28/02/2025
Kafka Journal
Ce sentiment de fausseté que j’ai en écrivant pourrait être représenté par cette image : quelqu’un attendrait devant deux trous creusés dans le sol une apparition qui ne doit surgir que de côté droit. Mais alors que justement ce trou-là reste obstrué par une paroi assez opaque, une apparition après l’autre sort du côté gauche, cherche à attirer le regard sur soi et finit par y parvenir sans effort grâce à une ampleur croissante, qui finit même par recouvrir la bonne ouverture, quel que soit le moyen de défense pour empêcher cela. Mais voilà, si on ne veut pas quitter cette place — et cela on ne le veut à aucun prix — on doit s’accommoder de ces apparitions, qui pourtant, en raison de leur fugacité — leur force s’épuise dans le fait même d’apparaître — ne peuvent suffire, mais, quand par faiblesse, elles s’arrêtent, on les disperse vers le haut et dans toutes les directions, juste pour en susciter d’autres, parce que leur vision prolongée vous est insupportable et aussi parce que l’espoir subsiste qu’après épuisement des fausses apparitions les vraies pourront enfin surgir.
Kafka, Journal (27/12/1911), traduction Robert Kahn, éditions NOUS, 2020, p. 281.
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27/02/2025
Franz Kafka, Journaux
Quand on s’arrête sur un livre de lettres ou de mémoires, quelle que doit la personne concernée (…), qu’on ne le fait pas pénétrer en soi par sa propre force, car pour cela il faut déjà de l’art et celui-ci se suffit à lui-même, mais que cela vous est donné — pour celui qui n’oppose pas de résistance cela arrive vite —,de se séparer de l’étranger ainsi constitué et de consentir à en faire un membre de sa famille, alors ce n’est plus quelque chose de spécial quand, en refermant le livre on se trouve face à soi-même, et que, après cette excursion et ce délassement on se sent à nouveau mieux dans son être propre, renouvelé et secoué à neuf d’avoir été pendant un moment vu de loin, et on reste avec une tête plus libre.
Kafka, Journaux, traduction Robert Kahn, éditions NOUS, 2020, p. 247.
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26/02/2025
Marie de Quatrebarbes, Les éléments : recension
Les livres de Marie de Quatrebarbes sont d’une certaine manière sans surprise : le lecteur n’y retrouve pas ce qui fait le fonds aujourd’hui de (très) nombreux recueils de poèmes, le récit de vie, l’autobiographie, la relation du quotidien. Les éléments est un livre exigent de questions, y entrer demande au lecteur un peu de patience et il aura en retour un rare plaisir de lecture. Ce qui peut être vite repérable dans le chaos offert, ce sont des constantes formelles et de contenu. Ici : les quatre premiers ensembles de poèmes en prose, Le détail principal, Les actualités reconstituées, Empirique fossile, Assez vivant, ont paru dans des revues, le cinquième est inédit ; ils sont liés de manière évidente, « les éléments », la mer, la terre, l’air sont constamment présents, moins le feu, avec « les films de Méliès brûlés » ; un cinquième poème en prose, Digression sur le dehors, est inédit, et construit à partir d’un des thèmes récurrents de l’œuvre, celui du reflet ou du double. Mais c’est le thème de la répétition qui apparaît dans la strophe d’ouverture.
Il est impossible de ne pas lire la reprise, trois fois, de : « enfance » (le jour de l’enfance, la très petite enfance, dans l’enfance) avec, comme une glose, « la petite fille ». Le mot revient régulièrement, un des ciments de parties assez diverses, plusieurs fois dans un poème avec des emplois différents, comme s’il s’agissait d’insister sur le choix formel de la répétition et la variété des significations :
L’enfant en l’enfant cajole l’enfant (…) Pour se donner du courage il chante quelque chose : je suis cet enfant qui vit à l’intérieur d’une autre enfant
On note la constance de l’enfance dans presque tous les livres, également sous la forme de la « petite fille » (« J’ai été cette petite fille solitaire », La vie moins une minute, 2014) ; elle est aussi présente dans Les éléments sous forme de souvenir (« Lorsque j’étais enfant, je pensais (…) »), également à la base d’une création artistique, « Inlassablement il répète les gestes en une série toujours identique ». D’autres mots réapparaissent au fil des pages, comme la tulipe, mot par ailleurs intégré une fois dans l’une des reprises d’un fragment de phrase [en italique] qui contribue à construire l’unité du livre :
« Comme l’élastique revient à sa position initiale, la tulipe de l’enfance retourne en la main avec la peau des doigts qui se touchent, s’entrelacent, s’entreglosent et nouent ensemble sensation, prémonition et désir »
Quelques variantes (verbes conjugués ou non, sujets différents, ajout de verbes, de compléments) apportent l’idée d’un changement continu dans les choses, dans le monde. Ce chaos est notamment figuré par le procédé de l’énumération, donc par l’impossibilité de contenir dans un texte le visible ; s’ajoute le fait que le nom des choses se crée par contiguïté sémantique (« il pleut (…) sur la mer basse continue ») ou sonore (« la pluie tombe sur (…) les voies toutes voilées de lumière, les voilures, les allures, les haleurs, les chaleurs, (…), les gens, les gendarmes (…), la voirie, la verrerie, les verrières » [etc.]). Sans oublier dans la longue liste des éléments — « la lumière, des éclairs » — ou des expressions — « les masques qui tombent » — que la pluie ne peut atteindre. On imaginerait le peu de réalité de ce monde si, dans l’énumération qui précède immédiatement, toutes les images d’un film sont affirmées être « vraies », mais une partie ne peut être regardé contrairement à ce qui est suggéré, comme « les fantômes de la bibliothèque et le lys dans la vallée ».
La "réalité" du film transporte le lecteur dans la fiction, l’une des constantes de l’œuvre de Marie de Quatrebarbes, fiction revendiquée (1) ou non. Dans Les éléments, l’imaginaire irrigue le texte, des embryons de récits appartiennent au conte, l’un met en scène un homme extrait de l’écorce d’un arbre, un autre des parents qui abandonnent des mois leurs enfants et reviennent nus « avec un œuf dans la bouche », etc. La fiction peut reposer sur l’ignorance ou une observation médiocre, par exemple quand un enfant se souvient qu’il prenait les seiches pour des vaisseaux, ou elle naît par un jeu de langage ; « Si (…) que se serait-il passé ? ». Enfin elle est la raison d’être du cinéma, d’où la brève biographie de Georges Méliès, pionnier des trucages avec ses "actualités reconstituées", et l’allusion à des images de ses films, celle notamment de la jeune femme à cheval sur un croissant de lune. Imaginaire triomphant avec ce que l’on peut découvrir derrière la porte : on pense à Lewis Carroll ou, pour le cinéma , par exemple à L’imaginarium du docteur Parnassus de Terry Gilliam. On en vient à conclure que « Tout ce qui est fiction existe ou existera », ou a existé comme est rappelée l’ouverture de la Mer rouge pour permettre l’exil de Moïse (Exode, 14).
Il s’agit bien d’une rupture d’avec "l’ordre naturel" et l’auteure introduit dans le livre des ruptures analogues en brisant l’ordre donné comme logique dans une suite de phrases, descriptive ou narrative. Un récit, ouvert avec la mention d’une femme couchée sur le sol bifurque complètement quand elle est comparée par son immobilité à une banquise : elle laisse place à des considérations sur la glace, la neige, l’iceberg — saut d’autant plus grand que la scène se passe à Tanger. Le lecteur rencontre d’autres ruptures avec la juxtaposition dans un énoncé, ou entre deux énoncés, de deux propos sans lien entre eux :
Une fois j’ai vu au microscope un morceau de mon doigt et il en va de même avec les gens
La rupture repose aussi sur un interdit culturel propre à notre civilisation et la présenter sans aucun commentaire en accroît la force, l’énoncé restreignant la pratique anthropophagique à une catégorie, « On ne doit pas manger la chair de ceux avec lesquels on dort ».
Ainsi les représentations du monde se modifient sans cesse et l’on se demande comment ce chaos de l’expérience peut se maîtriser. À vrai dire aucune issue n’est avancée. Les suggestions de la narratrice ne sont guère enthousiasmantes : « accrocher ma vie aux noms que j’invente, pas plus humains que moi, non plus que vous ». Pratique qui implique que « l’immobilité devient notre conquête », ce qui est répété ensuite, « Disons que l’immobilité est notre stratégie ». On comprend vite que la solution avancée n’en est pas une, pas celle de Marie de Quatrebarbes, mais que ses mouvements complexes dans la langue (qu’on a seulement esquissés) visent à questionner les représentations de l’expérience (de la langue, du monde), outre le plaisir de lire qu’ils procurent.
- voir par exemple : "on invente des histoires pour les derniers petits", La vie moins une minute, 2014.
Marie de Quatrebarbes, Les éléments, P.O.L, 120 p.,16 €. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 12 janvier 2025.
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25/02/2025
Gerard Manley Hopkins, Reliquiæ Vers Proses Dessins
Paraître l’étranger
Paraître l’étranger, tel est mon lot, ma vie
Parmi des étrangers. Père et mère chéris,
Frères er sœurs, sont dans le Christ non proches
Et Lui ma paix, mon désunir, glaive et discord.
L’Angleterre, ô mon cœur en quiert l’honneur ! épouse
De mon premier créant, ne m’écouterait pas
Si je plaidais, ni ne plaidè-je : combien las-
sé d’être là, oisif, où les guerres abondent.
Me voici en Irlande à présent : c’est ma tierce
Éloigne. Non qu’à chaque éloigne je ne donne
Et ne reçoive amour. Mais à toute parole
De mon cœur le plus sage, ou le ban confondant
Du ciel noir, ou l’enfer, met barre. Ce garder
Inouï, ou ouï sans plus, me laisse à zéro, seul.
Gerard Manley Hopkins, Reliquiæ Vers Proses Dessins
réunis et traduits par Pierre Leyris, éditions du Seuil, 1957, p. 115.
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24/02/2025
Dino Campana, Chants orphiques
La chimère
Je ne sais si entre des rochers ton pâle
Visage m’apparut, ou si un sourire
De lointains ignorés
Tu fus, baissé le front
D’ivoire éblouissant ou une jeune
Sœur de la Joconde :
Ou des printemps défunts
Pour tes pâleurs mythiques
La Reine ou la Reine adolescente :
Mais pour ton poème ignoré
De douleur et de volupté
Musique jeune fille exsangue,
Marqué de lignes de sang
Dans le cercle des lèvres sinueuses,
Reine de la mélodie :
Mais pour ta vierge tête
Penchée, moi poète nocturne
J’ai veillé les vives étoiles dans les prairies du ciel,
Moi pour ton doux mystère,
Moi pour ta démarche taciturne.
Je ne sais si des cheveux la pâle
Flamme fut la marque
Vivante de sa pâleur,
Je ne sais si ce fut une douce vapeur,
Douce sur ma douleur,
Sourire d’un visage nocturne :
Je regarde les rochers blancs les sources muettes des vents
Et l’immobilité des firmaments
Et les ruisseaux gonflés qui vont pleurant
Et les ombres du travail humain penchées sur les margelles souffrantes
Et toujours dans de tendres cieux des lointaines claires ombres courantes
Et toujours je t'appelle je t’appelle Chimère.
Dino Campana, Chants orphiques, édition bilingue, introduction de Maria Luisa Spaziani, postface et traduction de l’italien de Michel Sager, Seghers, 1977, p. 46-47.
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23/02/2025
Jean Tortel, Relations
On n’est pas heureux
Sous l’azur fragile.
En ce jardin je sais je ne sais quoi.
Les feuilles sont un peu plus larges,
Un peu moins vertes que leur nom.
L’azur enfante l’ombre
(Le fruit de sa pourriture).
La terre aborde son silence
Qui l’attendait.
Jean Tortel, Phrases pour un orage, III,
dans Relations, Gallimard, 1968, p. 31.
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22/02/2025
Joyce Mansour, Carré blanc
Du doux repos
Prends vire une plume
Écris
Je volerai je volerai
L’orbite de la lune sauvage
Les grêles sanglots des vagues
Venues de l’autre rive
Vagues vaguelettes bandelettes et babillage
Écris
Roule entre mes bras
Ainsi qu’un caillou entre le ciel et le fond
D’un puits
Le sable sauvegarde de l’aveugle
Sur le parchemin de sa nuit
Prends vite du papier
Écris
Suis-moi entre les plates-bandes
Tranchées béquilles épines
Écoute
Les confidences de la rose
Mâchées hachées anodines
Joyce Mansour, Carré blanc, éditions Le Soleil noir, 1961, p. 121.
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21/02/2025
Pierre Reverdy, La Guitare endormie
La vie fragile
Plus loin entre la plante grasse et le rideau
Dresser l'échelle
Les formes qui remuent dans le fond du jardin sont blanches
d'autres noires
Selon le mouvement brutal du réflecteur
Les maillots des arbres sont roses
Mais au premier plan une main tient la clef du cœur
Un couple ailé marche dans des couleurs qui changent
Celui qui vole bas c'est l'homme
Celui qui va à pied c'est l'ange
Les yeux luttent dans la lumière
La lampe fraîche du matin
Un fil cassé descend derrière
La tête nue s'incline et barre le chemin
Tout le reste est recouvert de feuilles mortes
Quant au ciel il s'ouvre par le fond et de côté mais en triangle
Pierre Reverdy, La Guitare endormie. [1919], dans Œuvres complètes I, "Mille&unepages", Flammarion, 2010, p. 262.
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20/02/2025
Sylvia Plath, Arbres d'hiver
Ces poèmes ne vivent pas : c’est un triste diagnostic.
Ils ont pourtant bien poussé leurs doigts et leurs orteils,
Leur petit front bombé par la concentration. S’il ne leur a pas été donné d’aller et venir comme des humains
Ce ne fut pas du tout faute d’amour maternel.
Ô je ne peux comprendre ce qui leur est arrivé !
Rien ne leur manque, ils sont correctement constitués. Ils se tiennent si sagement dans le liquide formique !
Ils sourient, sourient, sourient, sourient de moi.
Et pourtant les poumons ne veulent pas se remplir ni le cœur s’animer.
Ils ne sont pas des porcs, ils ne sont pas même des poissons,
Bien qu’ils aient un air de porc et de poisson —
Ce serait mieux s’ils étaient vivants, et ils l’étaient.
Mais ils sont morts, et leur mère presque morte d’affolement,
Et ils écarquillent bêtement les yeux, et ne parlent pas d’elle.
.
Sylvia Plath, Arbres d’hiver, précédé de La Traversée, édition bilingue, présentation de Sylvie Doizelet, traduction de Françoise Morvan et Valérie Rouzeau, Poésie/Gallimard, 1999, p. . 89
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19/02/2025
Malcom Lowry, Pour l'amour de mourir
Le passé
Comme une vieille échelle pourrie
Qu’on a jetée d’une scierie désaffectée
Et qui flotte, émergeant seulement par le haut,
Tandis que, tout imprégné d’eau, le reste baigne,
Rongé par les tarets, encroûté de bernacles
Et de moules accrochées en papillotes bleues ;
Puante, alourdie d’algues et de ces curieux êtres
Qui vivent de la mort et de la marée basse,
Route vermiculée, en proie à l’helminthiase :
Telle est ma conscience.
De temps en temps, je la sèche au soleil,
Je l’appuie (contre rien du tout,
Puisqu’elle ne monte nulle part) ;
Mais je la garde, on ne sait jamais, ça peut servir.
Qui sait si elle n’est pas récupérable,
Si on ne pourrait pas la radouber un peu ?
Et chaque nuit sans raison ma cervelle
Monte et descend les barreaux de l’échelle.
Malcom Lowry, Pour l’amour de mourir, traduction de J.-M. Lucchioni, préface de Bernard Noël, éditions de La Différence, 1976, p. 97.
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18/02/2025
Hugo Hofmannsthal, Le lien d’ombre, poèmes complets
Tercets, IV
Parfois des femmes que nul n’a jamais aimées viennent
En rêve à notre rencontre, on dirait des petites filles,
Et elles sont indiciblement émouvantes à voir.
Comme si avec nous sur d’invisibles routes
Elles avaient par un soir de jadis longuement cheminé,
Tandis que les cimes des arbres s’agitent en respirant
Et que tombe sur nous un souffle parfumé, et la nuit, et l’angoisse,
Et que le long du chemin, de notre chemin, l’obscur,
Dans la clarté du soir les étangs muets resplendissent.
Miroir de notre nostalgie, ils scintillent comme en rêve,
Et à toutes les paroles murmurées, à tout le flottement
De l’air du soir et au premier éclat des étoiles,
Les âmes, ces sœurs, profondément tressaillent
Et s’affligent, et s’emplissent d’une gloire triomphante,
Émues par le profond pressentiment qui comprend la grandeur de la
vie
Et sa splendeur et son austérité.
Hugo Hofmannsthal, Le lien d’ombre, poèmes complets,
traduit de l’allemand, annoté et présenté par
Jean-Yves Masson, édition bilingue, Verdier poche,
2006, p. 200-201.
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17/02/2025
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine
La grotte au filet aérien
témoigne d’inscription des liens sur la parole
qui ressemble à celui qui l’a prononcée.
Scellée, indépendante née
de la séquence des mains premières,
comme Caverne Platonique
encore esclave de passé continu ?
Chaque animal en liaison, et côtoiement
peint. Éclair gelé d’un temps
d’adhésion au Simple Jardin ? Non.
Nous en sommes là : Porte et Boyau.
Nous y entrons en bottes sèches.
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine,
Le Bruit du temps, 2025, p. 99.
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16/02/2025
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine
Les enfants n’écoutent pas et regardent.
Ils s’élèvent par l’immobile place au soleil
où chante l’imposture ? Non.
Dans le détour de l’action,
les mouvements sont les arts internes,
usant les transmetteurs-brouilleurs `
parallèles aux bruits qui font peur. Comment dire
les fermoirs et les toiles ? En fixant
les idées chantournées, le type de bonheur,
la marche des gris-vêtus, la dangereuse,
la badine, la moissonneuse, petit-deuil, roseaux,
culbute : le Grand Nié du Fumoir.
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine,
Le Bruit du temps, 2025, p. 62.
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15/02/2025
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine
Hiver dur, l’air captive
les paroles saisissantes. ?
Elles font des livres de vaine cuisine
Printemps rouvre la glace
et repique les volontés de l’eau
dans les trente-six âmes promenées.
Unités Dispersées rêvent de châtaignes
au brasier, de l’éclat grossier
de la peur. Pantagruel et Panurge
sont sur un bateau. Le premier
donne parole comme acte d’amour.
Le second est plein de sons à l’envers.
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine,
Le Bruit du temps, 2025, p. 25.
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14/02/2025
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine
10 décembre 1942, Alfred,
imposant la musique d’un pays
né comme tous et devenu,
hante la facilité en fantôme
de milice et entoure la poésie dite
abstraite et plaisantine césure aérienne.
Abstraite et plaisantine
contre fantôme terrien, elle qui analyse
les fines composantes du monde,
et capable de deuil accéléré
ou d’homme lent, opposé à l’accent
gravé au cœur passé dans l’Usine.
Philippe Beck, Abstraite et plaisantine,
Le Bruitdu temps ;2025, p.11.
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