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29/04/2019

Paul Éluard, Cours naturel,

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                     Novembre 1936

 

Regardez travailler les bâtisseurs de ruines

Ils sont riches patients ordonnés noirs et bêtes

Mais ils font de leur mieux pour être seuls sur terre

Ils sont au bord de l’homme et le comblent d’ordures

Ils plient au ras du sol des palais sans cervelle.

                               *

(…)

                               *

Parlez du ciel le ciel se vide

L’automne nous importe peu

Nos maîtres ont tapé du pied

Nous avons oublié l’automne

Et nous oublierons nos maîtres

 

Paul Éluard, Cours naturel, dans Œuvres complètes, I,

Pléiade / Gallimard, 1968, p. 801.

20/10/2016

Thomas Bernhard, Mes prix littéraires

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Discours de la remise du prix d’État autrichien

 

   Il n’y a rien à célébrer, rien à condamner, rien à dénoncer, mais il y a beaucoup de choses dérisoires, tout est dérisoire quand on songe à la mort.

   On traverse l’existence affecté, inaffecté, on entre en scène et on la quitte, tout est interchangeable, plus ou moins bien rodé au grand magasin d’accessoires qu’est l’État : erreur ! ce qu’on voit : un peuple qui ne se doute de rien, un beau pays — des pères morts consciencieusement dénués de con science, des gens dans la simplicité et la bassesse, la pauvreté de leurs besoins… Rien que des antécédents hautement philosophiques, et insupportables. Les époques sont insanes, le démoniaque en nous est un éternel cachot patriotique au fond duquel la bêtise et la brutalité sont devenues les éléments de notre détresse quotidienne. L’État est une structure condamnée à l’échec permanent, le peuple une structure perpétuellement condamnée à l’infamie et à l’indigence d’esprit. La vie est désespérance, à laquelle s’adossent les philosophies, mais qui en fin de compte condamne tout à la folie.

 

Thomas Bernhard, Mes prix littéraires, 2010, p. 142-143.