Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/02/2014

Malcom Lowry, Poèmes, traduction Jean Follain

imgres.jpg

                     Dans la prison d'Oaxaca

 

J'ai connu la cité d'atroce nuit

bien plus atroce que celle que connurent

Kipling ou Thomson...

une nuit où la dernière graine d'espérance s'est envolée

de l'esprit évanescent d'un petit-fils de l'hiver.

 

Dans le cachot cet enfant alcoolique frissonne

réconforté par l'assassin car la compassion ici aussi se montre ;

les bruits nocturnes y sont appels au secours

provenant de la ville, du jardin d'où l'on expulse les destructeurs ?

 

L'ombre du policier se balance sur le mur

l'ombre de la lanterne forme tache noire sur le mur

et sur un pan de la cathédrale oscille lentement ma croix

— les fils et le grand poteau télégraphique remuant au vent —

 

Et  moi je suis crucifié entre deux continents.

 

Aucun message n'arrive du dehors en pleurnichant

pour moi qui demeure ici

mais que de messages pour moi venant d'ici

où l'on signe syphilis et chaude pisse avec du Sloane liniment

mais selon l'un ou l'autre on varie la dose

 

Malcom Lowry, Poèmes, traduction Jean Follain, dans Les Lettres Nouvelles, "Malcom Lowry", mai-juin 1974, p. 225.

20/11/2012

Malcom Lowry, Pour l’amour de mourir

4105864202.3.jpeg

            Le passé

 

Comme une vieille échelle pourrie

Qu’on a jeté d’une scierie désaffectée

Et qui flotte, émergeant seulement par le haut,

Tandis que, tout imprégné d’eau, le reste baigne,

Rongé par les tarets, encroûté de bernacles

Et de moules accrochées en papillotes bleues ;

Puante, alourdie d’algues et de ces curieux êtres

Qui vivent de la mort et de la marée basse,

Route vermiculée, en proie à l’helminthiase :

Telle est ma conscience.

De temps en temps, je la sèche au soleil,

Je l’appuie (contre rien du tout,

Puisqu’elle ne monte nulle part) ;

Mais je la garde, on ne sait jamais, ça peut servir.

Qui sait si elle n’est pas récupérable,

Si on ne pourrait pas la radouber un peu ?

Et chaque nuit sans raison ma cervelle

Monte et descend les barreaux de l’échelle.

 

 

Malcom Lowry, Pour l’amour de mourir, traduction de

J.-M. Lucchioni, préface de Bernard Noël,

éditions de La Différence, 1976, p. 97.