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25/11/2025

Piere Revrdy, Œuvres complètes, II

pierre reverdi,Œuvres complètes,ii,respiration

                  Sans respirer

              
La jambe à droite
                       L’ombre du mort
Le marbre
           La table qui s’est inclinée
La nuit recouvre tout de son tapis troué
Le silence a de la peine à vaincre le bruit
Les mots faiblissent de partout
Et les lèvres frémissent
On ne sait pas pourquoi
Contre le mur des paroles qui glissent
Entre les doigts
                       Le vent
                       Le souffle
                       Et les soupirs
Partout entre les arbres tout ce qu’on voit courir

Piere Reverdy, Œuvres complètes, II, Flammarion,

2010, p. 244.

21/11/2025

Pierre Reverdy, Le livre de mon bord

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Le style, ce ne doit pas être tellement l’homme qu’on l’a dit – car l’on se complaît bien plus à sa personnalité qu’en ce qu’on écrit. On se désespère d’écrire mal, et rien ne concorde entre ce que l’on sent et ce que l’on écrit. On se relit, on retouche ce style répugnant, rien ne vient mieux. Je crois que ce qui est vraiment l’homme c’est le plaisir ou le dégoût qu’il prend à l’effort pour écrire mieux. C’est-à-dire qu’il n’y ait pas plus de vulgarité dans le style que dans la pensée.


L’homme ne se réalise que dans la connaissance. Les frontières de sa connaissance sont les frontières de son être. Plus il connaît, plus il est vaste et étendu, moins il connaît, plus il est étroit et restreint. Mais il y a aussi le parti qu’il tire et l’usage qu’il fait de ces connaissances et qui le font grand ou petit.

Le style, bon ou mauvais, je parle de ce qui caractérise un écrivain, ce n’est pas le premier jet, mais l’état où il laisse la chose écrite, celui auquel il n’éprouve plus le besoin de rien changer. Et ce n’est pas la moindre révélation du caractère que de ne jamais tenir pour définitive l’expression formelle de sa pensée.


Pierre Reverdy, Le livre de mon bord, Mercure de France, 1948,  p. 47-48, 162, 210.

20/11/2025

Pierre Reverdy, Gant de crin

pierre reverdi, gant de crin, image

Je ne connais pas d’exemple d’une œuvre qui ait inspiré moins de confiance à son auteur que la mienne.
Aussi me gardé-je bien de la défendre.
J’accepte ici qu’elle peut n’être qu’un témoin d’impuissance.


Le propre de l’image forte est d’être issue du rapprochement spontané de deux réalités très distantes dont l’esprit seul a saisi les rapports.

Le poète est poussé à créer par le besoin constant et obsédant de sonder le mystère de son être intérieur, de connaître son pouvoir et sa force.
Il n’est que les gens de métier qui se satisfassent de quelque certitude sur leurs facultés.
Mais en poésie les gens de métier sont les médiocres.

Si les glaces de verre sont flatteuses pour toi, supprime-les. Ne te regarde pas en dehors mais en dedans, il y a là un sombre miroir sans complaisance.


Pierre Reverdy, Gant de crin, Plon, 1927, p. 26-27, 34, 44, 105.