31/01/2023
Antoine Emaz, De l'air
dans la lumière brute
et le jaune des jonquilles
on est où ?
ricochets des mots
sur l’eau de tête
le temps
la masse tranquille d’un dimanche
océan c’est trop dire
plutôt mare étang borné
par la fin de semaine
étier
on ferait mieux
de s’atteler
à la semaine qui vient
Antoine Emaz, De l’air, Le dé bleu,
2006, p. 62.
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30/01/2023
Novalis, Les disciples à Saïs
I
Les hommes marchent par des chemins divers. Qui les suit et les compare verra naître d’étranges figures ; figures qui semblent appartenir à cette grande écriture chiffrée qu’on rencontre partout : sur les ailes, sur la coque des œufs, dans les nuages, dans la neige, dans les cristaux, dans les formes des rues, dans les eaux congelées, à l’intérieur et à l’extérieur des montagnes, des plantes, des animaux, des hommes, dans les clartés du ciel, sur les disques de verre et de poix lorsqu’on les frotte et qu’on les attouche ; dans les limailles qui entourent l’aimant et dans les étranges conjonctures du hasard…On y pressent la clef de cette écriture singulière et sa grammaire’ ; mais ce pressentiment ne veut pas se fixer dans une forme et se refuse à devenir la clef suprême.
Novalis, Les disciples à Saïs, traduction Maurice Maeterlinck, dans Les Romantiques allemands, I, Pléiade/Gallimard, 1966, p. 347.
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29/01/2023
Basho Seigneur ermite, l’Intégrale de haïkus
Jardin d’hiver —
minces comme un fil, la lune
et le chant des grillons qui survivent
Ce corbeau
pourquoi pat-il en ville
à la fin de l’année ?
Tous ces villageois
seraient-ils les descendants
des gardiens de fleurs ?
Es-tu un papillon
ou suis-je Tchouand-tseu
rêvant d’un papillon ?
Tourne-toi de ce côté !
je suis également seul
dans le soir d’automne
Basho Seigneur ermite, édition bilingue par Makoto Kemmoku et Dominique Chipot, La Table ronde, 2012, p. 241, 244, 249, 259, 253
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28/01/2023
Basho Seigneur ermite
Lune éclatante —
je tourne autour de l’étang
toute la nuit
Impossible de dormir
dans la nuit le bruit d’une jarre
brisée par le gel
Première neige —
jusqu’à ployer
les feuilles de narcisse
Parmi les feuilles
des cerisiers en fleur
un nid de cigogne
Dormir ivre
sur les graviers
fleuris d’œillets
Basho, Seigneur ermite, l’Intégrale des haïkus,
édition bilingue par Makoto Kemmoku et
Dominique Chipot, La Table ronde, 2012,
p.133, 134, 135, 139, 143.
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27/01/2023
Basho Seigneur ermite, l’Intégrale de haïkus
Bruyante grêle —
mon vieux corps
comme les vieilles feuilles d’un chêne
La mer sombre dans la nuit —
les cris des canards
vaguement blancs
Réveille-toi, réveille-toi,
je veux devenir ton ami
papillon endormi !
Sur le chemin montagneux
une violette me fascine
sans raison
Quelques papillons
leurs ombres voltigent
sur les champs
Basho, Seigneur ermite, l’Intégrale des haïkus,
édition bilingue par Makoto Kemmoku et
Dominique Chipot, La Table ronde, 2012,
p. 96, 112, 113, 121, 123.
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26/01/2023
Basho Seigneur ermite
Espérant le chant du coucou,
j’entends les cris
du marchand de légumes.
L’automne est venu —
sur l’oreiller
le vent me salue.
Sous une couverture de gelée,
un enfant abandonné
sur un matelas de vent.
Regagnant la côte
sur une feuille, le petit insecte
où dort -il ?
Basho, Seigneur ermite, l’Intégrale des haïkus,
édition bilingue par Makoto Kemmoku et
Dominique Chipot, La Table ronde, 2012, p. 64, 66, 69, 79.
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25/01/2023
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt profonde, Sonnets
Sonnet sur les beautés d’une autre
Son poil tout hérissé et bien long le visage,
Les deux yeux écaillés et un nez tout puant
La bouche bien fendue, par où va dégoutant
Une certaine humeur sentant le vieux fromage ;
Velue par le corps comme un monstre sauvage.
Le tétin avalé, graissé d’huile et d’onguent
L’aisselle du venin va toujours coulant ;
L’estomac enfoncé, le ventre plat et large ;
En descendant plus bas, un trou sanglant on voit,
De peaux moites autour, un landi qui paroit
De chancre revêtu, de farcins plein les bords ;
Les cuisses de Gigot et les jambes tremblantes
Pleines d’ulcères, loups, de mulets et de fentes :
Au reste elle se dit belle par tout le corps.
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt
profonde, Sonnets, édition Agnès Rees, Préface Florence Delay,
Poésie/Gallimard, 2023, p.97
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24/01/2023
Jodelle
Sonnet XLIII
Je ne suis de ceux-là que tu m’as dit se plaindre,
Que leur Dame jamais ne leur donne martel :
Vu l’âme véhémente, un dur martel m’est tel,
Qu’il peut plus à la mort qu’à l’amour me contraindre.
S’il peut donc l’amour avec ma vie éteindre,
En tout amour je chasse un poison si mortel,
Humble et petit, pourrais-je en moi tel mal empraindre ?
Mais las ! d’avoir peur d’être en ton cœur effacé,
Craindre qu’un Delta double en chiffre* entrelacé,
Ne soit plus pour mon nom, craindre qu’en ton absence
Tu ne me fasses plus tes lettres recevoir,
Ce n’est pas un martel, c’est d’amour le devoir,
Qui montre en froide peur ardente révérence.
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt
profonde, Sonnets, édition Agnès Rees, Préface Florence Delay,
Poésie/Gallimard, 2023, p. 75.
*Le chiffre désigne le nom d’une personne
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23/01/2023
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt profonde, Sonnets
Sonnet XXX
Comme un qui s’est perdu dans la forêt profonde
Loin de chemin, d’orée, et d’adresse, et de gens ;
Comme un qui en la mer grosse d’horribles vents,
Se voit presque engloutir des grands vagues de l’onde ;
Comme un qui erre aux champs, lorsque la nuit au monde
Ravit toute clarté, j’avais perdu longtemps
Voie, route, et lumière, et presque avec le sens,
Perdu longtemps l’objet, où plus mon heur se fonde.
Mais quand on voit (ayant ces maux fini leur tour)
Aux bois, en mer, aux champs, le bout, le port, le jour,
Ce bien présent plus grand que son mal on vient croire.
Moi donc qui ai tout tel en votre absence été,
J’oublie en revoyant votre heureuse clarté,
Forêt, tourmente, et nuit, longue, orageuse, et noire.
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt
profonde, Sonnets, édition Agnès Rees, Préface Florence Delay,
Poésie/Gallimard, 2023, p. 62.
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22/01/2023
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt profonde, Sonnets
Sonnet XLII
Je me trouve et me perds, je m’assure et m’effroie,
En ma mort je revis, je vois sans penser voir,
Car tu as d’éclairer et d’obscurcir pouvoir,
Mais tout orage noir de rouge éclair flamboie.
Mon front qui cache et montre tristesse, joie,
Le silence parlant, l’ignorance au savoir,
Témoigne mon hautain et humble devoir,
Tel est tout cœur, qu’espoir et désespoir guerroie.
Fier en ma honte et plein de frisson chaleureux,
Blâmant, louant, fuyant, cherchant, l’art amoureux,
Demi-brut, demi-dieu je suis devant ta face,
Quand d’un œil favorable et rigoureux, je croi,
Au retour tu me vois, moi las ! qui ne suis moi
Ô clairvoyant aveugle, ô amour, flamme et glace !
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt
profonde, Sonnets, édition Agnès Rees, Préface Florence Delay,
Poésie/Gallimard, 2023, p. 74.
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21/01/2023
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt profonde, Sonnets
Sonnet II
Des astres, des forêts, et d’Achéron l’honneur,
Diane, au Monde haut, moyen et bas préside,
Et ses chevaux, ses chiens, ses Euménides guide,
Pour éclairer, chasser, donner mort et horreur.
Tel est le lustre grand, la chasse, et la frayeur
Qu’on sent sous ta beauté claire, prompte, homicide,
Que le haut Jupiter, Phébus, et Pluton cuide,
Son foudre moins pouvoir, son arc, et sa terreur.
Ta beauté par ses rais, par son rets, par la crainte
Rend l’âme éprise, prise et, au martyre étreinte.
Luis-moi, prends-moi, tiens-moi, mais hélas ne me perds
Des flambants, forts, et griefs, feux, filets, et encombres,
Lune, Diane, Hécate, aux cieux, terre, et enfers
Ornant, quêtant, gênant, nos Dieux, nous, et nos ombres.
Étienne Jodelle, Comme un qui s’est perdu dans la forêt
profonde, Sonnets, édition Agnès Rees, Préface Florence Delay,
Poésie/Gallimard, 2023, p. 34.
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20/01/2023
Malcolm Lowry, Pour l'amour de mourir
Le passé
Comme une vieille échelle pourrie
Qu’on a jeté d’une scierie désaffectée
Et qui flotte, émergeant seulement par le haut,
Tandis que, tout imprégné d’eau, le reste baigne,
Rongé par les tarets, encroûté de bernacles
Et de moules accrochées en papillotes bleues ;
Puante, alourdie d’algues et de ces curieux êtres
Qui vivent de la mort et de la marée basse,
Route vermiculée, en proie à l’helminthiase :
Telle est ma conscience.
De temps en temps, je la sèche au soleil,
Je l’appuie (contre rien du tout,
Puisqu’elle ne monte nulle part) ;
Mais je la garde, on ne sait jamais, ça peut servir.
Qui sait si elle n’est pas récupérable,
Si on ne pourrait pas la radouber un peu ?
Et chaque nuit sans raison ma cervelle
Monte et descend les barreaux de l’échelle.
Malcom Lowry, Pour l’amour de mourir, traduction de J.-M. Lucchioni, préface de Bernard Noël, éditions de La Différence, 1976, p. 97.
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19/01/2023
Jacques Moulin, Corbeline : recension
Ne cherchez pas "Corbeline" dans un dictionnaire contemporain, ni même dans le Littré, il faut remonter à l’ancien français pour trouver trace du mot. Sans préciser de quelle herbe il s’agit, le dictionnaire de Frédéric Godefroy (1880-1895, ancien et moyen français), donne un exemple d’emploi : « Les corbeaux, quand il se sentent empoisonnez de la graine de Naples, cherchent l’herbe nommée corbeline pour leur remede et garison ». C’est cet emploi que conserve Jacques Moulin dans le premier quatrain du livre : « La corbeline est herbe de gravité / Corbeau la cueille / À la nuit tombée / Pour la mort déjouer » ; il propose ensuite d’en découvrir la nature qui ne peut être que liée à la mort, ce serait « l’herbe noire qui pousse au pied des gibets », antidote pour l’ensemble des corvidés.
Non, le livre n’est pas une enquête autour d’un remède propre à certains oiseaux, mais, pour commencer, une suite de variations autour de la corbeline et d’un oiseau en général peu apprécié, le corbeau, variations en courtes proses et en vers souvent rimés, parfois comptés et formant strophes. L’ensemble occupe la moitié du livre, l’autre consacrée à d’autres oiseaux, de la grue au martinet, du héron au vautour et à la mésange. Les notations à propos des uns et des autres, toujours précises, prouvent un observateur averti de la nature, même si elles sont souvent données comme en passant, tout comme les tableaux plus larges de l’espace : « C’est encore nuit petite. Avril repose sur l’étang. La lune est ronde. Le taillis inextricable. Les ronces agressives. Premières lueurs du jour. [etc.] » Jacques Moulin, attentif aux oiseaux comme à la faune observable* ne cherche pas à écrire en naturaliste : les oiseaux ne sont pas qu’un prétexte, ils sont bien présents, mais cette présence conduit à des combinaisons de mots des plus variées.
On ne saura pas ce qu’est exactement la corbeline, est repris le discours ancien qui définissait son action, « Herbe qui sauve », qui « lève le poison comme on lève la brûlure d’amour meurtri ». On apprendra l’existence de "corbelinier" et, dans l’une des premières proses, "corbeline" entraîne "cor(beau), "cour(bure), "or(be) , "cou", "(ja bot", à quoi s’ajoutent peu après "cro(assantes) et la proximité de "jabot et "bec" ; à d’autres moments du texte "corbin" (inusité pour "corbeau", et "corbine". Cette herbe aux corbeaux est associée à la jonquille — ce qui inspire une chanson ; elle vivrait au milieu d’autres plantes comme la panprée et le corblet : c’est là le plaisir particulier d’introduire des mots peu communs, ici le nom du panais sauvage et une désignation régionale du pavot cornu ; on lira aussi parmi d’autres "blaude", "tabard", "bollard", "cochoir".
On notera un développement où est imaginée une relation étroite entre l’oiseau et son nom, la séquence phonique K-R-B étant supposée restituer ce qu’est le corvidé, le [B] par exemple « par la saisie du bec braille et clabaude » ; le corbeau a perdu son "i" dans le mot "oiseau" : il est seulement « oseau » dont, remarque Jacques Moulin, on ne connaît « Ni gazouillis ni pépiement ni / Sifflotis ». Mais pour le cri des corvidés la liste des mots est étoffée, « croaillement, coraillement, craillement, [etc.] », et de courts descriptifs complètent une longue série, le cri comparé à « dans la nuit du gravier / le bruit d’évier », et ce cri est répété trois fois, « Trois trois trois / Lez corbeau fait nombre / Tierce / Dans sa voix ».
Le lecteur relève que le plaisir des sons guide souvent la construction des textes. À côté du (trop) classique « j’écris – je crie », on peut apprécier « corps vidé » ou « un chant a krâpella », ou encore quand on passe à la grue, « La grue n’est pas greluche ne grignote pas égraine avec soin le plant gobe des grenouilles (etc.] ». Un relevé exhaustif des jeux de mots nécessiterait de donner chaque fois le contexte, signalons-en cependant quelques-uns : « broyé-bruyant », « craille-braille », « graves-craves », « criarde-braillarde-raillarde », « Appeau appelle /appâts de mots » « la magie des oiseaux-la manie des corbeaux », etc. Par ailleurs, Jacques Moulin pratique régulièrement l’énumération — « Tu fais des listes sur ta page », reconnaît-il : liste de noms d’oiseaux chacun suivi d’une caractéristique, « La linotte mélodieuse / La mouette rieuse / Le bruant bruyant / Le martin triste [etc.] »
Les nombreuses remarques sur le cri des oiseaux sont souvent liées à la forme choisie pour l’écriture du poème ; ainsi, pour les grues :
« Se taire pour bien entendre. Effacer forme d’homme. N’être qu’un pavillon. Voir après. Un poème qui donne le son avant la forme. Une forme de cri en vol. Un envol d’onomatopées vivantes. Charivari. Tapagerie. »
Les formes choisies tendent à restituer quelque chose de la vivacité de l’oiseau ou de son cri, qu’il s’agisse du choix des phrases nominales ou de la fréquence de l’usage du rondel — pour le martinet, Jacques Moulin en écrit avec la rime -i- et commente : « Rondel en i / Pour le marti- / Net dans son cri ».
Jacques Moulin aime tous ces oiseaux, y compris le mal aimé corbeau ; couleur de charbon, certes, mais il faut percevoir sa lumière intérieure, comme s’il était peut-être oiseau de Soulages, et l’on comprend alors que « le corbeau est blanc au profond de la nuit ». On trouve cette lumière dans les monotypes d’Ann Loubert qui donne à voir des espaces possibles pour les oiseaux, le noir et blanc parfois subtilement rehaussé d’une couleur pastel.
Jacques Moulin, Corbeline, Monotypes d’Ann Loubert, L’Atelier contemporain, 2022, 176 p. Cette recension a été publiée dans Sitaudis le 27 décembre 2022.
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18/01/2023
Raymond Queneau, Les Ziaux
Averse averse averse averse averse averse
pluie ô pluie ô pluie ô ! ô pluie ô pluie ô pluie !
gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau
parapluie ô parapluie ô paraverse ô !
paragouttes d’eau paragouttess d’eau de pluie
capuchons pélerines et imperméables
que la pluie est humide et que la pluie mouille et mouille !
mouille l’eau mouille l’eau mouille l’eau mouille l’eau
et que c’est agréable agréable agréablet de pliue et de gouttes
d’eau de pluie et d’averse
d’avoir les pieds mouillés et les cheveux humides
tout humides d’averse
Raymond Queneau, Les Ziaux, dans Œuvres complètes,I,
Pléiade/Gallimard, 1090, p. 67.
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17/01/2023
Adrienne Rich (1929-2012), dans Olivier Apert, Une anthologie bilingue de la poésie féminine américaine du XXe siècle
D'une vieille maison en Amérique
16.
« De telles femmes sont dangereuses
pour l'ordre des choses »
et bien oui nous serons dangereuses
à nous-mêmes
avançant à tâtons parmi les épines du cauchemar
(datura s'enchevêtrant à une herbe simple)
car la ligne séparant
la lucidité des ténèbres
st encore à tracer
Isolement, le rêve
de la femme de la frontière
mettant en joue sa carabine derrière
la clôture de la ferme
piège encore notre vanité
- Une feuille suicidaire
s'étend sous le verre brûlant
de l'œil du soleil
La mort de toute femme me diminue.
From an old house in America
"Such women are dangerous
in the order of things"
and yes, we wille be dangerous
to ourselves
groping through spines of nightmare
(datura tangling with a simple herb)
because the line dividing
lucidity from darkness
is yet to be marked out
Isolation, the dream
of the frontier woman
levelling her rifle along
the homestead fence
still snares our pride
—a suicidal leaf
laid under the burning-glass
in the sun eye
Any woman death diminishes me.
Adrienne Rich (1929-2012), dans Olivier Apert, Une anthologie bilingue de la poésie féminine américaine du XXe siècle, Le Temps des Cerises, 2014, p. 183 et 182.