23/09/2023
Ernst Jandle, Retour à l'envoyeur
sommaire
pour faire un poème
j’ai rien
qu’ne langue
qu’une vie
qu’une pensée
qu’une mémoire
pour faire un poème
j’ai rien
Enst Jandle,Retour à l’envoyeur,
traduction Alain Jadot et Christian
Prigent ; Drmx, 2012, p. 49.
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22/09/2023
Jean Follain, Appareil de la terre
Au seuil d’une porte, le balai en main, la servante ressent un bien-être à écouter : des gens en blouse, veste de coutil ou caraco de nuit, se parlent en plein jour. Dans l’agitation demeurent calmes découvreurs de charades et problèmes : il ne faut pas dit un homme, la croix et la bannière pour trouver la capacité des citernes. Une clef du pressoir détruit reste enfouie, rouillée. Un mulot, un instant, inspecte. Il semble tout d’un coup que le monde veuille basculer dans le vide pour en terminer avec les bavardages du présent.
Jean Follain, Appareil de la terre, Gallimard, 1953, p. 10.
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21/09/2023
Jean Follain, Appareil de la terre
Solitaires
Toujours leur porte s’ouvre mal
derrière eux s’endort la bête
couleur de feu
au seul pas d’homme ou de femme
ils reconnaissent qui passe
sur a route tournante
regardent un instant
pendant du plafond noir
la lampe ornée
une plante verte ocellée meurt
pleure un enfant perdu
sous le vaste ciel bas
puis il neige enfin.
Jean Follain, Appareil de la terre,
Gallimard , 1964, p. 79.
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20/09/2023
Robert Desnos, Sirène-Anémone
Sirène-Anémone
Qui donc pourrait me voir
L’anémone du soi
Fleurit sous mes fougères
Moi la flamme étrangère
O fougères mes mains
Hors l’armure brisée
Sur le bord des chemins
En ordre sont dressées
Et la nuit s’exagère
Au brasier de la rouille
Tandis que les fougères
Vont aux écrins de houille
L’anémone des cieux
Fleurit sur mes parterres
Fleurit encore aux yeux
À l’ombre des paupières
Anémone des nuits
Qui plonge ses racines
Dans l’eau creuse des puits
Aux ténèbres des mines
Poseraient-ils leurs pieds
Sur le chemin sonore
Où se niche l’acier
Aux ailes de phosphore
Verraient-ils les mineurs
Constellés d’anthracite
Paraître l’astre en fleur
Dans un ciel en faillite
En cet astre qui luit
S’incarne la sirène
L’anémone des nuits
Fleurit sur son domaine
Alors que s’ébranlaient avec des cris d’orage
Les puissances Vertige au verger des éclairs
La sirène dardée à la proue d’un sillage
Vers la lune chante la romance de fer
Sa nage déchirait l’hermine des marées
Et la comète errant rouge sur un ciel noir
Paraissait par mirage aux étoiles ancrées
Rayait de feu le ciel et d’écume les eaux
L’anémone fleurie aux jardins des miroirs
Et parallèlement la double chevelure
Fougères surgissez hors de la déchirure
Par où l’acier saigna sur le fil des roseaux
[…]
Robert Desnos, Sirène-Anémone [1929], dans Domaine public, Le Point du jour, Gallimard, 1953, p. 155-156.
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19/09/2023
Robert Desnos, Langage cuit
La colombe de l’arche
Maudit !
soit le père de l’épouse
du forgeron qui forgea le fer de la cognée
avec laquelle le bûcheron abattit le chêne
dans lequel on sculpta le lit
où faut engendré l’arrière-grand-père
de l’homme qui conduisit la voiture
dans laquelle ta mère
rencontra ton père.
(14 novembre 1923)
Robert Desnos, Langage cuit, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 89.
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18/09/2023
Robert Desnos, L'aumonyme
Autant pour les crosses
Autant pour les crosses, évêques caducs qui baptisez les Êves aux aqueducs.
Autant pour les crosses, gens qui associez à l’amour votre sorte.
Flexible, Flexible, ma chère Flexible,
Est-ce ma chair, ma chère, sont-ce des crosses que vous cherchez ?
Autant pour
Autant dire.
Ici c’est Charles Cros.
Jamais plus pour Charles Cros.
Robert Desnos, L'aumonyme, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 67.
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17/09/2023
Chapiteaux romans, Dordogne
église de Saint-Orse, portail
Salle capitulaire de l'abbaye de Tourtoirac
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16/09/2023
Robert Desnos, Rrose Sélavy
Rrose Sélavy
29. Ah ! meurs, amour !
35. Si le silence est d’or, Rrose Sélavy abaisse ses cils et s’endort.
39. Rrose Sélavy propose que la pourriture des passions devienne la nourriture des nations.
49. Rrose Sélavy vous engage à ne pas prendre les verrues des seins pour les vertus des saints
53. Devise de Rrose Sélavy :
Plus que poli pour être honnête
Plus que poète pour être honni.
Robert Desnos, Rrose Sélavy, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p.41, 42, 42, 43, 43.
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15/09/2023
Robert Desnos, Rrose Sélavy
Rrose Sélavy
1.Dans un temple en stuc de pomme le pasteur distillait le suc des psaumes.
7. Ô mon crâne, étoile de nacre qui s’étiole.
10. Rrose Sélavy se demande si la mort des saisons fait tomber un sort sur les maisons.
19. Rrose Sélavy voudrait bien savoir si l’amour, cette colle à mouches, rend plus dures les molles couches.
21. Croyez-vous que Rose Sélavy connaisse ces jeux de fous qui mettent le feu aux joues ?
Robert Desnos, Domaine public, Gallimard, 11953, p.39, 39, 40, 40, 41.
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14/09/2023
Tristan Tzara, Où boivent les loups
errer errer dans une tête pleine
où j’attends la seule l’absente
la mal choisie d’entre les belles
la pierre au cou
par les profondes ruelles du sourire
tant d’hommes s’égarent près du pont
toujours partie — ni rides ni vents
parmi les rares
vieille l’ombre s’est rompue
de la branche sans amis
et la dernière est morte
qui voulait revivre une jeunesse morte
toute le neige toute
le ciel où demeurent toutes
ancrées désespérément
dans un cri — d’avoir trop compris
Tristan Tzara, Où boivent les loups, dans
Œuvres complètes, 2, 1925-1933, éditions
Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 207.
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13/09/2023
Robert Desnos, Les Ténèbres
Il fait nuit
Tu t’en iras quand tu voudras
Le lit se ferme et se délace avec délies comme un cordet de velours noir
Et l’insecte brillant se pose sur l’oreiller
Éclate et rejoint le Noir
Le flot qui martèle arrive et se tait
Samos la belle s’endort dans l’ouate
Clapier que fais-tu des drapeaux ? tu les roules dans la boue
À la bonne étoile et au fond de toute boue
Le naufrage s’accentue sous la paupière
Je conte les flacons de nuit et je les range sur une étagère
Le ramage de l’oiseau de bois se confond avec le bruit des bouchons en forme de regard
N’y pas aller n’y pas mourir la joie est de trop
Un convive de plus à la table ronde dans la clairière de vert émeraude et de heaumes retentissants près d’un monceau d’épées et d’armures cabossées
Nerf en amoureuse lampe éteinte de la fin du jour
Je dors
Robert Desnos, Les Ténèbres, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 132.
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Tristan Tzara, Où boivent les loups
il y a des heures, blanches épreuves
qu’engloutissent les maudites
sur le fente irréductible
d’un espoir trop plein
il y a tant de sens à l’aube qui sombrent
qu’il n’y ait qu’une aube de ce monde
seule et qu’elle ne fut que l’ombre
d’une raison parée de mille méduses
de ses clairs éclats ou des cendres
revivront les souffles oubliés
dans une aube nouvellement débordante
de vérités dures de pierres dures
et les aubes écrasées dans l’invisible sang
en laine au regard du fer jaloux
d’une croissance si pesante si grave
que le jour ne résiste au sourire avançant
dans la chaleur des mortifications où brûle encore
la constance du verre et se rue et se délasse
le tourment hideux de la vague à voir sans repos
Tristan Tzara, Où boivent les loups, dans Œuvres compères, 2,
1925-1933, éditions Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 233.
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12/09/2023
Tristan Tzara, L'homme approximatif
XII
le temps laisse choir de petits poucets derrière lui
il fauche les fines molécules sur les prairies d’eau
il dompte les poches d’air traverse leur jungle
il coupe le verde la vague et de chaque moitié s’illumine un papillon
dans le volcan il se faufile le long d’une note de violon
il boucle le cours filant du verre dans les fines heures de transparence
là où nos sommeils bousculent la chantante nourriture de lumière
Tristan Tzara, L’homme approximatif, dans Œuvres complètes 2, 1925-1933,
édition Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 131.
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11/09/2023
Tristan Tzara, L'arbre des voyageurs
à tour de rôle vainqueurs nous avons tous vaincus
dits et redits broyés — liseurs d’ombres —
aux enchères d’impossible quel survivant repentir
vous fera revivre l’un pour l’autre
ou trancher le nœud malade sans reproche
la perfidie des crimes où l’amère blancheur
se répand sur les seins san reproche
de tes nuits voyageur de dépit
nuits voyageuses je n’ai vu que clartés
de fruits charnus dans la chaleur de l’un et de l’autre
qu’une cruauté nouvelle vienne froissée dans l’enveloppe
toujours tu m’entendras venir dans le sang du mauvais signe
à l’aube elle se perd
au départ elle se regarde partir
la soir la fatigue
comme ma tête ne sait se reposer
Tristan Tzara, L’arbre des voyageurs, dans
Œuvres complètes, 2, 1925-1933, édition
Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 75.
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10/09/2023
Tristan Tzara, Premiers poèmes
Un beau matin aux dents fermées
je change le train en plume sonore
le pays n’a qu’un seul insecte
la maison aux narines d’or
est remplie de phrases correctes
découpons l’échelle matinale
de l’air et les nerfs de l’air
en différences irisées en cris de mal
pourquoi se regarder dans le blanc de l’air
Tristan Tzara, Premiers poèmes, dans Œuvres Complètes, I
(1912-1924), édition Henri Béhar, Flammarion, 1976, p. 217.
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