28/05/2024
Jules Renard, Journal
Le devoir ? Ah ! non, laissez-moi tranquille.
Quand il se regardait dans une glace, il était toujours tenté de l’essuyer.
Un livre nous déplaît partout où il nous ressemble.
Ne jamais rien faire comme les autres en art ; en morale, faire comme tout le monde.
Le talent, c’est comme l’argent : il n’est pas nécessaire d’ne avoir pour en parler.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 116, 117, 124, 127, 129.
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18/07/2019
Jues Renard, Journal, 1887-1910
Si, au lieu de gagner beaucoup d ‘argent pour vivre, nous tâchions de vivre avec peu d’argent ?
Il y a les bons écrivains, et les grands. Soyons les bons.
Il faut être honnête et modeste, mais il faut dire qu’on l’est.
Aller parfois dans le monde pour avaler un verre de bile.
Écrire, c’est une façon de parler sans être interrompu.
Jules Renard, Journal 1887-1910, Pléiade / Gallimard, 1965, p. 254, 263, 264, 273, 277.
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06/01/2017
Nathalie Quintane, Remarques
(…)
— Décider que lever un filet de colin est une activité supérieure, au même titre qu’expliquer À la nue accablante, est une tactique. On fait entrer un maximum d’activités classées autrefois dans l’inférieur dans le supérieur. D’où que l’inférieur devient particulièrement inférieur — de n’avoir même pas pu rentrer dans le supérieur, comme tant d’autres.
— Faire la caisse dans un supermarché, par exemple.
— Je ne me rappelle plus pourquoi tenir une caisse dans un supermarché est tellement pourri.
— Si tu ne travailles pas à l’école, tu finiras caissière dans un supermarché.
— Pourtant tout le monde aime bien l’argent et les supermarchés et on joue à la caissière ou au caissier quand on est petit. Bonjour madame, alors, qu’est-ce que vous voulez ? des poireaux ? des ananas ? Bon, je prendrai des ananas. D’accord, ça fait trois cent trente-cinq euros. Voilà. Merci, madame. Merci monsieur. Au revoir. Au revoir.
— C’est fatigant, c’est mal payé, et c’est un métier féminin.
Nathalie Quintane, Remarques, dans Nathalie Quintane, sous la direction de Benoît Auclerc, Garnier, 2015, p. 106-107.
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22/02/2014
Raymond Queneau, Chansons,
Chansons
I
Il y a des gens qui s' cass'nt la tête
Parc' qu'ils voudraient gagner d'l'argent
Beaucoup d'argent
Ils cherch'nt partout des recettes
Pour dev'nir rich's immédiatement
Et copieusement
Ou bien ils travaill'nt tout' leur vie
Ou bien ils préfèr'nt êt' bandits
De grand chemin
Tout ça c'est bien trop compliqué :
Pour êtr' célèbre et honoré
Y a qu'un moyen
Faites comme moi
Dev'nez champion
C'est si facile
Et c'est si bon
Ah quel plaisir d'être champion
On n'a qu'à se mettr' sur les rangs
Pour écraser les concurrents
Ah quel bonheur d'être champion
Même un champion de trottinette
Tout l'monde accourt pour lui fair' fête
Ah quelle joie d'être un champion
C'est si facile et c'est si bon.
*
Une vie sans toi
Une vie sans toi
Qu'est-ce que ça veut dire ?
Ça veut dir' la pluie
Tout au long des mois
Ça veut dir' l'ennui
Ça veut dir' le pire
Ça veut dir' tout ça
Et encore tout ça
Ça veut dir' la neige
Au mois de juillet
Ça veut dir' la fleur
Mourant sur la branche
Ça veut dire l'oiseau
Crevant en plein ciel
Ça veut dir' tout ça
Et encore tout ça
Ça veut dir' tout ça
Ne pas te revoir
Si jamais la vie
Voulait t'éloigner
À toujours de moi
Comme serait gris
Comme serait noir
Un monde sans toi
Raymond Queneau, Chansons, dans Œuvres
complètes, I, édition établie par Claude
Debon, Pléiade / Gallimard,1989, p. 972 et 969.
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02/08/2011
Charles Cros, Banalité
Banalité
L’océan d’argent couvre tout
Avec sa marée incrustante.
Nous avons rêvé jusqu’au bout
Le legs d’un oncle ou d’une tante.
Rien ne vient. Notre cerveau bout
Dans l’idéal, feu qui nous tente,
Et nous mourons. Restent debout
Ceux qui font le cours de la rente.
Étouffé sous les lourds métaux
Qui brûlèrent toute espérance,
Mon cœur fait un bruit de marteaux.
L’or, l’argent, rois d’indifférence
Fondus, puis froids, ont recouvert
Les muguets et le gazon vert.
Charles Cros, Douleurs et colères, dans Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, édition établie par Louis Forestier et Pierre-Olivier Walzer, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1970, p. 198.
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