08/11/2020
Jean-Baptiste Para, Une semaine dans la vie de Mona Grembo
Septième jour
À quel point jamais on ne dira
à quel point de silence et de nord
l’hiver ému m’a restaurée de gelée blanche
N’ayant plus de peau je choisissais la pierre
et la vérité qui fait de nous
des plongeurs essoufflés
une bouchée d’aurore
Mais un mot à la fin celui qu’on voit s’affaisser
et l’autre qui se redresse et crie
ont grignoté les mêmes baies de chaque côté du ciel
entrevu le mystère qui est comme les orvets
sur les roches, par toute approche empêché
de prendre racine
Mais le soleil, pour eux, ne revient plus
Le monde est dur comme des crics d’étal
épais comme des saules au bord de leur naissance
Il donne à note chant
sa profondeur de granges
Jean-Baptiste Para, Une semaine dans la vie de Mona Grembo,
Arcane 17, 1985, p. 21.
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07/11/2020
Bartolo Cattafi, Mars et ses idées
En silence
Un quelque chose qui donne de l’ombre
surgit et pique
une plante à épines
une encre livide
avec de nombreux bras
ici et maintenant avec nos bras
en silence
tête baissée
Bartolo Cattafi, Mars et ses ides, traduction
Philippe Di Meo, Héros-Limite, 2014, p. 95.
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06/11/2020
Pierre Chappuis, Battre le briquet
Ressassement
Que le monde — partie vaut pour le tout — ailleurs sans autre à notre conscience, que, par la grâce du poème, nulle distance (pourtant non abolie) n’intervienne entre les mots et les choses en vertu d’une adhésion unissant de même le poème à son lecteur, cela peut-il n'être qu’un vœu ? Toujours la même ombre au tableau attire le regard au point de l’engloutir. Par-delà, en fin de compte, le poème trouve à vibrer, et le monde, les choses avec lui.
Expérience première, vitale, renouvelée à chaque fois ; éblouissante ? Peut-être simple ressassement d’une idée reçue — c’est dans l’air ! — des plus banales aujourd’hui.
Pierre Chappuis, Battre le briquet, éditions corti, 2018, p. 56.
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05/11/2020
Tristan Tzara, Phases
ce fut un jour sans peur ni haine
ma vie
le cœur ailé
vivant de restes de semaines
au ciel mêlé
vivant — vivions-nous sans nul doute
ni peine —
au gré du vent
c’était le temps où l’on redoute
le mal présent
pourquoi au cours de ces tortures
errantes
lier tes pas
alors que tombe l’ombre mûre
autour de toi
Tristan Tzara, Phases, Poésie 49/Seghers,
1949, p.19.
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04/11/2020
Julien Bosc, Le coucou chante contre mon cœur
Ce livre posthume de Julien Bosc, en chantier probablement avant 2016, reprend plusieurs des motifs qui lui étaient chers et l’on y entend pleinement sa voix singulière. Le lien avec les livres précédents est au moins une fois explicite ; ainsi un fragment où il est dit qu’un homme sait lire « le verso des miroirs » a donné le titre Le verso des miroirs (2018). Mais ce ne sont pas seulement des mots semblables qui construisent des voies de passage entre les livres, plus profondément est constante la présence de ce qui le hantait : la mémoire des camps d’extermination, de la violence qui ne cesse. Le rêve mais non l’illusion d’une société harmonieuse, le lien profond avec la nature, l’amour d’une femme n’ont pu, dans une solitude choisie, contrebalancer la certitude d’un désastre général.
Julien Bosc connaissait « les souffrances d’un nom / Élu pour le pire » : juif de naissance, il portait toujours les images des camps ; motif principal d’un autre livre, De la poussière sur vos cils (2015), elles sont encore très présentes ici. La destruction n’est pas seulement celle des corps, c’est aussi celle des noms, de toute identité quand il ne subsiste que des cendres et que tout de ce qui a été vécu disparaît à jamais. Ce qui est insupportable à Julien Bosc, c’est à la fois l’extrême difficulté d’imaginer ce que fut le chemin de ceux qui ne revinrent pas des camps et le fait que la voix des survivants n’a pas été (ne pouvait pas être ?) entendue :
Les silhouettes rescapées s’extirpèrent du brouillard
Parler épousa l’innommable
Tout fut tenté pour dire
Rien ou peu fut entendu
Puis tout fut tu
Une femme morte dans un des camps apparaît dans un rêve, invisible mais active, nue sur un cheval et aux longs cheveux comme lady Godiva. Le narrateur accueille cette figure étrange, « mirage » qui « diffus(e) les songes » et qui lui apprend chaque nuit un dizain, le chargeant avant de rejoindre les morts de « poursuivre son chant ». L’écriture naît donc de la nécessité de conserver la mémoire du vécu, de dénoncer « les démences » des tyrans, de défendre ceux qui fuient « la misère et la guerre ». C’est pourquoi dans les dernières pages du livre le sort des migrants, qui meurent en traversant la Méditerranée, est rapproché de celui des Juifs exterminés par le nazisme : Julien Bosc emploie une comparaison sans ambiguïté : « Ils montent mille à bord / Quand le rafiot n’en supporte pas vingt / tels jadis les wagons / qui roulaient vers l’hourban. » ; "hourban", « ruine » en hébreu, est un terme théologique, relatif à la destruction du premier et du second Temple, abandonné aujourd’hui au profit de "Shoah". Le lien est poursuivi : la destruction des Juifs s’est déroulée sans que personne n’en dise rien et la mort des migrants laisse muet, « Qui peut entendre leurs cris ? Personne ou si peu », d’où le constat qui clôt le livre : tout le monde est coupable de garder le silence devant la tragédie, et notamment l’écrivain « À qui la langue manque : / Pour dénoncer ».
Cette impossibilité d’exprimer à propos du réel ce qui devrait l’être parcourt tout le livre ; dès son début, à côté de la forêt, de la mer, donc de la nature telle qu’elle est imaginée par le narrateur, il n’y a rien, ou plutôt « Ce qui doit être dit mais ne peut ». Face au désastre est construite la fiction d’un monde harmonieux où se réfugie un temps le narrateur ; après qu’il eut été battu et torturé parce que différent, il est exilé sur une île très étroite et s’invente alors une sorte de paradis où il est soigné par une sangsue (elle suce ses nécroses) et une épeire (ses toiles suturent les plaies) ; il apprend les oiseaux et, les jours de mélancolie, « le coucou chante contre (s)on cœur ». Tableau idyllique qui fut celui d’un âge d’or détruit par « l’invention des races », la volonté d’accumuler des biens, les conquêtes. Il y a chez le narrateur une hésitation entre une vision proprement apocalyptique (« Le ciel s’obscurcit / Chargé de cendres et de plaintes [...] ») et le rêve d’un monde réconcilié (« Le ciel s’ouvrit / Les oiseaux s’accouplèrent /[...] », parcours d’un extrême à l’autre qui ne permet pas de vivre aisément dans le monde éloigné de ces deux visions.
La tentation est toujours de se retirer, de se dépouiller de tout pour recommencer à vivre, être « Nu de peau de tout / Pour l’aventure la dérive l’amour la mort. » ; l’un des rêves du narrateur découvre d’ailleurs la femme aimée morte dans un fossé mais qui s’éveille — donc tout à fait nouvelle —, et la femme désirée, « contre soi », éloigne « les terreurs et la mort » ; mais le narrateur hésite constamment entre cette relation apaisante et le repli, en particulier la solitude devant la mer qui est « la beauté tout ici devant soi ». Le texte regorge de mots relatifs à la mer (tempête, fanal, naufrage, radeau, phare, lames, vague, écume, clapot, etc.) et aux oiseaux de mer, et l’on retrouve la fascination pour la mer à l’origine de La Coupée (2017).
La forme d’écriture privilégiée dans ce livre s’accorde avec le propos, il s’agit de l’énumération, souvent de groupes nominaux, parfois d’infinitifs, qui sortent le procès du temps et de la personne, énumération chaque fois proche de la psalmodie :
L’ivresse du pouvoir
Le dédain de la parole donnée
La compromission des maîtres
Le mépris vis-à-vis des plus pauvres
L’insanité des mieux pourvus
Les noyés dans l’indifférence
La déportation
Les camps
La mer cimetière
Que regretterai-je ?
Il s’agit, par ce procédé, de « tenter de dire ce qui est » (La Coupée, p. 26), la lecture même devrait accepter le prosaïsme des vers et viser ce but, effectuée « Sans effet ni intonation particulière // (...) non une litanie / Un chant ». Rythme d’un chant qui ne cherche pas d’effets, « dans la lignée des épopées sans gloire » comme l’écrit justement dans son témoignage Jean-Claude Leroy, l’ami de longue date.
Julien Bosc, Le coucou chante contre mon cœur, postface de J.-C. Leroy, collection L’Orpiment, La Réalgar, 2020, 84 p., 15 €. Cette note de lecture a été publiée dans Sitaudis le 23 septembre 2020.
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03/11/2020
Max Jacob, Art poétique
Suppression dans toute poésie (même non moderne) du style critique cérébral, philosophique, journalistique.
Penser à la matière de la prose, de la peinture, de la musique, c’est très bien : l’avoir er l’oublier c’est mieux.
On ne donne la vie que par l’émotion.
Vous oubliez que l’émotion est le tout. La distinction de votre tempérament vous empêchera d’être vulgaire.
Les œuvres à thèse meurent quand la thèse n’est plus d’actualité. On ne lit plus le Contrat social si on lit encore Germinal.
Max Jacob, Art poétique, dans Œuvres, Quarto/Gallimard, 2012, p. 1361, 1508, 1577, 1577, 1579.
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02/11/2020
Pierre Reverdy, Le Cadran quadrillé
Derrière le spectacle
La gouttière penche et se détache au bord des tuiles par moments
Des boules vertes et tendres pendant le long du mur
Les hirondelles sortent et entrent par la cheminée
En bas un homme en costume noir regarde la tête en l’air et salue
De la fenêtre on entend sortir une chanson dont les notes se mettent à la portée des
rayons de soleil
Mais il manque cependant quelqu’un et la ruelle ne peut tenir lieu de coulisses
Pierre Reverdy, Le Cadran quadrillé, dans Œuvres complètes, I, Flammarion, 2010, p. 846.
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01/11/2020
Ludovic Degroote, Si décousu
Sans nous
dans cette réduction où chacun se tient
contre le bruit de sa disparition
nous allons seuls
avec notre solitude
je ne sais ce qu’on sauve
sinon la respiration
qui respire malgré nous
on se manque
je ne sais pas non plus ce qui avance
j’étais né avant moi
dans une mémoire qui ne m’attendait pas
je me suis construit par effacement
c’est ainsi que nous vieillissons
en passant d’une absence à l’autre
aucun de nos âges ne meurt
sans nous
Ludovic Degroote, Si décousu, éditions Unes,
2019, p. 71-72.
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31/10/2020
Michel Deguy, Poèmes de la Presqu'île
Le miroir
Ville aveuglée à moins que ne la montre
À soi une rivière
Elle tire partage de l’eau
Et s’assied chez soi sur les berges
Un côté garde l’autre ils s’opposent et se voient
La rive se reflète en l’autre
Et chacune soi-même en le fleuve
Lui la dédouble et ainsi la redouble
Et permet qu’elle se connaisse.
Michel Deguy, Poèmes de la Presqu’île,
Gallimard /Le Chemin, 1961, p. 79.
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30/10/2020
Nicolas Pesquès, La face nord du Juliau, dix-sept, dix-huit
07.09.13
Séparé de tout, séparé de tous.
Toute communauté est une réponse à cette scission générale. Elle camoufle la solitude des corps, l’éparpillement des groupes. Elle tente de désigner ce qui les unit quand tout effort descriptif ne peut que creuser davantage distance et attirance. Le langage fait son œuvre. Il accomplit le paradoxe du vivant : il entretient le sentiment d’un gain de proximité et il approfondit l’abîme.
Nicolas Pesquès, La face nord du Juliau, dix-sept, dix-huit, Poésie/Flammarion, 2020, p. 43.
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28/10/2020
Paul-Jean Toulet, Contrerimes
XLIII
Ainsi, ce chemin de nuage,
Vous ne le prendrez point,
D’où j’ai vu mon sourire au loin
Votre brillant mirage ?
Le soir d’or sur les étangs bleus
D’une étrange savane,
Où pleut la fleur de frangipane,
N’éblouira vos yeux ;
Ni les feux de la luciole
Dans cette épaisse nuit
Que tout à coup perce l’ennui
D’un tigre qui miaule.
Paul-Jean Toulet, Contrerimes,
dans Œuvres complètes, Bouquins
/ Robert Laffont, 1986, p. 18.
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27/10/2020
Michel Leiris, Le ruban au cou d'Olympia
Qu’Édouard Manet y ait songé ou non, son Olympia est agencée de manière telle que plusieurs tiges du somptueux bouquet de l’amour charnel se trouvent rassemblées dans la pièce exiguë qui constitue le décor :
la cible du désir (Olympia que font plus nue son ruban et autres menus accessoires) ;
l’appel à des ardeurs étrangères au monde journalier (la camériste à chaude couleur de peau et vêture d’un autre climat) ;
l’obscurité d’un mystère qui se laisse toucher mais nulle caresse ne séduire (le chat noir).
Michel Leiris, Le ruban au cou d’Olympia, Gallimard, 1981, p. 70.
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25/10/2020
John Donne, Poésie
L’automnale (élégie IX)
Beautés de printemps et d’été n’ont plus de grâce
Que ne m’en a montrée un visage d’automne.
Les jeunes beautés imposent l’amour : c’est viol ;
Celle-ci le conseille : on ne peut que céder.
Fût-il honteux d’aimer, ici n’est nulle honte,
Car notre affection prend le nom de respect.
En sa jeunesse elle eut son âge d’or ? C’est vrai,
Mais, éprouvé souvent, cet or est toujours neuf.
Elle a connu le temps des torrides ardeurs,
Et voici le climat plus doux de son tropique.
John Donne, Poésie, traduction Robert Ellrodt,
Imprimerie nationale, 1993, p. 215.
L’automnale (élégie IX)
Les couleurs du printemps et de l’été sont pâles
Près de certain visage aux grâces automnales.
Une jeune beauté vous contraint de l’aimer ;
C’est viol. Celle-ci plaît, et vous sait garder.
L’Amour fût-il honteux, il garde ici la face
En prenant du Respect et le nom et la place.
Sa jeunesse, il est vrai, était son Âge d’Or :
Mais, souvent éprouvé, son or est neuf encor.
Jadis fut ssa saison torride et implacable ;
Son climat tropical est ores tolérable.
John Donne, Poèmes, traduction de ce poème Jean
Fuzier, Poésie / Gallimard, 1991, p.49.
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24/10/2020
Cioran, Syllogismes de l'amertume
Une poésie digne de ce nom commence par l’expérience de la fatalité. Il n’y a que les mauvais poètes qui soient libres.
Une vogue philosophique s’impose comme une vogue gastronomique : on ne réfute pas plus une idée qu’une sauce.
Au rebours des plaisirs, les douleurs ne conduisent pas à la satiété. Il n’est point de lépreux blasé.
Rien ne nous flatte tant que l’obsession de la mort ; l’obsession, et non la mort.
Cioran, Syllogismes de l’amertume, Idées / Gallimard, 1976, p. 30, 31, 59, 59.
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23/10/2020
Esther Tellermann, Corps rassemblé
Je la vis
suspendue sur
le temps
ou le bord
des orages
parfois le contour
du sein
fut la viole où
s’étire
ce qui
doucement
souligne
la forme
d’un destin
Esther Tellermann, Corps rassemblé,
éditions Unes, 2020, p. 46.
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