23/12/2016
Jules Supervielle, Oublieuse mémoire
Oublieuse mémoire
Pâle soleil d’oubli, lune de la mémoire,
Que draines-tu au fond de tes sourdes contrées ?
Est-ce donc là ce peu que tu donnes à boire
Ces gouttes d’eau, le vin que je te confiai ?
Que vas-tu faire encor de ce beau jour d’été
Toi qui me changes tout quand tu ne l’as pas gâté ?
Soit, ne me les rends tels que je te les donne
Cet air si précieux, ni ces chères personnes.
Que modèlent mes jours ta lumière et tes mains,
Refais par-dessus moi les voies du lendemain,
Et mène-moi le cœur dans les champs de vertige
Où l’herbe n’est plus l’herbe et doute sur sa tige.
Mais de quoi me plaignais-je, ô légère mémoire,
Qui avait soif, Quelqu’un ne voulait-il pas boire ?
Jules Supervielle, Oublieuse mémoire, dans Œuvres poétiques
complètes, édition Michel Collot, Pléiade/Gallimard,
1996, p. 485.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jules supervielle, oublieuse mémoire, herbe, été, oubli, boire | Facebook |
Les commentaires sont fermés.