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31/05/2019

Julien Bosc, La demeure et le lieu

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la locution « à bord de nuit »

comme dans « se promener à bord de nuit »

est-elle propre à cette famille de paysans

(de qui je l’affectionne et la tiens)

ou est-elle plus largement répandue

 

quoi qu’il en soit

si elle touche la corde sensible

c’est que

révélatrice des transmutations et métamorphoses

— où s’accordent mots et songes —

elle fait du crépuscule un navire

des cieux la mer

et

de la nuit

l’augure d’une traversée merveilleuse

                                             — si

                                             à bord

                                             et au large déjà

                                             la côte est laissée derrière soi

 

Julien Bosc, La demeure et le lieu, Faï fioc, 2018, p. 39.

© Photo Chantal Tanet

30/05/2019

Louis Aragon, Le Mouvement perpétuel

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La route de la révolte

 

Ni les couteaux ni la salière

Ni les couchants ni le matin

Ni la famille familière

Ni j’accepte soldat ni Dieu

Ni le soleil attendre ou vivre

Les larmes danseuses du rire

 

N-I ni tout est fini

 

Mais Si qui ressemble au désir

Son frère le regard le vin

Mais le cristal des roches d’aube

Mais MOI le ciel le diamant

Mais le baiser la nuit où sombre

Mais sous ses robes de scrupule

 

M-É mé tout est aimé

 

Aragon, Le Mouvement perpétuel, dans

Œuvres poétiques complètes, I, Pléiade /

Gallimard, 2007, p. 116.

 

29/05/2019

Jean-Pierre Chambon, Un écart de conscience

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Je ne sais quelle nécessité

me pousse aujourd’hui à revenir

quelques années plus tard

au trouble si indéfinissable

que devant l’évidence d’un lieu nu

il m’est arrivé maintes fois d’éprouver

comme une manière d’expérience des limites

même si l’expression est exagérée.

 

Te mettre à nouveau dans la confidence

de mon introspection

t’inclure ne serait-ce qu’en pensée

dans le mouvement de ma recherche

m’aide et me soutient cette fois encore.

 

 

C’est aussi une occasion

en dépit de la distance irréductible

qui désormais nous sépare

de t’accueillir en songe dans l’état de rêverie

où il m’a été si souvent reproché de me complaire.

 

Jean-Pierre Chambon, Un écart de conscience,

Le Réalgar, 2019, p. 33.

28/05/2019

Paysages, coquelicots et bleuets

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27/05/2019

Christian Ducos, Plic ! Ploc !

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Plic ! Ploc ! le bruit de la pluie, Ploc ! le bruit de la grenouille qui tombe dans l’eau chez Bashô, et le titre de la revue de l’association française du haïku… On sait que le haïku classique (de Bashô, Issa, chacun ici dans un haïku) compte trois vers non rimés de 5, 7 et 5 syllabes, relatifs notamment aux saisons, aux choses de la vie quotidienne. Le genre a été introduit en France au début du XXesiècle et adapté par de nombreux poètes, dont Paul Éluard qui a publié 11 haïkus en 1920 et qui s’est souvenu de cette forme ensuite, par exemple dans Cours naturel, en 1938 :

                  Le bec de bois crachait des flammes vertes

                  L’herbe aurorale

                  Chant des fontaines disparues

    L’essentiel est, chaque fois, de conserver la brièveté, l’emploi de groupes nominaux, l’inégalité dans la longueur des trois vers, mais aussi le déséquilibre syntaxique. Il ne s’agit pas de restituer dans notre langue ce qui appartient à une culture fort éloignée de la nôtre, ce que rappelle Christian Ducos pour qui l’intérêt du haïku vient de ce qu’il « entretient un rapport très particulier avec le sens qu’il s’emploie à immobiliser, figer pour mieux faire entendre le silence dans lequel il est tout entier contenu. » Beau programme que de chercher à restituer pour le lecteur le « mystérieux pouvoir d’évidement » du haïku.

   Ce qui séduit dans le livre, c’est la volonté de Christian Ducos de ne pas proposer une simple succession de haïkus, mais souvent de donner à lire quelque chose de l’absence au cœur du haïku ; ainsi, le premier haïku et le dernier se répondent et la suggèrent :

                  coquille vide

                  peut-être pas

                  l’escargot !

 

                  enfin

                  de l’autre côté du mur

                  l’escargot

On peut relever tous les haïkus qui, avec de nombreuses variations, mettent en évidence le vide, l’absence dans le temps et l’espace. Ainsi la fleur n’apparaît que lorsque ce qui la cachait est ôté :

                  lorsque l’herbe est coupée

                  plus rouges encore

                  les fleurs de l’azalée

et des moments oubliés resurgissent avec un objet :

                  bille d’agate

                  retrouvés

                  mes yeux d’enfant

Le silence même est dans le haïku pour que puisse s’entendre une vibration — « le haïku se doit de résonner, vibrer », écrit Christian Ducos :

                  là

                  dehors

                  dans le silence d’éclore

           sous la peau nue des pierres

           bat le sang

           du silence

Bien d’autres approches du haïku sont retenues dans le livre. Son titre qui figure un bruit est introduit et, quelquefois, le lien à la saison ou à ses aspects retrouve le ton du haïku classique : 

                  elle vient

                  comme la pluie  
                  la mélancolie*

   Christian Ducos, comme il l’indique dans sa note liminaire, utilise les ressources rhétoriques pour inventer sa voix. Il joue sur le double sens d’une expression :

                  elle se croyait parfaite

                  elle tombe de haut

                  la neige

et sur l’homophonie :

                  elle est claire

                  avec elle-même

                  la luciole

L’humour est présent dans nombre de haïkus :

                  lire Saint-Simon

                  ou se laver les pieds

                  matinée d’été

 et, également, le plaisir de l’absurde, le vide ou le poème lui-même devenant personnage :

                  il fait si chaud

                  même mon ombre

                  cherche un peu de fraîcheur

On lit aussi des haïkus avec assonances, qui peuvent en même temps être en vers comptés (10 + 8 + 8) :

                  par la fenêtre la lune d’avril      

                  personne ici pour l’accueillir

                  le monde entier pour s’en réjouir

   On voit la variété des approches du genre, qui permet d’aborder tous les sujets, y compris des questions de société, la peur de l’autre et l’extrême pauvreté, celle que l’on préfère ne pas voir :

                  chacun a peur

                  de l’ombre de l’autre

                  vivement midi 

 

                  le regard du mendiant

                  m’a fait baisser les yeux

                  longue nuit

 

On ne boude pas son plaisir à lire et relire Plic ! Ploc !, à comparer le traitement différent d’un même thème (presque chaque thème apparaît deux fois) et s’il arrive d’estimer un peu faible un haïku on passe allègrement au suivant.

 

Christian Ducos, Plic ! Ploc !, Le Cadran ligné, 2019, 64 p., 14 €. Cette note de lecture a été publiée par Sitaudis le 10 mai 2019.              

 

* Bashô écrivait : « Soleil d’un matin d’hiver / tout n’est que mélancolie », traduction René Sieffert, dans Bashô, Jours d’hiver POF, 1987, p. 61.

 

26/05/2019

Alberto Giacometti, Écrits

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Je n’ai plus peur

plus aucune peur,

avant je tremblais

le soir, la nuit

la mort toujours

me hantait, me

tourmentait, maintenant

rien, c’est pire c’est

effroyable, ce calme.

 

Alberto Giacometti, Écrits,

Hermann, 1992, p. 154.

25/05/2019

Boris Pasternak, Poèmes

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Le poème qui suit les poèmes

 

Sur votre étagère j’ai posé des poèmes

Poèmes que vous prenez pour du « moi-même »

Sur mon étagère aucun poème :

Et dans les jours que j’ai subisd aucun « moi-même ».

 

Dans la vie de ceux qui le mieux ont chanté,

Des traits d’une telle simplicité

Que quicinque, authentique, y a goûté

Ne peut plus que s’achever en silence entier.

 

Né de même parenté avec tout ce qui est,

Familier d’un avenir, qui dès aujourd’hui est,

Comment ne pas, finalement, tomber

Dans l’hérésir de la simplicité inouïe ?

 

J’ai honte, tous les jours plus honte

Qu’au profond de ce siècle de telels ombres

Subsiste une certaine haute maladie

Nommée « haut mal de poésie ».

 

Boris Pasternak, Poèmes, traduction Armand Robin,

Paris, sans nom d’éditeur, octobre 1946.

24/05/2019

Henri Cole, Terre médiane

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                        Insomnie

 

La nuit, à la lueur de la lampe, certains insectes

planant ou volant, en noir, rouge ou or,

surgissent comme des acteurs, vaguement spectraux,

dans l’espace ordinaire de ma chambre.

Hier soir, ils ont exécuté La Tempêteavec frénésie,

exigeant que je joue Prospero et pardonne

à chacun. « Et puis quoi ! » ai-je gémi.

Ce cher Ariel surnaturel, je l’aimais,

le décor insulaire, l’opportune vengeance —

comment résister ? La pluie s’est mise à tomber,

emplissant le temps comme du sable ou l’entendement humain.

C’est comme si je rêvais ou étais mort.

J’ai pardonné à mon frère, il m’a pardonné.

Nous nous sommes serrés l’un contre l’autre dans l’obscur reflux de la nuit.

 

Henri Cole, Terre médiane, traduction Claire Malroux, Le bruit du temps, 2003, p. 83.

 

22/05/2019

Louis-René des Forêts, Poèmes de Samuel Wood

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Est-il pire façon d’alléger ses regrets

Que perdre le désir de désirer ce qui passe ?

Pourquoi mettre si grande hâte à se déprendre,

Fermer les yeux aux biens offerts et visibles,

À tout ce que déverse la gaieté du soleil

Sur la mer, les feuilles, un visage inconnu

Qu’on croise dans la fraîcheur de la jeune saison ?

C’est comme s’avouer vaincu avant la partie

Au lieu de jouer franchement cartes sur table

Jusqu’à la dernière, et rire d’avoir perdu

Sachant que la mort ne connaît pas d’échec,

Qu’elle brûle nos chances et d’une main sûre

Nous tient tôt ou tard à sa merci.

 

Louis-René des Forêts, Poèmes de Samuel Wood,

Fata Morgana, 1988, p. 22.

21/05/2019

Philippe Jaccottet, Exemples

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                           L'habitant de Grignan

 

   Parfois, un tel poids est sur nous que nous décidons de ne rien faire, et en particulier de ne rien écrire, qui ne l'allège, mais encore ne l'allège qu'à bon droit. Cela se peut-il en parlant simplement d'un lieu ? C'est la question que je me suis posé devant ce texte. Provisoirement, en tout cas, rien d'autre ne m'intéresse, et tant pis si je m'égare.

   Il semblerait donc que je dispose d'une règle qui me permette de choisir entre le pire et le mieux, c'est-à-dire de quelque absolu ? Non ; mais comment s'expliquer ? C'est un peu comme si le mouvement de l'esprit vers une vérité pressentie révélait cette vérité, ou l'alimentait ; comme si nous devions une bonne fois partir, puisque quelque chose nous y pousse, et que la voie créât, ou plutôt découvrît le but. Marche difficile aux étapes dérobées.

   En route donc encore une fois ! Je suis un marcheur voûté par ses doutes. Mais il arrive que des souffles bienheureux m'emportent.

 

Philippe Jaccottet, Exemples, dans Œuvres, édition établie par José-Flore Tappy, Pléiade, Gallimard, 2014, p. 90.

20/05/2019

Leonor Fini, Rogomelec

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   Je savais qu'il ne fallait pas se laisser tenter. Qu'il faudrait savoir rester chez soi, éviter les voyages dans cette époque barbare, les affreuses bousculades, l'humiliation de ce que l'on appelle les "villégiatures".

« Le vain travail de voir divers pays », Maurice Scève l'avait écrit ; je me le répétais.

   Mais on m'avait parlé de ce lieu solitaire, de ce climat assoupissant. Imaginant un bien-être particulier, je suis donc parti rejoindre le navire.

   C'était le Port Saïd.

   D'autres navires hurlaient déjà très fort. Pour le Port Saïd, il y avait encore du temps ; au moins une heure. Passaient des chariots avec des ballots d'odorantes épices — safran peut-être, cannelle — une bonne odeur et de la poussière jaune or tout autour. Cette poussière voilait parfois ces groupes d'humains vociférants, tous habillés de mêmes couleurs, me semblait-il.

   Il n'y avait qu'un homme différent et peu recommandable. Mais à l'observer plus attentivement, je lui trouvai davantage l'aspect d'un assassiné que celui d'un assassin. Il se frayait un chemin pour rejoindre une jeune femme blonde qui parut surprise en l'apercevant et certainement ne le connaissait pas. Lui se baissa un peu et murmura quelque chose à l'oreille de la femme qui, contre le soleil, apparaissait d'une transparence fragile. Puis elle baissa le regard vers cette main ouverte, tendue à la hauteur de sa taille ; elle poussa un petit cri, mais le passage d'un chariot chargé de ballots qui sentaient le safran et la cannelle la fit disparaître à mes yeux.

   Je ne la voyais plus.

   La foule s'épaississait.

   Je m'apercevais que je suivais cet homme.

 

Leonor Fini, Rogomelec, éditions Stock, 1979, p. 9-11.

19/05/2019

Thomas Bernhard, Mes prix littéraires

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[après la publication de Gel]

 

   [...] lorsque le déluge de critiques, incroyablement violent et complètement contradictoire, des éloges les plus embarrassants aux descentes en flèche les plus féroces, a pris fin, je me suis senti d'un seul coup comme anéanti, comme si je venais de tomber sans rémission dans un épouvantable puits sans fond. J'étais persuadé que l'erreur d'avoir placé tous mes espoirs dans la littérature allait m'étouffer. Je ne voulais plus entendre parler de littérature. Elle ne m'avait pas rendu heureux , mais jeté au fond de cette fosse fangeuse et suffocante d'où l'on ne peut plus s'échapper, pensai-je à l'époque. Je maudissais la littérature et ma dépravation auprès d'elle et j'allais sur des chantiers pour finalement me faire engager en tant que chauffeur-livreur pour la société Christophorus, située sur la Klosterneuburgerstrasse. Pendant des mois j'ai fait des livraisons de bière pour la célèbre brasserie Gösser. Ce faisant, j'ai non seulement très bien appris à conduire des camions, mais aussi à connaître encore mieux qu'avant la ville de Vienne tout entière. J'habitais chez ma tante et je gagnais ma vie comme chauffeur de poids lourds. Je ne voulais plus entendre parler  de littérature, j'avais placé en elle tout ce que j'avais, et elle m'avait récompensé en me jetant au fond d'une fosse. La littérature me dégoûtait, je détestais tous les éditeurs et toutes les maisons d'édition et tous les livres. Il me semblait qu'en écrivant Gel, j'avais été victime d'une escroquerie gigantesque. J'étais heureux quand, dans ma veste de cuir, je m'installais au volant du vieux camion Steyr et sillonnais la ville en faisant vrombir le moteur. C'est là que se montrait toute l'utilité pour moi d'avoir appris à conduire des camions depuis longtemps, c'était une des conditions pour  obtenir un poste en Afrique auquel je m'étais porté candidat, des années auparavant, ce qui finalement ne s'était pas fait, en raison d'un concours de circonstances en réalité très heureux, comme je sais aujourd'hui.

 

Thomas Bernhard, Mes prix littéraires, traduit de 'allemand par Daniel Mirsky, "Du Monde entier", Gallimard, 2009, p. 41-42.

18/05/2019

Jean-Yves Masson, Neuvains du sommeil et de la sagesse

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Je n'ai pas eu à la chercher longtemps, la maison grise. Soudain

   près du grand pont de pierre, au bout de cette rue trop noire,

      elle était là. Et si je l'avais imaginée différente,

 

passé le bref étonnement je crus l'avoir connue depuis toujours.

   Enfant, à l'une ou l'autre de ces fenêtres

      tu te penchais. Mais point de jardin, point d'allée :

 

le bruit seulement de la rue — carrioles, chevaux et voitures —

   et l'heure au clocher de l'église, les cris d'enfants au loin...

      Plus rien ici ne se souvient de ton sourire.

 

Jean-Yves Masson, Neuvains du sommeil et de la sagesse, éditions Cheyne,

2007, p. 63.

17/05/2019

Sylvia Plath, Arbres d'hiver

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                                  Mort-nés 

Ces poèmes ne vivent pas : c’est un triste diagnostic.

Ils ont pourtant bien poussé leurs doigts et leurs orteils,

Leur petit front bombé par la concentration. S’il ne leur a pas été donné

D’aller et venir comme des humains

Ce ne fut pas du tout faute d’amour maternel.

 

Ô je ne peux comprendre ce qui leur est arrivé !

Rien ne leur manque, ils sont correctement constitués.
Ils se tiennent si sagement dans le liquide formique !

Ils sourient, sourient, sourient, sourient de moi.

Et pourtant les poumons ne veulent pas se remplir ni le cœur s’animer.

 

Ils ne sont pas des porcs, ils ne sont pas même des poissons,

Bien qu’ils aient un air de porc et de poisson —

Ce serait mieux s’ils étaient vivants, et ils l’étaient.

Mais ils sont morts, et leur mère presque morte d’affolement,

Et ils écarquillent bêtement les yeux, et ne parlent pas d’elle.

  

                                Stillborn

These poems do not live: it’s a sad diagnosis.

They grew their toes and fingers well enough,

Their little foreheads bulged with concentration.

If they missed out on walking about like people

It wasn’t for any lack of mother-love.

 

O I cannot understand what happened to them!

They are proper in shape and number and every part.

They sit so nicely in the pickling fluid!

They smile and smile and smile and smile at me.

And still the lungs won’t fill and the heat won’t start.

 

They are not pigs, they are not even fish,

Though they have a piggy and a fishy air —

It would be better if they were alive, and that’s what they were.

But they are dead, and their mother near dead with distraction.

And their stupidly stare, and do not speak of her.

 

Sylvia Plath, Arbres d’hiver, précédé de La Traversée, édition bilingue, traduction Françoise Morvan et Valérie Rouzeau, Poésie/Gallimard, 1999, p. 88 (texte anglais) - 89.

 

16/05/2019

Lord Byron, Oraison vénitienne (Ode on Venice)

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                 Oraison vénitienne

                   (Ode on Venice)

 

Ô Venise ! Venise ! Quand tes murs de marbre

     Seront gagnés par les eaux, il y aura

 Un cri des nations devant tes salons engloutis,

Une forte lamentation le long de la mer vorace !

   Si moi, voyageur du nord, je pleure sur toi,

 Que devront faire tes fils ? tout sauf sangloter

Et pourtant ils ne font que gémir dans leur sommeil.

          Par contraste avec leurs pères,

     Ils sont aux disparus ce que le limon,

   Ce que la vase verdâtre des flots refluant,

 Est à l’écume impétueuse qui ramène au port

Le marin sans navire. ; ce sont des crabes rampants

          Répandus dans leurs rues étayées.

(…)

 Lord Byron, Le corsaire et autre poèmes orientaux, traduction

Jean Pavans, édition bilingue, Poésie/Gallimard, 2019, p. 27.

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