17/03/2024
André du Bouchet, Air
Amarre
La grosse corde des jours de campagne
m’a lié
je m’use
couvert d’une écorce de fer
et comme moi
le jour s’est fermé
ma plaie
enterrée
la bande d’arbres
en diagonale
et l’air
au croc
qui nous faisait trembler
la surface de la terre
je suis sourd
et lisse
je ne comprends pas les mots de l’arbre
qui par moments continue de parler
au-dessus de la baignoire
posée dans le pré
comme une auge froide
d’où le jour sera sorti
entier.
André du Bouchet, Air,
Clivages, 1977, np.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Bouchet André du | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : andré du bouchet, air, arbre, écorce | Facebook |
16/03/2024
Witold Gombrowicz, Moi et mon double
(...) Mais ce mot « je suis », sans aucun attribut, ce fait nu et terrible, me remplissait d’épouvante.il semblait qu’il n’y avait rien de plus difficile que d’être soi-même, ni plus ni moins. Ce mot impliquait une affreuse nudité ; D’ailleurs j’avais craché sur l’esprit et il s’était enfui. « Non, non —murmurai-je recroquevillé et frémissant — je ne veux pas être moi-même. Je préfère être un employé subalterne au ministère des Affaires étrangères, je préfère servir quelque chose ou quelq’un.
Witold Gombrowicz, Moi et mon double, traduction C. Jezewski et D. Autrand, L’œl de la Lettre, 1990, p. 25.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : witold gombrowicz, moi et mon double | Facebook |
15/03/2024
René Char, Chants de la Balandrane
Ma feuille vineuse
Les mots qui vont surgir savent de nous ce que nous ignorons d’eux. Un moment nous serons l’équipage de cette flotte composée d’unités rétives, et le temps d’un grain, son amiral. Puis le large la reprendra, nous laissant à nos torrents limoneux et à nos barbelés givrés.
*
J’ai été élevé parmi les feux de bois, au bord de braises qui ne finissaient pas cendres. Dans mon dos l’horizon tournant d’une vitre safranée réconciliait le plumet brun des roseaux avec le marais placide. L’hiver favorisait mon sort. Les bûches tombaient sur cet ordre fragile maintenu en suspens par l’alliance de l’absurde et de l’amour. Tantôt m’était soufflé au visage l’embrasement, tantôt une âcre fumée. Le héros malade me souriait de son lit lorsqu’il ne tenait pas clos ses yeux pour souffrir. Auprès de lui, ai-je appris à rester silencieux ? À ne pas barrer la route à la chaleur grise ? À confier le bois de mon cœur à la flamme qui le conduirait à des étincelles ignorées des enclaves de l’avenir ? Les dates sont effacées et je ne connais pas les convulsions du compromis.
René Char, Chants de la Balandrane, Gallimard, 1977, p. 16 et 23.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rené char, chants de la balandrane | Facebook |
14/03/2024
René Char, Retour amont, Chants de la Balandrane
Célébrer Giacometti
En cette fin d’après-midi d’avril 1964 le vieil aigle despote, le maréchal-ferrant agenouillé, sous le nuage de feu de ses invectives (son travail, c’est-à-dire lui-même, il ne cessa de le fouetter d’offenses), me découvrit, à même le dallage de son atelier, la figure de Caroline, son modèle, le visage peint sur toile de Caroline — après combien de coups de griffes, de blessures, d’hématomes ? —, fruit de passion entre tous les objets d’amour, victorieux du faux gigantisme des déchets additionnés de la mort, et aussi des parcelles lumineuses à peine séparées, de nous autres, ses témoins temporels. Hors de son alvéole de désir et de cruauté. Il se réfléchissait, ce beau visage sans antan qui allait tuer le sommeil, dans le miroir de notre regard, provisoire receveur universel pour tous les yeux futurs.
René Char, Retour amont, Gallimard, 1966, p. 29
Ne viens pas trop tôt
Ne viens pas trop tôt, amour, va encore ;
L’arbre n’a tremblé que sa vie ;
Les feuilles d’avril sont déchiquetées par le vent.
La terre apaise sa surface
Et referme ses gouffres.
Amour nu, te voici, fruit de l’ouragan !
Je rêvais de toi décousant l’écorce.
René Char, Chants de la Balandrane, Gallimard, 1977, p. 55.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rené char, retour amont, chants de la balandrane | Facebook |
13/03/2024
André du Bouchet, Enclume de fraîcheur
Embâcle
S’il fallait aussitôt sorti, rester dehors,
qu’il n’était plus
temps de reculer. Ici, quand la montagne serait sur
nous. Mais il est temps de reculer.
Le chemin court, m'éclaire, dès le
jour, comme il prend sans faire halte. De retour déjà,
il emporte.
Oh, la route que l’inaction de l’air envahit !
André du Bouchet, Enclume de. fraîcheur, La Dogana,
2024, np.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Bouchet André du | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : andré du bouchet, enclume de fraîcheur, chemin | Facebook |
12/03/2024
Frédéric Forte, Transformation de la condition humaine dans toutes les branches d'activité
action de la
« La forme 99 notes préparatoires est un couteau suisse » (p. 119, note 43)
Le titre est emprunté à une allocution radiodiffusée et télévisée du général de Gaulle, le 4 octobre 1962, que l’on peut écouter sur le site de l’INA, indication donnée par l’auteur page 158 ; ce titre aurait déjà été celui d’un « sonnet perdu » de Jean Queval (p. 101, note 70). Le livre est construit en quatre parties les parties I et II comptent chacune quatre « 99 notes réparatoires » et, après un interlude (« au jeu de mah-jong »), III et IV en rassemblent chacune trois. Les thèmes semblent des plus variés, des notes préparatoires — toujours 99 — à la reconstruction d’Okinawa à celles, les dernières, au vert, en passant par les « 99 notes préparatoires aux 99 notes préparatoires ». À partir de ce bref descriptif, on rapproche sans peine Frédéric Forte de l’Oulipo et les nombreux emprunts, marqués comme tels dans le texte et attribués dans les Notes à la fin du livre, confirment son appartenance au groupe ; on y lit notamment les noms de Perec, Queneau, Roubaud, etc., et le recours à La Bibliothèque oulipienne, à Lewis Carroll, Marcel Duchamp, etc., mais aussi la liste de ceux et celles qui ont publié des textes titrés 99 notes préparatoires à...., avec la référence de publication — cette liste, sans référence cette fois, fait l’objet de la note 84 de III, 1.
Ce qui précède oriente vers un travail de la forme particulier aux écrivains qui, comme Frédéric Forte, se réclament de l’Oulipo. Le livre est construit sur le modèle du sonnet (4+4+3+3), en quatre parties numérotées (I, II, III, IV) deux ensembles de quatre « 99 notes préparatoires » en précèdent deux de trois notes. En outre, les "quatrains" s’opposent aux "tercets" : I ne compte que des notes préparatoires à propos d’éléments de fiction ou hors de portée (« à la reconstruction d’Okinawa / au Renard, série policière / aux Pays des Merveilles ») ou justement titrées « à l’impossible ». Le groupement III, à l’inverse, ne retient dans les « notes » que des éléments qui appartiennent à une réalité, ou le prétendent : « aux 99 notes préparatoires / à un livre de poésie contemporaine / à un objet de mon bureau ». On lit un décalage analogue entre II et IV. Entre les deux ensemble I, II et III, IV prend place un interlude : « 99 notes préparatoires au jeu de mah-jong » : les 45 images du jeu traditionnel comptent pour les notes 1-45, celles de 46 à 99 se résument en « Ou bien le jeu de mah-jong n’existe pas » : le double point de vue est respecté. Cette partition complexe est explicitement présentée dans les « Notes préparatoires aux notes préparatoires », « 92. Le livre Transformations de la condition humaine dans toutes les branches de l’activité sera un « sonnet » de poèmes composés dans la forme 99 notes préparatoires. »
Lire dans le détail est constamment réjouissant, tant Frédéric Forte tire des effets des répétitions, d’une connaissance approfondie des œuvres qu’il utilise mais aussi de la sociologie de la lecture. Frédéric Forte établit par exemple la liste des « 33 fonctions » du couteau suisse (III, 3), objet devenu le symbole de la transdisciplinarité ; ce faisant il a rajouté des fonctions aux douze traditionnelles, le couteau devenant un objet utilisable pour les soins du corps (« cure-dents », « cure-ongles », « pince à épiler », « repousse-cuticules »), la communication (« stylo à bille) », les déplacements la nuit (« lampe LED »), etc. Le « tercet » à propos de la poésie contemporaine, en même temps qu’il avance dans quelques notes l’importance de la relation "son / sens", relève à peu près tout ce que l’on peut entendre sur le sujet : l’incompréhension due à l’absence de lecture et de l’enseignement sur le sujet, mais aussi la bêtise à encadrer, digne de Bouvard et Pécuchet (qui sont cités ailleurs) ; au hasard :
« 5. Premièrement, les phrases ne veulent rien dire », « 19. L’auteur lance un peu tout ce qui lui passe par la tête. », « 32. Pas de ponctuation correcte, quand il y en a une ; l’ordre des mots n’est pas respecté ; il n’y a pas de proposition subordonnée relative. », « 46. Je ne nie pas qu’il s’agit d’une expérience intéressante. » ; « 99. Il faut aussi aimer la poésie, bien sûr. »
On lira des banalités analogues dans IV, 2, « 99 notes préparatoires à moi (en vrai), le « je » du texte pouvant être un homme (« Cela me rend nerveux de sentir quelqu’un marcher derrière moi (même en plein jour »), une femme (96. « Je regarde ma mère faire la cuisine pour devenir plus tard "femme au foyer" »). Les reprises d’une phrase, littéralement ou non, ou d’un motif, courantes dans l’ensemble du livre, introduisent un sentiment d’absurde — toute "logique" d’un texte étant en défaut : « Dans le cahier de leçons, une liste de mots à apprendre » (IV, 3, note 21) est transformé en « autre liste de mots à apprendre » (note 54), puis en « encore une liste de mots à apprendre » (note 79) avant, simplement, « Liste de mots à apprendre » (note 96). Une note peut être réduite à un seul mot (« oui »), qui n’apporte pas d’information, être seulement un renvoi à une note précédente (p. 134, « 92. Cf. note 1) ou disparaître : il ne reste que la numérotation (p. 134, « 94. … », « 95. … », « 96. … », « 97. … »), ce qui illustre la proposition de la note 89., « Ces notes préparatoires ne préparent à rien. ».
On renonce à relever les énoncés qui rappellent, par exemple, l’univers de Lewis Carroll et, notamment, la tradition littéraire du "nonsense", mais pas seulement : Frédéric Forte a co-traduit Oskar Pastior et traduit Guy Bennett. Si l’on veut caractériser en peu de mots ces 99 notes préparatoires, on reprend l’exergue du livre : « Ce n’est pas un jeu — sauf le sens où on peut dire que les éléments d’un corps (vivant, social, musical) jouent ensemble » (Michelle Grangaud).
Frédéric Forte,
« La forme 99 notes préparatoires est un couteau suisse » (p. 119, note 43)
Le titre est emprunté à une allocution radiodiffusée et télévisée du général de Gaulle, le 4 octobre 1962, que l’on peut écouter sur le site de l’INA, indication donnée par l’auteur page 158 ; ce titre aurait déjà été celui d’un « sonnet perdu » de Jean Queval (p. 101, note 70). Le livre est construit en quatre parties les parties I et II comptent chacune quatre « 99 notes réparatoires » et, après un interlude (« au jeu de mah-jong »), III et IV en rassemblent chacune trois. Les thèmes semblent des plus variés, des notes préparatoires — toujours 99 — à la reconstruction d’Okinawa à celles, les dernières, au vert, en passant par les « 99 notes préparatoires aux 99 notes préparatoires ». À partir de ce bref descriptif, on rapproche sans peine Frédéric Forte de l’Oulipo et les nombreux emprunts, marqués comme tels dans le texte et attribués dans les Notes à la fin du livre, confirment son appartenance au groupe ; on y lit notamment les noms de Perec, Queneau, Roubaud, etc., et le recours à La Bibliothèque oulipienne, à Lewis Carroll, Marcel Duchamp, etc., mais aussi la liste de ceux et celles qui ont publié des textes titrés 99 notes préparatoires à...., avec la référence de publication — cette liste, sans référence cette fois, fait l’objet de la note 84 de III, 1.
Ce qui précède oriente vers un travail de la forme particulier aux écrivains qui, comme Frédéric Forte, se réclament de l’Oulipo. Le livre est construit sur le modèle du sonnet (4+4+3+3), en quatre parties numérotées (I, II, III, IV) deux ensembles de quatre « 99 notes préparatoires » en précèdent deux de trois notes. En outre, les "quatrains" s’opposent aux "tercets" : I ne compte que des notes préparatoires à propos d’éléments de fiction ou hors de portée (« à la reconstruction d’Okinawa / au Renard, série policière / aux Pays des Merveilles ») ou justement titrées « à l’impossible ». Le groupement III, à l’inverse, ne retient dans les « notes » que des éléments qui appartiennent à une réalité, ou le prétendent : « aux 99 notes préparatoires / à un livre de poésie contemporaine / à un objet de mon bureau ». On lit un décalage analogue entre II et IV. Entre les deux ensemble I, II et III, IV prend place un interlude : « 99 notes préparatoires au jeu de mah-jong » : les 45 images du jeu traditionnel comptent pour les notes 1-45, celles de 46 à 99 se résument en « Ou bien le jeu de mah-jong n’existe pas » : le double point de vue est respecté. Cette partition complexe est explicitement présentée dans les « Notes préparatoires aux notes préparatoires », « 92. Le livre Transformations de la condition humaine dans toutes les branches de l’activité sera un « sonnet » de poèmes composés dans la forme 99 notes préparatoires. »
Lire dans le détail est constamment réjouissant, tant Frédéric Forte tire des effets des répétitions, d’une connaissance approfondie des œuvres qu’il utilise mais aussi de la sociologie de la lecture. Frédéric Forte établit par exemple la liste des « 33 fonctions » du couteau suisse (III, 3), objet devenu le symbole de la transdisciplinarité ; ce faisant il a rajouté des fonctions aux douze traditionnelles, le couteau devenant un objet utilisable pour les soins du corps (« cure-dents », « cure-ongles », « pince à épiler », « repousse-cuticules »), la communication (« stylo à bille) », les déplacements la nuit (« lampe LED »), etc. Le « tercet » à propos de la poésie contemporaine, en même temps qu’il avance dans quelques notes l’importance de la relation "son / sens", relève à peu près tout ce que l’on peut entendre sur le sujet : l’incompréhension due à l’absence de lecture et de l’enseignement sur le sujet, mais aussi la bêtise à encadrer, digne de Bouvard et Pécuchet (qui sont cités ailleurs) ; au hasard :
« 5. Premièrement, les phrases ne veulent rien dire », « 19. L’auteur lance un peu tout ce qui lui passe par la tête. », « 32. Pas de ponctuation correcte, quand il y en a une ; l’ordre des mots n’est pas respecté ; il n’y a pas de proposition subordonnée relative. », « 46. Je ne nie pas qu’il s’agit d’une expérience intéressante. » ; « 99. Il faut aussi aimer la poésie, bien sûr. »
On lira des banalités analogues dans IV, 2, « 99 notes préparatoires à moi (en vrai), le « je » du texte pouvant être un homme (« Cela me rend nerveux de sentir quelqu’un marcher derrière moi (même en plein jour »), une femme (96. « Je regarde ma mère faire la cuisine pour devenir plus tard "femme au foyer" »). Les reprises d’une phrase, littéralement ou non, ou d’un motif, courantes dans l’ensemble du livre, introduisent un sentiment d’absurde — toute "logique" d’un texte étant en défaut : « Dans le cahier de leçons, une liste de mots à apprendre » (IV, 3, note 21) est transformé en « autre liste de mots à apprendre » (note 54), puis en « encore une liste de mots à apprendre » (note 79) avant, simplement, « Liste de mots à apprendre » (note 96). Une note peut être réduite à un seul mot (« oui »), qui n’apporte pas d’information, être seulement un renvoi à une note précédente (p. 134, « 92. Cf. note 1) ou disparaître : il ne reste que la numérotation (p. 134, « 94. … », « 95. … », « 96. … », « 97. … »), ce qui illustre la proposition de la note 89., « Ces notes préparatoires ne préparent à rien. ».
On renonce à relever les énoncés qui rappellent, par exemple, l’univers de Lewis Carroll et, notamment, la tradition littéraire du "nonsense", mais pas seulement : Frédéric Forte a co-traduit Oskar Pastior et traduit Guy Bennett. Si l’on veut caractériser en peu de mots ces 99 notes préparatoires, on reprend l’exergue du livre : « Ce n’est pas un jeu — sauf le sens où on peut dire que les éléments d’un corps (vivant, social, musical) jouent ensemble » (Michelle Grangaud).
Frédéric Forte,, P.O.L., 2023, 150 p., 17 €. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 11 février 204.
, P.O.L., 2023, 150 p., 17 €. Cette recension a été publiée par Sitaudis le 11 février 204.
11/03/2024
Georges Perros, Œuvres
X
Que les hommes se suicident, c’est assez logique. On comprend. Qu’ils deviennent fous, c’est beaucoup plus troublant. Que la folie puisse constituer l’issue d’une pensée trop vécue — court-circuitée — cela met en cause l’authenticité de tout homme pensant qui ne devient pas fou. Penser est fou. S’installer dans cette région minée, la rationaliser, comme on dit, et dès lors travailler… hum !
Le travail ne vaut que dans la mesure où il retient les cavales de la folie. « Si je ne travaille pas, je deviens fou », se dit l’homme. Or combien sont devenus fous malgré leur travail, ce dernier au cœur même de leur existence.
Il y a donc une folie organisée. Qui bouche les trous. Répare en vitesse les lézardes. Puis la mort naturelle arrange tout.
Je n’aime pas les déclarations d’avant-mort. En général, c’est : « tant mieux, y en a marre ». Formule généralement soufflée par ceux qui ont fait preuve d’un optimisme débordant. Pour faire croire quoi ? à qui ?
Georges Perros, Œuvres, Quarto/Gallimard, 2020, p. 960.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Perros Georges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, folie, logique, travail | Facebook |
10/03/2024
Georges Perros, Une vie ordinaire
Les femmes vieillissent trop vite
à force d’hommes sur leur ventre
mais elles valent mieux que nous
qui passons entre leurs genoux
comme on entre dans un tunnel
seulement fiers de bien saillir
afin de satisfaire filles
à prendre et bientôt à laisser
je me dégoûte d’être un homme.
Georges Perros, Une vie ordinaire, dans
Œuvres, Quarto/Gallimard, 2020, p. 698.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Perros Georges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, une vie ordinaire, femme, dégoût | Facebook |
09/03/2024
Georges Perros, Une vie ordinaire
Je fus longtemps impressionné
par les gens ayant l’air de croire
à leur réalité D’où vient
qu’on puisse faire de ce rien
qu’est notre présence sur terre
un monument ? Ce ne serait
qu’à moitié absurde si tête
en avant l’autre n’y jetait
ce qu’on nomme encor son complexe
Les hommes mutuellement
se font si peur les uns les autres
Ils ne l’avouent qu’à peu près sûrs
de mourir sur l’heure Après quoi
parler de masques de pudeur
de caractère de froideur
est à tout prendre plus malin
que de choisir banalité
la revêche et pauvre parure
Georges Perros, Une vie ordinaire, dans
Œuvres, Quarto/Gallimard, 2020, p. 727.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Perros Georges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, une vie ordinaire, réalité, complexe | Facebook |
08/03/2024
Georges Perros, Œuvres
Les poissons nagent dans l’eau
Bien mieux que l’homme sur terre
Savoir nager c’est misère
Quand on n’est pas maquereau
La mouette dans le ciel
Mieux que l’homme vole, vole,
Ah ! voler manque de sel
Quand on n’est pas un oiseau.
La mer est toujours à boire.
Le ciel à prendre d’assaut.
Mais si vous voulez m’en croire
Restons-en là.
Ken Avo !
Georges Perros, Œuvres, Quarto/
Gallimard, 2020, p.528.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, œuvres, ciel, mer | Facebook |
07/03/2024
Georges Perros, Œuvres
On rencontre parfois des hommes de la vie brillante, mondaine, et qui, vous prenant dans un coin, à la fin d’un repas, vous disent profondément : « Mon auteur favori, c’est Pascal ». Ah ! et de vous questionner sur le lieu Pascal en eux. Pascal, c’est leur luxe. D’autre encore parlent d’Artaud, de Rimbaud. Leur vie n’en est nullement influencée. Ce sont des goûts qu’ils ont plus amusants à faire connaître que celui qu’on éprouve pour la saucisse de Francfort. » Mais Pascal, jeune homme, quel grand homme ! ».
Georges Perros, Œuvres, Quarto/Gallimard, 2017, p. 524.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Perros Georges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, œuvres, mondanité, pascal, goût | Facebook |
06/03/2024
Georges Perros, Œuvres
La vie active, le frottement avec les autres, etc., nous feraient croire qu’on peut changer, c’est-à-dire qu’un mot d’autrui, une opinion sur notre compte, etc., sont capables de nous influencer autrement que dans cette mesure affectueuse ou maligne. Bref, qu’on peut perdre — ou gagner — sa vie, en faisant ceci plutôt que cela. C’est absurde.
Georges Perros, Œuvres, Quarto/Gallimard, 2017, p. 522.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Perros Georges | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges perros, Œuvres, changement, influence | Facebook |
05/03/2024
Pierre Alferi, Divers chaos
on demande un poème
sur l’affaissement des chairs
l’assèchement des peaux
un poème qui se penche
sur les taches de la gale
un autre sur les signes
précurseurs de la gangrène
un poème coulant
épais comme le pus
un poème
lit médicalisé
qui sent l’urine
un poème qui touche
la crasse et creuse
la faim
qui engourdisse les doigts
un poème d’épandage
élémentaire
liquide empoisonné
gazeux irrespirable
terreux toxique
qui serre la gorge
quand il se consume
avant l’heure
Pierre Alferi, Divers Chaos,
P.O.L ; 2020, p.245-246.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre alferi, divers chaos, poème, maladie | Facebook |
04/03/2024
Pierre Alferi, Divers chaos
un tissu de pas grand-chose
innombrables
je t’embrasse à pleine bouche
ça le chauffe
c’est ignoble
il rougeoie
sous mes paupières
mon désir
ton sauveur !
combien de fois
t’a-t-il évité le pire
univers ?
Pierre Alferi, Divers chaos,
P.O.L, 2020, p. 63.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre alferi, dvers chaos, embrasser, désir | Facebook |
03/03/2024
Pierre Alferi, Divers chaos
chaque voiture
sur la chaussée
trempée réveille
et son crépi-
tement de sable
le souvenir
net d’une vague
sur la grève
Pierre Alferi, divers chaos,
P.O.L, 2020, pp. 218.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre alferi, divers chaos, voiture | Facebook |