20/07/2017
Primo Levi, À une heure incertaine
Donnez-nous
Donnez-nous quelque chose à détruire,
Une corolle, un coin de silence,
Un compagnon de foi, un magistrat,
Une cabine téléphonique,
Un journaliste, un renégat,
Un supporter de l’autre équipe,
Un réverbère, une grille d’égout, un banc public,.
Donnez-nous quelque chose à érafler,
Un mur neuf, la Joconde,
Une aile de voiture, une pierre tombale.
Donnez-nous quelque chose à violer,
Une adolescente timide,
Un parterre de fleurs, nous-mêmes.
Ne nous méprisez pas : nous sommes
Des messagers et des prophètes,
Donnez-nous quelque chose qui brûle,
Offense, lacère, défonce, salisse,
Qui nous fasse sentir que nous existons.
Donnez-nous une matraque ou une Nagant,
Donnez-nous une seringue ou une Suzuki.
Plaignez-nous.
Primo Levi, À une heure incertaine, traduit de l’italien par Louis Bonalumi, préface de Jorge Semprun, Arcades/Gallimard, 1997, p. 93.
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19/07/2017
Juan Rodolfo Wilcox (1919-1978), Le stéréoscope des solitaires
La lectrice
Une grosse poule occupe l’appartement ; elle est si grosse qu’elle a déjà démoli quelques portes en essayant de passer d’une pièce dans l’autre. Ce n’est pas qu’elle soit très agitée cependant : c’est une poule intellectuelle et elle passe presque tout son temps à lire. En effet, elle est conseillère de la maison d’édition x… ; l’éditeur lui envoie tous les romans qui paraissent à l’étranger et la poule les lit, patiemment, de l’œil droit, car elle ne peut pas lire avec les deux yeux à la fois : celui de gauche reste fermé sous la belle paupière gris velouté. De temps à autre, la poule marmonne quelque chose, parce que les caractères d’imprimerie sont trop petits pour elle ; ou bien elle fait clo-clo et bat des ailes, mais personne ne sait si c’est de plaisir ou d’ennui. De toute façon, quand elle n’aime pas un livre, la poule intellectuelle le mange ; la maison x envoie ensuite un inspecteur ramasser les autres — qu’elle laisse éparpillés dans toute la maison — et les publie. Cela a été, dans le passé, à l’origine de quelques méprises : des livres qu’on retrouvait derrière une armoire alors qu’ils avaient déjà été publiés par un autre éditeur, avec un succès déplorable. Malgré cela, c’est la poule la plus influente de l’industrie du livre.
Nous ne savons comment nous en défaire : non seulement elle fait s’effondrer les portes, mais elle salit partout, et la domestique menace de s’en aller si la poule ne s’en va pas. Et cependant c’est un animal si intelligent, ses jugements sont si exacts, ses habitudes si douces : à six heures du soir, elle monte sur son divan, se juche, ferme les yeux et s’endort, sans plus déranger personne ; elle ne bouge même pas pour faire ses besoins. Le matin, à notre lever, nous la trouvons déjà dans la salle à manger en train de lire le dernier russe en Sibérie ou le dernier sud-américain. Et elle n’a jamais fait un œuf.
Rodolfo Wilcox, Le stéréoscope des solitaires, traduit de l’italien par André Maugé, Gallimard, 1976, p. 51-52.
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18/07/2017
Umberto Saba, Il Canzoniere
Le dernier amour
Que me faudrait-il pour être heureux ?
Une petite chambre, mais avec un feu allumé
deux tasses, deux petites tasses,
l’une pour toi, l’autre pour moi, Paolina ;
et adoucir de tes baisers l’amertume
de la boisson. O ma toute petite écoute :
je ne te verrais durant quelques jours, je crois,
que rarement et furtivement. Et tu ne voudrais pas
d’abord une fois, une seule fois, ce
qu’à l’oreille je t’ai dit, et toi,
levant sur moi une main qui dans son geste
fut de baisers punie et recouverte,
tu m’as répondu « coquin » ; et contre ma poitrine
tu cachais, en riant, ta petite tête.
Tu ne veux pas, Paolina ? que je conserve
un souvenir de toi, si doux si doux, que mon cœur
à ce souvenir défaille, et que ce soit
la dernière fleur que j’aurai cueillie parmi les vivants.
Umberto Saba, Il Canzoniere, L'Âge d’Homme, 1988, p. 197.
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17/07/2017
Sereine Berlottier, "récit"
« récit »
I
de vraie persécution
je recommence par la fin le récit
une première boucle
dans le soleil
loin de la fenêtre
ligotée par les veines
à quoi ressemble
ici encore, en séparé
malgré le murmure
on pourrait croire que ce ne sont pas des larmes, mais une sécrétion mystérieuse, opaque, l’envers des images captives dans la concrétion, brusquement, suinterait
un long chemin
il faut dessiner tout le paysage, et l’ayant dessiné le marteler de ses poings, miette après miette, et l’ayant martelé de ses poings, miette après miette, moudre la terre avec ses dents
ne pas retenir
[ …]
Sereine Berlottier, « récit », dans L’étrangère, n° 43-44, 2016, p. 51-52.
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16/07/2017
Paul de Roux, Les intermittences du jour, Carnets 1984-1985
On ne se voit pas vieillir : on se voit vieilli.
Petite conversation du merle dans le froid, la pluie, le jour à peine levé.
Aime ne rien attendre. Oui fais-en ton amour — autant que tu le peux.
Le poème, précaire réconciliation. Tout si précaire.
C’est en nous que tout manque, que rien n’accueille. Le monde, autour de nous, est immuable.
Paul de Roux, Les intermittences du jour, Carnets 1984-1985, le temps qu’il fait,1989, p. 115, 116, 126, 136, 144.
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15/07/2017
Christian Prigent, Ça tourne, notes de régie (2)
[À propos de Météo des plages]
Avril 2009
Ce qui me reste d’un « savoir » ( ?) du spécifique ( ??) du « poétique » ( ???)
Le langage poétique travaille avec les dimensions « non-figuratives » de la langue (graphique de la lettre, rebonds du son, tonicité des rythmes, mesure mathématique des scansions, portée respiratoire du phrasé).
Il vise à ressembler (ou résumer) ,son énergie non pas en une image descriptive, mais en une sorte de chiffre blasonné (Diderot disait : de hiéroglyphe) des contenus qu’il invoque : tel est le « poème ».
Il ne se contente pas de « dire », mais il fait ce qu’il dit : la forme fait (le) sens (leçon de Ponge de Pour un Malherbe, dans la suite de Mallarmé).
Ce qu’il « représente » (le « réel » qu’il verbalise) n’est pas ce qu’il « figure » (scènes, corps, sites, émotions : « sujets »).
Il va toujours vers la source de la « poésie » en lui (et ce « retour amont » est précisément ce qu’en définitive il « représente »).
Ce faisant il pointe plus généralement la « cause » énigmatique de la poésie. Un poème est une tentative de répondre à la question pourquoi il y a « de la poésie » plutôt que rien.
Soit : ce qu’un poème représente (quel que soit par ailleurs le développement composé de son « sujet ») est la cause de la poésie: l’innommable que la poésie tente envers et contre tout de nommer.
Christian Prigent, Ça tourne, notes de régie, L’Ollave, 2017, p. 58.
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14/07/2017
La butte rouge : chanson antimilitariste, guerre de 1914-1918, pour fêter le 14 juillet
La butte rouge
Sur cette butte là y’avait pas d’gigolettes
Pas de marlous ni de beaux muscadins.
Ah c’était loin du Moulin d’la Galette,
Et de Paname qu’est le roi des patelins.
C’qu’elle en a bu du bon sang cette terre,
Sang d’ouvriers et sang de paysans,
Car les bandits qui sont cause des guerres
s N’en meurent jamais, on n’tue qu’les innocents !
La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boira d’ce vin là, boira l’sang des copains.
Sur cette butte là on n’y f’sait pas la noce
Comme à Montmartre où l’champagne coule à flots,
Mais les pauvr’s gars qu’avaient laissé des gosses
Y f’saient entendre de terribles sanglots ...
C’qu’elle en a bu des larmes cette terre,
Larmes d’ouvriers et larmes de paysans
Car les bandits qui sont cause des guerres
Ne pleurent jamais, car ce sont des tyrans !
La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boit de ce vin là, boit les larmes des copains.
Sur cette butte là, on y r’fait des vendanges,
On y entend des cris et des chansons :
Filles et gars doucement qui échangent
Des mots d’amour qui donnent le frisson.
Peuvent-ils songer, dans leurs folles étreintes,
Qu’à cet endroit où s’échangent leurs baisers,
J’ai entendu la nuit monter des plaintes
Et j’y ai vu des gars au crâne brisé !
La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin.
Mais moi j’y vois des croix portant l’nom des copains.
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13/07/2017
Christian Prigent, Ça tourne, notes de régie
[à propos de Grand-mère Quéquette]
De quoi ça parle (ce livre, mes ivres en général) ? Du réel.
Je le redis, martèle, n’ai sûrement pas fini de le ressasser (il n’est pas sourd… — la pire des surdité étant sans doute ma propre incrédulité).
Je pars de ceci, qui concerne empiriquement tous les êtres parlants : qu’aucun des discours positifs (science, morale, idéologie, religion…) ne rend compte de l’expérience que nous faisons intimement, chacun pour notre compte, du monde (de la manière dont le réel nous affecte). Parce que le monde (le monde « extérieur » — société, politique, histoire — et le monde « intérieur » — nos « cieux du dedans » : mémoire, inconscient, imaginaire) ne nous vient pas comme sens, mais comme confusion, affects ambivalents, jouissance et souffrance mêlées, chaque fois polyphonie insensée.
Christian Prigent, Ça tourne, notes de régie, L’Ollave, 2017, p. 21.
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12/07/2017
Franz Kafka, Lettres à Ottla
[Matlyary, vers le 10 février 1921]
(… l’après-midi il faisait trop froid pour écrire, le soir j’étais trop triste, et aujourd’hui, aujourd’hui il fait de nouveau trop beau, le soleil brûle. Le jour j’étais triste parce que j’avais mangé des sardines, c’était bien préparé, mayonnaise, petits morceaux de beurre, purée de mômes de terre, seulement c’étaient des sardines. Depuis quelques jours déjà, la viande me faisait envie, ça a été une bonne leçon. Après cela j’ai erré dans la forêt, triste come une hyène (avec un brin de toux en guise de signe humain distinctif) et j(ai passé la nit triste comme une hyène. Je voyais la hyène trouver uen boîte de sardine perdue par une caravane, piétiner le petit cercueil de fer-blanc et l’ouvrir pour se repaître des cadavres. En quoi elle ne se distingue peut-être de l’homme que parce qu’elle y est forcée et ne le veut pas (sinon pourquoi serait-elle si triste, pourquoi la tristesse lui fermerait-elle toujoutd à demi les yeux ?), alors que nous le voulons sans y être forcés. Tôt le matin le docteur m’a consolé : après tout c’est moi qui i mangé les sardines et non les sardines qui m’ont mangé.
Franz Kafka, Lettres à Ottla, traduction Marthe Robert, Gallimard, 1978, p. 110.
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11/07/2017
André Malraux, Royaume farfelu (1928)
Prenez garde, diables frisés : de pâles images se forment sur la mer en silence ; cette heure n’est plus la vôtre. Voyez, voyez : en face des tombeaux de lieux saints, les visiteurs remontent lentement les horloges qui mesurent l’éternité aux sultans morts — les papes et les antipapes dorés se poursuivent dans les égouts déserts de Rome ; derrière eux rient sans bruit des démons à la queue soyeuse qui sont les anciens empereurs — à travers le désert, un vagabond marche vers une ville éblouissante, environné de vols de perdrix qui se mussent autour de lui comme des poussins, le soir — un roi qui n’aime plus que la musique et les supplices erre la nuit, désolé, soufflant dans de hautes trompes d’argent et entrainant son peuple qui danse… et voici qu’à la frontière des deux Indes, sous des arbres aux feuilles serrées comme des bêtes, un conquérant abandonné s’endort dans son armure noire, entouré de singes inquiets…
André Malraux, Royaume farfelu (1928), dans La Condition humaine et autres écrits, Pléiade / Gallimard, 2016, p. 3.
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10/07/2017
Georges Perec, La belle absente
La belle absente
1
Daphné fit le visage que j’ombre
Plomb figé devenu torche jusqu’ ;
Au dos fragile, vasque, jubé, champ,
Blanc qu’âge de jade rompt à vif
Jusqu’au flambant pavot d’or, gâchis
Déjà fléchés : manque. Boive ta page
Humble, grave, l’aspect que je fonde,
Qui défit cet aplomb gravé hors jeu
Champ d’or gravi jusqu’au but final.
2
Inquiet, aujourd’hui, ton pur visage flambe.
Je plonge vers toi qui déchiffre l’ombre et
La lampe jusqu’à l’obscure frange de l’hiver :
Quêtes de plomb fragile où j’avance, masqué
Nu, hagard, buvant ta soif jusqu’à accomplir
L’image qui s’efface, alphabet déjà évanoui.
L’étrave de ton regard est champ bref que je
Dois espérer, la flèche tragique, verbe jeté,
Plain-chant qu’amour flambant grava jadis.
Georges Perec, Œuvres, II, édition Christelle Reggiani,
Pléiade / Gallimard, 2017, p. 796.
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09/07/2017
Rainer Maria Rilke, La mélodie de l'amour et de la mort du cornette Christoph Rilke
Chevaucher, chevaucher, chevaucher, le jour, la nuit, le jour.
Chevaucher, chevaucher, chevaucher.
Et la vaillance est maintenant si lasse et la nostalgie si grande. Il n’y a plus de montagnes, à peine un arbre. Rien n’ose se lever. Des cahutes étrangères sont accroupies assoiffées près de puits envasés. Nulle part une tour. Et partout le même tableau. On a deux yeux en trop. La nuit seulement, on croit parfois connaître le chemin. Peut-être que nous refaisons sans cesse la nuit le trajet que nous avons péniblement gagné sous un soleil étranger ? C’est possible. Le soleil est pesant, comme chez nous en plein été. Mais nous avons fait nos adieux en été. Les robes des femmes brillèrent longtemps sur la verdure. Et nous chevauchons maintenant depuis longtemps. On ne peut donc qu’être en automne. Du moins là où des femmes tristes nous connaissent.
Rainer Maria Rilke, La mélodie de l’amour et de la mort su cornette Christoph Rilke, traduction Roland Crastes de Paulet, Alia, 2017, p. 11.
02/07/2017
Jean-Pierre Burgart, Stèle
Stèle
Je suis là
et toi dans la crypte
où il n’est plus d’images ni de noms
en toi j’habite l’oubli
tu ne rêves plus de moi, tu ne sens pas
mon bras posé sur ton épaule
ni sur ta nuque la chaleur de ma paume
sur tes lèvres affleure à ton insu
le dessin de mes lèvres, dans une voix
inconnue passe une inflexion de ma voix
tu ne l’entends pas, autour de toi
la couleur flambe ou s’éteint
tu ne sais pas pourquoi
j’habite l’oubli
Jean-Pierre Burgart, Pris par le temps, dans
L’étrangère, n° 43-44, p. 19.
Littérature de partout reprendra ses publications le 10 juillet
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01/07/2017
Cioran, Aveux et anathèmes
Kandinsky soutient que le jaune est la couleur de la vie….On sait maintenant pourquoi cette couleur fait si mal aux yeux.
Sainte-Beuve écrivait en 1849 que la jeunesse se détournait du mal romantique pour rêver, à l’exemple des saint-simoniens, du « triomphe illimité de l’industrie ».
Ce rêve, pleinement réalisé, jette le discrédit sur toutes nos entreprises et sur l’idée même d’espoir.
Si je me suis toujours méfié de Freud, c’est mon père qui en porte la responsabilité : il racontait ses rêves à ma mère, et me gâchait ainsi toutes mes matinées.
On n’habite pas un pays, on habite une langue. Une patrie, c’est cela et rien d’autre.
Cioran, Aveux et anathèmes, Arcades / Gallimard, 1987, p. 15, 17, 18, 21.
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30/06/2017
Chamfort, Maximes et pensées
La plupart des nobles rappellent leurs ancêtres, à peu près comme un Cicerone d’Italie rappelle Cicéron.
J’ai vu, dans le monde, qu’on sacrifiait sans cesse l’estime des honnêtes gens à la considération, et le repos à la célébrité.
Ne tenir dans la main de personne, être l’homme de son cœur, de ses principes, de ses sentiments, c’est ce que j’ai vu de plus rare.
Il y a des hommes qui ont besoin de primer, de s’élever au-dessus des autres, à quelque prix que ce puisse être. Tout leur est égal, pourvu qu’ils soient en évidence sur des tréteaux de Charlatan ; sur un théâtre, un trône, un échafaud, ils seront toujours bien, s’ils attirent les yeux.
La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri.
Chamfort, Maximes et pensées, éditions jean Dagen, Garnier-Flammarion, 1968.
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