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07/09/2021

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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Les nuits sans celui qu’on aime — et les nuits

Avec c elui qu’on n’aime pas, et les grandes étoiles

Au-dessus de la tête en feu et les mains

Qui se tendent vers Celui —

Qui n’est pas — qui ne sera jamais,

Qui ne peut être — et celui qui le doit...

Et l’enfant qui pleure le héros

Et le héros qui pleure l’enfant,

Et les grandes montagnes de pierre

Sur la poitrine de celui qui doit — en bas...

 

Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,

Je connais ce mystère sourd-muet

Que dans la langue menteuse et noir

Des humains — on appelle la vie.

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, traduction Pierre Léon et Ève Malleret, Poésie/Gallimatd, 1999, p. 79.

17/05/2021

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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De pierre sont les uns, d’argile d’autres sont.—

Moi je scintille, toute argentine !

Trahir est mon affaire et Marine ô mon nom.

Je suis fragile écume marine.

 

D’argile sont les uns, les autres sont de chair —

À eux : tombes et dalles tombales !

— Baptisée dans la coupe marine — et en l’air

Sans fin brisée, je vole et m’affale.

 

À travers tous les cœurs, à travers tout filet

Mon caprice s’infiltre, pénètre.

De moi — ces boucles vagabondes : vise-les ! —

On ne fera pas du sel terrestre.

 

Contre vos genoux de granit je suis broyée

Et chaque vague me — réanime !

Vive l’écume, gloire à l’écume joyeuse,

Vive la haute écume marine !

                                                   23 mai 1920

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, traduction Pierre Léon et Ève Malleret, Poésie/Gallimard, 1999, p. 103.

11/01/2021

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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Tu m’aimas dans la fausseté

Du vrai — dans le droit au mensonge,

Tu m’aimas — plus loin : c’eût été

Nulle part ! Au-delà ! Hors songe !

 

Tu m’aimas longtemps et bien plus

Que le temps. — La main haut jetée ! —

Désormais :

 

              • Tu ne m’aimes plus ! —

C’est en cinq mots la vérité.

                      

                                               12 décembre 1923

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de Tentative

de jalousie, traduction Pierre Léon et Ève Malleret,

Poésie / Gallimard,1999, p.119.

 

21/03/2020

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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Deux poèmes pour Ossip Mandelstam

 

                           I

 

Personne ne nous a rien ôté —

Elle m’est douce, notre séparation !

Je vous embrasse, sans compter

Les kilomètres qui nous espacent.

 

Je sais : notre art est différant.

Comme jamais ma voix rend un son doux.

Jeune Derjavine (1), que peut vous faire

Mon vers brutal et ses à-coups !

 

Pour un terrible vol je vous

Baptise : envole-toi donc, jeune aigle ;

Tu fixes le soleil, l’œil ouvert, —

Est-ce mon regard trop jeune qui t’aveugle ?

 

Plus tendrement et sans retour

Nul regard n’a suivi votre trace.

Je vous embrasse, — sans compter

Les kilomètres qui nous espacent.

 

                                    12 février 1916

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de Tentative de

Jalousie, traduction Pierre Léon et Ève Malleret,

Poésie/Gallimard, 1999, p. 96.

 

 

 

  1. Gabriel Derjavine (1743-1816), poète officiel du règne de Catherine II.

04/11/2019

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle

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Les nuits sans celui qu’on aime

Avec celui qu’on n’aime pas , et les grandes étoiles

Au-dessus de la tête en feu et les mains

Qui se tendent vers Celui —

Qui n’est pas — qui ne sera jamais,

Qui ne peut être — et celui qui le doit...

Et l’enfant qui pleure le héros

Et le héros qui pleure l’enfant,

Et les grandes montagnes de pierre

Sur la poitrine de celui qui doit — en bas.

 

Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,

Je connais ce mystère sourd-muet

Que dans la langue menteuse et noire

Des humains — on appelle la vie.

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, traduction

Pierre Léon et Ève Malleret, Poésie/Gallimard,

1999, p. 79.

16/10/2013

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de Tentative de jalousie,

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de Tentative  de jalousie, les yeux, miroir

                     Les yeux

 

Deux lueurs rouges — non, des miroirs !

Non, deux ennemis !

Deux cratères séraphins

Deux cercles noirs

 

Carbonisés — fumant dans les miroirs

Glacés, sur les trottoirs,

Dans les salles infinies —

Deux cercles polaires

 

Terrifiants !

Flammes et ténèbres !

Deux trous noirs.

C'est ainsi que les gamins insomniaques

Crient dans les hôpitaux : — Maman !

 

Peur et reproche, soupir et amen...

Le geste grandiose...

Sur les draps pétrifiés —

Deux gloires noires.

 

Alors sachez que les fleuves reviennent,

Que les pierres se souviennent !

Qu'encore encore ils se lèvent

Dans les rayons immenses —

 

Deux soleils, deux cratères,

­ Non, deux diamants !

Les miroirs du gouffre souterrain :

Deux yeux de mort.

 

                                               30 juin 1921

 

Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle, suivi de Tentative

de jalousie, préface de Zéno Bianu, Traductions de

Pierre Léon et d'Éve Malleret, Poésie / Gallimard,

 

1999, p. 86-87.

16/02/2013

Marina Tsvétaïéva, Le Ciel brûle, suivi de Tentative de jalousie

Marina Tsvétaïeva, Le Ciel brûle, suivi de Tentative de jalousie, amour, la vie

Les nuits sans celui qu'on aime — et les nuits

Avec celui qu'on n'aime pas, et les grandes étoiles

Au-dessus de la tête en feu et les mains

Qui se tendent vers Celui —

Qui n'est pas — qui ne sera jamais,

Qui ne peut être — et celui qui le doit...

Et l'enfant qui pleure le héros

Et le héros qui pleure l'enfants,

Et les grandes montagnes de pierre

Sur la poitrine de celui qui doit — en bas...

 

Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,

Je connais ce mystère sourd-muet

Que dans la langue menteuse et noire

Des humains — on appelle la vie.

 

Marina Tsvétaïéva, Le Ciel brûle, suivi de Tentative de jalousie,

Préface de Zéno Bianu, Traduction de Pierre Léon et

d'Éve Malleret, Poésie / Gallimard, 1999, p. 79.