16/09/2022
Jude Stéfan, Libères
ma lente ma digne ma parfaite
toi partie pour guérir de toi
puisque femme de la femme guérit
courons voir au large une voile
rouge sur l’écume brève avec la
nymphe au trop de gestes et demain
la vénitienne aux baisers doulou-
reuse mais aux doigts si blancs sur sa
touffe puis le soir même la vieille
aux dents d’or qui vous abîme en l(oubli ;
où es-tu où je ne suis ici je
crie haï de moi d’aimer reviens
ma chaste unique entre tes mains
calmer ma face de tes feux mon cœur.
(Absence)
Jude Stéfan Libères, Gallimard, 1970, p. 47.
Stéfan, 1991, photo T. H.
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11/11/2016
Christine de Pisan, Cent ballades d'amant et de dame
La dame
Qui son chien veult tuer lui met la rage
Assus, dist-on, ainsi me veult tu faire,
Faulx déloyal, qui dis que mon corage
Se veult de toy, pour autre amer, retraire.
Mais tu scez bien, cetes, tout le contraire
Et qu’en mon cuer n’a grain de tricherie.
Mais cë es tu mauvais, tu t’as biau taire,
Qui deceveur es plain de menterie.
Car onc en moy, n’en semblant n’en lengaige,
Tu n’apperceuz chose qui fust contraire
A loyaulté, ce n’est pas mon usage.
Tu n’en fais pas doubte, mais pour moy traire
En sus de toy, tu veulx telz mots retraire
Pour mieux couvrir ta faulse tromperie,
Mais ne suis pas si comme toy faulsaire,
Qui deceveur es plain de menterie.
Ha ! mirez vous, dames, en mon dommage,
Pour Dieu Mercy, ne vous laissiez attraire
Par homme nul, tous sont de faulx plumage.
En ce cas cy, si fuiez leur affaire.
Au commenciez font bien le débonnaire
Mais au derrain c’est toute mocquerie.
Ce fais tu, Dieu d’Amours, pour cuers detraire,
Qui deceveur es plain de menterie.
Mais or me dy, Amours, s’il me doit plaire
Que pour amer je doye estre perie,
Ce es tu dont, j’en voy bien l’exemplaire,
Qui deceveur es plain de menterie.
Christine de Pisan, Cent ballades d’amant et de dame,
texte établi et commenté par J. Cerquiglini,
10/18, 1982, p. 125.
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16/08/2015
JUles Renard, Journal
Formules pour accuser réception des livres :
— Voilà un livre qui est bien à vous, cher ami, et je suis heureux de vous le dire.
— Merci ! J’emporte votre livre à la campagne. Je le lirai sous les arbres, au bord de l’eau, dans un décor digne de lui.
Il n’y a aucune différence entre la perle vraie et la perle fausse. Le difficile, c’est d’avoir l’air désolé quand on casse ou qu’on perd la perle fausse.
L’homme vraiment libre est celui qui sait refuser une invitation à dîner, sans donner de prétexte.
Lis toutes les biographies des grands morts, et tu aimeras la vie.
Comme on serait meilleur, sans la crainte d’être dupe !
Jules Renard, Journal, texte établi par Léon Guichard et Gilbert Sigaux, Pléiade / Gallimard 1961, p. 292, 294, 300, 302, 313
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