11/10/2018
Niki Giannari, Des spectres hantent l'Europe
Des spectres hantent l’Europe
(lettre d’Idomeni)
(les migrants)
Se posent ici,
attendent et ne demandent rien,
seulement passer.
De temps en temps, se retournent vers nous
d’une réclamation incompréhensible,
absolue, hermétique.
Figures insistantes de notre généalogie oubliée,
délaissée, personne ne sait où et quand.
Dans ce vaste temps de l’attente,
nous enterrons leurs mort à la va-vite.
D’autres leur éclairent un passage dans la nuit,
d’autres leur crient de s’en aller
et crachent sur eux et leur donnent des coups de ped,
d’autres encore les visent et vont vite
verrouiller leurs maisons.
Mais ils continuent, eux, à travers la sujétion
dans les rues de cette Europe névrosée
qui « sans cesse amoncelle ruines sur ruines »
au moment même où les gens observent le spectacle,
depuis les cafés ou les musées,
les universités ou les parlements.
Niki Giannari, texte bilingue, dans Georges Didi-Huberman et N. G., Passer, quoi qu’il en coûte, éditions de Minuit, 2017, p. 13 et 15.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges didi-huberman et niki giannari, passer, quoi qu’il en coûte, des spectres hantent l'europe | Facebook |
Les commentaires sont fermés.