30/01/2014
James Sacré, Trois anciens poèmes mis ensemble pour lui redire je t'aime
Une semaine avec James Sacré
Le taureau, la rose et le poème
Avec sa fesse en feu souple en soie la femme
Son visage en linges doux avec ses dentelles
Son foin les odeurs sa fouine tiède elle
Travaille à des treillis miraculeux des trames
Elle trame un piège au monde et mine ses atours
(mime ses amours)
Lui crame ses forêts tombent.
Belle elle est la rose
À cueillir au rosier, le projet d'un poème :
Qu'elle porte une épine au cœur de sa splendeur
Le désir en fleurit davantage d'ardeur
De jambes de soleil dans le jeu du poème.
[...]
James Sacré, Trois anciens poèmes mis ensemble pour lui redire je t'aime, Cadex éditons, dessin de Yvon Vey, 2006, p. 43-44.
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11/01/2014
Paul Celan, Poèmes, traduction de John E. Jackson
En hommage à Jean Bollack : une semaine avec Paul Celan
Psaume
Personne ne nous pétrira plus de terre et d'argile,
personne ne conjurera notre poudre.
Personne.
Loué sois-tu, Personne.
Par amour de toi nous
voulons fleurir.
Vers
Toi.
Un rien
étions-nous, sommes-nous, resterons-
nous, fleurissant :
la rose de Rien, la
rose de Personne.
Avec
le style clair d'âme,
l'étamine ciel-désert,
la corolle rouge
du mot-pourpre que nous chantions
par-dessus, ô par-dessus
l'épine.
Psalm
Niemand knetet uns wieder aus Erde und Lehm,
niemand bespricht unsern Staub.
Niemand.
Gelobt seist du, Niemand.
Dir zulieb wollen
wir blühn.
Dir
entgegen.
Ein Nichts
waren wir, sind wir, werden
wir bleiben, blühend :
die Nichts-, die
Niemandsrose
Mit
dem Griffel seelenhell,
dem Staubfaden himmelswüst,
der Krone rot
vom Purpurwort, das wir sangen
über, o über
dem Dorn.
Paul Celan, Poèmes, traduction de John E. Jackson,
éditions Unes, 1987, p. 37 et 36.
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18/08/2013
Jacques Réda, Hors les murs
Terminus
Sournoisement quelqu'un se lève dans la lumière
Soudain plus foncée, et les feuilles ne bougent pas.
Mais l'espace ouvre d'un coup ses invisibles portes
Et dans chacune on voit frémir la face du vent
Qui remue à son front désolé de lourdes roses
D'octobre s'illuminant dans l'ombre des jardins.
Car dans les sentiers en dédale tous les jardins
Ont à la longue dérouté si bien la lumière
Aveugle trébuchant parmi les lampes des roses
Qu'on pourrait la toucher qui respire et ne fuit pas
Mais se tient sans bouger sous le lierre, entre le vent
Et les voix prises du côté paisible des portes.
Elle n'ose pas comme le vent heurter aux portes
Ni s'ouvrir de force un passage dans les jardins :
Bientôt l'obscurité l'aura saisie. Et le vent
Commence à flairer les épaules de la lumière
Qui voudrait de nouveau s'échapper et ne peut pas
Sortir de ce halo dont l'enveloppent les roses.
De proche en proche on aperçoit encore ces roses
Penchant vers la chaleur qui chaque fois sourd des portes
Et des fenêtres dont les lampes ne craignent pas
D'affronter dans l'ombre où s'épaississent les jardins
Les derniers soubresauts indécis de la lumière
Seule devant la face indifférente du vent.
Et sur les maisons qui vont disparaître, le vent
Bâtit une maison noire où s'éteignent les roses
Et, secouant à son front leurs gouttes de lumière
Déclinante, il se rue à travers le flot des portes
Qu'on devine qui battent sans bruit. Et les jardins
Ne font plus qu'un seul remous de feuillages, et pas
La moindre lueur maintenant sous les roses, pas
De lampe sous la houleuse toiture du vent.
On se perdra peut-être à jamais dans ces jardins,
Sans fin leurré par la flamme équivoque des roses
Et toujours enfonçant tel le vent de fausses portes
Pour retrouver la trace ultime de la lumière.
N'abandonnez pas le passant au dédale, roses
D'octobre, au vent qui vous effeuille devant les portes
Et répand votre semence aux jardins sans lumières.
Jacques Réda, Hors les murs, "Le Chemin", Gallimard, 1982, p. 74-75.
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26/12/2012
Catherine Pozzi, Très haut amour
Chanson sans gestes
Sur la planète de douleurs
Les roses vont jusqu'au ciel même.
Devant le mur d'azur tu meurs
Du mal qui vient d'ailleurs.
Soleil, soleil fleur de souci
Touche un cœur de ta pointe extrême
Le rayon jeté sans merci
Du passé jusqu'ici.
Mon cœur est une rose aussi
Il est plein de rois et de reines
Ils ont vécu ils ont fini
Ils souffrent où je suis.
Ils ont dormi ils ont péri
Ils s'éveilleront si je t'aime.
Un trait les touche sans merci
L'amour n'est pas l'ami.
Ô prisonniers ! dormez ainsi
Ne quittez les ombres suprêmes
La caresse est blessure ainsi
Le soleil passe aussi.
Catherine Pozzi, Très haut amour, édition de
Claire Paulhan et Laurence Joseph,
Poésie/Gallimard, 2002, p. 63-64.
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19/12/2012
Gabrielle Althen, Vie saxifrage
Sur la place
Le jour commençait une rose
La rose était transparente et amène
La patience ne serait plus nécessaire
Les routes auraient des jeux ardents
Tu serais défeuillé de tes hésitations
Nu contre la paroi de verre noir de ton vœu
L'orient en est à blanc et la simplicité totale
*
Mais il y eut des jours de pleurs sans indigence
Des vagues émanaient du profond du mystère
En soutenant le gris de la lumière
Les enfants interdits qui cessaient de jouer
Penchés en rond sur le moment
Oubliaient en riant de poser leurs questions
Et l'on se chérissait dans les anneaux du paysage
Gabrielle Althen, Vie saxifrage, Al Manar / Alain
Gorius, 2012, p. 47 et 31.
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18/10/2012
René Char, Fenêtres dormantes et porte sur le toit
Légèreté de la terre
Le repos, la planche de vivre ? Nous tombons. Je vous écris en cours de chute. C'est ainsi que j'éprouve l'état d'être au monde. L'homme se défait aussi sûrement qu'il fut jadis composé. La roue du destin tourne à l'envers et ses dents nous déchiquettent. Nous prendrons feu bientôt du fait de l'accélération de la chute. L'amour, ce frein sublime, est rompu, hors d'usage.
Rien de cela n'est écrit sur le ciel assigné, ni dans le livre convoité qui se hâte au rythme des battements de notre cœur, puis se brise alors que notre cœur continue à battre.
*
Une rose par mégarde.
Une rose sans personne.
Une rose pour verdir.
*
Nous vivons avec quelques arpents de passé, les gais mensonges du présent et la cascade furieuse de l'avenir. Autant continuer à sauter à la corde, l'enfant-chimère à notre côté.
René Char, Fenêtres dormantes et porte sur le toit, Gallimard, 1979, p. 52, 54 et 65.
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20/07/2012
Marc Guyon, Volis agonal
Il y a des roses
sous le givre, et le lilas
bourdonne, le jour s'ouvre
d'une caresse.
Luxe, chasteté, l'année
vient : à sa surface
la nue calme,
le roseau ivre.
*
Saisir le jour
à sa douleur ;
combien l'automne
est doux, grande
l'envolée des oiseaux.
Sommes dignes
d'une joie ?
*
Est-ce l'homme
que je croise, pense-t-il
l'avenir, sans une boucle
tendre, sans regard précieux
un instant ?
Les filles
jadis parfumées ?
Le bienfait
nous ne le voyons pas,
mais par le songe
illuminé.
Marc Guyon, Volis agonal, Gallimard,
1972, p. 18, 37, 75.
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