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19/09/2023

Robert Desnos, Langage cuit

 

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La colombe de l’arche

 

Maudit !

soit le père de l’épouse

du forgeron qui forgea le fer de la cognée

avec laquelle le bûcheron abattit le chêne

dans lequel on sculpta le lit

où faut engendré l’arrière-grand-père

de l’homme qui conduisit la voiture

dans laquelle ta mère

rencontra ton père.

                                            (14 novembre 1923)

 Robert Desnos, Langage cuit, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 89.

18/09/2023

Robert Desnos, L'aumonyme

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                     Autant pour les crosses

 

Autant pour les crosses, évêques caducs qui baptisez les Êves aux aqueducs.

Autant pour les crosses, gens qui associez à l’amour votre sorte.

Flexible, Flexible, ma chère Flexible,

Est-ce ma chair, ma chère, sont-ce des crosses que vous cherchez ?

         Autant pour

         Autant dire.

                  Ici c’est Charles Cros.

                  Jamais plus pour Charles Cros.

 

Robert Desnos, L'aumonyme, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 67.

17/09/2023

Chapiteaux romans, Dordogne

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église de Saint-Orse, portail

 

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Salle capitulaire de l'abbaye de Tourtoirac

16/09/2023

Robert Desnos, Rrose Sélavy

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Rrose Sélavy

 29. Ah ! meurs, amour !

 35. Si le silence est d’or, Rrose Sélavy abaisse ses cils et s’endort.

 39. Rrose Sélavy propose que la pourriture des passions devienne la nourriture des nations.

 49. Rrose Sélavy vous engage à ne pas prendre les verrues des seins pour les vertus des saints

  53. Devise de Rrose Sélavy

        Plus que poli pour être honnête

        Plus que poète pour être honni.

       

Robert Desnos, Rrose Sélavy, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p.41, 42, 42, 43, 43.

15/09/2023

Robert Desnos, Rrose Sélavy

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Rrose Sélavy

1.Dans un temple en stuc de pomme le pasteur distillait le suc des psaumes.

7. Ô mon crâne, étoile de nacre qui s’étiole.

10. Rrose Sélavy se demande si la mort des saisons fait tomber un sort sur les maisons.

19. Rrose Sélavy voudrait bien savoir si l’amour, cette colle à mouches, rend plus dures les molles couches.

21. Croyez-vous que Rose Sélavy connaisse ces jeux de fous qui mettent le feu aux joues ?

 

Robert Desnos, Domaine public, Gallimard, 11953, p.39, 39, 40, 40, 41.

14/09/2023

Tristan Tzara, Où boivent les loups

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errer errer dans une tête pleine

où j’attends la seule l’absente

la mal choisie d’entre les belles

la pierre au cou

 

par les profondes ruelles du sourire

tant d’hommes s’égarent près du pont

toujours partie — ni rides ni vents

parmi les rares

 

vieille l’ombre s’est rompue

de la branche sans amis

et la dernière est morte

qui voulait revivre une jeunesse morte

 

toute le neige toute

le ciel où demeurent toutes

ancrées désespérément

dans un cri — d’avoir trop compris

 

Tristan Tzara, Où boivent les loups, dans

Œuvres complètes, 2, 1925-1933, éditions

Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 207.

13/09/2023

Robert Desnos, Les Ténèbres

 

                         

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Il fait nuit

Tu t’en iras quand tu voudras

Le lit se ferme et se délace avec délies comme un cordet de velours noir

Et l’insecte brillant se pose sur l’oreiller

Éclate et rejoint le Noir

Le flot qui martèle arrive et se tait

Samos la belle s’endort dans l’ouate

Clapier que fais-tu des drapeaux ? tu les roules dans la boue

À la bonne étoile et au fond de toute boue

Le naufrage s’accentue sous la paupière

Je conte les flacons de nuit et je les range sur une étagère

Le ramage de l’oiseau de bois se confond avec le bruit des bouchons en forme de regard

N’y pas aller n’y pas mourir la joie est de trop

Un convive de plus à la table ronde dans la clairière de vert émeraude et de heaumes retentissants près d’un monceau d’épées et d’armures cabossées

Nerf en amoureuse lampe éteinte de la fin du jour

Je dors

 

Robert Desnos, Les Ténèbres, dans Domaine public, Gallimard, 1953, p. 132.

Tristan Tzara, Où boivent les loups

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il y a des heures, blanches épreuves

qu’engloutissent les maudites

sur le fente irréductible

d’un espoir trop plein

 

il y a tant de sens  à l’aube qui sombrent

 

qu’il n’y ait qu’une aube de ce monde

seule et qu’elle ne fut que l’ombre

d’une raison parée de mille méduses

de ses clairs éclats  ou des cendres

revivront les souffles oubliés

dans une aube nouvellement débordante

de vérités dures de pierres dures

 

et les aubes écrasées dans l’invisible sang

en laine au regard du fer jaloux

d’une croissance si pesante si grave

que le jour ne résiste au sourire avançant

dans la chaleur des mortifications où brûle encore

la constance du verre et se rue et se délasse

le tourment hideux de la vague à voir sans repos

 

Tristan Tzara, Où boivent les loups, dans Œuvres compères, 2,

1925-1933, éditions Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 233.

12/09/2023

Tristan Tzara, L'homme approximatif

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  XII 

le temps laisse choir de petits poucets derrière lui

il fauche les fines molécules sur les prairies d’eau

il dompte les poches d’air traverse leur jungle

il coupe le verde la vague et de chaque moitié s’illumine un papillon

dans le volcan il se faufile le long d’une note de violon

il boucle le cours filant du verre dans les fines heures de transparence

là où nos sommeils bousculent la chantante nourriture de lumière

 

Tristan Tzara, L’homme approximatif, dans Œuvres complètes 2, 1925-1933,

édition Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 131.

11/09/2023

Tristan Tzara, L'arbre des voyageurs

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à tour de rôle vainqueurs nous avons tous vaincus

dits et redits broyés — liseurs d’ombres —

aux enchères d’impossible quel survivant repentir

vous fera revivre l’un pour l’autre

 

ou trancher le nœud malade sans reproche

la perfidie des crimes où l’amère blancheur

se répand sur les seins san reproche

de tes nuits voyageur de dépit

 

nuits voyageuses je n’ai vu que clartés

de fruits charnus dans la chaleur de l’un et de l’autre

qu’une cruauté nouvelle vienne froissée dans l’enveloppe

toujours tu m’entendras venir dans le sang du mauvais signe

 

à l’aube elle se perd

au départ elle se regarde partir

la soir la fatigue

comme ma tête ne sait se reposer

 

Tristan Tzara, L’arbre des voyageurs, dans

Œuvres complètes, 2, 1925-1933, édition

Henri Béhar, Flammarion, 1977, p. 75.

10/09/2023

Tristan Tzara, Premiers poèmes

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Un beau matin aux dents fermées

 

je change le train en plume sonore

le pays n’a qu’un seul insecte

la maison aux narines d’or

est remplie de phrases correctes

 

découpons l’échelle matinale

de l’air et les nerfs de l’air

en différences irisées en cris de mal

pourquoi se regarder dans le blanc de l’air

 

Tristan Tzara, Premiers poèmes, dans Œuvres Complètes, I

(1912-1924), édition Henri Béhar, Flammarion, 1976, p. 217.

09/09/2023

Tristan Tzara, Premiers poèmes

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          La mort de Guillaume Apollinaire

 

                           nous ne savons rien

                  nous ne savions rien de la douleur

la saison amère du froid

                           creuse de longues traces dans nos muscles

il aurait plutôt aimé la joie de la victoire

                           sages sous les tristesses calmes     en cage

                                                            ne pouvoir rien faire

                           si la neige tombait en haut

si le soleil montait chez nous pendant la nuit

                                                            pour nous chauffer

                  et les arbres pendaient avec leur couronne

          • unique pleur —

si les oiseaux étaient parmi nous pour se mirer

dans le lac tranquille au-dessus de nos têtes

                                          ON POURRAIT COMPRENDRE

                           la mort serait un beau voyage

et les vacances illimitées de la chair des structures et des os

 

Tristan Tzara, Premiers poèmes, dans Œuvres Complètes, I,

(1912-1924),  édition Henri Béhar, Flammarion, 1976, p. 209.

08/09/2023

Tristan Tzara, Premiers poèmes

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                            Incertitudes

 

J’ai sorti le vieux rêve de la boîte comme tu sors un chapeau

Quand tu mets la robe aux boutons nombreux

Comme tu sors le lièvre par les oreilles

Quand tu retournes de la chasse

Comme tu choisis la fleur parmi les mauvaises herbes

Et l’ami parmi les courtisans

 

Voici ce qui m’est arrivé

Lorsque vint le soir lentement comme un insecte

Pour beaucoup le remède qu’il leur faut

À l’heure où j’allume en mon âme un feu de branches mortes

Je me suis couché. Le sommeil est un jardin clôturé de doute

On ne sait pas ce qui est vrai, ce qui ne l’est pas

On pense que c’est un voleur et l’on tire au fusil

Ensuite le bruit court que c’était un soldat

Avec moi ce fut tout à fait pareil

C’est pourquoi je t’ai appelée pour me dire — sans faute

Ce qui est vrai — ce qui ne l’est pas.

 

Tristan Tzara, Premiers poèmes, dans Œuvres Complètes, I

(1912-1924),  édition Henri Béhar, Flammarion, 1976, p. 45.

07/09/2023

Li Bai, Florilège

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Pensée d’une nuit calme

 

La lune luit, claire, devant mon lit,

On jurerait le sol couvert de givre.

Levant les yeux, j’ai la lune qui luit ;

Baissant les yeux, mon pays de revivre.

 

                           *

 

Dans la cité de la Luo, une nuit de printemps, j’entends une flûte

 

Chez qui la flûte en jade au son qui vole noir ?

Grâce au vent de printemps la ville en est emplpie !

J’entends « Coupons un saule ! » au sein des airs du soir ;

Qui donc du vieux jardin ne sent la nostalgie ?

 

Li Bai, Florilège, traduit du chinois, présenté et annoté par

Paul Jacob, Connaissance de l’Orient/Poésie /Gallimard,

2023, p. 165, 166.

06/09/2023

Li Bai, Florilège

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Trois, cinq, sept mots

 

                  Par le vent de l’automne

                  Dont la lune rayonne

         Feuilles, tombant, s’assemblent et s’en vont ;

         Le corbeau froid se perche puis frissonne.

Pour nous aimer et pour nous voir, quel jour ? le connait-on ?

En ce moment, en cette nuit, ce qu’on sent s’emprisonne.

 

                                            *

Sentiment de peine

 

Une beauté lève un store fluide,

S’assoit, et fronce un sourcil papillon.

Si de ses pleurs on voit la trace humide,

À qui son cœur en veut-il ? Le sait-on ?

 

Li Bai, Florilège, traduit du chinois, présenté

et annoté par Paul Jacob, Connaissance de

l’Orient/Poésie /Gallimard, 2023, p. 97 et 99.