29/10/2025
Paysages





Photo T.H.
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28/10/2025
Jean Tortel, Limites du regad

Transparent. C’est merveille
Immobile ici. Le seuil
Étonnant de jour dense.
(Exulter que cela
Soit tel. Et toute profondeur
Calmée.)
J’ai dit : dehors
Je subis une intensité.
Lame étalée d’argent ou langue
Aérienne et solide,
C’est à présent et pour m’y retrouver.
Lavé. Soleil.
Dire belles
Visible.
La verdure encore massive.
Le corps est là
Évidemment,
Luire ou lumière
Sur le gravier gris-bleu.
Cela doit se dire
Si proche que.
Jean Tortel, Limites du regard,
Gallimard, 1971, p. 88-89.
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27/10/2025
Guy Goffette, Épilepsie force douze

I
La parole
Un seul soir ivre
Le petit ramoneur ne passera plus
Demandez le matin
La logique où est la logique
Elle boit un verre
au café de la gare
La mer vomit pas loin
contre un poteau indicateur
Si seulement les tickets
L’antipode dit que c’est l’heure
périodiquement
XI
Écrire ah
La tête que font les gens pressés
dans les vitrines
Combien en voulez-vous
Un peu de mou pour vos chats Madame
Le sergent de ville passe
dans les portefeuilles
L’identité du bonhomme de neige
est confuse
Glisser dans le Moyen Âge
est une question de souplesse
Quant à écrire
la putain se méfie
Guy Goffette, Épilepsie force douze, dans
Traversées, n° 46, printemps 2007, p. 4 et 14.
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26/10/2025
Jacques Lèbbre, Les carrefours ou les regrets : recension

« Que sont-elles devenues ? »
L’autobiographie aujourd’hui prend les formes les plus diverses, du Journal, qui le plus souvent conserve ce que l’auteur(e) juge publiable, au roman où le "je" se donne plus ou moins clairement pour un double de l’auteur(e). Jacques Lèbre a choisi de revenir, dans douze poèmes en vers libres, sur quelques rencontres — non datées — avec des femmes, aimées parfois fugitivement ou simplement croisées. Il pourrait sans doute citer Apollinaire, « Les souvenirs sont cors de chasse / dont le bruit meurt parmi le vent » : quand le temps a effacé le vécu, il se souvient et relate avec des imprécisions, des erreurs quelques moments de ces "carrefours" qui, parfois, ont changé pour longtemps ses jours. Il retient aussi des "regrets", ces moments d’hésitation qui font disparaître ce qui était possible, ces empêchements de la vie aussi où l’on pourrait changer de voie.
L’ensemble touche à ce qui est intime, cependant la pose lyrique est éloignée en écartant des poèmes le "je", comme si un narrateur extérieur s’adressait à un personnage, avec un "tu", et auquel il rappellerait quelques épisodes de la vie passée. À côté de ce procédé, Jacques Lèbre accroît la distance en rapportant une rencontre sans aucun pronom personnel, mais en en notant les lieux, du premier où quelque chose va se passer (« l’escalier gravi », qui aboutit donc à un appartement) au dernier, le plus anonyme qui soit (« l’aire déserte d’une route »), en accord avec le ciel nocturne qui semble illustrer la fin d’une liaison :
une étoile filante comme la traîne d’un amour
qui déjà disparaissait tout au fond de l’horizon
Les autres lieux du poème connotent la nécessité de dissimuler la liaison : « Une traversée matinale du Jardin des Plantes », une gare, « une autre ville, à l’abri sous un pont ». « Discrétion » de la liaison interdite, mais désir de continuer à la faire vivre par la parole quand les amants se séparent, provisoirement ou non, ce qu’indiquent le premier et le dernier vers semblables, « Un numéro de téléphone longtemps su par cœur ».
Il n’est pas indispensable de suivre les récits dans le détail : certaines rencontres sont seulement souhaitées, pour respecter une éthique (on ne trompe pas l’amie avec qui l’on vit) mais qu’une femme trompe, elle, son compagnon pour vivre quelque temps une vie parallèle, est accepté. Une liaison n’a été vécue qu’« en pointillé durant vingt ans », alors que cette autre est délimitée dans le temps, restreinte à « quelques rencontres épisodiques ». Plus intéressant peut-être pour le lecteur et la lectrice, le lien entre ces récits et des modèles littéraires. L’un d’entre eux se situe précisément dans la ligne de l’amour, de la rencontre amoureuse selon les surréalistes ; une femme, présentée comme belle, monte dans un bus et, rapidement, sort de son sac une revue de poésie, face à celui qui écrit des poèmes, ce qui semblait rendre obligée une rencontre — qui a lieu. On reconnaît là le "hasard objectif" à l’œuvre par exemple dans la Nadja d’André Breton, d’autant plus nettement qu’ici l’acteur du récit, « un peu déprimé », était « sorti pour qu’il se passe quelque chose ». Une dimension tragique, inattendue, qui accroît le caractère littéraire, clôt le récit ; s’il est noté qu’il n’y eut que quelques « rencontres épisodiques », le sort de la femme est souligné, « maintenant : sa tombe dans un cimetière parisien / et quelques pauvres cailloux sur le marbre noir ».
D’autres poèmes rapportent cet imprévisible des mouvements de la vie, le chaos dans lequel chacun vit, dans les rencontres amoureuses ou non, et Jacques Lèbre ne met pas de côté des "regrets". Le désir d’une relation peut être partagé à un moment et plus tard le sens s’en est perdu pour l’un ou pour les deux. Une liaison ancienne et depuis longtemps terminée pourrait « recommencer » mais les gestes ou les paroles attendus ne viennent pas, une autre fois les mots ne manquaient pas mais il fallait sortir de ce lieu mal commode qu’est une poste et « Plus jamais, plus jamais tu ne l’as revue ».
Les souvenirs sont toujours une reconstruction du passé, souvent erronée, pour les carrefours comme pour les regrets, et Jacques Lèbre en est conscient. Il en donne au moins un exemple ; s’adressant à une femme autrefois aimée, il lui rappelle qu’elle avait porté une jupe jaune, « Non, (…) elle n’avait jamais porté de jupe jaune ». C’est presque toujours le hasard, encore une fois, qui appelle le souvenir — une rue, une phrase — et ne ressurgissent des « limbes » que des « bouffées ». Ce qui domine, c’est la perte et chacun ne sauve que des fragments de ce qui peu à peu s’efface.
Jacques Lèbre, Les carrefours ou les regrets, Potentille, 2025, 20 p., 10 €. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 4 septembre 2025.
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25/10/2025
Edmond Jabès, La clef de voûte

Nous sommes invisibles
Quant tu es loin
il y a plus d’ombre
dans la nuit
il y a
plus de silence
Les étoiles complotent
dans leurs cellules
cherchent à fuir
mais ne peuvent
Leur feu blesse
il ne tue pas
Vers lui quelquefois
la chouette lève la tête
puis ulule
Une étoile est à moi
plus qu’au sommeil
et plus qu’au ciel
distant absent
prisonnière hagarde
héroïne exilée
Quand tu es loin
il y a plus de cendres
dans le feu
plus de fumée
Le vent disperse
tous les foyers
Les murs s’accordent
avec la neige
Il était un temps
où je ne t’imaginais pas
où hanté par ton visage
je te suivais dans les rues
Tu passais étonnée à peine
J’étais ton ombre dans le soleil
J’ignorais le parc silencieux
où tu m’as rejoint
Seuls nous deux
rivés à nos rêves
au large de nos paroles abandonnées
Je dors dans un monde
où le sommeil est rare
un monde qui m’effraie
pareil à l’ogre de mon enfance
[...]
Edmond Jabès, La Clef de voûte,
GLM, 1950, p. 25-26.
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24/10/2025
Claude Chambard, Cet être devant soi

Une fois
l’enfant a trouvé
dans la montée des Couardes
une façon de grotte
où il s’est faufilé
à peine un trou de lapin
tapissé de mousse & de feuilles
—est-ce un endroit pour vivre —
il attendait un lutin
un elfe une fée Alice
que sais-je
mais au fond du petit terrier
il discernait à peine quelques couleurs
du bleu turquoise du brun roux
su vert sombre du jaune bordé de noir
quelques plumes
un cadeau une couvée
du guêpier d’Europe (Merops apiaster)
Claude Chambard, Cet être devant soi, Æncrages & CO, 2012, np.
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23/10/2025
Jehan Rictus, Les Soliloques du pauvre

P’têt’ ben qu’un jour gn’aura du bon
Pour l’Gas qui croit pus à grand’chose,
Qu’a ben sommeil, qu’est ben morose
Et qui bourlingue à l’abandon ;
Pour l’Gas qui marche en ronflant debout
Et qui veut pas en foutre un’ datte
Et qui risqu’rait p’têt’ un sal’ coup
S’il l’tait pus vaillant su’ ses pattes
Et s’y n’aurait pas qu’en fin d’comptes
Pus ya d’misère et d’scélérats,
Pus ya d’ l’horreur, pus ya d’ la honte,
Pus ya d’pain pour les magistrats !
(…)
Jehan Rictus, Les Soliloques du pauvre, Poésie/
Gallimard, 2020, p. 41.
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22/10/2025
Philippe Jaccottet, Autres journées

Loriot : oiseau lié au soleil de huit heures du matin, aux ombres encore longues dans les vergers, les truffières.
Les engoulevents sont déjà repartis : brefs compagnons. Messagers ponctuels du crépuscule, avec leur bruit d'horloge de bois. Messagers de l'entre-deux, entre ciel et terre, entre jour et nuit — au ras de la cime des arbres.
Il y a une décantation qui se produit, en même temps qu'il fait plus sombre peu à peu — et c'est alors que paraît cet oiseau couleur d'ombre, plutôt paisible, flottant, autour duquel plus ou moins vainement je tourne. Comme un morceau de nuit, découpé dans son étoffe.
Quand la fumée brillante du jour se dissipe.
Travail au jardin, sous un temps doux, ciel pâle. Pas une feuille nouvelle, sinon celles, infimes, de la spirée. Le rouge-gorge, le « cravaté de rouge» d'Emily Dickinson si cher à Roud dans sa vieillesse, par moments semble accompagner mon travail ou même s'y intéresser, tant il est proche ; petit piéton plutôt qu'oiseau, presque toujours à picorer dans la terre.
Aube d'octobre
Il fait un peu plus froid.
Le rouge-queue chante dans l'aube qui se dissipe.
C'est comme si chantait un charbon.
En plein midi, soudain, deux martinets très haut dans le ciel à côté d'un nuage en forme de tour blanche, légère — comme je ne sais quelle apparition foudroyante, énigmatique, ou quelle mesure de la hauteur de l'air, quelle révélation de l'espace aérien, quelle flèche de fer dans le cœur. Une joie bizarre, d'à peine une seconde — et en me relisant, je me rappelle le gerfaut des Solitudes, « scandale bizarre de l'air » —, une lettre tracée sur le bleu puis effacée, un trait — ou le crochet d'un hameçon ? Sait-on qui a pu vous ferrer ainsi ?
La fauvette dans le tilleul : chant extraordinairement, mystérieusement clair, comme s'il traversait, transperçait une enveloppe, franchissait une limite.
Fauvette
dernier oiseau parleur en plein été
de quoi me parles-tu ainsi de loin en loin
dans le feuillage du tilleul ?
De quoi peut donc parler voix si limpide ?
Philippe Jaccottet, Autres journées, Fata Morgana,
1987, p. 15, 19, 28, 34, 46, 82, 88.
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21/10/2025
Queneau Raymond, les Ziaux
Les ziaux
les eaux bruns, les eaux noirs, les eaux de merveille
les eaux de mer, d'océan, les eaux d'étincelles
nuitent le jour, jurent la nuit
chants de dimanche à samedi
les yeux vertes, les yeux bleues, les yeux de succelle
les yeux de passante au cours de la vie
les yeux noirs, yeux d'estanchelle
silencent les mots, ouatent le bruit
eau de ces yeux penché sur tout miroir
gouttes secrets au bord des veilles
tout miroir, tout veille en ces ziaux bleues ou vertes
les ziaux bruns, les ziaux noirs, les ziaux de merveille
Raymond Queneau, Les Ziaux, collection Métamorphoses, XVII, Gallimard, 1943, p. 74.
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20/10/2025
Georges Perros, Papiers collé, 3

Il y a toujours quelque chose d’illisible dans un poème (digne de ce nom). L’illisible, c’est le poème lui-même, rendu équivalent à la nature. Incueillable. On se donne des gants en semant.
La culture fait des perroquets. Une partie de la poésie moderne — mais qu’entends-je par là ? — est le fait de type pas bêtes qui ont lu jusqu’à la garde, et peuvent à leur volonté singer tel ou tel prédécesseur de leur choix.
Tout le monde est capable d’écrire n’importe quoi en se réclamant de la poésie.
Un poème, c’est l’intérieur et l’extérieur, quelque chose au cœur de laquelle on peut habiter. Et quand l’intérieur est trop confortable, permet une pose, voire un repos, ça se sent tout de suite. Un poème fait partie du monde, il s’intègre à tout l’invisible, à tout l’ailleurs, à ce que Bonnefoy appelle l’arrière-pays. Il y a des choses qui passent en nous, qui nous traversent, nous travaillent, comme on dit que la mer est travaillée, sans que nous en soyons les maîtres. Ni les esclaves. Le matériau nous ignore, nous lui sommes parfaitement indifférents. À prendre ou à laisser. L’art n’est pas autre chose que la récupération difficile de ces signes qui échappent au quotidien élémentaire, mais comme le tout échappe au détail.
Ce qu’on entend généralement par poésie est devenu la tarte à la crème de notre délicieuse société. On va même jusqu’à l’enseigner — l’ensaigner ? — dans les universités, ce qui pourrait suffire à incendier l’immeuble si l’exercice professoral n’était de longue date voué au ridicule de l’inefficacité absolue. Mais il est vrai, vérifiable, que pas mal d’individus diplômés continuent d’expliciter Rimbaud, Cummings, etc. En tout rien toute horreur. Les étudiants n’y voient que du feu, mais ce feu ne prend pas. Nulle part. Ils connaîtront trois vers de X. Y. Z., juste assez pour les citer de travers quand ils seront devenus députés, ministres, président de je ne sais quelle république.
Georges Perros, Papier collés 3, Gallimard, 1978, p. 15, 46, 46, 69, 169.
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19/10/2025
Jacques Dupin, Gravir

Le partage
Une larme de toi fait monter la colonne du chant.
Une larme la ruine, et toute lumière est inhabitée.
La corde que je tresse, la rose que j’expie,
N’ont pas à redouter de lumière plus droite.
Le peu d’obscurité que je dilapide en montant
C’est de l’air qui me manque à l’approche des cimes.
Par le versant abrupt, la plus libre des routes,
Malgré le timon de la foudre et mes vomissements.
L’initiale
Poussière fine et sèche dans le vent,
Je t’appelle, je t’appartiens,
Poussière, trait pour trait,
Que ton visage soit le mien,
Inscrutable dans le vent.
Jacques Dupin, Gravir, Gallimard, 1963, p. 29 et 59.
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18/10/2025
Queneau Raymond, les Ziaux

Les ziaux
les eaux bruns, les eaux noirs, les eaux de merveille
les eaux de mer, d'océan, les eaux d'étincelles
nuitent le jour, jurent la nuit
chants de dimanche à samedi
les yeux vertes, les yeux bleues, les yeux de succelle
les yeux de passante au cours de la vie
les yeux noirs, yeux d'estanchelle
silencent les mots, ouatent le bruit
eau de ces yeux penché sur tout miroir
gouttes secrets au bord des veilles
tout miroir, tout veille en ces ziaux bleues ou vertes
les ziaux bruns, les ziaux noirs, les ziaux de merveille
Raymond Queneau, Les Ziaux, collection Métamorphoses, XVII, Gallimard, 1943, p. 74.
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17/10/2025
Valérie Rouzeau, Récipients d'air
photo Chantal Tanet, 2009
Pommes poires et tralalas merles renards flûtes à bec
Et les petites bottes bleues enfoncées dans la boue
Après la peine la joie revenait aussi sec
Au bois sifflaient les ziaux les loups les pâtres grecs
Beaucoup d’airs de toutes sortes faisaient gonfler nos joues
Pommes poires et tralalères merles renards flûtes à bec
Il n’y avait pas d’euros de dollars de kopecks
On pouvait chanter fort la gadoue la gadoue
Après la peine la joie revenait aussi sec
Dans le vent murmuraient le lièvre et le fennec
Tournaient les grues les elfes les roues
Pommes poires et tralalères merles renards flûtes à bec
Au soleil se grisaient les drontes et les pastèques
Les porcelets songeurs échappés de la soue
Après la peine la joie revenait aussi sec
Mais de ce temps bon vieux ont eu lieu les obsèques
Et je sens ma chanson de vilain qui s’enroue
Pommes poires et tralalas merles renards flûtes à bec
Après la peine la joie revenait aussi sec
Valérie Rouzeau, Récipients d’air, Le Temps qu’il fait, 2005, p. 21-22.
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16/10/2025
Francis Ponge, Pièces

Le paysage
L’horizon, surligné d’accents vaporeux, semble écrit en petits caractères, d’une encre plus ou moins pâle selon les jeux de lumière.
De ce qui est plus proche je ne jouis plus que comme d’un tableau,
De ce qui est encore plus proche que comme de sculptures, ou architectures,
Puis de la réalité même des choses jusqu’à mes genoux, comme d’aliments, avec une sensation de véritable indigestion,
Jusqu’à ce qu’enfin, dans mon corps tout s’engouffre et s’envole par la tête, comme par une cheminée qui débouche en plein ciel.
Francis Ponge, Pièces, dans Œuvres complètes, Pléiade/Gallimard, p. 721.
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15/10/2025
Francis Ponge, Pièces

Éclaircie en hiver
Le bleu renaît du gris, comme la pulpe éjectée d’un raisin noir.
Toute l’atmosphère est comme un œil trop humide, où raisons et envie de pleuvoir ont momentanément disparu.
Mais l’averse a laissé partout des souvenirs qui servent au beau temps de miroirs.
Il y a quelque chose d’attendrissant dans cette liaison entre deux états d’humeur différente. Quelque chose de désarmant dans cet épanchement terminé.
Chaque flaque est alors comme une aile de papillon placée sous vitre,
Mais il suffira d’une roue de passage pour en faire jaillir la boue.
Francis Ponge, Pièces, dans Œuvres complètes, I, Gallimard/ Pléiade, p. 720-721.
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