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12/11/2017

Christine de Pisan, Cent ballades d'amant et de dame

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Cent ballades d’amant et de dame,

XX, La Dame

 

Se j’estoie bien certaine

Que tout vostre cuer fust mien,

Et sans pensée vilaine

M’amissiez, je vous dy bien,

Que tant vous vueil ja de bien,

Que m’amour vostre seroit,

N’autre jamais ne l’aroit.

 

Mais mains hmmes, par grant peine,

Faont accroire, et n’en est rien,

Qu’ils ayment d’amour certaine

Les dames, et par maintien

Faulx, font tant qu’on leur dit : « Tien

Mon cuer qui tien est de droit,

N’autre jamais ne l’aroit ».

 

Par quoy s’ainsi amour vaine

M’avugloit, sur toute rien

Me seroit douleur grevaine,

Mais s’estiez en tel lien

Comme vous dictes, je tien

Que mon penser s’i donroit,

N’autre jamais ne l’aroit.

 

Le cuer dit : « Je vous retien ».

Mais Doubtance y met du sien,

Mon vueil point ne vous lairoit

N’autre jamais ne l’aroit.

 

Christine de Pisan, Cent ballades d’amant

et de dame, 10/18, 1982, p. 51.

 

 

 

 

 

31/08/2017

Christine de Pisan, Cent ballades d'amant et de dame

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La Dame     LXXVII

 

Hé Dieux ! que souvent avient,

Doulz ami, ce m’est advis,

Que tu t’en vas ! Ce me tient

Pensif le cuer et le vis,

Oncques tant aller ne vis

Homme, car c’est sans cesser :

Tu n’as ailleurs ton penser.

 

Je sçay bien qu’il t’appartient

A voyagier, mais tous vifs

Mon cuer en meurt, ne lui tient

D’envoisier, je te pleuvis.

De fort heure oncques te vis,

Tu m’occis par ton tracer :

Tu n’as ailleurs ton penser.

 

Hé las ! maint amant se tient

Sans tant aller, mais envis

T’en endroies, ne souvient

A ton cuer comment je vifs

En duel quand tu m’es ravis

Mais on ne t’en peut lasser :

Tu n’as ailleurs ton penser.

 

Or en sois a ton devis,

Bien sçay que tout alouvis

Et de vaillance amasser :

Tu n’as ailleurs ton penser.

 

Christine de Pisan, Cent ballades d’amant

et de dame, 10/18, bibliothèque médiévale,

1982, p. 108.

 

11/11/2016

Christine de Pisan, Cent ballades d'amant et de dame

Christine de Pisan, Cent ballades d’amant et de dame, amour, tromperie, fidélité,proverbe

La dame

 

Qui son chien veult tuer lui met la rage

Assus, dist-on, ainsi me veult tu faire,

Faulx déloyal, qui dis que mon corage

Se veult de toy, pour autre amer, retraire.

Mais tu scez bien, cetes, tout le contraire

Et qu’en mon cuer n’a grain de tricherie.

Mais cë es tu mauvais, tu t’as biau taire,

Qui deceveur es plain de menterie.

 

Car onc en moy, n’en semblant n’en lengaige,

Tu n’apperceuz chose qui fust contraire

A loyaulté, ce n’est pas mon usage.

Tu n’en fais pas doubte, mais pour moy traire

En sus de toy, tu veulx telz mots retraire

Pour mieux couvrir ta faulse tromperie,

Mais ne suis pas si comme toy faulsaire,

Qui deceveur es plain de menterie.

 

Ha ! mirez vous, dames, en mon dommage,

Pour Dieu Mercy, ne vous laissiez attraire

Par homme nul, tous sont de faulx plumage.

En ce cas cy, si fuiez leur affaire.

Au commenciez font bien le débonnaire

Mais au derrain c’est toute mocquerie.

Ce fais tu, Dieu d’Amours, pour cuers detraire,

Qui deceveur es plain de menterie.

 

Mais or me dy, Amours, s’il me doit plaire

Que pour amer je doye estre perie,

Ce es tu dont, j’en voy bien l’exemplaire,

Qui deceveur es plain de menterie.

 

Christine de Pisan, Cent ballades d’amant et de dame,

texte établi et commenté par J. Cerquiglini,

10/18, 1982, p. 125.