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06/12/2021

Georges Didi-Huberman, Niki Giannari, Passer, quoi qu'il en coûte

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(...) Après tout, les réfugiés ne font que revenir. Ils ne « débarquent » pas de rien, ni de nulle part. Quand on les considère comme des foules d’envahisseurs venus de contrées hostiles, quand on confond en eux l’ennemi avec l’étranger, cela veut surtout dire que l’on tente de conjurer quelque chose qui, de fait, a déjà eu lieu : quelque chose que l’on refoule de sa propre généalogie. Ce quelque chose, c’est que nous sommes tous des enfants de migrants et que les migrants ne sont que nos parents revenants, fussent-ils « lointains » (comme on parle des cousins). L’autochtonie que vise, aujourd’hui, l’emploi paranoïaque du mot « identité », n’existe tout simplement pas et c’est pourquoi toute nation, toute région, toute ville ou tout village sont habités de peuples au pluriel, de peuples qui coexistent, qui cohabitent, et jamais d’« un peuple » autoproclamé dans son fantasme de « pure ascendance ». Personne en Europe n’est « pur » de quoi que ce soit — comme les nazis en ont rêvé, comme en rêvent aujourd’hui les nouveaux fascistes — et si nous l’étions par le maléfice de quelque parfaite endogamie pendant des siècles, nous serions à coup sûr génétiquement malades, c’est-à-dire « dégénérés ».

 

Georges Didi-Huberman, Niki Giannari, Passer, quoi qu’il en coûte, éditions de Minuit, 2017, p. 31-32.

13/10/2018

Georges Didi-Huberman, Passer, quoi qu'il en coûte

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(…) Après tout, les réfugiés ne font que revenir. Ils ne « débarquent » pas de rien ni de nulle part. Quand on les considère comme des foules d’envahisseurs venues de contrées hostiles, quand on confond en eux l’ennemi avec l’étranger, cela veut surtout dire que l’on tente de conjurer quelque chose qui, de fait, a déjà eu lieu : quelque chose que l’on refoule de sa propre généalogie. Ce quelque chose, c’est que nous sommes tous les enfants de migrants et que les migrants ne sont que nos parents revenants, fussent-ils lointains (comme on parle des « cousins »). L’autochtonie, que vise, aujourd’hui, l’emploi paranoïaque du mot « identité », n’existe tout simplement pas et c’est pourquoi toute nation, toute région, toute ville ou tout village sont habités de peuples au pluriel, de peuples qui coexistent, qui cohabitent, et jamais d’ « un peuple » autoproclamé dans son fantasme de « pure ascendance ». Personne en Europe n’est « pur » de quoi que ce soit — comme les nazis en ont rêvé, comme en rêvent aujourd’hui les nouveaux fascistes —, et si nous l’étions par le maléfice de je ne sais quelle endogamie pendant des siècles, nous serions à coup sûr génétiquement malades, c’est-à-dire « dégénérés ».

 

Georges Didi-Huberman, Niki Giannari, Passer, quoi qu’il en coûte, éditions de minuit, 2017, p. 31-32.

11/10/2018

Niki Giannari, Des spectres hantent l'Europe

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Des spectres hantent l’Europe

     (lettre d’Idomeni)

 

(les migrants)

Se posent ici,

attendent et ne demandent rien,

seulement passer.

 

De temps en temps, se retournent vers nous

d’une réclamation incompréhensible,

absolue, hermétique.

Figures insistantes de notre généalogie oubliée,

délaissée, personne ne sait où et quand.

Dans ce vaste temps de l’attente,

nous enterrons leurs mort à la va-vite.

D’autres leur éclairent un passage dans la nuit,

d’autres leur crient de s’en aller

et crachent sur eux et leur donnent des coups de ped,

d’autres encore les visent et vont vite

verrouiller leurs maisons.

Mais ils continuent, eux, à travers la sujétion

dans les rues de cette Europe névrosée

qui « sans cesse amoncelle ruines sur ruines »

au moment même où les gens observent le spectacle,

depuis les cafés ou les musées,

les universités ou les parlements.

 

Niki Giannari, texte bilingue, dans Georges Didi-Huberman et N. G., Passer, quoi qu’il en coûte, éditions de Minuit, 2017, p. 13 et 15.

 

 

 

 

29/05/2012

Joë Bousquet, La Connaissance du Soir

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            La nuit mûrit

                                           à Jean Paulhan

 

En cherchant mon cœur dans le noir

Mes yeux cristal de ce que j'aime

S'entourent de moi sans me voir

 

Mais leur ténèbre est l'amour même

Où toute onde épousant sa nuit

Dans mes jours se forge un sourire

 

Afin qu'aux traits où je le suis

Sa transparence ait pour empire

Mon corps en soi-même introduit

 

                           *

 

               Passer

 

Enfance qui fus dans l'espace

Un vol poursuivi jusqu'au soir

J'appelle ton ombre à voix basse

Avec la peur de te revoir

 

Sœur en deuil de tes robes claires

Ta fuite est l'oiseau bleu des jours

Que de son chant fait la lumière

Des gestes rêvés par l'amour

 

C'est par ton charme qu'une fille

D'un corps ébauché dans les cieux

A formé la larme des villes

Qui s'illuminent dans ses yeux

 

Et ce fut ton âme de rendre

Mon doute plus que moi vivant

Passerose aux ailes de cendre

Qui m'ouvrais ton cœur dans le vent

 

Joë Bousquet, La Connaissance du Soir, Gallimard,

1947, p. 30 et 53.

                      *  *  *

Un appel du cipM :

 

En 2008 Marseille Provence 2013 a été sélectionnée capitale européenne de la culture, ce qui a suscité, notamment de la part des acteurs culturels qui avaient travaillé à sa préparation, d’immenses espoirs. 
C’est donc avec enthousiasme et énergie que nous nous sommes attelés à la préparation de
 projets à proposer à Marseille Provence 2013, fiers de vivre et de travailler dans la ville qui allait devenir capitale, ville qui s’engageait résolument vers un avenir culturel, comme l’avait fait quelques années plus tôt la ville de Lille. 

Pour le centre international de poésie Marseille, 
aujourd’hui, c’est la douche froide…
 


• Alors que nous participons à des projets acceptés et financés par
 Marseille Provence 2013, 
Pasolini (juin-juillet), Le vrai et le faux (juillet-août), ActOral (septembre-octobre),
 

• Alors que nous portons un projet accepté et financé par
 Marseille Provence 2013, 
Le colloque de Tanger qui se tiendra à Marseille et à Tanger (printemps),
 

• Alors que le
 Centre national du livre nous a missionné pour porter et organiser un projet de lectures en plusieurs langues du pourtour de la Méditerranée (à partir des ateliers de traduction créés par le cipM : IMPORT / EXPORT) lors du temps fort consacré au livre par Marseille Provence 2013 (17-20 octobre), 

• Alors qu’il était spécifié dans le dossier de présélection adressé à la commission
 européenne que : « Les adhérents de la Charte conviennent qu’il s’agit d’un budget constitué exclusivement de mesures nouvelles permettant le financement du projet 
Marseille Provence 2013, sans réduction des budgets structurels préexistants… »,
 

• Alors que nous sommes à quelques mois du début de l’année capitale,
 

après avoir amputé notre budget de 30 000 € en 2011, 
la Ville de Marseille
 nous supprime 30 000 € supplémentaires cette année, faisant ainsi passer la subvention au cipM (7 salariés) 
de 260 000 € en 2010 à 200 000 € cette année !!!
 

À ce rythme-là, nous ne toucherons plus que 20 000 € en 2018,
 et nous pourrons programmer notre mort définitive pour l’an 2019.
 


Vous pouvez adresser un message de soutien à :
 cipm@cipmarseille.com