10/10/2019
Mina Loy, Manifeste féministe & écrits modernistes
Manifeste féministe [1914]
Le mouvement féministe tel qu'il est constitué à présent est
Imparfait
Femmes si vous souhaitez vous accomplir — vous êtes à la veille d'un soulèvement psychologique dévastateur — toutes vos illusions domestiques doivent être démasquées — les mensonges des siècles sont à congédier — Êtes-vous préparées à cet arrachement — ? Il n'y a pas de demi-mesure — NUL coup de griffe à la surface du monceau d'ordure s de la tradition ne conduira à la Réforme, la seule méthode est une Démolition Absolue.
Cessez de placer votre confiance dans la législation économique, les croisades contre le vice & l'éducation égalitaire — vous glosez à côté de la Réalité
Des carrières libérales et commerciales s'ouvrent à vous —
Est-ce là tout ce que vous voulez ?
[...]
Aphorismes sur le modernisme
Le MODERNISME est un prophète criant dans le désert que l'Humanité épuise son temps.
La MORALE a été inventée comme excuse pour assassiner le voisinage.
Les ANARCHISTES en art en sont les aristocrates immédiats.
Notes sur l'existence
La guerre n'a laissé aucune trace en nous à l'exception de la disgrâce de quelques vieilles dames qui publiquement se vautrent sur la tombe de leurs fils alors qu'elles auraient dû savoir comment mieux les élever.
Tomber amoureux est un tour de passe-passe qui consiste à magnifier un être humain à des proportions telles que toutes les comparaisons s'évanouissent.
Considérant ma vie passée, je peux en tirer une loi absolue de la physique — que l'énergie est toujours perdue.
Mina Loy, Manifeste féministe & écrits modernistes, traduction [de l'anglais] et préface d'Olivier Apert, NOUS, 2014, p. 15-16, 49, 50, 51, 59, 61, 61.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, ESSAIS CRITIQUES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mina loy, manifeste féministe & écrits modernistes, olivier apert, aphorisme, existence | Facebook |
09/05/2018
Olivier Apert, Si et seulement si
projections de jour
salle de projection privée — le luxe — me-
direz-vous-vous— une simple habitude dont on ne peut se défaire
projection privée à l’écoute de l’aveugle obscène :
des fureurs qu’entend-il : : ?
d’immondes jouissances
*
projection privée — qu’entends-je moi-même si
ce n’est dérision cynisme par l’aube en délabrement :
clichésdouteseaoutsréceptionssynonymesbals : :
enfin une vraie péripatéticienne avec ses dents
d’en avant soufflées par les vents en poupe : : :
ça broute les méninges
*
salle de projection privée : ça vole bas :
voulez-vous des recettes peaufinées par mon cuisinier : :
assurément un disciple de carême : : :
gâte-sauce impuni, une broche à la main : : : :
il paierait cher sa démission, inopinée
*
alors, il faut savoir s’arrêter — juste au bord de l’intelligence
Olivier Apert, Si et seulement si, Lanskine, 2018, p. 30-31.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : olivier apert, si et seulement si, projection privée, dérision, cuisinier | Facebook |
26/06/2014
Adrienne Rich (1929-2012), dans Olivier Apert, Une anthologie de la poésie féminine
D'une vieille maison en Amérique
16.
« De telles femmes sont dangereuses
pour l'ordre des choses »
et bien oui nous serons dangereuses
à nous-mêmes
avançant à tâtons parmi les épines du cauchemar
(datura s'enchevêtrant à une herbe simple)
car la ligne séparant
la lucidité des ténèbres
st encore à tracer
Isolement, le rêve
de la femme de la frontière
mettant en joue sa carabine derrière
la clôture de la ferme
piège encore notre vanité
— Une feuille suicidaire
s'étend sous le verre brûlant
de l'œil du soleil
La mort de toute femme me diminue.
From an old house in America
"Such women are dangerous
in the order of things"
and yes, we wille be dangerous
to ourselves
groping through spines of nightmare
(datura tangling with a simple herb)
because the line dividing
lucidity from darkness
is yet to be marked out
Isolation, the dream
of the frontier woman
levelling her rifle along
the homestead fence
still snares our pride
—a suicidal leaf
laid under the burning-glass
in the sun eye
Any woman death diminishes me.
Adrienne Rich (1929-2012), dans Olivier Apert, Une anthologie bilingue de la poésie féminine américaine du XXe siècle, Le Temps des Cerises, 2014, p. 183 et 182.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : adrienne rich, olivier apert, anthologie, poésie féminine, amour, femme, abandon, fête | Facebook |
25/06/2014
Muriel Rukeyser (1923-1980), dans Olivier Apert, Une anthologie bilingue
Mythe
Longtemps après, Œdipe, âgé et aveugle, cheminait.
Il flaira une odeur familière. C'était
la Sphinx. Œdipe dit, « Je voulais te poser une question.
Pourquoi n'ai-je pas reconnu ma mère ? » « Tu as donné la
mauvaise réponse », dit la Sphinx. « Mais cela rendait
pourtant
toute chose possible », dit Œdipe. « Non », dit-elle.
« Quand je demandai, Qu'est-ce qui marche à quatre pattes le matin,
à deux le midi, à trois le soir, tu répondis
l'Homme. Tu n'as rien dit à propos de la femme. »
« Lorsque tu dis l'Homme », dit Œdipe, « tu entends aussi femme.
Chacun sait cela. » Elle dit, « c'est ce que
tu crois. »
Myth
Long afterward, Œdipus, old and blinded, walk the
roads. He smells a familiard smell. It was
the Sphinx. Œdipus said, "I want to ask one question.
Why didn't I recghnize my mother?" "You gave the
wrong answer" said the Sphnx. "But tat was what
made everything possible." said Œdipus. "No," she said.
"When I asked, What walks on four legs in the morning,
two at noon, and then three in the evening, you answered
Man. You din't say anything about woman."
"When you say Man" said dipus, ' you include women
too. Everyoneknow that. She said, 'That's what
you think."
Muriel Rukeyser, dans Olivier Apert, Une anthologie bilingue de la
poésie féminine américaine du XXe siècle, Le Temps des cerises, 2014,
p. 83 et 82.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : muriel rukeyser, olivier apert, mythe, mère, Œdipe, question, réponse, homme | Facebook |
06/02/2014
Mina Loy, Manifeste féministe & écrits modernistes
Les éditions NOUS ont 15 ans...
www.editions-nous.com
Le dernier livre paru : Mina Loy [1882-1966]
Manifeste féministe [1914]
Le mouvement féministe tel qu'il est constitué à présent est
Imparfait
Femmes si vous souhaitez vous accomplir — vous êtes à la veille d'un soulèvement psychologique dévastateur — toutes vos illusions domestiques doivent être démasquées — les mensonges des siècles sont à congédier — Êtes-vous préparées à cet arrachement— ? Il n'y a pas de demi-mesure — NUL coup de griffe à la surface du monceau d'ordure s de la tradition ne conduira à la Réforme, la seule méthode est une Démolition Absolue.
Cessez de placer votre confiance dans la législation économique, les croisades contre le vice & l'éducation égalitaire — vous glosez à côté de la Réalité
Des carrières libérales et commerciales s'ouvrent à vous —
Est-ce là tout ce que vous voulez ?
[...]
Aphorismes sur le modernisme
Le MODERNISME est un prophète criant dans le désert que l'Humanité épuise son temps.
La MORALE a été inventée comme excuse pour assassiner le voisinage.
Les ANARCHISTES en art en sont les aristocrates immédiats.
Notes sur l'existence
La guerre n'a laissé aucune trace en nous à l'exception de la disgrâce de quelques vieilles dames qui publiquement se vautrent sur la tombe de leurs fils alors qu'elles auraient dû savoir comment mieux les élever.
Tomber amoureux est un tour de passe-passe qui consiste à magnifier un être humain à des proportions telles que toutes les comparaisons s'évanouissent.
Considérant ma vie passée, je peux en tirer une loi absolue de la physique — que l'énergie est toujours perdue.
Mina Loy, Manifeste féministe & écrits modernistes, traduction [de l'anglais] et préface d'Olivier Apert, NOUS, 2014, p. 15-16, 49, 50, 51, 59, 61, 61.
05:01 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, ESSAIS CRITIQUES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mina loy, manifeste féministe & écrits modernistes, olivier apert, modernisme, existence, amoureux, énergie | Facebook |
14/08/2012
Olivier Apert, Infinisterre suivi de Crash
Drame
quelque chose s’est cassé
- quoi & depuis quand
quelque chose gît se réfugie
comme ces mères qu’on imagine à l’hospice, visitées par leurs enfants, et se grattant furieusement le sexe
quelque chose meurt & ne veut pas mourir
la volonté la foi l’amour le moi comme dispensés au ciel d’un crash-Mirage
quelque chose guette & rit sur la tristesse
ici sur les galets, carlingue écrouie, la mémoire ; là, les débris, souvenirs métalliques qui hantent comme autant de perfusions – cockpit faisant saigner la voûte nocturne
quelque chose mime
- dans les bars, l’alcool caresse la frivolité d’un verre comme ces créatures magnifiques vivant la peau d’un autre
quelque chose attendrait
- un geste au détour comme dans un lit une peinture le pli de la violence éphémère
si quelque chose s’est cassé
- ce serait quoi & depuis quand
Pavane pour une infante disparue, 3
SI loin de toi (je) pense à toi
près de toi ) je ( t’oublie
oui puisqu’IL – le monde – existe
avec & sans eux
SI loin de toi ) je ( pense à (toi)
c’est parce que près de toi
je L’oublie dans ) toi (
SI tu m’oublies en IL
c’est parce que loin de moi
tu existes loin de ) toi (
COMMENT,
COMMENT POURRAIS-JE NE PAS TE VOIR quand
la langue du chat – rose ô si rose boudoir –
avidement lèche le lait coulant des étoiles
avant qu’il aille du balcon se jeter comme la mouette
tridactyle que je recueille (stoïque la mouette) blessée
mais encore voulant marcher vers sa mort (bancale
notre mort) juste pour me donner leçon digne et
drôle avec la gueule (rose ô si rose le gosier) ne
miaulant pas à sec son cri : ne m’oublie pas :
COMMENT NE POURRAIS-JE PAS TE VOIR ?
Olivier Apert, Infinisterre suivi de Crash, éditions Apogée (Rennes),
2006, p. 45, 75, 108.
05:00 Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : olivier apert, infinisterre suivi de crash | Facebook |