19/06/2018
Paul Celan, La rose de personne
Kolon
Dans la lumière des vigiles
des mots aucune main
gagnée par errance
Mais toi, gagnée par sommeil, toujours,
vraie de langue dans chacune
des pauses ;
à quel prix
de divorcé d’ensemble
le prépares-tu pour un nouveau départ :
le lit mémoire !
Sens, nous gisons
blancs d’une multi-
couleur, mille-
bouches à force de
vent-du-temos, souffle-année, cœur-jamais.
Paul Celan, La rose de personne, traduction Martine Broda, Le Nouveau Commerce, 1979, p. 107.
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30/01/2018
Paul Celan, Poèmes, traduction André du Bouchet
Débris d’écoute, débris de vue, dans
le dortoir mille-
et-un,
jours ou
nuits,
la polka-des-ours :
ici on te façonne à nouveau,
de nouveau tu deviens
il.
Hörreste, Sehreste, im
Schlafsaal eintausendundeins,
tagnächtlich
die Bäten-Polka :
sie schulen dich um,
du wirst wieder
er.
Paul Celan, Poèmes, traduction André du Bouchet, Clivages, 1978, np.
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20/11/2017
Fernando Pessoa, Pour un "Cancioneiro"
Ma vie aura été, en somme,
Autant subalterne qu’obscure,
Sans bonne ni mauvaise part,
Ombres de haillons dans la brume.
Comme un caissier je suis resté
Posté derrière un guichet nul :
Poète ou amant, nul Catulle
Ne devient conseiller d’État.
Et même quand on m’a aimé
Il semble que l’on m’offensait.
L’habit humain dont j’ai été lardé
Ses boutons même ont tous sauté.
Me voici calme, un peu plus sûr
Un tant soit peu moi désormais :
Voyant, après coup, le portail ouvert,
Mais disant toujours : "Ce n’est pas chez moi".
Fernando Pessoa, Pour un « Cancioneiro », dans Œuvres
poétiques, édition Patrick Quillier, Pléiade/Gallimard, 2001.
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08/01/2017
Denis Thouard, Pourquoi ce poète ? Le Celan des philosophes
Poétique, philosophie, politique : les trois s’enchaînent, et enchaînés, libèrent. Les bonnes et les mauvaises recettes sont là depuis longtemps.
Une société très sélective, qui pourrait être une secte littéraire, aussi bien qu’une communauté politique, d’abord. Lucien, auteur grec du IIe siècle de notre ère, né en Syrie, rapporte la proposition de décret que Momus présente à Jupiter pour limiter les nouveaux arrivants de cette assemblée : les dieux qui ne pourront faire la preuve de leur citoyenneté olympienne « seront renvoyés en leur pays, leurs autels profanés et leurs statues renversées, et s’ils s’ingèrent à l’avenir d’entrer dans le Ciel, ou sont trouvés sur le chemin, ils seront précipités dans les Enfers ! » Le rejet est ici sans ménagements. Une société se constitue par la clôture. Elle s’autosacralise en expulsant l’autre hors de soi. Pour faire la preuve de sa bonne foi, ou à tout le moins de papiers en règle, il faut un bon avocat.
[…]
Denis Thouard, Pourquoi ce poète ? Le Celan des philosophes, ‘’L’ordre philosophique’’, Seuil, 2016, p. 184.
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17/11/2016
Paul Celan, La rose de personne, traduction Martine Broda
Gel, Eden
Il y a un pays : Perdu,
où pousse une lune dans le roseau,
mort de froid avec nous,
Il rayonne autour et voit.
Il voit, alors il a des yeux,
qui sont de claires terres.
La nuit, la luit, l’alcali.
Il voit, l’enfant-œil.
Il voit, il voit, nous voyons,
je te vois, tu vois.
Le gel ressuscitera
avant que l’heure se ferme.
Paul Celan, La rose de personne, traduction
Martine Broda, Le Nouveau Commerce,
1979, p 37.
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21/09/2016
Paul Celan, Renverse du souffle
L’Écrit se creuse, le
Parlé, vert marin,
brûle dans les baies,
dans les noms,
liquéfiés
les marsouins fusent,
dans le nulle part éternisé, ici,
dans la mémoire des cloches
trop bruyantes à — mais où donc ?,
qui,
dans ce
rectangle d’ombres,
s’ébroue, qui
sous lui
scintille un peu, scintille, scintille ?
Paul Celan, Renverse du souffle, traduit
de l’allemand et annoté par Jean-Pierre
Lefebvre, Seuil, 2003, p. 83.
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27/03/2016
Jean Daive, Paul Celan, les jours et les nuits : recension
La poésie de Celan et sa correspondance sont maintenant, pour une grande partie, disponibles en français et, en France, de nombreux travaux ces vingt dernières années ont exploré différents aspects de l’œuvre — on pense notamment aux livres majeurs de Jean Bollack, aux études de Martine Broda, Alain Suied, Jacques Derrida, Yves Bonnefoy et, récemment, de John. J. Jackson et Stéphane Mosès. Jean Daive a déjà écrit autour de ses relations avec Celan (Sous la coupole, P.O.L, 1996) ; ce dernier livre réunit des textes de dimensions inégales — entretiens, essais, conférence, souvenirs — et qui portent sur des sujets variés : la vie de Celan, ses traductions, ses réflexions sur la poésie, le lien avec Ghérasim Luca, l’affaire Goll. Livre hétérogène donc, qui vise à rappeler ce que furent les activités de Celan et à aborder divers aspects de sa personnalité. C’est aussi le propos de Werner Hamacher, grand lecteur de Celan, qui analyse une partie du texte de Daive, mais il faudrait une chronique entière pour rendre comte de ces ‘’suggestions’’ d’une bonne cinquantaine de pages.
Jean Daive a connu Celan jusqu’à sa disparition en 1970 ; il a traduit ses poèmes (« La traduction de « Strette » côte à côte au Royal Panthéon. À sa droite », Sous la coupole, p. 17) et, encore avec lui, quelques-uns du poète allemand Johannes Poethen pour la revue L’Éphémère, republiés ici avec le texte original. Il a passé beaucoup de temps dans le bureau de Celan à l’École normale de la rue d’Ulm, en promenades et conversations « sous les marronniers de l’avenue des Gobelins ». Il a choisi d’ouvrir le livre en reprenant un entretien avec Bernard Böschentein qui, spécialiste de Hölderlin, a été un familier de Celan : c’est donner un autre regard sur le poète, qui complète son expérience.
Dans le portrait très construit que donne Jean Daive est mise en relief la complexité du poète.
On en saisit un aspect dans un chapitre consacré à Ghérasim Luca ; les deux poètes étaient proches, notamment parce que pour eux « une langue se dématérialise, se décompose et la poésie se réalise comme au travers d’un fantôme syllabique qui en serait le titre ». La décomposition donne les moyens, comme l’analyse Bernard Böschentein, « de refaire à partir de zéro une langue qui est d’abord faite d’intervalles, faite de pauses, faite de césures, faite de silences ». La réflexion sur la langue a son accomplissement dans le travail de traduction, essentiel dans la vie de Celan — « véritable combat contre la mort », selon Jean Daive — ; la liste de ses traductions, complètes ou partielles, est impressionnante, des quelques strophes de ‘’La Chanson du mal aimé’’ à Ungaretti, Mandelstam, du Bouchet et Daive, des sonnets de Shakespeare à Michaux. Et Rimbaud ; pour ‘’Le Bateau ivre’’, il s’agissait non d’écrire un équivalent en allemand mais de créer une œuvre originale : hanté qu’il était par l’image de l’abîme, celui où ont disparu les morts des camps nazis, la traduction « métamorphose l’idée du voyage en pensée de la déportation et rend la vérité rimbaldienne (la descente aux enfers) apocryphe. » Pour lui le poème, toujours, « est mémoire ou proximité de l’abîme » et c’est parce qu’il a cette importance que l’ « affaire Goll » a été une épreuve qu’il n’a pu surmonter.
Après la mort en 1950 du poète Yvan Goll, Claire Goll accusa Celan d’avoir plagié son époux et mena une campagne violente contre lui, alors que le recueil publié par Celan reprenait des poèmes qu’il avait édités en 1948, donc avant de connaître le couple — elle avait introduit dans une édition posthume de Yvan Goll des fragments empruntés à ce recueil. En Allemagne, l’antisémitisme toujours bien vivant s’empara de ces mensonges, bien que le trucage ait été mis au jour et la vérité rétablie par des amis du poète, d’abord par Peter Szondi. C’est l’engrenage : Celan a refusé de minimiser l’affaire, Claire Goll représentant alors pour lui toute l’hostilité du monde, et il a longtemps multiplié les lettres(1) sur l’’’Affaire’’, cherchant sans cesse des appuis et à susciter des pétitions en sa faveur. Il lui fallait l’impossible : que son innocence soit reconnue partout et clamée, l’Affaire rejoignant « une somme de culpabilité, décisive et tragique ».
Cette extrême difficulté à vivre les attaques calomnieuses de Claire Goll ont contribué à ruiner un équilibre précaire, le souvenir des camps toujours vivant, la tentation de se donner la mort toujours présente : jusqu’à proposer à son épouse de mourir ensemble. Car comment être là ? Daive rapporte le goût qu’avait Celan pour le cirque, c’est-à-dire pour l’activité de ces nomades jamais installés, fixés dans un lieu, lui-même ne voulant pas « être l’habitant et le représentant d’un pays spécifique ». Comment vivre le présent, quand on vit « la souffrance au jour le jour » ? Ingeborg Bachmann a relaté dans un roman autobiographique, Malina, sa relation, d’une certaine manière impossible, avec Celan, qui avait « l’art ou la stratégie de provoquer les circonstances conflictuelles où le pardon joue un rôle actif. »
On n’a fait qu’aborder ce livre témoin d’une amitié vraie. Daive analyse de manière aiguë aussi bien la complexité de la relation de Celan avec son épouse, Gisèle Lestrange, que le déroulement et le sens des attaques de Claire Goll et la place du Méridien dans l’œuvre. Vingt ans après Sous la coupole, il donne un portrait chaleureux et vivant.
- On lira par exemple une lettre de 1962 de Celan à René Char sur l’affaire Goll, dans Paul Celan, René Char Correspondance, 1954-1968, édition établie, présentée et annotée par Bernard Badiou, Gallimard, 2015, p. 138-145.
Jean Daive, Paul Celan, les jours et les nuits, suivi de Suggestions, par Werner Hamacher, NOUS, 216 p., 20 €. Cette note de lecture a été publiée dans Sitaudis le 16 mars 2016.
Le n° 4 des Carnets d'eucharis, organisé par Nathalie Riera, outre un hommage à Charles Racine, publie un ensemble de portraits d'écrivains.
J'ai proposé un portrait de Jean-Luc Sarré et conduit un entretien avec Claude Chambard.
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01/03/2016
Paul Celan, Grille de parole
Avec lettre et horloge
De la cire
pour sceller le non-écrit
qui devina
ton nom,
qui chiffre
ton nom.
Viens-tu maintenant, nageante lumière ?
Des doigts, de cire eux aussi,
passés en d’étranges,
de douloureux anneaux.
Fondus leurs bouts.
Viens-tu, nageante lumière ?
Vides de temps les alvéoles de l’horloge,
nuptial l’essaim multiple,
prêt au voyage.
Viens, nageante lumière.
Mit Brief und Uhr
Wachs,
Ungeschriebnes zu siegeln,
das deinen Namen
erriet,
das deinen Namen
verschlüsselt.
Kommst du nun, schwimmendes Licht ?
Finger, wächsern auch sie,
durch fremde,
schmerzende Ringe gezogen.
Fortgeshmolzen die Kuppen.
Kommst du, schwimmendes Licht ?
Zeitleer, die Waben der Uhr,
bräutlich das Immentausend,
reisebereit.
Kommst, schwimmendes Licht.
Paul Celan, Grille de parole [Sprachgitter], traduit
de l’allemand par Martine Broda, Christian Bourgois,
1991, p. 19 et 18.
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03/12/2015
Paul Celan, Enclos du temps, traduction Martine Broda
Viens, explique le monde à ton aune,
viens, laisse-moi vous combler
de toute opinion,
je ne fais qu’un avec toi,
pour nous capturer,
même maintenant.
Komm, leg die Welt aus mit dir,
komm, laß mich euch zuschütten mit
allem Meinen,
Eins mit dir bin ich,
uns zu erbeuten,
auch jezt.
Paul Celan, Enclos du temps, traduit par
Martine Broda, Clivages, 1985, np.
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26/10/2015
Paul Celan, Grille de parole (traduction Martine Broda)
Un œil ouvert
Heures, couleur mai, fraîches.
Ce qui n’est plus à nommer, brûlant,
audible dans la bouche.
Voix de personne, à nouveau.
Profondeur douloureuse de la prunelle :
la paupière
ne barre pas la route, le cil
ne compte pas ce qui entre.
Une larme, à demi,
lentille plus aiguë, mobile,
capte pour toi les images.
Paul Celan, Grille de parole, traduction
Martine Broda, 1991, p. 75.
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22/12/2014
Paul Celan, La rose de personne, traduction Martine Broda
Erratique
Les soirs se creusent
sous ton œil. Recueillies
avec la lèvre, des syllabes — beau
cercle en silence —
guident l’étoile qui rampe
vers leur centre. La pierre,
autrefois proche des tempes, ici s’ouvre :
auprès de tous
les soleils
dispersés, âme,
tu étais, dans l’éther.
Erratisch
Die Abende graben sich dir
unters Aug. Mit der Lippe auf-
gesammelte Silben — schönes,
lautloses Rund
helfen dem Kriechstern
in ihre Mitte. Der Stein,
schläfennah einst, tut sich hier auf :
bei allen
versprengten
sonnen, Seele,
warst du, im Äther.
Paul Celan, La rose de personne, traduction
Martine Broda, Le Nouveau Commerce,
1979, p. 56-57
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12/01/2014
Paul Celan, Pavot et mémoire,
En hommage à Jean Bollack : une semaine avec Paul Celan
Louange du lointain
À la source de tes yeux
vivent les filets des pêcheurs d'eaux folles.
À la source de tes yeux
la mer tient sa promesse.
Je jette là
un cœur qui a vécu parmi les hommes,
jette bas mes vêtements et l'éclat d'un serment :
Plus noir dans le noir je suis plus nu.
Infidèle seulement je suis fidèle.
Je suis tu quand je suis je.
À la source de tes yeux
je suis emporté et je rêve de rapine.
Un filet a pêché un filet :
nous nous séparons enlacés.
À la source de tes yeux
un pendu étrangle sa corde.
Lob der Ferne
Im Quell deiner Augen
leben die Garne der Fischer der Irrsee.
Im Quell deiner Augen
hält das Meer sein Versprechen.
Hier werf ich,
ein Herz, das gewellt unter Menschen,
die Kleider von mir und den Glanz eines Schwures :
Schwärzer im Schwarz, bin ich nackter.
Abtrünnig esrt bin ich treu.
Ich bin du, wenn ich ich bin.
Im Quell deiner Augen
treib ich und träume von Raub.
Ein Garn fing ein Garn ein :
wir scheiden umschlungen.
Im Quell deiner Augen
erwürgt ein Gehenkter den Strang.
Paul Celan, Pavot et mémoire, traduction de Valérie
Briet, Christian Bourgois, 1987, p. 69 et 68.
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11/01/2014
Paul Celan, Poèmes, traduction de John E. Jackson
En hommage à Jean Bollack : une semaine avec Paul Celan
Psaume
Personne ne nous pétrira plus de terre et d'argile,
personne ne conjurera notre poudre.
Personne.
Loué sois-tu, Personne.
Par amour de toi nous
voulons fleurir.
Vers
Toi.
Un rien
étions-nous, sommes-nous, resterons-
nous, fleurissant :
la rose de Rien, la
rose de Personne.
Avec
le style clair d'âme,
l'étamine ciel-désert,
la corolle rouge
du mot-pourpre que nous chantions
par-dessus, ô par-dessus
l'épine.
Psalm
Niemand knetet uns wieder aus Erde und Lehm,
niemand bespricht unsern Staub.
Niemand.
Gelobt seist du, Niemand.
Dir zulieb wollen
wir blühn.
Dir
entgegen.
Ein Nichts
waren wir, sind wir, werden
wir bleiben, blühend :
die Nichts-, die
Niemandsrose
Mit
dem Griffel seelenhell,
dem Staubfaden himmelswüst,
der Krone rot
vom Purpurwort, das wir sangen
über, o über
dem Dorn.
Paul Celan, Poèmes, traduction de John E. Jackson,
éditions Unes, 1987, p. 37 et 36.
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10/01/2014
Paul Celan, Voix /Stimmen, traduction Martine Broda
En hommage à Jean Bollack : une semaine avec Paul Celan
Voix venues du chemin d'orties :
Viens à nous sur les mains.
Qui est seul avec la lampe,
pour y lire, n'a que sa main.
Stimmen vom Nesselweg her :
Komm auf den Händen zu uns.
Wer mit der Lampe allein ist,
hat nur die Hand, draus zu lessen.
Paul Celan, Voix /Stimmen, traduction
Martine Broda, Lettres de Casse,
1984, n. p.
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09/01/2014
Paul Celan, Partie de neige
En hommage à Jean Bollack : une semaine avec Paul Celan,
À ton ombre, à ton
ombre toute mal-sonnée aussi,
j'ai donné sa chance.
elle, elle aussi
je l'ai lapidée à coups de moi-même,
moi le droit-ombré, droit
sonné —
étoile à six branches
à laquelle tu as
adonné ton silence.
aujourd'hui
adonne ce silence où tu veux,
catapultant du sous-sacralisé par l'époque,
depuis longtemps, moi aussi, dans la rue,
je sors, pour n'accueillir aucun cœur,
jusque chez moi dans le pierreux-
multiple.
Deinem, aux deinem
fehldurchläuteten Schatten
gab ich die Chance.
ihn, auch ihn
besteinigt ich mit mir
Gradgeschattetern, Grad-
geläutetem — ein
Schsstern,
dem du dich hinschwiegst,
heute
schweig dich, wohin du magst,
Zeitunterheligtes schleudernd,
längst, auch ich, auf der Straße,
tret ich, kein Herz zu empfangen,
zu mir ins Steinig-Viele
hinaus.
Paul Celan, Partie de neige, édition bilingue,
traduit de l'allemand et annoté par Jean-Pierre
Lefebvre, Seuil, 2007, p. 51.
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