26/12/2019
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie
Maïakovski à Prague
Entre les coiffeurs et les popes
Un athlète agile comme une antilope
Ses jeux préférés c'étaient
Les vers et le revolver à tambour
Qui veut de la vodka qui se bouche les intestins
Gauche gauche gauche
Quand Maïakovski vint à Prague
J'étais dans un théâtre au vestiaire
Haut-de-forme de maître de poste
Qu'il est impossible d'enlever
C'était futuriste
Comme nos vies brèves
Et comme ce passant superbe
Qui boirait de la jambe gauche
Il avait l'air trop sérieux pour un poète
Il était trop empâté pour une grenouille
Ah tout ce qui serait arrivé
Si la veste et la fiancée étaient de la même cuvée
C'était de la honte
Que naît la haine
Comme les éléphants il dédaignait toute chose
Plus le ciel est lointain plus il est monotone
Surtout dans les bars
Où n'importe qui admire le charlatan
Il l'avait vu danser à Harlem
Il aimait les palmiers autant que les pommes de terre
Des volets
Et Maïakovski est mort
Lui qui pleurait dès qu'il était seul
Tu connais cela et moi aussi je connais cela
Comme nous aimons Prague
Chaque fois qu'il venait quelqu'un de là-bas
Les tavernes et les ménages bouleversés
Et la Voltava tout à coup séduisante
comme une baigneuse
Nous nous éloignons dans la nuit
À l'angle d'une rue Maïakovski agite son chapeau
Tu te jettes tête baissée
Dans des vers indéfinissables comme la nuit
Et Prague est de nouveau vivante
Le charme des blondes de la petite charcuterie
Comme les ouvrières sont belles
Et nous ne le savions pas
Tu marches et tu parles
Les perspectives défilent
Belles et usées
Comme ton manteau marron
Je connais dans les faubourgs un immeuble
Auquel il ressemble
Comme la poésie à la réalité
Et comme la réalité à la poésie sa demi-sœur
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie, et autres poèmes (1919-1955), traduit du tchèque par François Kérel, Préface de Philippe Soupault, Les Éditeurs Français Réunis, 1960, p. 63-64.
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16/08/2019
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie
Maïakovski à Prague
Entre les coiffeurs et les popes
Un athlète agile comme une antilope
Ses jeux préférés c'étaient
Les vers et le revolver à tambour
Qui veut de la vodka qui se bouche les intestins
Gauche gauche gauche
Quand Maïakovski vint à Prague
J'étais dans un théâtre au vestiaire
Haut-de-forme de maître de poste
Qu'il est impossible d'enlever
C'était futuriste
Comme nos vies brèves
Et comme ce passant superbe
Qui boitait de la jambe gauche
Il avait l'air trop sérieux pour un poète
Il était trop empâté pour une grenouille
Ah tout ce qui serait arrivé
Si la veste et la fiancée étaient de la même cuvée
C'était de la honte
Que naît la haine
Comme les éléphants il dédaignait toute chose
Plus le ciel est lointain plus il est monotone
Surtout dans les bars
Où n'importe qui admire le charlatan
Il l'avait vu danser à Harlem
Il aimait les palmiers autant que les pommes de terre
Des volets
Et Maïakovski est mort
Lui qui pleurait dès qu'il était seul
Tu connais cela et moi aussi je connais cela
Comme nous aimons Prague
Chaque fois qu'il venait quelqu'un de là-bas
Les tavernes et les ménages bouleversés
Et la Voltava tout à coup séduisante
comme une baigneuse
Nous nous éloignons dans la nuit
À l'angle d'une rue Maïakovski agite son chapeau
Tu te jettes tête baissée
Dans des vers indéfinissables comme la nuit
Et Prague est de nouveau vivante
Le charme des blondes de la petite charcuterie
Comme les ouvrières sont belles
Et nous ne le savions pas
Tu marches et tu parles
Les perspectives défilent
Belles et usées
Comme ton manteau marron
Je connais dans les faubourgs un immeuble
Auquel il ressemble
Comme la poésie à la réalité
Et comme la réalité à la poésie sa demi-sœur
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie, et autres poèmes
(1919-1955), traduit du tchèque par François Kérel,
préface Philippe Soupault, Les Éditeurs Français Réunis,
1960, p. 63-64.
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06/09/2016
Vladimir Maïakovski, Lettres à Lili Brik
Enfant
J’ai largement reçu le don d’aimer.
Mais dès l’enfance
les gens
au travail sont dressés.
Moi — je filais sur la berge du Rion,
je traînais
ne fichant rien de rien.
Maman se fâchait : « L’affreux garnement ! »
Comme un fouet papa brandissait sa ceinture.
Et moi,
j’allais, trois faux roubles en poche,
faire avec des troupiers un tour de bonneteau.
Sans le faix des souliers,
sans le faix des chemises,
au four de Koutaïssi bronzé,
je tournais au soleil ou le dos,
ou la panse,
au point d’en avoir la nausée.
Le soleil s’émerveille :
« C’est haut comme trois pommes !
ça possède —
un cœur d’homme.
Il le fait s’échiner.
D’où vient
qu’il soit dans cet archine place
pour moi,
pour la rivière,
pour cent verstes de rochers ? »
Vladimir Maïkovski, Lettres à Lili Brik (1919-1930),
traduction André Robel, Gallimard, 1969, p. 90.
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03/03/2012
Maïakovski, "Adulte", dans Lettres à Lily Brik
Adulte
Adulte, on fait de affaires.
Des roubles en poche.
De l'amour ? En voila !
Pour cent petits roubles.
Et moi,
sans domicile,
les mains
dans les poches
déchirées,
je m'en allais, les yeux ouverts.
La nuit
vous mettez vos meilleurs habits,
vous cherchez le repos sur l'épouse ou la veuve.
Et moi,
Moscou m'étouffait dans ses bras,
de l'anneau des boulevards sans fin.
Dans vos cœurs,
dans vos monstres,
vont et viennent les amantes.
Quels transports, partenaires de la couche d'amour !
Moi, qui suis la place de la Passion,
je surprends
le sauvage battement de cœur des capitales.
Déboutonné,
le cœur presque dehors,
je m'ouvrais au soleil et à la fleur d'automobile...
Déboutonné,
le cœur presque dehors,
je m'ouvrais au soleil et à la flaque d'eau.
Entrez avec vos passions !
Grimpez avec vos amours !
Dès maintenant, j'ai perdu le contrôle de mon cœur.
Je connais chez autrui le domicile du cœur.
Il est dans la poitrine — c'est connu de chacun.
Avec moi,
l'anatomie a perdu la tête.
Je suis tout cœur —
Cela bat de partout.
Ô, combien fussent-ils,
seulement les printemps,
en vingt ans engloutis dans sa fournaise !
Accumulé, leur poids n'est pas supportable.
Pas supportable,
non pour le rire,
mais à la lettre.
Vladimir Maïakovski, Lettres à Lily Brik (1917-1930),
traduites du russe par Andrée Robel et présentées par
Claude Frioux, Gallimard, 1969, p. 95-96.
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23/12/2011
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie
Nezval en 1919
Maïakovski à Prague
Entre les coiffeurs et les popes
Un athlète agile comme une antilope
Ses jeux préférés c'étaient
Les vers et le revolver à tambour
Qui veut de la vodka qui se bouche les intestins
Gauche gauche gauche
Quand Maïakovski vint à Prague
J'étais dans un théâtre au vestiaire
Haut-de-forme de maître de poste
Qu'il est impossible d'enlever
C'était futuriste
Comme nos vies brèves
Et comme ce passant superbe
Qui boirait de la jambe gauche
Il avait l'air trop sérieux pour un poète
Il était trop empâté pour une grenouille
Ah tout ce qui serait arrivé
Si la veste et la fiancée étaient de la même cuvée
C'était de la honte
Que naît la haine
Comme les éléphants il dédaignait toute chose
Plus le ciel est lointain plus il est monotone
Surtout dans les bars
Où n'importe qui admire le charlatan
Il l'avait vu danser à Harlem
Il aimait les palmiers autant que les pommes de terre
Des volets
Et Maïakovski est mort
Lui qui pleurait dès qu'il était seul
Tu connais cela et moi aussi je connais cela
Comme nous aimons Prague
Chaque fois qu'il venait quelqu'un de là-bas
Les tavernes et les ménages bouleversés
Et la Voltava tout à coup séduisante
Comme une baigneuse
Nous nous éloignons dans la nuit
À l'angle d'une rue Maïakovski agite son chapeau
Tu te jettes tête baissée
Dans des vers indéfinissables comme la nuit
Et Prague est de nouveau vivante
Le charme des blondes de la petite charcuterie
Comme les ouvrières sont belles
Et nous ne le savions pas
Tu marches et tu parles
Les perspectives défilent
Belles et usées
Comme ton manteau marron
Je connais dans les faubourgs un immeuble
Auquel il ressemble
Comme la poésie à la réalité
Et comme la réalité à la poésie sa demi-sœur
Vitezslav Nezval, Prague aux doigts de pluie, et autres poèmes (1919-1955), traduit du tchèque par François Kérel, Préface de Philippe Soupault, Les Éditeurs Français Réunis, 1060, p. 63-64.
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