27/05/2024
Jules Renard, Journal
J’ai vu, monsieur, sur une table de boucher, des cervelles pareilles à la vôtre.
On peut donner le ton des paysans sans faute d’orthographe.
Il y a des critiques qui ne parlent que des livres qu’on va faire.
Comme c’est vain une idée ! Sans la phrase, j’irais me coucher.
C’est une erreur commune de prendre pour des amis deux personnes qui se tutoient.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 98, 99, 103, 103, 106.
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10/05/2021
James Sacré, Si peu de terre tout
Portrait du paysan à travers les arbres
Paysan comme un arbre en colère
mouvements grands, tant de cris pourquoi ?
on sait mal peu à peu le temps l’apaise
demain la campagne est belle avec les foins
coupés les outils qu’on entretient
ça donne du tonus au paysage l’éloignement de ces cris
dans le profond bleu calme
James sacré, Si peu de terre tout, le dé bleu, 2000, p. 65.
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17/03/2021
Virgile, Le souci de la terre (nouvelle traduction des Géorgiques)
Oh quelle chance les paysans
Ils ne connaissent pas leur bonheur
Loin des rames ennemies, la terre très juste leur offre d’elle-même une nourriture facile
Ils n’ont pas de grandes maisons qui vomissent par de magnifiques portes dès les saluts du matin un flot gigantesque de courtisans
Ils ne rêvent pas de linteaux ouvragés en belle écaille
Ni d’habits brodés d’or
Ni de cuivres d’Éphyre
Pour eux, on ne teint pas la laine blanche de pigments d’Assyrie
On ne sert pas une huile d’olive pure, gâchée par la cannelle
Mais repos sans soucis
Vie sans mensonges, riche de ressources variées
Pouvoir paresser devant les grandes étendues
Grottes, lacs, eaux vives, vallées fraîches
Mugissement des bœufs
Siestes molles sous un arbres
Rien ne manque
Bois, tanières des bêtes
Jeunesse endurante, travailleuse et habituée à peu
Culte des dieux et des Anciens vénérés
Ici dernières traces de la Justice abandonnant la terre
Virgile, Le souci de la terre, traduction des Géorgiques par Frédéric Boyer, Gallimard, 2018, p. 141-142.
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27/03/2018
Ossip Mandelstam,Œuvres poétiques
Combien m’est cher ce vivant qui peine,
qui compte pour un siècle une année,
qui met au monde, qui dort, qui crie,
tout ce peuple cloué à sa terre.
Ton oreille se tient aux frontières —
elle se satisfait de tout bruit —
un ictère, un ictère, un ictère !
dans ce trou moutardier et maudit !
octobre 1930
Ossip Mandelstam, Œuvres complètes I, Œuvres
poétiques, traduction Jean-Claude Schneider,
Le Bruit du temps / La Dogana, 2018, p. 351.
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Ossip Mandelstam,Œuvres poétiques
Combien m’est cher ce vivant qui peine,
qui compte pour un siècle une année,
qui met au monde, qui dort, qui crie,
tout ce peuple cloué à sa terre.
Ton oreille se tient aux frontières —
elle se satisfait de tout bruit —
un ictère, un ictère, un ictère !
dans ce trou moutardier et maudit !
octobre 1930
Ossip Mandelstam, Œuvres complètes I, Œuvres
poétiques, traduction Jean-Claude Schneider,
Le Bruit du temps / La Dogana, 2018, p. 351.
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06/03/2015
James Sacré, Cherchet-on le père qu'on a eu ?, dans Rehauts
Juste après qu’on a dépassé Carcassonne
Venant de Montpellier
On entre comme dans les couleurs que sont
Les toiles de Bentajou, visage rouges
En bord de labours ocre rose ou marron
Ou leurs feuillages morts
Avec des traces de verdure. Bentajou
A tiré de cela des figures comme il dit
Qui sont et ne sont pas ces paysages
Mais ce qui est venu
Quand il a mis du temps et ses mains
À l’épreuve de la couleur, oubliant peut-être
Ou se perdant. Pourrait-on pas dire
Que toi mon père te relevant
En bout d’un arpent de vigne, en Vendée
Tu n’étais plus
Que tremblement de formes et de couleurs
Dans la longueur de ton travail paysan ?
James Sacré, Cherche-t-on le père qu’on a eu ?, dans Rehauts, n°34, automne 2014, p. 9.
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06/08/2013
André Frénaud, Hæres, poèmes 1968-1981
Rumination du paysan
Je veux grossir pour défendre ma vie.
Contre la mort il faut prendre du poids,
il me faut boire des six litres
et pisser,
pour ma santé,
pour honorer ma santé et ma vie.
Il me faut vivre pour accroître mon bien,
peser les bêtes, arroser les clôtures,
renforcer les semences, affûter les outils,
bourrer le temps.
Mais le dimanche, on peut fanfaronner
avec l'alouette et la violette.
1959
Marmonnement du petit vieux
Cache-toi
Couve tes maladies.
Le soleil ne te veut pas de bien.
Descends dans la cave.
On pourrait te les prendre.
Profites-en tout seul...
Tu risquerais d'y voir clair.
N'aie pas peur... Un jour
Tout ça finira bien par éclater.
Bouche innocente
Au bon petit cheval, ainsi se glorifiait
la boucherie hippophagique... Et aussi bien,
ne pouvait-il manquer d'être satisfait, l'innocent,
d'être mort et mangé, et dans le poids d'un homme.
Rue Vieille-du-Temple
André Frénaud, Hæres poèmes 1968-1981, Gallimard, 1982, p. 105, 106, 111.
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