03/06/2022
Étienne Faure, Vol en V
Dans la ville à pied, sans repli, sans arrière-
pays, origines, hors cela, il emprunte
au début sous le nom de rue, pont, grève,
un parcours exempté de fil, anonyme,
laissant l’impasse pour attraper les quais
via les passages, les cours et circuler
inclus dans la foule en mue sans arrêt
selon l’heure ou l’allure à laquelle on passe,
interdit soudain sous un nom, un bouquet
au mur scellé (mortellement blessé)
après la chute de naguère, le bruit d’un corps au sol,
épitaphe à jamais cernée du crible des impacts
encore au mur, semblant redire : passant,
nous allons mourir et personne n’en saura rien,
ou bien continuer de parler aux vivants
plus avant, ceux qui vont te survivre
— et le flâneur éclairé sous un angle
un instant exposé au soleil du soir,
médite à découvert avant de traverser vite,
regagner l’ombre.
passage à découvert
Étienne Faure, Vol en V, Gallimard, 2022, p. 121.
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17/11/2021
Shakespeare, Sonnets
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Soit je vivrai pour composer ton épitaphe,
Soit tu me survivras, moi pourrissant en terre,
La mort ne peut d’ici dérober ta mémoire,
Même quand je serai tout entier oublié
Ton nom grâce à mes vers aura vie immortelle,
Si je dois (disparu) mourir au monde entier,
La terre m’offrira une tombe ordinaire
Quand tu reposeras au fond des yeux des hommes.
Tu auras pour tombeau mes doux et nobles vers
Que reliront sans fin des yeux encore à naître
Et des langues à venir rediront ton être,
Quand tout ce qui respire au monde expireras ;
Toi tu vivras toujours (ma plume a cette force)
Où le souffle prend souffle, dans la bouche des hommes.
Shakespeare, Sonnets et autres poèmes, traduction Jean-Michel Déprats, Pléiade/Gallimard, 2021, p. 409.
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03/07/2019
Étienne Faure, Scrutations
Dans la ville à pied, sans repli, sans arrière
pays, origines, hors cela, il emprunte
sous le nom de rue, pont, grève
un parcours exempté de fil, anonyme,
laissant l’impasse pour attraper les quais
via les passages, les cours et circuler
inclus dans la foule en mue sans arrêt
selon l’heure ou l’allure à laquelle on passe,
interdit soudain sous un nom, un bouquet
au mur scellé (mortellement blessé)
après la chute de naguère, le bruit d’un corps au sol,
épitaphe à jamais cernée du crible des impacts
encore aux murs, semblant dire : passant,
nous allons mourir, et personne n’en saura rien,
ou bien de continuer de parler aux vivants
plus avant, ceux qui vont te survivre
— et le flâneur éclairé sous un angle
un instant exposé au soleil du soir,
médite à découvert avant de traverser vite,
regagner l’ombre.
passage à découvert
Étienne Faure, Scrutations, dans la revue de
belles-lettres, 2019, I, p. 110.
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