19/11/2014
Luis Mizon, Corps du délit où se cache le temps
je réfléchis
il y a une petite chose qui me tracasse
je ne sais pas reconnaître mes adversaires
je sis capable
de reconnaître mes alliés
mais je me trompe souvent
je ne connais pas les règles de ce jeu
plus grave encore je n'ai pas envie de les
connaître
c'est trop tard pour les apprendre
maintenant
à minuit
au milieu du terrain
entouré de haut-parleurs et de chiens
illuminés par les étincelles d'un bâton de
charbon
qui se consume entre la vie et la mort
Luis Mizon, Corps du délit où se cache le temps, dessins
de Philippe Hélénon, Æncrages & Co, 2014, np.
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28/10/2014
Luis Mizon, Corps du délit où se cache le temps
tout est écrit par le corps
sans que la main droite sache
ce que fait la main gauche
le linge immaculé raconte
des histoires cryptées
près de la flamme
les taches deviennent visibles
on voit la trace de la machinerie
les effets spéciaux
la scène sombre du balcon
les aveux des amoureux
les hésitations des comédiens
les soupirs des jeunes poètes
les traces de l'amour et de la haine
l'oubli n'a rien effacé
Luis Mizon, Corps du délit où se cache le temps,
dessins de Philippe Hélénon, Æncrages
& Co, 2014, np.
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03/07/2012
Luis Mizón, Terre brûlée
Mémoire du corps absent.
Le joueur d'échecs
travaille la géométrie de l'écho.
L'éclat des vagues de pierre noire
et le geste qui devine
les moralités du vent.
Je caresse des lèvres de bronze vert
des masques de plâtre.
Je lance des parcelles de soleil
contre murs et angles
forteresses et bateaux de guerre
soldats et marins amnésiques.
J'attaque d'une main souriante avec furie
le raisin vert de l'éclipse.
Je m'assieds sur les traces de l'arbre musicien
pour écouter des histoires de personne
échos anciens.
Histoire et rêve.
La passion du corps invisible
murmure
en effeuillant les grappes
de la fleur de la plume.
Le puits des musiciens
éveille et ressuscite
des scories brillantes
dans la mémoire des enfants
et il guérit de son lait d'ombre
la pierre malade de ton visage
et son ivresse muette.
Le puits pulvérise le ciel.
Arbre de clarté blanche.
Bouche qui murmure
sur la terre brûlée.
Le vent parcourt la mémoire
cherchant les mots
d'un poème ancien échoué dans les vagues
il peint un autre labyrinthe
de pierre transparente
et d'ombre illuminée.
[...]
Luis Mizón, Terre brûlée, traduit de l'espagnol (Chili)
par Claude Couffon, Obsidiane, 1984, p. 55 et 57.
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11/01/2012
Luis Mizón, Passage des nuages, traduction Claude Couffon
1
Je me penche à la fenêtre
d'églises et de gares
lapidées
comme des couchers de soleil
afin d'y écouter la houle
de la forêt et de l'étoile.
2
Maison de l'homme déguisé
surpris dans le plaisir de sa mémoire
l'oisiveté intemporelle
de ses contes
3
Jardiner et musicien
dans les destins terrestres se regardent.
Éclats d'une même explosion.
Des voyageurs sans mémoire et sans corps
soudain traversent
la mémoire d'un autre corps.
4
Pétrole et mer
blé de la lune.
L'allégresse des grands moteurs
rafraîchit la nuit au ciel bas.
Et l'homme sur ses mots navigue.
5
Qu'il meure et masqué ressuscite
dans les pièces vides
au pied des escaliers
au fond des fleuves
sur le navire échoué.
6
Quel obscur papillon ?
Quel secret de la mer excite
l'oreille du musicien ?
Respiration de la pierre dure.
Soupir et voix enrouée.
1
Me asomo a la ventana
de iglesias y estaciones
apedreadas
como atardeceres
a escuchar la marejada
del bosque y de la estrella.
2
Casa del homre disfrazado
sorprendido en el placer de su memoria
en el ocio sin tiempo
de sus cuentos.
3
El jadinero y el músico
se miran en los dibujos de la tierra.
Fragmentos de una misma explosión.
Viajeros sin memorie y sin cuerpo
atraviesan de pronto
la memoria de otro cuerpo.
4
Petróleo y mar
trigo de la luna.
El júbilo de los grandes motores
refresca la noche baja.
Y el hombre navega en sus palabras.
5
Que muera y resucite disfrazado
en las piezas vacías
al pie de las escalas
al fondo de los ríos
en el barco encallado
6
¿ Qué oscura mariposa ?
¿ qué secreto de mar excita
la oreja del músico ?
Respiración de piedra dura.
Suspiro y voz enronquecida.
Luis Mizón, Passage des nuages, traduit de l'espagnol par Claude Couffon, éditions Unes, 1986, p. 45 et 47, 44 et 46.
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