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24/09/2017

Philippe Jaccottet, Tâches de soleil, ou d'ombre. Notes sauvegardées.

 

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   Les iris poussent au hasard dans un enclos d'herbes hautes — couleur mauve ou violet sombre — sortis de leurs papiers de soie parmi leurs dures lames vertes. Ou ceux, de couleur jaune, qui poussent dans les marais et les canaux. Et ces toutes petites fleurs basses — jaunes ou roses — qui s'accrochent aux pierres, aux rochers, qui leur tiennent lieu de pelage, doux, gras et chaud, modeste et tenace.

 

                                             *

                                           

   Le parfum des iris, très doux, sucré, presque suave, évoquant, me semble-t-il, l'idée qu'on a pu se faire, adolescent, du féminin : de quoi vous tourner la tête... Avec cette espèce de chenille d'un jaune éclatant, solaire, mais si bien cachée sous les pétales bleu pâle comme sous des langues d'eau. Mais le mot "chenille"  gêne, et "brosse" tout autant. Une réserve de poudre d'or, un pelage d'or, une toison peut-être, cachée dans la soie de la robe ?

 

Philippe Jaccottet, Taches de soleil, ou d'ombre, Notes sauvegardées, 1952-2005, Le Bruit du temps, 2013, p. 47, 154.

25/05/2016

Ariane Dreyfus, Iris, c'est votre bleu

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Je veux bien essayer au bord mais avec toi.

 

Je vois ta main ton bras, et le deuxième aussi m’entoure quand la lumière baisse.

Chacun s’allonge avec l’autre, calmant son ombre.

 

Un doigt parfois suffit

Au vertige de te toucher

Pas disparu

 

Et puis le ciel !

 

Qui restera,

Lui, immense,

Mais toi aussi, immense et tiède.

 

Serrée entre tes bras et le regard sur la montagne,

Je ne l’aime pas autant, l’éternelle,

Tendres flancs humains.

 

C’est léger une main qui caresse, qui va revenir,

Si légère que nous continuons.

 

Il faut car le temps nous pose plus haut.

 

Ariane Dreyfus, Iris, c’est votre bleu, Le Castor Astral,

2008, p. 30-31.

08/05/2013

Philippe Jaccottet, Taches de soleil, ou d'ombre, Notes sauvegardées

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   Les iris poussent au hasard dans un enclos d'herbes hautes — couleur mauve ou violet sombre — sortis de leurs papiers de soie parmi leurs dures lames vertes. Ou ceux, de couleur jaune, qui poussent dans les marais et les canaux. Et ces toutes petites fleurs basses — jaunes ou roses — qui s'accrochent aux pierres, aux rochers, qui leur tiennent lieu de pelage, doux, gras et chaud, modeste et tenace.

 

                                             *

                                           

   Le parfum des iris, très doux, sucré, presque suave, évoquant, me semble-t-il, l'idée qu'on a pu se faire, adolescent, du féminin : de quoi vous tourner la tête... Avec cette espèce de chenille d'un jaune éclatant, solaire, mais si bien cachée sous les pétales bleu pâle comme sous des langues d'eau. Mais le mot "chenille"  gêne, et "brosse" tout autant. Une réserve de poudre d'or, un pelage d'or, une toison peut-être, cachée dans la soie de la robe ?

 

Philippe Jaccottet, Taches de soleil, ou d'ombre, Notes sauvegardées, 1952-2005, Le Bruit du temps, 2013, p. 47, 154.

09/07/2011

Ariane Dreyfus, Les Compagnies silencieuses ; Iris, c'est votre bleu

 

Le lendemain du jour

  

LanuitRemue_-_02.jpeg Comme une femme se glisse sous un homme

 

Je lis votre écriture

 

Ou alors c’est moi qui écris couchée

La page blanche fait cette lumière où j’oublie de me voir

Toujours commencée

Il y a un côté où l’encre n’est pas sèche

qui mène jusqu’à vous


Quand vous me lisez vous le dites

Ou jamais

Je prends toutes les étoffes selon la chaleur

Les morceaux de vie selon

Ma  bien future mort


Je n’étais pas penchée sur le vide

Une femme sur un homme


Qui écrit n’est pas longtemps une jeune fille

Plutôt souvent


Il faut des mots pour se glisser entre eux

Y voir

Aucun n’est vrai tout seul

Heureusement le tumulte ne refuse pas la main


Tant de poèmes que je suis cachée dans toute la forêt ?

C’est vous qui choisissez


L’écorce que vous dites que j’ai touchée.

 

Ariane Dreyfus, Les Compagnies silencieuses, Flammarion, 2001, p. 27.

 

 

                           Les équilibres

 

La rose s’ouvre vers la mort

   Bien avant qu’on la coupe

 

     S’immobiliser à cause

     Du fil sur quoi on tire

 

  Je te regarde intensément

Je croyais que seul le poème

     miroitait sans faiblir

 

Pivotant dans la page sans fond

     Venir ? Venir c’est toi

 

Les petites lumières de se caresser

   D’un côté attention le vide

 

Je lèche le bout de ton sexe

     Il n’y en a qu’un

 

Tous les mots viennent voir ce que c’est

          Embrasser

 

Je souffle dans ta bouche avant l’heure

 

Ariane Dreyfus, Iris, c’est votre bleu, Le Castor Astral, 2008, p. 92-93.

04/05/2011

James Sacré, Une petite fille silencieuse

James Sacré.jpg

 

                                  À côté des iris sans fleurs

 

                                        1

 

La beauté d’un jour de juillet,

Grand soleil et bleu mais tempérés par des feuillages

Qui font de l’ombre  à la maison tranquille où j’écris.

Telle beauté se nourrit de beaucoup de temps passé,

De choses qui ont changé, de gens qu’on oublie ;

Mais l’herbe de la pelouse verdit.

 

Je ne verrai plus assise à côté des iris sans fleurs

Une enfant qui regarde un animal familier.

 

Est-ce qu’un poème ressemble à la verte indifférence de l’herbe,

Ou s’il peut être aussi un geste pour voir ?


 

 

La persistance d’une pluie un jour d’été,

Avec des moments que l’on entend plus fort,

Produit de la fraicheur qui est bonne

À la moiteur d’un gros bourg

Dans l’ouest rempli d’arbres et de collines de la

     Nouvelle- Angleterre.

 

Quelqu’un a l’impression

Que toute l’activité de la pluie lui rend

Les façons d’être un corps (une jambe, un visage disparus) comme à      

     nouveau sensibles ;

 

En fait c’est qu’un poème qui s’écrit à cause

De l’attention prêtée à un bruit d’eau, à cause d’événements récents,

     les mots

Perdent leur sens où du plaisir s’empêtre en des tourments de cœur.

 

James Sacré, Une petite fille silencieuse, collection Ryôan-ji, André Dimanche éditeur, 2001, p. 27-28.