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30/06/2025

James Sacré, Des objets nous accompagnent (ou l'inverse)

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Quelque part en Galicie.

Le tour permet aux mains du potier

De monter une grande quantité de bols, les voilà mis

Dans presque tout l’espace de l’atelier, comme si

L’obscur z la terre nue

Fleurissait par-dessus le ciment.

 

Sur le haut d’un meuble chez moi

D’autres bols de fabrication marocaine :

Les regarder met du plaisir

Dans les mots silencieux.

 

James Sacré, Des objets nous accompagnent (ou l’inverse),

PURH, 2025, p. 21.

29/06/2025

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

laurent fourcaut, sacrée marchandise, hein ?, décadence

            Aux Champs Élyséens

 

Sur les Champs Élysées de Marcel Proust

les marronniers endurent une foule

hétéroclite et veule il eût dit : oust !

l’enfant au cerceau dont perdu le moule

il narra la fin d’un monde qui croule

sous la poussée de barbares nouveaux

ont fait depuis longtemps rôtir le veau

d’or pour convertir tout en marchandise

tout jusques à vos rêves vous est vo

lé reste une uniforme bâtardise

 

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?,

La Rumeur libre, 2025, p. 95.

28/06/2025

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

 

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      Compte tenu des mots

 

Deux perdrix font un trou dans la poussière

du hangar s’y vautrant en un nid

la faune vous a de ces mœurs princières

dommage qu’on en ait été bannis

ce non  pas suite d’un décret éni

gmatique mais du fait de la parole

vu qu’elle abstrait on n’est plus à la colle

avec le « monde muet » qu’il prisait

Ponge remonté contre le symbole

pas pour autant le gars qu’il se taisait

 

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

Le Merle moqueur, 2025, p. 54.

27/06/2025

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

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                Facebook

 

Hors de question d’aller sur fesse bouc

où se débonde libre un tombereau

d’accablantes niaiseries c’est un souk

nauséabond où se montrent les crocs

où s’exhibent les fesses des héros

du jour mais tenez-vous voici le pire

on se soumet de facto à l’empire

des sens prostitués : à la canto

nade on divulgue son minable dire

version abâtardie du bel canto

 

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

Le Merle moqueur, 2025, p. 34.

26/06/2025

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

 

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               Rosebud

 

Regard de qui reconnaît son désir

après avoir troué les subterfuges

comme il s’embue qui voulait se durcir

tant qu’il n’avait remémoré sa luge

- s’arcbouter sur sa lésine vous gruge

serré dans son bouton la rose attend

que l’enclos de ses larmes se déten

de et les laisse s’écouler et les laisse

l’ouvrir elle la rose tant et tant

que la haine de soi plus ne la presse

 

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

Le Merle moqueur, 2025, p. 43.

25/06/2025

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

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              La messe est dite

 

L’espère humaine occupe tout l’espace

urbain ses maisons ses rues tout rempli

à bloc elle est le seul grand rapace

flingués autres vivants jusqu’à l’oubli

mais voilà qu’à la fin elle faiblit

les animaux refoulés lui refilent

un truc à décimer les grandes villes

rongées jusqu’au trognon de passions viles

où ça pullule avec obscénité

l’a-t-on assez dédaignée la sibylle

que peut-elle dire sinon : ite

missa est ?

 

Laurent Fourcaut, Sacrée marchandise, hein ?

                                     Le Merle moqueur, 2025, p. 47.

23/06/2025

Tristan Corbière, Les Amours jaunes

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Le crapaud

 

Un chant dans une nuit sans air…

La lune plaque en métal clair

Les découpures du vert sombre.

 

… Un chant ; comme un écho, tout vif

Enterré, là, sous le massif…

— Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre…

 

— Un crapaud ! Pourquoi cette peur,

Près de moi, ton soldat fidèle !

Vois-le, poète tondu, sans aile,

Rossignol de la boue… — Horreur !

 

… Il chante. — Horreur !! — Horreur pourquoi ?

Vois-tu pas son œil de lumière…

Non : il s’en va, froid, sous sa pierre…

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  . . . . . . . . . . . .

 

Bonsoir — ce crapaud-là c’est moi.

 

Ce soir, 20 juillet.

 

Tristan Corbière, Les Amours jaunes, dans Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, Pléiade, Gallimard, 1970, p. 735.

 

21/06/2025

Laura Tirandaz, J'étais dans la foule

laura tirandaz, j'étais dans la foule

Le cri dans une prairie quand on s’est perdu

Ce point à l’horizon quand les bêtes cessent leur repas

Ces draps qu’on repousse qu’on espère

 

Quelqu’un cherche mon prénom

et ne sait plus quelle lumière

sous quelle couture il m’a connue

Je n’ai rien gardé d’autre

que quelques terreurs

et le goût des portes qui fermaient mal

 

Mais toi

Ton corps se fait virgule

systole

marche

pierre

à lancer contre les murs

 

Tout n’est pas à l’usage des vivants

 

Laura Tirandaz, J’étais dans la foule,

Héros-Limite, 2025, p. 56.

20/06/2025

Laura Tirandaz, J'étais dans la foule

laura tirandaz,j'étais dans la foule,témoin,figurant

Dans cette aube qui se refuse

se nouent de nouvelles présences

Un vêtement une trame une fuite en avant

J’étais encore là

témoin ou figurante

Je savais

ces lacs qu’on emporte avec soi

ces vieilles bâtisses

la douceur de tout ce qui tombe en ruine

et

tombant en ruine

s’invente un nouveau visage

 

Laura Tirandaz, J’étais dans la foule,

Héros-Limite, 2025, p.45.

19/06/2025

Laura Tirandaz, J'étais dans la foule

laura tirandaz, j'étais dans la foule, point de vue

Qu’un pauvre chemin

sans fruit sans ronce

sans brouillard qui affole

sans garçon en embuscade

 

Traverser

Un simple chemin

Il n’y avait pas de pierre

Rien à construire

Rien à détruire

 

Voilà

l’éclaircissement qu’apporte l’orage

 

Laura Tirandaz, J’étais dans la foule,

Héros-Limite, 2025, p. 42.

18/06/2025

Laura Tirandaz, J'étais dans la foule

laura tirandaz,j'étais dans la foule,injure

Les places sont déjà prises

Reste une suite d’espace

de derniers étages

Feux d’une fenêtre close

Il se déshabille

courbe sa nuque

Il jette les restes du jour

les dents serrées sur l’injure

Prisonnier d’un cauchemar où la joie sonnait trop fort

 

Laura Tirandaz, J’étais dans la foule, Héros-Limite,

2025, p. 25.

16/06/2025

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski

 

cécile a. holdban, le rêve de dostoïevsk, écriture

Nous avons tant écrit

les pierres s’ouvrent, sans retour sur le chemin

les voix des bêtes couvent,

petits feux dans des lieux sans carte

et les étoiles tissent l’espace

hors de nous.

Nous avons trop écrit peut-être

les mots sont plus lourds que des pierres

nous les lançons avec le fol espoir

qu’ils deviennent flamme, éclair, oiseau.

 

 Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski,

Arfuyen, 2025, p. 128.

15/06/2025

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski

cécile a. holdban, le rêve de dostoïevski, l'orchestre invisible

L’orchestre invisible

 

Écoute, comme

par petites touches

le temps s’épaissit,

dans sa pâte de lumière

et d’obscurité,

un roulement,

une rumeur un peu marine,

un peu comme si le sang du corps

remuait vers dehors

et se mêlait à l’air

dans une couleur naissante

impossible à nommer

sans qu’elle ne disparaisse.

 

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski,

Arfuyen, 2025, p. 109.

14/06/2025

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski

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Tandis que la nuit encercle les maisons

d’un horizon toujours plus étroit

qu’un beffroi invisible pèse sur la voix

des vivants, et le froid

                                      s’insinue jusqu’à l’espace intime de nos cils, de nos lèvres,

chaque mot semble usé, effiloché

prêt à s’évanouir dans le pointillé des pluies

résonance assourdie, dont nous redoutons

qu’elle nous fige définitivement,

un cœur se serre

et fait vœu d’une rose aux pétales mobiles

dont le centre serait

notre feu absent.

 

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski, Arfuyen, 2025, p. 95.

13/06/2025

Cécile A. Holdban, Le Rêve de Dostoïevski

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                            Aria


 Ne précipite rien, trouve ta forme, l’ombre 
glisse sous tes ailes 
l’épaule des collines se hausse 
 
sur l’intimité des herbes

un seul battement de cils 
dans le soleil antique 
 
et l’été coule entre nos doigts 
les voûtes claires, rieuses 
s’élancent entre les corps.
 
Cécile A. Holdban, Le rêve de Dostoïevski,
Arfuyen, 2025, p.  77.