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11/06/2024

Emily Dickinson, Du côté des mortels : recension

emily dickinson, dru côté des mortels : recension

               « La Vie n’est que la Vie ! Et la Mort la Mort ! »

 

Est-il indispensable de donner une nouvelle traduction de poèmes dont on a déjà plusieurs versions ? Ce genre de questions, heureusement, n’a plus cours : il existe plusieurs éditions en français, complètes ou non, des poèmes d’Emily Dickinson, on peut prendre plaisir à passer de l’une à l’autre, et l’on peut en souhaiter de nouvelles ; les variations dans la saisie de la langue source aboutissent à des solutions différentes qui sont toujours bienvenues. François Heusbourg n’a pas le projet de traduire la totalité de l’œuvre, près de 1800 poèmes, mais en choisit par tranches chronologiques : il a déjà publié quatre volumes et il présente ici un ensemble pris dans les années 1860 et 1861, « juste avant la période la plus intense de sa production poétique ».

 

"Du côté des mortels" est la traduction du dernier vers (« Opon the mortal side », p. 28) d’un poème., vers choisi parce que dans cet ensemble demeurent encore fortement vivants pour la jeune femme — elle a trente ans — Amherst, le jardin, les fleurs, les oiseaux, l’enfance, avant le repli noté par le traducteur « dans le monde intérieur de la demeure familiale ». La nature est très présente, sous une forme générale (arbre, verger, rosée, oiseau — « "Maman" n’oublie jamais les oiseaux » —, etc.) et les différents éléments observés peuvent être aussi nommés : aster, renoncule, marguerite, rose, baumier, grive, merle, cerf, cerise, etc., et souvent mis en relation, « Si la Campanule avait ouvert son corset / à l’Abeille amoureuse (…) ». L’attention d’Emily Dickinson aux choses de la nature est aussi lisible dans des comparaisons, par exemple dans « Toi — aussi — prends des allures d’Arantèle » [= mot ancien pour "toile d’araignée" ; pour cobweb].  Il y a dans son imaginaire le sentiment d’être totalement du côté des plantes et des animaux, ainsi dans un distique : « Ni Rose, me suis pourtant sentie fleurir, / Ni oiseau — ai pourtant plané dans l’Éther — » ; cette proximité est sans doute nécessaire dans un monde où il lui est difficile de trouver une identité.

 

Il faut pour cela pouvoir se situer, y compris dans le temps. Ce qui est le plus aisé à définir pour elle, c’est le passé. Quelques éléments qui ont compté sont conservés dans une « boîte d’Ébène », une lettre, une fleur, une boucle. On ne saura rien de plus, sinon qu’ils appartiennent à un temps accompli, « comme si la petite Boîte d’Ébène / N’était notre affaire en rien ». Pour le présent, Emily Dickinson imagine pouvoir un lieu social tout en en marquant la quasi impossibilité, « À l’aube — je serai — une Épouse — (…) À minuit — je ne suis qu’une jeune fille — (…) / Si tôt pour une enfant — de ne plus l’être — ». L’aube est toujours le moment d’une séparation pour quelque chose à venir - c’est le matin renaissance -, d’où la question « Y aura-t-il vraiment un matin ? » pour que s’accomplisse, notamment, la sortie de l’enfance, qu’elle devienne elle-même, « Je suis "Femme" maintenant / C’est plus sûr ainsi ». Femme, épouse…, lorsqu’elle a « prudemment, examiné [sa] petite vie », elle a fait la part de ce qui pouvait disparaître et rester, et elle termine par une question, « Te trouves-tu dans cette petite Grange / Que l’Amour T’a offerte ? ».

 

À côté d’Emily, il y aurait un "tu" et cet "Autre" semble bien vivant ; elle lui écrirait tant qu’elle voit son « crayon émoussé » et, pensant à une prochaine rencontre elle note qu’il lui faudrait « Songer à ce que moi-même je dirai / Et ce que lui-même me dira à moi — ». Elle projette une vie commune, imaginant une présence continue (« Marcher pour toujours à ses côtés ») et elle est consciente que la durée est nécessaire pour que l’Autre devienne pleinement un "tu", « La vie entière — pour connaître l’autre / Que nous ne pouvons jamais apprendre ». Serait-ce la voie pour être reconnue ? « Enfin— être identifiée —/ Enfin — les Lampes tournées vers toi —/ Le reste de la vie — ». Parallèlement à ce désir d’être vue comme une femme, et surtout un "je", est aussi rappelé le sort commun, le sort de tous, donc le sien, « Je ne suis Personne / Qui êtes-vous ? / Êtes-vous — Personne — vous aussi ? / (…) C’est si morne — d’être — Quelqu’un / Si commun — ».  Ce mouvement de la reconnaissance de ce qu’elle est à l’effacement est une constante, mais son identité est toujours assurée quand elle parle de son rapport à la nature, en particulier à l’eau, à la mer. S’imaginant devenue rivière, elle questionne, « Mer bleue — m’accueilleras-tu ? » ; question toute rhétorique : elle ne pense pas être comme une goutte d’eau dans la mer, qu’elle associe par ailleurs à l’Autre rêvé dans deux vers quelque peu énigmatiques, « Les plus petites Rivières — dociles à quelque mer / ma Caspienne — toi ». L’eau est parfois associée à la mort : un nageur disparaît, parce que la mort n’est jamais loin dans les poèmes d’Emily Dickinson.

Elle est bien terrienne et son lien à la nature proche d’elle est vivant, constant, ce qui n’empêche pas qu’elle aille « Vers l’éternité profonde », que la mort soit toujours présente, emportant une amie. Elle-même, se supposant disparaître, souhaiterait qu’une grive « à Foulard Rouge » reçoive « une miette Commémorative ». Les vers semblent parfois empruntés à une prédication tant ils ne laissent que peu d’espoir à la vie, « La Poussière est le seul Secret / La mort la seule Personne ». Reste le paradis, qui l’obsède, coupé de tout ce qu’elle vit : « Savent-ils qu’ici c’est "Amherst" — ».

 

Tout a été dit de la simplicité du vocabulaire d’Emily Dickinson. et de son usage du tiret qui impose un rythme à la lecture, mais qui ne rendent en rien aisée la traduction : celle de François Heusbourg transforme notre approche des poèmes sans doute parce qu’il traduit en ayant présent l’ensemble de l’œuvre. On lira avec intérêt l’analyse de Claude Ber, à qui la postface a été confiée comme elle l’a été à des écrivaines dans les volumes précédents.

Emily Dickinson, Du côté des mortels, Poèmes 1860-1861, traduction François Heusbourg, éditions Unes, 2023, 152 p. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 19 avril 2024.

 

 

 

10/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

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Le passé vit de hasards. Tout incident tire un souvenir.

 

Mon hasard est plus moi que moi.

Une personne n’est que réponses à quantité d’incidents impersonnels.

 

Il importe que le passé ne soit pas seulement à moitié mort.

 

Toute discussion se réduit à donner l’adversaire la couleur d’un sot ou la figure d’une canaille.

 

Duplicité :

Que si tu veux paraître jouer un double jeu et tenir double rôle, joue le tien. Pour paraître inconstant, il suffit de demeurer ce que l’on est, — constant ou non.

 

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade, 1960, p. 879, 880, 881, 883, 885.

09/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

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Tous les jugements sur les hommes ou sur les œuvres qui sont louanges ou blâmes, sont des jugements de concierges : jugements de cerveaux qui sont à la porte des choses.

 

« Confier sa peine au papier »

Drôle d’idée. Origine de plus d’un livre, et de tous les plus mauvais.

 

Nous avons de quoi saisir ce qui n’existe pas et de quoi ne pas voir ce qui nous crève les yeux.

 

Quelle que doit la valeur, le pouvoir pénétrant d’une explication, c’est encore et toujours la chose qu’elle explique qui est la plus réelle, — et parmi sa réalité, précisément ce mystère qu’on a voulu dissiper.

 

Le naturel est ennuyeux.

 

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade, 1960, p. 865, 866, 866, 871, 874.

08/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

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Conte

Il y eut autrefois un homme qui devint sage.

Il apprit à ne plus faire de geste ni de pas qui ne fussent utiles.

Peu après, on l’enferma.

 

Chaque homme sait une quantité prodigieuses de choses  qu’il ignore, qu’il sait. Savoir tout ce que nous savons ? Cette simple recherche épuise la philosophie.

 

Ce qui est simple est toujours faux, ce qui ne l’est pas est inutilisable.

 

L’espoir fait vivre, mais comme sur une corde raide.

 

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade, 1960, p. 851, 863, 864, 864.

07/06/2024

Vadom Kosovoï, Correspondance Maurice Blanchot–Vadim Kosovoï

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Après la lecture de L’Instant de ma mort, de Maurice Blanchot :

 

La mort en instance, serait-elle toujours la même DEVANT le même jeune homme ou le même enfant ? Et EN lui toujours aussi légère ?

Je la vis sans peut-être la voir (car je fermai les yeux, on le sait) à l’âge de sept ans ou, pour être plus précis, de six ans et demi, dans une petite gare, devant notre train qui devait repartir. Ce fut un lourd obus d’artillerie, trop lourd pour moi, qui gisait à même le sol, couvert d’immondices, (je le remarquai au dernier instant), que je levai péniblement, puis jetai (ou plutôt laissai tomber). Et qui s’enfonça dans mon œil gauche, quasi déchiqueta ma jambe gauche, couvrit ma tête, ma poitrine et mes bras de maintes traces indélébiles de souffrance. Je m’assis, la tête penchée.

Je la revis (si seulement ce « je » m’appartient) de nombreuses fois encore sur les corps mutilés de ces enfants qu’on apportait à l’hôpital, inertes et mugissants, pour les soigner un peu ou plutôt pour les laisser mourir. Je savais, me semble-t-il, que la douleur et l’agonie d’autrui me concernaient de près, qu’elles me promettaient ma propre fin.

Je la revis métamorphosée (mais toujours la même, celle que je croyais connaître, si ce n’est avoir connue) dans mes rêves illuminés, en prison, (deuxième ou troisième année), à travers le feu de plusieurs fins du monde les unes plus fantasmagoriques que les autres.

Je la vis une fois pour toutes (toujours en prison) bien plus calme, voire impassible, pendant une nuit d’adieu et d’extrême épouvante, après une expérience particulièrement lourde de hachisch, une mort qui me rendait mon MOI STRATÉGIQUE, affreusement émietté, dispersé par l’effet du poison [...].

 

Correspondance Maurice Blanchot –Vadim Kosovoï, Lettre à Maurice Blanchot du 3 novembre (1994 ?), dans PO&SIE, n° 112-113, éditions Belin, 2005, p. 110.

05/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

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                                                    Histoire

Dans l’histoire, les personnages qui n’ont pas eu la tête coupée, et les personnages qui n’ont pas fait couper de têtes disparaisssent sans laisser de traces.

Il faut être victime ou bourreau, ou sans aucune importance.

Si Richelieu n’eût pas usé de la hache, Robespierre de la guillotine, l’un serait moindre, l’autre effacé. Tout ceci est d’un mauvais exemple.

Le supplice du Christ fut l’origine d’une onde immense, et plus agissant sur les êtres que tous les miracles : sa mort plus sensible aux hommes que sa résurrection.

 

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade, 1960, p. 837.

04/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

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L’homme se cramponne à ce qu’il croit valoir.

 

Être soi-même !... mais soi-même en vaut-il la peine ?

 

On ne pense réellement à soi et que l’on est soi que quand on ne pense à rien.

 

« Mets les rieurs de ton côté » — et le bateau chavire. Il te verse avec eux dans le vulgaire.

 

Chacun de nous est le seul être au monde qui ne soit pas toujours une mécanique.

 

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade 1960, p. 806, 811, 814, 827, 828.

03/06/2024

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres

 

                                  paul valer, mauvaises pensées et autres, mystère, sottise,

Parfois la sottise, parfois la puissance de l’esprit, s’obstine contre le fait.                                 

Ce qu’on appelle mystère du monde, mystère de la vie, n’est en soi pas plus profond que l’impuissance des yeux à voir le dos de leur homme.

La nuque est un mystère pour l’œil.

Il est impossible de penser sérieusement — avec des mots comme Classicisme, Romantisme, Humanisme, Réalisme…

On ne s’enivre ni ne se désaltère avec des étiquettes de bouteilles.

La lecture des histoires et romans set à tuer le temps de deuxième ou troisième qualité.

Le temps de première qualité n’a pas besoin qu’on le tue. C’est lui qui tue tous les livres. Il en engendre quelques-uns.

 

Le besoin de nouveau est signe de fatigue ou de faiblesse de l’esprit, qui demande ce qui lui manque.

Car il n’est rien qui ne soit nouveau.

  

Paul Valéry, Mauvaises pensées et autres, dans Œuvres, II, Gallimard / Pléiade, 1960, p. 791, 797, 801, 801, 803.

02/06/2024

Franz Kafka, À Milena

 

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(…) je connais ma relation à toi (tu m’appartiens, même si je ne devais plus jamais te voir), je la connais tant qu’elle n’appartient pas au domaine opaque de la peur, mais ta relation avec moi, je ne la connais pas du tout, elle appartient toute entière à la peur. Tu ne me connais pas non plus, Milena, je te le répète.

Pour moi ce qui se passe a quelque chose de formidable, mon monde s’effondre, mon monde s’édifie, voilà comment tu (ce tu que je suis) subsistes. Je ne me plains pas de l’effondrement, il était en train de s’effondrer, je me plains de son édification, je me plains de mes faibles forces je me plains d’être né, je me plains de la lumière du soleil.

 

Franz Kafka, À Milena, traduction Robert Kahn, NOUS, 2021, p. 68.

01/06/2024

Franz Kafka, À Milena

 

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(…) Comme je t’aime (et je t’aime donc, toi la récalcitrante, comme la mer aime un minuscule galet de son fond, c’est exactement ainsi que mon amour te recouvre — et que chez toi je vois de nouveau le galet, si les cieux le permettent) j’aime le monde entier et ton épaule gauche en fait aussi partie, non, c’était d’abord le droit et c’est pourquoi je l’embrasse, quand j’en ai envie (et que tu es assez gentille pour entrouvrir la blouse) et l’épaule gauche en fait aussi partie et ton visage au-dessus de moi dans la forêt et ton visage en-dessous de moi dans la forêt et le repos sur ton sein presque nu. Et c’est pourquoi tu as raison quand tu dis que nous n’avons déjà fait qu’un et je n’ai aucune peur de cela, mais c’est mon seul bonheur et ma seule fierté et je ne le limite pas du tout à la forêt.

   Mais maintenant entre ce monde du jour et cette « demi-heure au lit » que tu as dans une lettre qualifiée de termes méprisants comme une affaire d’hommes, il y a un abîme, que je ne peux pas franchir, sans doute parce que je ne le veux pas. Là-bas c’est l’affaire de la nuit, vraiment dans tous les sens du terme l’affaire de la nuit ; ici c’est le monde et je le possède et maintenant je devrais sauter dans la nuit pour en reprendre possession. Peut-on reprendre encore une fois possession d’une chose ? Cela ne signifie-t-il pas : la perdre. Ici il y a le monde que possède et je dois aller de l’autre côté pour céder à un étrange enchantement, un tour de magie, une pierre philosophale, une alchimie, un anneau magique.

   Vouloir saisir dans la nuit par un sortilège, furtivement, le souffle court, désemparé, oppressé, ce que chaque jour offre aux yeux ouverts ! (« Peut-être » ne peut-on avoir d’enfants autrement, « peut-être » les enfants sont-ils aussi un sortilège. Laissons encore de côté cette question) C’est pourquoi je suis si reconnaissant (à toi et à tout) et donc c’est samozrejmé (=  tout naturellement) qu’à côté de toi je suis au plus haut point calme et au plus haut point bouleversé, au plus haut point contraint et au plus haut point libre, voilà pourquoi après cette prise  de conscience j’ai abandonné toute autre forme de vie.

 

Franz Kafka, À Milena, traduction Robert Kahn, NOUS, 2021, p. 200-201.

31/05/2024

Franz Kafka, À Milena

 

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Pour poursuivre : avec toi dans mon cœur je peux tout supporter, et si j’ai écrit que les jours sans tes lettres étaient terribles, et bien ce n’est pas exact, ils n’étaient pas terriblement lourds, le bateau était lourd, il avait un terrible tirant d’eau , mais il voguait quand même sur les flots. Il n’y a qu’une seule chose Milena que je ne peux supporter sans ton aide explicite : la « peur », pour cela je suis bien trop faible, je ne peux même pas regarder cette monstruosité en entier, elle m’emporte.

 

Franz Kafka, À Milena, traduction Robert Kahn, NOUS, 2021, p. 126.

30/05/2024

Franz Kafka, Journal

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Je vais essayer de rassembler progressivement tout ce qu’il y a de douteux en moi, plus tard ce qui est plausible, ensuite le possible, etc. Il y a sans doute en moi un désir avide de livres. Non pas, en fait, les posséder ou les lire, mais bien plutôt les voir, me convaincre de leur  existence dans la vitrine d’un libraire. S’il y a quelque part plusieurs exemplaires du même livre chacun d’entre eux me réjouit. C’est comme si ce désir provenait de l’estomac, comme si c’était un appétit qui s’égare. Les livres que je possède me réjouissent moi, par contre les livres de mes sœurs me font bien plaisir. Le besoin de les posséder est incomparablement plus faible, il manque presque.

 

Kafka, Journal, traduction Robert Kahn, éditions NOUS, 2020, p. 211-212.

29/05/2024

Jules Renard, Journal

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Être clair ? Nous sommes si peu capables d’efforts pour comprendre les autres !

 

Quand elle avait pris ses belles résolutions d’économie, elle commençait tout de suite par refuser aux pauvres.

 

L’incompréhensible dit toujours : « Mais tu ne comprends donc rien ! ».

 

Si l’inspiration existait, il ne faudrait pas l’attendre ; si elle venait, la chasser comme un chien.

 

La peur de l’ennui est la seule excuse du travail.

 

Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 130, 131, 133, 133, 134.

28/05/2024

Jules Renard, Journal

                                    jules renard, journal, devoir, morale, argent

Le devoir ? Ah ! non, laissez-moi tranquille.

 

Quand il se regardait dans une glace, il était toujours tenté de l’essuyer.

 

Un livre nous déplaît partout où il nous ressemble.

 

Ne jamais rien faire comme les autres en art ; en morale, faire comme tout le monde.

 

Le talent, c’est comme l’argent : il n’est pas nécessaire d’ne avoir pour en parler.

 

Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 116, 117, 124, 127, 129.

27/05/2024

Jules Renard, Journal

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J’ai vu, monsieur, sur une table de boucher, des cervelles pareilles à la vôtre.

 

On peut donner le ton des paysans sans faute d’orthographe.

 

Il y a des critiques qui ne parlent que des livres qu’on va faire.

 

Comme c’est vain une idée ! Sans la phrase, j’irais me coucher.

 

C’est une erreur commune de prendre pour des amis deux personnes qui se tutoient.

 

Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 98, 99, 103, 103, 106.