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03/07/2012

Luis Mizón, Terre brûlée

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Mémoire du corps absent.

Le joueur d'échecs

travaille la géométrie de l'écho.

L'éclat des vagues de pierre noire

et le geste qui devine

les moralités du vent.

 

Je caresse des lèvres de bronze vert

des masques de plâtre.

Je lance des parcelles de soleil

contre murs et angles

forteresses et bateaux de guerre

soldats et marins amnésiques.

J'attaque d'une main souriante avec furie

le raisin vert de l'éclipse.

 

Je m'assieds sur les traces de l'arbre musicien

pour écouter des histoires de personne

échos anciens.

Histoire et rêve.

La passion du corps invisible

murmure

en effeuillant les grappes

de la fleur de la plume.

 

Le puits des musiciens

éveille et ressuscite

des scories brillantes

dans la mémoire des enfants

et il guérit de son lait d'ombre

la pierre malade de ton visage

et son ivresse muette.

Le puits pulvérise le ciel.

Arbre de clarté blanche.

Bouche qui murmure

sur la terre brûlée.

 

Le vent parcourt la mémoire

cherchant les mots

d'un poème ancien échoué dans les vagues

il peint un autre labyrinthe

de pierre transparente

et d'ombre illuminée.

[...]

 

Luis Mizón, Terre brûlée, traduit de l'espagnol (Chili)

par Claude Couffon, Obsidiane, 1984, p. 55 et 57.

 

11/01/2012

Luis Mizón, Passage des nuages, traduction Claude Couffon

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1

Je me penche à la fenêtre

d'églises et de gares

lapidées

comme des couchers de soleil

afin d'y écouter la houle

de la forêt et de l'étoile.

 

2

Maison de l'homme déguisé

surpris dans le plaisir de sa mémoire

l'oisiveté intemporelle

de ses contes

 

3

Jardiner et musicien

dans les destins terrestres se regardent.

Éclats d'une même explosion.

Des voyageurs sans mémoire et sans corps

soudain traversent

la mémoire d'un autre corps.

 

4

Pétrole et mer

blé de la lune.

L'allégresse des grands moteurs

rafraîchit la nuit au ciel bas.

Et l'homme sur ses mots navigue.

 

5

Qu'il meure et masqué ressuscite

dans les pièces vides

au pied des escaliers

au fond des fleuves

sur le navire échoué.

 

6

Quel obscur papillon ?

Quel secret de la mer excite

l'oreille du musicien ?

Respiration de la pierre dure.

Soupir et voix enrouée.

 

1

Me asomo a la ventana

de iglesias y estaciones

apedreadas

como atardeceres

a escuchar la marejada

del bosque y de la estrella.

2

Casa del homre disfrazado

sorprendido en el placer de su memoria

en el ocio sin tiempo

de sus cuentos.

3

El jadinero y el músico

se miran en los dibujos de la tierra.

Fragmentos de una misma explosión.

Viajeros sin memorie y sin cuerpo

atraviesan de pronto

la memoria de otro cuerpo.

4

Petróleo y mar

trigo de la luna.

El júbilo de los grandes motores

refresca la noche baja.

Y el hombre navega en sus palabras.

5

Que muera y resucite disfrazado

en las piezas vacías

al pie de las escalas

al fondo de los ríos

en el barco encallado

6

¿ Qué oscura mariposa ?

¿ qué secreto de mar excita

la oreja del músico ?

Respiración de piedra dura.

Suspiro y voz enronquecida.

 

Luis Mizón, Passage des nuages, traduit de l'espagnol par Claude Couffon, éditions Unes, 1986, p. 45 et 47, 44 et 46.