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23/10/2023

Étienne Faure, Et puis prendre l'air

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L’ennui léger à la fenêtre enduré dès l’enfance, à regarder passer dans le ciel quelque chose, attendre un événement venu des nues : un nuage effilé par le vent, le passage de l’avion disparu par l’embrasure des arbres, un V d’oiseaux très haut en solitude rebroussant leur chemin en lançant des signaux aux autres animaux restés au sol, cet ennui lentement scruté derrière la vite avait changé progressivement de sens, glissé par la force des ans — nouveaux cirrus, autre altitude — parmi les nuages qui commençaient à s’amonceler, non plus singuliers mais pluriels — les ennuis. Et de loin le rire clair qui tout balaie au ciel de mars, à nouveau en mouvement.

        1.  
        2. Étienne Faure,  Et puis prendre l’air, Gallimard, 2020, p.103.

 

22/10/2023

Étienne Faure, La vie bon train.

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La nuit quand le train va si vite

qu’on ne voit rien

rouler perd tout son sens

— il n’est plus sûr alors qu’une gare attende,

à l’autre bout fasse un trajet qui relie les deux lieux

ordonnancés un départ une arrivée,

car nul retour, aucun aller n’est visible,

à regarder par la vitre envahie de noir :

miroir vide où suis-je ?

 

Voici l’hiver aux jours réduits, qui emporte le corps

engendré vite autrefois, le moral au noir fixe,

dans un état pour une éternité transitoire

d’aucune utilité car jamais abouti

(et donc de ton sperme personne ne sera né)

maillon sans chaîne, wagon désormais sans attache

ni ascendance, ni hoirs, ni rien d’approchant.

 voici l’hiver

 

Étienne Faure, La vie bon train (proses de gare),

Champ Vallon, 2013, p. 119.

21/10/2023

Étienne Faure, Horizons du sol

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Longtemps condamné au lit comme à l’internement,

il scrutait fixement dans les papiers peints

des motifs d’évasion, lignes de fuite,

des baies en auréole où s’embarquer

pour l’infini l’espace d’une heure,

les yeux ronds d’étonnement que la vie s’y cache,

tapissée au gré des saisons de nymphes

aux blancheurs de gel

— les corps aussitôt peints devenant des nus —

ou bien des fleurs insistantes,

exhalant quoique fanées depuis longtemps

un même enfermement dans la torpeur

spectrale — non pas sommeil —

à flotter en surface aux côtés de son propre corps,

dépouille, non, remuement que le soir

dément.

trouble du soir

 

Étienne Faure, Horizon du sol,

Champ Vallon, 2011, p. 44.

Photo Chantal Tanet, 2011

20/10/2023

Étienne Faure, Vues prenables

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À chaque alliance, premier lit, remariage,

la peau des murs avait changé,

ici offrant l’illusion du feuillage

d’une toile de Jouy inspirée des fêtes

à la campagne où le motif s’organise

en chemins, en rivières,

où court une tige fleurie sur un fond picoté

que les fabricants avaient reproduit maintes fois,

au bout du siècle effeuillé près du lit.

Parmi les vases, cassolettes, chandeliers, lampes,

on vivait volets tirés dans la pénombre

pour ne pas abîmer les tentures

et que les papiers peints ne passassent

trop vite

il y avait bien cachés dans les ramures

des souvenirs au matin réveillés, tête lourde,

en lés répétés où dormait le pavot

et les vies imprimées là, sans raccords.

la peau des murs 

 

Étienne Faure, Vues prenables,

Champ Vallon, 2009, p. 83.

Photo T.H., 2012

19/10/2023

Étienne Faure, Légèrement frôlée

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             Où est l’exil

en sueur, en train jadis accompli

si le avions, presque

à la vitesse du mensonge, nous déposent

en des lieux prémédités de loin,

transmis par la parole, des papiers

traduits ou rédigés dans la langue des mères,

où est l’exil, un écart temporel

réduit à rien — espace crânien

où l’on revient sur ses pas pour retrouver

l’idée perdue en route —

heure de seconde main aujourd’hui effacée

devant l’entrée des morts, ou le seuil,

par politesse ultime de la mémoire

ici trahie, en creux, quand l’avion atterrit

qui ne comblera donc rien, jamais

l’amplitude intime de la perte.

il revient les mains vides

 

Étienne Faure, Légèrement frôlée,

Champ Vallon, 2007, p. 90.

photo Chantal Tanet, 2011

18/10/2023

Paul Verlaine, Chair

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    Les méfaits de la lune

 

Sur mon front, mille fois solitaire,

Puisque je dois dormir loin de toi,

La lune, déjà maligne en soi

Ce soir jette un regard délétère.

 

Il fit ce regard — pût-il se taire !

Mais il prétend ne pas rester coi,

Qu’il n’est pas sans toi de paix pour moi ;

Je le sais bien, pourquoi ce mystère,

 

Pourquoi ce regard, oui, lui, pourquoi ?

Qu’ont de commun la lune et la terre ?

Ha, reviens vite, assez de mystère i

Toi, c’est le soleil, luis clair sur moi !

 

Paul Verlaine, Chair, dans Poésies complètes,

Bouquins/Robet Laffont, 2011, p. 840.

17/10/2023

Paul Verlaine, Parallèlement

paul verlaine, parallèlement, la dernière fête galante, sodome, gomorrhe

        La dernière fête galante

 

Pour ne bonne fois séparons-nous,

Très chers messieurs et si belles mesdames.

Assez comme cela d’épithalames,

Et puis là, nos plaisirs furent trop doux.

 

Nul remords, nul regret vrai, nul désastre !

C’est effrayant ce que nous nous sentons

D’affinités avecque les moutons

Enrubannés du pire poétastre.

 

Nous fûmes trop ridicules un peu

Avec nos airs de n’y toucher qu’à peine.

Le Dieu d’amour veut qu’on ait de l’haleine ,

Il a raison ! Et c’est un jeune dieu

 

Séparons-nous, je vous le dis encore.

Ô que nos cœurs qui furent trop bêlants

Dès ce jourd’hui réclament trop hurlants,

L’embarquement pour Sodome et Gomorrhe !

 

Paul Verlaine, Parallèlement, dans Poésies complètes,

Bouquins/Robert Laffont, 2011, p. 446-447.

16/10/2023

Paul Verlaine, Jadis et naguère

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                          Paysage

 

Vers Saint-Denis c’est bête et sale la campagne,

C’est pourtant là qu’un jour j’emmenai ma compagne,

Nous étions de mauvaise humeur et querellions.

Un plat soleil d’été tartinait ses rayons

Sur la plaine séchée ainsi qu’une rôtie.

C’était pas trop après le Siège : une partie

Des « maisons de campagne » était à terre encor.

D’autres se relevaient comme on bisse un décor,

Et des obus tout neufs encastrés au pilastre

Portaient écrit : SOUVENIR DES DÉSASTRES.

 

Paul Verlaine, Jadis et naguère, dans Poésies complètes,

Bouquins/Robert Laffont, 2011, p. 299-300.

15/10/2023

Paul Verlaine, La bonne chanson

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Dans le vieux parc solitaire et glacé

Deux formes ont tout à l’heure passé.

 

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,

Et l’on entend à peine leurs paroles.

 

Dans le vieux parc solitaire et glacé

Deux spectres ont évoqué leur passé.

 

­— Te souvient-il de notre extase ancienne ?

— Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne.

 

— Ton cœur bat-il toujours à mon sel nom ?

Toujours vois-tu mon âme en rêve. — Non.

 

— Ah ! les beaux jours de bonheur indicible

Où nous joignions nos bouches ! — C’est possible.

 

— Qu’il était bleu, le ciel, et grand l’espoir !

— L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

 

Tels ils marchaient dans les avoines folles,

Et la nuit seule entendit leurs paroles.

 

Paul Verlaine, La bonne chanson, dans Poésies complètes,

Bouquins/Robert Laffont, 2011, p. 108.

14/10/2023

Paul Verlaine, L'espoir luit...

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L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable.

Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ?

Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou.

Que ne t’endormais-tu, le coude sur la table ?

 

Pauvre âme pâle, au moins cette eau du puits glacé,

Bois-la. Puis dors après. Allons, tu vois, je reste,

Et je dorloterai les rêves de ta sieste,

Et tu chantonneras comme un enfant bercé.

 

Midi sonne. De grâce, écartez-vous, madame,

Il dort. C’est étonnant comme les pas de femme

Résonnent au cerveau des pauvres malheureux.

 

Midi sonne. J’ai fait arroser dans la chambre.

Va, dors ! L’espoir luit comme un caillou dans un creux.

Ah, quand refleuriront les roses de septembre !

 

Paul Verlaine, Sagesse, dans Œuvres poétiques,

Bouquins/Robert Laffont, 2011, p. 203.

 

13/10/2023

Lorine Niedecker, Cette condenserie : recension

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Martin Richet, traducteur de l’anglais américain, a choisi pour ce volume des lettres de Lorine Niedecker envoyées, pour la plus grande partie, à Louis Zukofsky (pas toutes conservées et parfois censurées) et à Cid Corman. La correspondance est suivie de deux essais à propos de ces deux poètes — le second, aussi éditeur, publiait la revue Origin —, puis d’un récit de voyage, précédé de notes. Par ces choix, Martin Richet a voulu mettre en lumière « plusieurs mouvements de condensation : « comment la vie devenue lettre se fait matériau d’un poème ; comment la lecture se densifie en poétique ; comment le document et le savoir informent l’expérience et l’écriture. » Le livre se termine par une brève étude de Jean Daive, ouverture à la lecture de Lorine Niedecker.

 

Lorine Niedecker et Louis Zukofsky furent très proches et le mariage de l’écrivain n’interrompit pas, pendant longtemps, leur correspondance. Dans ses lettres, Lorine Niedecker décrit souvent avec beaucoup de détails l’espace dans lequel elle vit, la faune et la flore qu’elle ne se lasse pas d’observer ; par exemple, pour les oiseaux, le grand héron, l’engoulevent, le nid de kildirs, et elle parcourt trente kilomètres « pour voir des nids d’hirondelles comme des bouteilles ou des gourdes de boue sur les flancs d’une grange ». C’est là la matière de ses poèmes. Elle se sent si proche du milieu humide qui l’entoure — les marais, le lac Koshkonong proche — qu’elle a le sentiment d’en être un élément (« je pourrais presque me croire de l’eau de mer dans les veines ») ; vivant dans ce milieu, elle imagine qu’elle peut contribuer à son développement, en y créant elle-même : ainsi elle arrache de très jeunes saules, les emporte jusqu’à la maison pour [s]a propre création du monde ». Cette image de monde premier est régulière, jusqu’à écrire, quand elle doit se mêler aux occupations de ses contemporains, « j’ai surgi de ma boue primordiale ». C’est dans une cabane, au confort des plus sommaires (sans eau ni électricité), près du bord d’une rivière, qu’elle a vécu longtemps avec sa mère et qu’elle abandonnera dans la dernière partie de sa vie : « Comme j’aimerais être libre de cette sinistre affaire qu’est la propriété », écrira-t-elle. C’est là aussi qu’elle écrivait et lisait.

 

Elle lisait beaucoup, dans plusieurs domaines, et elle énumérait parfois dans une lettre un achat de livres (par exemple : D. H. Lawrence, Goethe, Edith Hamilton, Rilke, Henri James, Conrad, une étude concernant Emily Dickinson) ou précisait ce qu’elle appréciait (« J’aime les poèmes de Robert Creeley », « Ce livre [de Cid Corman]) rentre dans mon armoire spéciale ». Elle n’hésitait pas à noter ses réticences et ses mises à l’écart ; estimant encore un peu Ginsberg, elle regrettait son comportement, « pourquoi faut-il que ces manifestations de vitalité passent par la misère, la crasse, le sexe. ». Elle donnait son sentiment à ses correspondants à propos de telle ou telle œuvre, tout en ne se jugeant pas capable de lecture critique, « j’apprécie, je ne critique pas et je cite comme [Marianne Moore] mais sans sa perspicacité ». L’étude sur la poésie de Zukofsky est en effet pour l’essentiel un montage de citations du poète.

 

Lorine Niedecker ne mettait jamais en avant ce qu’elle écrivait, ce qu’elle était ; elle a gagné son pain en faisant des ménages et ne tenait pas à ce que l’on sache qu’elle publiait des poèmes, mais elle n’avait aucun doute sur la nécessité pour elle d’écrire, « Il n’y a rien de plus important dans ma vie que la poésie », écrivait-elle à Jonathan Williams. C’est cette nécessité qui la conduisait à toujours reprendre ses poèmes, rarement satisfaite. L’écriture avait toujours pour elle comme point de départ ce qu’elle avait vu, entendu, vécu ; pour garder une de ses images, la phrase lui venait comme une crue de printemps mais, ensuite, acceptant le conseil de Zukofsky, le « sentiment suivant a toujours été de « condenser, condenser ». » Commentant une lettre de Cid Corman, qui pensait ses poèmes trop « écrits », elle se donnait cette tâche de condenser, « il faut que je travaille à me faire plus dense, plus nette et pourtant plus distante, comme dans l’imagination pure ». Cette volonté l’a éloignée de l’enregistrement de ses poèmes ou de leur lecture en public. Cette solitaire pensait que les poèmes s’adressaient au lecteur et devaient être « lus en silence », ce qui n’empêchait pas pour elle d’être constamment attentive aux sons, « Quand on a l’oreille affutée on fait sonner ses poèmes dans le silence ». Tout se résumait à s’éloigner de la prose, c’est-à-dire à l’abondance de mots dans un poème qui aurait abouti à « perdre une poésie parfaite, serrée ».

.

Ses notes de voyage sont faites d’observations, mais aussi de lectures sur l’histoire de la venue des Français dans la région du Lac Supérieur. Elle a écrit sa passion pour les pierres, et dans son compte rendu de voyage elle a noté : « Le panneau de la Boutique à Agates je ne l’ai pas raté » : elle y a acheté, en plus d’une agate, « une pierre bleue, une sodalite et une cornaline ». On lit cette importance de la pierre dans un poème, Voyageurs, qui précédant la postface de Jean Daive, s’ouvre ainsi : « Dans la moindre partie du moindre être vivant / est une matière qui a un jour été pierre / devenu terreau. »

 

Jean Daive est allé jusqu’à la cabane où vivait Lorine Niedecker — elle appréciait beaucoup sa poésie — et la revue qu’il dirige, K.O.S.H.K.O.N.O.N.G., nom du lac proche de la cabane, témoigne d’une proximité avec une manière de penser la poésie. Sa brève étude demanderait à être largement commentée, retenons-en un passage sur la complexité de l’œuvre : « En lisant textes, journaux, lettres et poèmes, je pense souvent aux fresques de Giotto à Assise où les récits de rêves et les changements d’échelle culbutent notre regard et ses logiques parce que la narration surdimensionnée s’en trouve malmenée. »

 Lorine Niedecker, Cette condenserie, Textes traduits, choisis et assemblés par Martin Richet, Postface de Jean Daive, éditions Corti, série américaine, 2023, 274 p., 21 €. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 22 septembre 2023.

12/10/2023

Eugène Savitzkaya, Au pays des poules aux œufs d'or

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 L’une était renarde et l’autre était héron sans avoir jamais choisi le poste qu’ils occupaient dans les classifications établies depuis belle lurette par des hommes en bésicles apparentés aux universités du monde. L’une pratiquait l’anglais avec facilité et le russe avec plaisir. L’autre ne connaissait qu’une seule langue dont il usait avec modération. Les deux vénéraient le soleil et la lune, son déflecteur de roche usée. Il portait les nuages et elle traînait les nuées.

   Comment s’étaient-ils acoquinés ? Le glapissement d’une renarde n’attire pas d’ordinaire les hérons errants. Le claquement d’un bec long et fin d’un héron n’émoustille pas plus que ça une renarde.

 Mais les temps varient et les cœurs changent comme        varient les cieux et changent les formes des nuages.

 

Eugène Savitzkaya, Au pays des poules aux œufs d’or, Les éditions de minuit, 2020, p. 75.

11/10/2023

Eugène Savitzkaya, Fraudeur

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                Les champs secs ou le parc brumeux.

   Il a toujours aimé l’eau mais adore le grattement du chaume contre ses chaussures, l’odeur et le chant des tuyaux de paille dorée. D’un côté la croupe argileuse, de l’autre le  limon d’une rivière er de son affluent. Entre deux fossés, remblais de terre herbeuse, un chemin creux ancien comme le village dont il s’éloigne. Entre deux haies d’ifs, une allée vers le château qu’il laisse pour demain, pour plus tard. Plus tard les jeunes filles aux jambes nues sur la pelouse descendant vers l’étang. Aujourd’hui, préfère l’ornière au fond de laquelle se tapit le lièvre au poil clair quand le vent du nord souffle transportant le vacarme d’un train de marchandises.

   Un été torride, le parc ouvrait ses grilles et le garçon suivit le ruisseau d’eau pure et vit le poisson d’or nageant sur un fond de coquilles vides blanches comme nacre ou onyx. Ce poisson avait la forme et la délicatesse d’un pied d’enfant ; ses nageoires s’agitaient comme des voiles d’un mouvement régulier et souple. Le poisson nageait contre le courant, se déplaçait latéralement, se couchait sur le flanc, actif et lumineux

 

Eugène Sawitzkaya,  Fraudeur, éditions de Minuit, 2015, p. 58-59.

10/10/2023

Eugène Savitzkaya, Alain Le Bras, Quatorze cataclysmes

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Au printemps, de la cime d’un arbre, araucaria, on voit le merveilleux quartier de la maison nouvelle avec les couloirs sonores, les escaliers à marche de pierre et un seul mur, debout, quelques tranquilles murets pour s’appuyer et pour poser les plans, de sèches bergeries et de nombreuses étables vides, certaines spacieuses, d’autres minuscules pour les minuscules animaux à cornes, ces derniers bâtiments pourvus de surprenantes entrées et issues. Les lapins auront peut-être des maisonnettes en terre truffées de cristaux, de pépites et de débris de coquillages laiteux et les colombes , des tourelles en roche très veinée, en marbre et en craie que l’on pourra creuser à la cuiller et manger pendant les famines.

 

Eugène Savitzkaya,, Alain Le Bras, Quatorze  cataclysmes, Le temps qu’il fait, 1985, np.

09/10/2023

Eugène Savitzkaya, Rules of solitude

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Chaque visage est une fontaine

nouvelle qui s’écoule dans le vide et

l’obscurité. Le haut est léger et froid.

Le bas est noir et tiède. Le large

s’étend. Le long s’étire. Le vaste s’ouvre

et l’infini se referme. La nuit est

tellement parfumée.

 

Eugène Savitzkaya, Rules of solitude,

Quale Press, 2001, np.