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25/01/2019

Peter Huchel, La neuvième heure

Peter Huchel, La neuvième heure, sur les routes, chien, bohémien

     Par les routes

 

La troupe vagabonde

des feuilles glacées,

le jour l'a rabattue sur la fosse à feu

avec ses lacets.

 

Près du chariot

à l'abri de la bâche,

la bohémienne

à ses pieds,

emmitouflé, l'enfant endormi.

Elle sort de sa veste de mouton

un jeune chien qui tète,

en l'allaitant

elle nourrit dans la neige le vent affamé.

 

Sœur lointaine 

de la déesse asiatique,

le croissant de silex,

tu l'as perdu

au bord des étangs infernaux.

Tu entends dans la nuit l'aboi

derrière les traces de roues, d'un campement l'autre.

 

 

     Unterwegs

 

Die streifende Rotte

vereister Blätter

fällte der Tag

mit Drähten über der Feuergrube.

 

Neben dem Karren

im Schutz der Plache

die Zigeunerin,

zu ihren Füßen

eingewickelt das schlafende Kind.

Sie hebt aus dem Schafspelz

einen jungen Hund an die Brust,

ihn säugend,

säugt sie den hungrigen Wind im Schnee.

 

Ferne Tochter

der asiatischen Göttin,

die Feuersteinsichel

hast du verloren

am Rand der höllischen Teiche.

Du hörst das Gebell in der Nacht

das der Radspur folgt von Lager zu Lager.

 

Peter Huchel, La neuvième heure [Die neunte Stunde], traduit de l'allemand par Maryse Jacob et Arnaud Villani, Atelier La Feugraie, 2013, p. 63 et 62.

 

27/10/2015

Peter Huchel (1903-1980), La neuvième heure

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         Le chat

 

Matin d’hiver,

encore sombre dans la congère du rêve,

éparpillés dans la grange,

des épis de maïs réduits au squelette,

un visage de perles d’eau

s’évanouit derrière la lucarne

 

Ce que le chat

dissimule derrière son regard,

le givre, le sel des sorcières,

ne le sait pas.

 

Peter Huchel, La neuvième heure, traduit de

l’allemand par Maryse Jacob et Arnaud Villani,

Atelier La Feugraie, 2013, p. 59.

10/07/2013

Peter Huchel, La neuvième heure

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     Par les routes

 

La troupe vagabonde

des feuilles glacées,

le jour l'a rabattue sur la fosse à feu

avec ses lacets.

 

Près du chariot

à l'abri de la bâche,

la bohémienne

à ses pieds,

emmitouflé, l'enfant endormi.

Elle sort de sa veste de mouton

un jeune chien qui tète,

en l'allaitant

elle nourrit dans la neige le vent affamé.

 

Sœur lointaine

de la déesse asiatique,

le croissant de silex,

tu l'as perdu

au bord des étangs infernaux.

Tu entends dans la nuit l'aboi

derrière les traces de roues, d'un campement l'autre.

 

 

     Unterwegs

 

Die streifende Rotte

vereister Blätter

fällte der Tag

mit Drähten über der Feuergrube.

 

Neben dem Karren

im Schutz der Plache

die Zigeunerin,

zu ihren Füßen

eingewickelt das schlafende Kind.

Sie hebt aus dem Schafspelz

einen jungen Hund an die Brust,

ihn säugend,

säugt sie den hungrigen Wind im Schnee.

 

Ferne Tochter

der asiatischen Göttin,

die Feuersteinsichel

hast du verloren

am Rand der höllischen Teiche.

Du hörst das Gebell in der Nacht

das der Radspur folgt von Lager zu Lager.

 

Peter Huchel, La neuvième heure [Die neunte Stunde], traduit de l'allemand par Maryse Jacob et Arnaud Villani, Atelier La Feugraie, 2013, p. 63 et 62.

 

 

04/08/2011

Peter Huchel, Jours comptés (traduction M. Jacob & A. Villani)

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                  Macbeth

 

Avec les sorcières j’ai parlé,

en quelle langue,

je ne sais plus.


Arrachées,

les portes du ciel,

laissé libre, l’esprit,

l’engeance de la lande

dans le tourbillon du vent.


En bord de mer

les orteils sales de la neige,

quelqu’un attend là,

les mains à vif.

J’aurais préféré que ma mère

m’eût étouffé.


Des écuries du vent

il surgira,

là où les vieilles femmes

hachent le foin.


Méfiance ! Mon heaume,

je le suspends

à la charpente de la nuit.

 

 

                  Macbeth

 

Mit Hexen redete ich,

in welcher Sprache,

ich weiß es nicht mehr.


Aufgesprengt

die Tore des Himmels,

freigelassen der Geist,

in Windwirbeln

das Gelichter der Heide.


Am Meer

die schmutzigen Zehen des Schnees,

hier wartet einer

mit Händen ohne Haut.

Ich wollt, meine Mutter

hätt mich erstickt.


Aus den Ställen des Winds

wird er kommen,

wo die alten Frauen

das Futter häckseln.


Argwohn mein Helm,

ich häng ihn

ins Gebälk der Nacht.

 

 

                  Pas de réponse

 

Sur la cime noyée de brouillard,

sur le chêne

la corneille se pose.

La poutre aux chats est déserte.

 

Ombres

de sarments secs

au plafond de la chambre.

Signes

qu’un mandarin

a tracés de sa main.

 

L’alphabet

que tu possèdes

ne suffit pas

pour souffler réponse

à l’écriture sans défense.

 

              Keine Antwort

 

Aufs schwimmende Nebelhaupt

der Eiche

setzt sich die Krähe.

Der Katzenbalken ist leer.

 

Schatten von dürrem

Weingerank

an der Zimmerdecke.

Zeichen,

von eines Mandarinen Hand

geschrieben.

 

Das Alphabet,

das du besitzt,

reicht nicht aus,

Antwort zu geben

der wehrlosen Schrift.

 

Peter Huchel, Jours comptés, [Gezählte Tage, 1972], traduit de l’allemand par Maryse Jacob et Arnaud Villani, Atelier La Feugraie, 2011, p. 76-77 et 96-97.