17/01/2020
Saint-John Perse, Oiseaux
Oiseaux, I
L’oiseau, de tous nos consanguins le plus ardent à vivre, mène aux confins du jour un singulier destin. Migrateur, et hanté d’inflation solaire, il voyage de nuit, les jours étant trop courts pour son activité. Par temps de lune grise couleur du gui des Gaules, il peuple de son spectre la prophétie des nuits. Et son cri dans la nuit est cri de l’aube elle-même : cri de guerre sainte à l’arme blanche.
Saint-John Perse, Oiseaux, dans Œuvres complètes, Pléiade / Gallimard, 1972, p. 409.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : saint-john perse, oiseaux, destin, migration, cri | Facebook |
12/03/2018
Jean Daive, 1, 2, de la série non aperçue
Mort jusqu’au cri poussé
dans la matière
si je regarde
parmi les meubles
du jugement
la tombe externe.
Jean Daive, 1, 2, de la série non
aperçue, textes/Flammarion,
1976, p. 63.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean daive, 1, 2, de la série non aperçue, tombe, cri, matière | Facebook |
03/08/2015
Pierre Dhainaut, Plus loin dans l'inachevé
Oiseaux d’ici
Rieuses, dit-on de ces mouettes
tête noire et bec rouge,
d’autant plus blanches
lorsque les ailes se déploient
sur la digue, sur le port,
sans trêve, le vent,
le vent est favorable
à la véhémence
de la trajectoire, à l’acuité
du cri : elles gravissent l’air,
elles s’y précipitent, là même
où nous ne voyons rien,
quelle était
leur victime ? cette clameur
de vagues qui s’abattent
nous rattrape, nous blesse
jusque dans les rêves.
Pierre Dhainaut, Plus loin dans l’inachevé,
Arfuyen, 2010, p. 69 .
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre dhainaut, plus loin dans l'inachevé, mouette, mer, vent, cri, proie, vol | Facebook |
15/07/2015
Mira Wladir, L'invention de la légèreté
Le lieu
un matin
ce que c’est
il faut encore l’apprendre
une teinte qui bouge
dans la fuite de l’œil
une teinte en fuite
qui fait matin
ce que c’est
on l’apprendra peut-être
dans un morceau tombé
*
au début devient le lieu
autre début
à cheval
dans le fond de nos ventres
on touche la tiédeur de la pierre
cette teinte qui court
dorée
sur le rein gris du mur
*
frôlement
au-dessus du cri ou dedans
un bruit qu'on n'avait pas perçu encore
de l'aile
ou de l'eau
même
Un bruit qui glisse
sous le sang
on découvre cela
sur le corps
de l'humide léger
plus clair que du rouge
le rêve aussi il faut l'apprendre
l'amour
comme un jonc brun tendu qui crisse
[...]
Mira Wladir, L’invention de la légèreté, éditions
Empreintes, 2015, p. 37-38.
06:03 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mira wladir, l'invention de la légèreté, le lieu, matin, cri, bruit | Facebook |
25/07/2014
Roland Dubillard, Je dirai que je suis tombé
Quatre poèmes d’amour
Si quelqu’un sourit
Si quelqu’un sourit à te voir,
s’il te regarde avec bonheur,
c’est que ton corps n’a plus la force
de lui cacher, derrière toi, le mur.
Enfant qui tète sa mère,
bientôt sa mère le détestera,
avant de lui ôter la tête.
Les yeux commencent par un point,
la douleur les allonge vers le bas,
le regard tire d’eux l’horizon,
et il faut compléter le triangle
toute sa vie, avec les mains.
Ce qui sort de ta bouche,
c’est d’abord la fumée d’une cigarette ;
et puis c’est tout le reste.
Si tu es en première
Si tu es en première
quand je suis en seconde
qu’est-ce donc qui s’est décoiffé ?
Où est la brosse, où est le peigne, où est le vent ?
où est la chevelure ?
Soleil, par qui les feuilles sont des lampes transparentes.
Orgueil, par qui les filles montent dans les wagons rouges.
Honte, qui donne à l’homme une allumette vite éteinte.
Quand de l’eau entre dans la noix
par la fente de sa coquille,
chaque moitié sur l’eau qui noie
bientôt peut-être flottera.
Si je monte au Palais-Royal,
quand tu descends au Châtelet,
les rails restent si parallèles
qu’on voudrait être des roues.
Parfois, d’un moment
Parfois, d’un moment, tu peux dire
qu’il est huit heures,
ou que c’est le moment de remonter ta montre.
Mais tu diras bien autre chose
Pour peu qu’à ce moment un autocar t’écrase.
Or, il y a toujours
quelque chose qui nous écrase,
ne serait-ce que notre poids.
Et ce qui nous écrase,
comme un autocar, est parfois
plein de militaires joyeux.
À tout moment ,
il faut les mentionner aussi.
Je lui ai crié
Je lui ai crié :
Madame ! Madame !
Votre parapluie,
je crois, s’est ouvert.
Fallait-il plutôt
ne pas le lui dire ?
le fermer de force ?
ne pas l’avoir vu ?
se mettre en colère ?
L’aurais-je quittée
de toute manière
aussi las de vivre ?
Roland Dubillard, Je dirai que je suis tombé, Gallimard, 1966, p. 79-82.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roland dubillard, je dirai que je suis tombé, quatre poèmes d'amour, enfance, ville, cri | Facebook |
11/04/2014
Bruno Fern, Reverbs, phrases simples
78
De seconde s'accolent les uns aux
Autres explosent les bornes.
Fixées par la loi se croient hors catégories ou quoi.
Je parle sous moi(1)
Ou à côté c'est une variante reliée souterrainement au
phénomène à la petite cuiller multipliant les évasions.
Malgré le déploiement de milices privées, la zone est loin
d'être sécurisée.
De surcroît, l'isolation paraît nettement insuffisante d'autant.
79
qu'on crie sans fin(2).
Des Maliens chartérisés aux frais du contribuable des Tchétchènes pacifiés en deux des Birmans totalisés par milliers des Kurdes en voie d'assimilation des Palestiniens en 15 mn chrono des Biélorusses ayant du plomb dans la tête des Afghanes promptement déscolarisées des Roms ramenés gratos à Bucarest et puis quoi encore des Saoudiens décapités en présence des Ouïghours intégrés à la nation mère des Mexicains interceptés de justesse à la place des Vietnamiens détournés de leur itinéraire en bonus des Iraniennes lapidées dans le strict respect des Soudanais après les ultimatums d'usage des Érythréens voguant sur la Grande Bleue, etc. montent — sans compter celle à droite en entrant sur le parking.
(1) Tristan Corbière
(2) Jean Cayrol
Bruno Fern, Reverbs, phrases simples, NOUS, 2014, np.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bruno fern, reverbs, phrases simples, loi, cri, répression | Facebook |
26/08/2011
Jean-Pierre Duprey, La Fin et la manière
Cri
Un cri barré de foudre en jet enlumineur,
Appel happé sur un fil d’aiguille…
Au tranchant mouillé d’ombre,
Contre quoi s’est troquée
La tête mouillé noire,
L’oiseau du mal-passage
S’est barré les ailes en croix.
Armé de foudre sèche, un cri
Arrache la voix et crache la bouche…
Muet, creusé de sang, taillé
En pointes vives,
La mort a desserré sa voix et morcelé
Son rire
En glaçons épousant les regards bleu-noyé.
La glas fait pierrement au coulement du froid
Au tranchant rouillé d’ombre,
Contre quoi s’est troquée
La tête mouillée noire,
Le cri file un ciseau de deux pointes fermées,
L’oiseau d’ombre-passage,
S’ouvrant le corps au souffle bas,
A labouré la houle sourde.
Puis
Retenu, griffé, forcé
S’est encastré aux griffes basses.
Jean-Pierre Duprey, La Fin et la manière, en préface Lettre rouge d’Alain Jouffroy, couverture illustrée par Matta, Le Soleil Noir, 1965, p. 55-56.
05:02 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-pierre duprey, la fin et la manière, cri | Facebook |