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19/05/2013

Guillevic, Aguets, dans Relier

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                             Aguets

 

Dans ce que je vois

Tout autour de moi

 

Qu'est-ce qui n'es pas

Avertissements ?

 

            *

 

Il y a

Ce qu'il y a.

 

Il y a

Ce qu'il n'y a pas.

 

Il y a

Ce qui est entre les deux.

 

             *

 

On voudrait qu'il y ait

Dans la hauteur de l'air

 

Des espèces de joues

Que l'on pourrait gifler.

 

              *

 

Comme est loin

Ce qui somnole en moi

 

Et près de moi

Ce que je cherche

Dans les lointains.

 

               *

 

Le ciel de la nuit

Est un bal continuel,

Mais jamais d'idylle.

 

                *

 

Je ne récuserai pas

La terre,

Elle fait ce qu'elle peut,

 

Mais lui échappe

Ce qui nous échappe

Et nous taraude.

 

                *

 

Et ce goût de néant —

 

Comme si le néant

Avait un goût.

 

                  *

 

Le temps,

J'ai tout mon temps,

 

Mais il en a, lui,

Beaucoup plus.

 

                  *

 

Ce n'est pas rien

D'avoir à porter le monde,

 

Courage !

   

                                    (1991)

 

Guillevic, Relier, Gallimard, 2007, p. 495-497.

18/10/2012

René Char, Fenêtres dormantes et porte sur le toit

 

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                Légèreté de la terre

 

Le repos, la planche de vivre ? Nous tombons. Je vous écris en cours de chute. C'est ainsi que j'éprouve l'état d'être au monde. L'homme se défait aussi sûrement qu'il fut jadis composé. La roue du destin tourne à l'envers et ses dents nous déchiquettent. Nous prendrons feu bientôt du fait de l'accélération de la chute. L'amour, ce frein sublime, est rompu, hors d'usage.

     Rien de cela n'est écrit sur le ciel assigné, ni dans le livre convoité qui se hâte au rythme des battements de notre cœur, puis se brise alors que notre cœur continue à battre.

 

                                         *

 

          Une rose par mégarde.

          Une rose sans personne.

          Une rose pour verdir.

 

                                         *

 

     Nous vivons avec quelques arpents de passé, les gais mensonges du présent et la cascade furieuse de l'avenir. Autant continuer à sauter à la corde, l'enfant-chimère à notre côté.

 

René Char, Fenêtres dormantes et porte sur le toit, Gallimard, 1979, p. 52, 54 et 65.