25/03/2023
Judith Chavanne, De mémoire et de vent
On aurait pu se dire soustraits au temps
dans la cuisine à l’abri des intempéries d’avril :
il avait neigé sur les plateaux, il faisait humide,
et la vapeur du thé ajoutaitp à la brume.
On avait dérobé un jour au calendrier
des jours ouvrables et dûment remplis
par on ne savait quoi au juste
mais ce furent : quelques mots,
comme s’égoutte au long des heures
la pluie depuis les branches,
le verre de vin improvisé,
puis, ayant marché par des chemins trempés,
aux chaussures la boue agglutinée.
Et aussi l’oiseau, gorge rouge et léger
par intermittences,
plus vif peut-être qu’on ne le vit jamais.
Judith Chavanne, De mémoire et de vent,
L’herbe qui tremble, 2023, p. 65.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : judith chavanne, de mémoire et de vent, rouge-gorge | Facebook |
18/12/2022
Peter Gizzi, Et maintenant le noir
L’ingénuité de la vie animale
Loin au fond de l’enzyme gît la forme du foyer.
Loin au fond du code l’architecture où nicher.
Le Rouge-Gorge de son bec collecte boue et branchettes fragments de duvet de de plumes aussi.
La Grouse s’enfouit dans n monde sous la neige en quête de chaleur et d’abri.
Le Corbeau se sert des branches et le casse sous son poids, de son bec, il tapisse son nid de bouts de fourrure et de débris.
L’Oie arrache les plumes du poitrail pour apprêter la chambre.
Long est le chagrin.
Peter Gizzi, Et maintenant le noir, traduction Stéphane Bouquet, Corti, 2022, p. 60.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peter gizzi, l'ingénuité de la vie animale, rouge-gorge, grouse, corbeau | Facebook |
16/12/2022
Peter Gizzi, Et maintenant le noir
Enterrement céleste
Le rouge-gorge qui vit dans mon jardin
vit aussi en moi. Voici l’intérieur
tandis que l’état se dévide à travers
une vaste étendue divisant le ciel.
Il y a tant et plus ;
ces choses servaient de passage
à l’après-midi porté par la lumière
cascadant puis s s’enroulant
comme une bride autour de jour.
Oui, le jour, staccato
sous sa bannière d’azur et d’or ;
puis on apprend, comme on apprend
du crépuscule, comment regarder
par ici, et par ici, en souriant.
La glycine à la fenêtre ondoie, haut, et bas, et haut
c’est si loin en même temps, dehors.
Je suis ici où le monde s’ouvre.
Il y a des lointains, toute
l’échelle tonale explose,
clarté à l’aspect atténué,
charge utile livrant une poussière sensée.
Voici un jour idéal pour mourir.
Peter Gizzi, Et maintenant le noir, Corti,
2022, p. 32.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peter pizzi, enterrement céleste, rouge-gorge | Facebook |
26/11/2021
Fabienne Raphoz, Ce qui reste de nous
sursis d’été à
l’heure d’hiver roux
trois rouges-gorges
jouent à la guéguerre
avant l’aurore
écrire toute une vie
sans autre connaissance
que — la perte —
des chants et des fleurs)
*
Puis la mousse se gorge quand le tilleul lâ
che tout
Toute la forêt détone entre les sabots
des bêtes
Une langue se tend du plexus à leurs yeux
mi-clos
Fabienne Raphoz, Ce qui reste de nous,
éditions Héros-Limite, 2021, p. 27-28.
©Photo Ianna Andréadis
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabienne raphoz, ce qui reste de nous, été, hiver, rouge-gorge, bête | Facebook |
06/04/2013
Umberto Saba, Oiseaux, dans Il Canzoniere
Rouge-gorge
Même si je voulais te garder je ne puis.
Voici l'ami du merle, le rouge-gorge.
Il déteste autant ses pareils
qu'il semble heureux auprès de ce compagnon.
Toi, tu les crois amis inséparables
quand, surpris , à l'orée d'un bois, tu les surprends.
Mais d'un élan joyeux il s'envole, fuyant
le noir ami qui porte au bec une vivante proie.
Là-bas un rameau plie mais que ne peut briser,
juste un peu balancer son poids léger.
La belle saison, le ciel tout à lui l'enivrent,
et sa compagne dans le nid. Comme en un temps
le fils chéri que je nourrissais de moi-même,
il se sent avide, libre, cruel,
et chante alors à pleine gorge.
*
Oiseaux
Le peuple ailé
que j'adore — si nombreux par le monde —
aux coutumes si variées, ivre de vie,
s'éveille et chante.
Umberto Saba, Oiseaux (1948), traduit par Odette Kaan, dans
Il Canzoniere, L'Âge d'homme, 1988, p. 549, 551.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : umberto saba, oiseaux, il canzoniere, rouge-gorge, merle, chanter | Facebook |