge, le souffle, les lèvres. Il semble que tout le corps, pourtant immobile, s'est mis à suivre une certaine cadence, qu'il ne gouverne pas, mais que le livre lui impose : la langue résonne en silence dans les marques syntaxiques, le corps halète un peu et c'est un très lointain fredon.
On le dit.
« On le dit », cela veut dire : ce sont des choses qu'on entend. Mais personne n'entend les livres.
S'il est vrai que la ponctuation d'un livre est plus affaire de syntaxe que de souffle, il reste que parfois pareille voix fictive parcourt effectivement le corps. Même, quand le livre est très beau, elle fait penser que la lecture n'est pas si loin de l'audition, ni le silence du livre tout à fait éloigné d'une « musique extrême », — encore qu'il faille affirmer aussitôt qu'elle est imperceptible.
Aussi entend-on parler de la ponctuation comme d'une sorte de cadence ou, plutôt, de « mouvement d'exécution ». Ce n'est pas un air, une mélodie : mais un rythme, qui est abstrait, qui chiffre la promptitude ou la lenteur, solfiant les groupes des mots, décidant des valeurs Ainsi on estime certaines ponctuations pour agitées, ou contenues, pour graves, ou inquiètes, pour fougueuses, ou sèches, pour domptées, ou tumultueuses, — et il est vrai que le rejet même de la ponctuation, loin qu'il affranchisse d'une règle, consent un sacrifice qu'il n'appelait peut-être pas de ses vœux s'il a pour premier effet des restrictions supplémentaires, des privations exorbitantes. Vouant à vivre de peu, il accroît la misère.
[...]
Pascal Quignard, Petits traités, I, Maeght, 1990, p. 159-161.
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05/04/2013
Luc Benazet, La Vie des noms
Le titre La vie des noms s'inscrit dans une tradition ancienne, puisque La vie des mots étudiée dans leur signification d'Arsène Darmesteter a été publié en 1877, et La vie du langage d'Albert Dauzat en 1911. Mais si le livre de Benazet traite bien du statut des noms, de leur relation aux objets qu'ils désignent, il n'est pas pour autant un ouvrage de linguistique. Des propositions sont avancées sous la forme d'assertions, type "les noms sont...", qu'il serait malaisé — ou, en apparence, trop aisé — à réfuter quand elles jouent avec les catégories grammaticales classiques, comme dans « attenter est un nom d'action ». C'est bien que le livre déborde les réflexions sur la langue : il mêle des références diverses, souvent fort éloignées de l'étude des noms et pas toujours repérables : c'est un poème de prose dans son écriture comme dans son organisation.
Après un liminaire qui pose la nécessité du lecteur (« une phrase ne serait pas sans adresse, quand même le langage ne serait pas un ») et le refus de la propriété (dont celle des noms), trois parties titrées. La première, "La respiration véritable", — « la respiration qui entre et sort par les noms et par la phrase n'est pas la respiration véritable, mais le rythme véritable du souffle est en relation avec elle » —, peut être entendue comme approche de ce qu'est la lecture à voix haute. Par la mention d'une « ancestrale force » s'opère le passage à "Piété filiale", piété analogue au son d'une cloche parce qu'elle est fabrique d'échos. S'engagent dans ce second ensemble des développements sur la filiation ("On a / son père comme il a lui- / même son père, lequel etc., aussi / s'épuise le savoir qu'on a / des pères") et sur le nom de personne, et d'abord sur celui de "Benazet" : il est écrit verticalement sans ses voyelles ("b n z t"), « les fentes du monde » étant formées par l'espace entre les consonnes — nom image comme en hébreu, et ce n'est pas hasard si le nom "Hamor", qui renvoie à un épisode tragique de la Genèse, se trouve dans la première partie. Le troisième sous-titre, "Une marche de la réalité", apparaît dans un poème de cette seconde partie.
L'écriture mime ici et là celle du discours philosophique — distante, "objective", avec une dominante des assertions —, mais elle est sans cesse rompue par la reprise de propositions, la présence d'anaphores, et les séquences s'achèvent parfois par : [...], comme si le texte était inachevable, à poursuivre ailleurs de même qu'il avait été commencé dans un autre livre : des esquisses sur les noms sont dans Envoi, échanges de courriels datés de 2010 avec Benoît Casas(1). En outre, la mention des références indique au lecteur à la fois qu'il n'a pas affaire à un traité et que la question des noms ne s'arrête pas aux noms "communs". Si l'on reconnaît Rousseau dans "Jean-Jacques R." (avant un extrait de son "Essai sur l'origines des langues") ou l'allusion à Rimbaud avec « l'horrible travail », il est moins aisé de savoir qui est Lucie B. dont est cité le syntagme « voix de l'estomac » ou situer l'auteur du « Requiem for what's name (guitare, M. R.) », titre d'un disque de Marc Ribot, dans lequel un des morceaux s'intitule "Motherless Child" — mais ce sont les pères qui sont le motif du poème de Luc Benazet. Plus transparent est le renvoi au traité de sexualité taoïste, en rapport avec l'association de la Lune et du Soleil (avec majuscule) qui « suivent le souffle originel » — présence de l'Orient (déjà dans Nécrit, 2011), comme de la psychanalyse et de l'opposition dedans/dehors.
Le nom n'existe que prononcé, ce qui lui donne vie, force, sinon il n'est que « pensée de corde éteinte ». Dans les poèmes où les lettres ne sont pas à leur place dans les mots, ou viennent les parasiter, les mots prennent un aspect inhabituel, même s'ils sont toujours reconnaissables (comme le nom de "Benazet" sans consonne) : « Mobn fildrougr et bleu / Pas mamobn on zurz cimporis / Ni ma moto nonplusd / De rien / De rrien ». Il est remarquable que cette transformation soit aussi dans un poème titré "LET-RRES DE / L'AMOUR " où est inscrite l'impossibilité d'une rencontre : « nous ne nous rencontrerons jamais, ni dand la vie, ni dans la mort », et où "dand", "dans" deviennent "dent", puis « Dla, galand / Gland, dans ».
On comprend que ce livre complexe, qui roule des matériaux variés, exige un engagement dans la lecture ; il éloigne le lecteur du lyrisme à fleur de peau qui sévit toujours, et ce n'est pas la moindre de ses qualités ; avec lui, « On ne voudrait pas ne pas être en dehors des choses ».
Luc Benazet, La vie des noms, "collection Antiphilosophique", éditions NOUS, 2013, 88 p., 14 €.
Cette note de lecture a d'abord été publiée sur le site Sitaudis.
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