30/05/2024
Franz Kafka, Journal
Je vais essayer de rassembler progressivement tout ce qu’il y a de douteux en moi, plus tard ce qui est plausible, ensuite le possible, etc. Il y a sans doute en moi un désir avide de livres. Non pas, en fait, les posséder ou les lire, mais bien plutôt les voir, me convaincre de leur existence dans la vitrine d’un libraire. S’il y a quelque part plusieurs exemplaires du même livre chacun d’entre eux me réjouit. C’est comme si ce désir provenait de l’estomac, comme si c’était un appétit qui s’égare. Les livres que je possède me réjouissent moi, par contre les livres de mes sœurs me font bien plaisir. Le besoin de les posséder est incomparablement plus faible, il manque presque.
Kafka, Journal, traduction Robert Kahn, éditions NOUS, 2020, p. 211-212.
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29/05/2024
Jules Renard, Journal
Être clair ? Nous sommes si peu capables d’efforts pour comprendre les autres !
Quand elle avait pris ses belles résolutions d’économie, elle commençait tout de suite par refuser aux pauvres.
L’incompréhensible dit toujours : « Mais tu ne comprends donc rien ! ».
Si l’inspiration existait, il ne faudrait pas l’attendre ; si elle venait, la chasser comme un chien.
La peur de l’ennui est la seule excuse du travail.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 130, 131, 133, 133, 134.
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28/05/2024
Jules Renard, Journal
Le devoir ? Ah ! non, laissez-moi tranquille.
Quand il se regardait dans une glace, il était toujours tenté de l’essuyer.
Un livre nous déplaît partout où il nous ressemble.
Ne jamais rien faire comme les autres en art ; en morale, faire comme tout le monde.
Le talent, c’est comme l’argent : il n’est pas nécessaire d’ne avoir pour en parler.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 116, 117, 124, 127, 129.
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27/05/2024
Jules Renard, Journal
J’ai vu, monsieur, sur une table de boucher, des cervelles pareilles à la vôtre.
On peut donner le ton des paysans sans faute d’orthographe.
Il y a des critiques qui ne parlent que des livres qu’on va faire.
Comme c’est vain une idée ! Sans la phrase, j’irais me coucher.
C’est une erreur commune de prendre pour des amis deux personnes qui se tutoient.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 98, 99, 103, 103, 106.
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26/05/2024
Jules Renard,Journal
Le style, c’est l’oubli de tous les styles
Acquiers le talent de dire sans bâiller : « C’est intéressant. »
Ne jamais être content : tout l’art est là.
Soyez tranquille ! Je n’oublierai jamais le service que je vous ai rendu.
Le vrai bonheur serait de se souvenir du présent.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 88, 95, 96, 96, 97.
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25/05/2024
Jules Renard, Journal
Un monsieur très bien propriétaire d’un palmier en Tunisie.
Il jouait du piano d’une façon remarquable avec un seul doigt.
Le réalisme ! le réalisme ! Donnez-moi une belle réalité : je travaillerai d’après elle.
Un peintre, c’est un homme qui porte un béret.
Il est tombé sur moi à coups de compliments.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 60, 52, 66, 67, 69.
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24/05/2024
Jules Renard, Journal
Cette sensation poignante qui fait qu’on touche à une phrase comme à une arme à feu.
On peut être poète avec des cheveux courts.
On peut être poète et payer son loyer.
Quoique poète, on peut coucher avec sa femme.
Un poète, parfois, peut écrire en français.
Les bourgeois, ce sont les autres.
Cherchez le ridicule en tout, vous le trouverez.
Elle avait une peur ridicule du ridicule.
Jules Renard, Journal, Gallimard/Pléiade, 1965, p. 50, 51, 51, 54, 55.
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10/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Écrire pour quelqu’un, c’est comme écrire à quelqu’un : on se croit tout de suite de mentir.
Le peuple ne nous comprend pas. Nous le comprenons encore bien moins.
Mes bonheurs, je les ai presque toujours eus par maladresse.
Il vaudrait mieux se taire toujours. On ne dit rien quand on parle. Ou les mots dépassent la pensée, ou ils la diminuent.
Nous avons tous quelqu’un que notre mort arrangerait.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1151, 1152, 1153, 1160, 1164.
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09/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Mon ignorance et l’aveu de mon ignorance, voilà le plus clair de mon originalité.
J’aime assez à me créer moi-même mes ennuis.
Je ne connais qu’une vérité : le travail seul fait le bonheur. Je ne suis sûr que de celle-là, et je l’oublie tout le temps.
N’être bon que pour se faire bien voir, c’est se sentir, au fond, incurable.
La vérité créatrice d’illusions, c’est la seule que j’aime.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/gallimard, 1965, p. 1164, 1170, 1172, 1174, 1181.
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08/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Dans ce coin du monde qu’est un village, il y a à peu près toute l’humanité.
La vanité est le sel de la vie.
Livres. Il suffit de lire les cinquante premières pages et de découper le reste.
J’avoue que parfois la nature m’embête. C’est une saveur de plus que je lui dois : celle de l’ennui.
La Bruyère, le seul dont dix lignes lues au hasard ne déçoivent jamais.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1182, 1186, 1191, 1191, 1195.
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07/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Je ne sais jamais rien, et j’ai toujours le plaisir d’apprendre n’importe quoi.
Les hommes naissent égaux. Dès le lendemain ils ne le sont plus.
Oui, je m’ennuie, mais l’ennui ne fait pas mal comme un autre sentiment : colère, orgueil, désir, etc.
Une seule expérience se fortifie en moi : tout dépend du travail. On lui doit tout, et c’est le grand régulateur de la vie.
Une fenêtre sur la rue vaut un théâtre.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1130, 1132, 1147, 1148, 1148.
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05/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Se défier des principes qui rapportent beaucoup d’argent.
Ma peur, quand je marche derrière une femme, qu’elle s’imagine que je la suis.
Un jeune qui n’a pas de talent, c’est un vieux.
Ils sont encore chrétiens parce qu’ils croient que leur religion excuse tout.
On s’habitue à n’être jamais malade.
Rongé de modestie.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965,
p. 1111, 1112, 1112, 1117, 1121, 1129.
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04/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Pourquoi se déplacer ? D’une certaine hauteur de rêve, on voit tout.
À relire des vieilles lettres, j’éprouve déjà un plaisir de vieux.
Métro : on entre dans la gueule populaire.
Travailler à n’importe quoi, c’est-à-dire faire de la critique.
La mort ne nous prend peut-être que tout à fait développés : ma lenteur à croître me rassure.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1097, 1097, 1103, 1104, 1108.
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03/11/2023
Jules Renard, Journal, 1887-1910
Il y a place au soleil pour tout le monde, mais ce n’est pas la place de la Concorde.
On a tout lu, mais ils ont lu un livre que vous devriez lire, qui leur donne une supériorité, et qui annule toutes vos lectures.
Pourquoi tant jouir ? Ne pas jouir est aussi amusant, et ça fatigue moins.
Un socialiste, indépendant jusqu’à ne pas craindre le luxe.
Chaque fois que je veux me mettre au travail, je suis dérangé par la littérature.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1087, 1089, 1090, 1096, 1097.
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Jules Renard, Journal, 1887-1910
Il y a place au soleil pour tout le monde, mais ce n’est pas la place de la Concorde.
On a tout lu, mais ils ont lu un livre que vous devriez lire, qui leur donne une supériorité, et qui annule toutes vos lectures.
Pourquoi tant jouir ? Ne pas jouir est aussi amusant, et ça fatigue moins.
Un socialiste, indépendant jusqu’à ne pas craindre le luxe.
Chaque fois que je veux me mettre au travail, je suis dérangé par la littérature.
Jules Renard, Journal, 1887-1910, Pléiade/Gallimard, 1965, p. 1087, 1089, 1090, 1096, 1097.
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